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Forte reprise de la production industrielle en 1997

En croissance très modérée en 1996, l'activité économique s'est accélérée en 1997 sous l'impulsion d'une forte demande extérieure relayée progressivement par la demande intérieure.

Au niveau mondial, la crise financière asiatique a progressivement perturbé les marchés financiers et les taux de change de nombreux pays. L'effondrement en dominos des monnaies et des marchés financiers s'est propagé brutalement à la Corée en fin d'année et a ébranlé le Japon qui émergeait à peine de sa plus profonde dépression de l'après guerre grâce à la remise à niveau du yen. Cette crise est restée localisée à la zone pacifique en 1997, et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, ... ) ont résisté aux pressions sur leurs monnaies.

De leur coté, les Etats-Unis, toujours en pleine expansion, ont servi de refuge aux capitaux errants. La baisse récente des taux d'intérêt y a limité les risques d'un freinage excessif de l'économie ou d'une crise boursière trop accentuée.

Au delà des risques financiers, cette crise va surtout se traduire par une concurrence accrue en provenance de l'Asie du Sud-Est et par une réduction de leurs commandes, en particulier pour les biens d'équipement. A l'inverse, les pays de l'OCDE vont bénéficier de la baisse du prix du pétrole et des matières premières et de la détente des taux d'intérêt à long terme.

L'Europe est relativement à l'abri des effets de la crise financière. La conjoncture s'est progressivement raffermie tout au long de l'année, en particulier en Allemagne, en Belgique et aux Pays-Bas, alors que le Royaume-Uni tentait de modérer une expansion jugée trop rapide en réévaluant la livre. L'Italie semble sortir sans heurts d'une légère récession due aux efforts considérables consentis pour rétablir ses équilibres budgétaires et pour supprimer son inflation, alors que l'Espagne aborde une période de forte expansion sans déséquilibres majeurs et sans inflation.

La France a bénéficié de cet environnement extérieur favorable. Les exportations, mais aussi les importations ont crû bien plus rapidement que ne le prévoyaient les experts. Le solde de notre commerce extérieur a doublé pour les produits manufacturés, avec un excédent proche de 130 milliards de Francs (Caf-Fab, armements compris et agroalimentaire exclu)

La production manufacturière aurait donc augmenté de 4 % en moyenne annuelle de 1996 à 1997. De fait, la production augmente depuis 18 mois à un rythme voisin de 6%.

Après une légère pause au quatrième trimestre 1996 et au début de l'hiver, suite à l'arrêt brutal des primes automobiles et à un mois de janvier très froid, tous les indicateurs se sont mis au beau fixe au printemps, et l'optimisme s'est accentué à la rentrée (ainsi, les opinions des chefs d'entreprises sur leurs carnets de commandes étrangers ont battu au deuxième semestre tous les records d'optimisme depuis 20 ans).

Cette croissance, plus saine que celle de 1994, n'est pas dopée par un restockage trop brutal (rappelons qu'en 1993-1994, la croissance avait augmenté au rythme de 8% pendant cinq trimestres consécutifs).

En effet, la reconstitution des stocks «matières» reste modérée sous l'impact d'une légère reprise des cours fin 1996-début 1997. De plus, ces mouvements ont été déphasés. La hausse a d'abord concerné dès 1996 le pétrole et les produits chimiques, puis les produits métalliques, et finalement le papier. Maintenant, une nouvelle baisse des prix des matières premières affecte les marchés mondiaux suite au ralentissement asiatique.

Les stocks de produits finis ont peu évolué de leur coté, en l'absence de toute pression inflationniste.

La consommation des ménages a progressé régulièrement tout au long de l'année. Seules les immatriculations d'automobiles sont en nette régression en moyenne annuelle. Mais cette baisse frappe surtout les petits modèles antérieurement primés, et n'a eu qu'un impact limité sur la croissance du secteur automobile dopé par la reprise en Europe. De plus, on assiste en 1997 à une lente mais régulière remontée des immatriculations. Les revenus réels sont en hausse, avec une légère remontée des salaires, une stabilisation du chômage, des effets de richesse dus à une montée de la Bourse d'environ 30%, et une très faible augmentation des prix.

En effet, la reprise actuelle se fait sans inflation, et les prix de détail des biens manufacturés sont restés à peu près stables tout au long de l'année. Si la modération actuelle des prix peut s'expliquer par la baisse des matières premières, l'évolution à plus long terme reste remarquable et montre la quasi disparition de toute inflation rampante en France

Plus préoccupant, l'investissement manufacturier serait resté atone de 1996 à 1997, après une vive reprise de 20% de 1994 à 1996. Les industriels, échaudés par le retournement de la demande de l'été 1995 et par la pause de l'automne 1996, auraient freiné leurs plans d'investissement. Cependant les investissements manufacturiers à l'étranger ont repris depuis 2 ans. Témoin du dynamisme de nos industriels sur les marchés internationaux, ce développement est le gage du rayonnement de notre industrie et d'une croissance durable de nos exportations.

Une reprise semble se dessiner en fin d'année avec l'augmentation régulière des taux d'utilisation des capacités de production dans l'industrie manufacturière. Rappelons que l'investissement manufacturier est encore, en 1997, bien inférieur au pic de 1990.

Les taux d'intérêt sont maintenant redevenus raisonnables. Si le marché monétaire semble stabilisé en France, les taux d'intérêt à long terme se détendent avec la crise asiatique, et l'amélioration de la situation des banques leur permet de diminuer leurs marges d'intermédiation et donc de réduire les taux offerts aux petites et moyennes industries.

L'emploi a bénéficié de cette embellie, et le chômage conjoncturel est en régression, comme en témoigne la diminution du chômage des jeunes.

Le redressement de l'emploi industriel est à la source de la reprise des embauches. En effet, la croissance des emplois intérimaires dans l'industrie compense la baisse des emplois directs du secteur industriel, de l'ordre de 30 000 emplois. On peut même parler de création nette d'emplois en 1997 en tenant compte du développement du travail à temps partiel. Ce regain témoigne du succès des incitations gouvernementales (loi Robien, allégement des charges sociales sur les bas salaires, plan textile, ... ).

Tous les grands secteurs de l'industrie sont concernés par la reprise, ceci avec une intensité et un calendrier variable selon les produits :

Les biens intermédiaires se redressent vivement. Ils avaient été les premières et principales victimes du retournement conjoncturel de l'été 1995. La reprise s'était fait attendre en 1996, à l'exception notable de la chimie. En 1997, l'embellie a surtout marqué toute la filière liée au travail des métaux. Les taux d'expansion y sont très élevés, témoignant du dynamisme des secteurs en aval, qu'il s'agisse de la mécanique, de l'automobile ou de l'aviation.

Le secteur où la reprise a été la plus tardive est celui des matériaux de construction. Mais la demande s'améliore en fin d'année, et ceci aussi bien pour le bâtiment et pour les travaux publics.

Le secteur de l'automobile a bénéficié de la reprise générale du marché en Europe, et plus particulièrement des primes italiennes. L'arrêt des primes françaises a donc été largement compensé par la croissance de la demande européenne et par le rééquilibrage de la production vers les hauts de gamme. Cette reprise a surtout bénéficié aux équipementiers dont le poids, en particulier dans nos échanges extérieurs, est bien supérieur à celui des véhicules finis.

Notons aussi la reprise des achats de poids lourds liée au développement des échanges intérieurs en France et en Europe.

Les biens de consommations ont augmenté plus modérément, car ils sont, de par leur nature, moins sensibles aux fluctuations conjoncturelles.

Le secteur du textile-habillement, très marqué par les pertes de production liées aux dévaluations de la lire, comme en témoignent les graves difficultés financières des plus grandes entreprises du secteur de la chaussure en début d'année, a bien résisté. Le plan textile a eu un effet bénéfique, non seulement en terme d'emploi, mais aussi de compétitivité d'une industrie dont le déclin semblait structurel.

Pour la pharmacie, l'année 1997 a été excellente.

Dans les secteurs des biens durables, les performances sont plus variables selon les produits, mais assez satisfaisantes dans le meuble et l'électroménager. On notera surtout le boom de produits innovants liés aux technologies de l'information (téléphonie, multimédia, ...).

Les industries de biens d'équipement se développent rapidement, poursuivant ainsi un redressement entamé en 1996 sous l'impulsion de la demande internationale.

La très forte hausse des commandes de l'aviation civile en est le témoignage le plus marquant. Après cinq années de crise, la reprise de transport aérien a mis fin au suréquipement des compagnies. De plus, la remontée du dollar améliore la compétitivité d'Airbus face à Boeing.

La forte croissance de l'ensemble du secteur de la mécanique est tout aussi remarquable. Portant sur de nombreux produits, elle témoigne du rétablissement de la compétitivité française en général, et du dynamisme d'un secteur composé surtout de petites et moyennes entreprises, et récompense les efforts des industriels pour s'implanter sur le marché mondial.

En conclusion, la reprise actuelle repose sur des bases saines. Son caractère très général dans une Europe unie monétairement et débarrassée de son inflation et de ses déséquilibres budgétaires permet d'espérer une poursuite de cette expansion.

A l'abri des turbulences monétaires, cette Europe pourra de plus, en liaison avec les Etats-Unis, jouer pleinement son rôle de stabilisateur mondial et contrer les effets d'une crise financière dont l'ampleur internationale reste considérable.

Tableau récapitulatif de l'industrie manufacturière en France
 
  1990 1994 1995 1996 1997
-Indice de la production manufacturière 100 94,7 96,3 95,6 100,4
    ( hors énergie et IAA) évol : -6 +1,5 -0,5 +4,9
 
-Effectifs employés (en 1000 en fin d'année) 3 857 3 372 3 372 3 305 2 976
évol : -480 -0 -67 -29
 
-Chiffres clés des entreprises manufacturières - en milliards de Francs - source Sessi-EAE)
Nombre d'entreprises concernées : 22000 (de plus de 20 salariés, hors énergie et agroalimentaire)
Chiffre d'affaires 2873 2882 3070 3118 p 3300 e
Valeur ajoutée 961 924 960 nc nc
Investissements 154 100 114 125p 125 e
Capacité d'autofinancement 171 153 167 180e nc
Résultat financier -31 -17 -19 nc nc
Recherche et développement (DIRDE) 87 88e 91e nc
 
Commerce extérieur de (en milliards de F source Douanes)
Biens manufacturés - yc armements-nc agroalimentaire en nomenclature CPF- métropole+Dom
Importations Caf 1000e 1020 1130 1140 1240e
Exportations Fab 950e 1040 1160 1210 1370e
Solde Caf-Fab -58e 20 32 72 130e
(p) = premiers résultats de l»EAE - (e)= estimation Sessi - (nc)= non connu