J.O. 304 du 31 décembre 2005       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Décision n° 2005-530 DC du 29 décembre 2005


NOR : CSCL0508973S



Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi de finances pour 2006, le 21 décembre 2005, par M. Jean-Marc Ayrault, Mme Sylvie Andrieux, MM. Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, William Dumas, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Henri Emmanuelli, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mme Nathalie Gautier, MM. Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Eric Jalton, Serge Janquin, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Jean-Yves Le Drian, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Bruno Le Roux, Mme Marylise Lebranchu, MM. Michel Lefait, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Mme Annick Lepetit, MM. Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Louis-Joseph Manscour, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Christian Paul, Germinal Peiro, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mmes Ségolène Royal, Odile Saugues, MM. Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque, Paul Giacobbi, Joël Giraud, Simon Renucci, Mmes Chantal Robin-Rodrigo, Martine Billard, MM. Yves Cochet et Noël Mamère, députés ;

Le Conseil constitutionnel,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu la loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 modifiée relative aux lois de finances, ensemble la décision du Conseil constitutionnel no 2001-448 DC du 25 juillet 2001 ;

Vu le code de la sécurité sociale, notamment ses articles LO 111-3 à LO 111-10-2, ensemble la décision du Conseil constitutionnel no 2005-519 DC du 29 juillet 2005 ;

Vu le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles LO 1114-1 à LO 1114-4, ensemble la décision du Conseil constitutionnel no 2004-500 DC du 29 juillet 2004 ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de l'éducation ;

Vu la loi no 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale pour 2006 ;

Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 26 décembre 2005 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi de finances pour 2006 ; qu'ils formulent à son encontre plusieurs griefs fondés sur des contrariétés à la loi organique du 1er août 2001 susvisée et tenant notamment à l'insuffisance des indicateurs de performances, à la présentation des emplois de la mission « Enseignement scolaire », au périmètre de la mission « Ecologie et développement durable », au caractère « mono-programme » des comptes spéciaux ou à la nature des dépenses qu'ils retracent ; qu'ils contestent également ses articles 7, 26, 56, 74, 78 et 85 ;

Sur la procédure législative :

2. Considérant que les requérants font valoir, de façon générale, que « le nombre d'indicateurs de performance non renseignés dans les documents budgétaires transmis au Parlement et détaillant les crédits de chacune des missions est inacceptable et remet en cause la qualité même de l'autorisation parlementaire » ; qu'ils jugent que cette défaillance prive le Parlement « de la capacité d'exercer son contrôle sur l'efficacité des politiques menées » et « aura des conséquences dommageables également lors de la discussion du projet de loi de règlement pour l'année 2006 » ; que, ce faisant, ils mettent en cause la procédure législative au terme de laquelle la loi déférée a été adoptée ;

3. Considérant que l'article 51 de la loi organique du 1er août 2001, entré en vigueur le 1er janvier 2005, définit les documents qui doivent désormais être joints au projet de loi de finances de l'année ; que, parmi ces documents, doivent figurer des « projets annuels de performances » présentant les objectifs associés aux crédits des différents programmes et permettant de mesurer, au moyen « d'indicateurs précis », l'efficacité de la dépense publique ; que l'article 54 de la même loi organique est relatif aux documents qui devront être joints au projet de loi de règlement à partir de celui portant sur l'année 2006 ; que, parmi ces documents, figurent des « rapports annuels de performances » qui permettent d'établir des comparaisons avec les projets annuels de performances annexés au projet de loi de finances initiale ;

4. Considérant que ces annexes doivent permettre au Parlement de se prononcer en connaissance de cause sur le projet de loi de finances de l'année et de contrôler, a posteriori, l'utilisation faite des autorisations qui lui ont été demandées ; que tel est l'objet, en particulier, des projets et des rapports annuels de performances ;

5. Considérant, en l'espèce, qu'il n'est pas établi que les indicateurs de performances associés à la loi de finances pour 2006 soient entachés d'un défaut de sincérité ; que, si quelques retards ou déficiences ont pu être constatés et devront être corrigés à l'avenir, ils ne sont, ni par leur nombre, ni par leur ampleur, de nature à remettre en cause la régularité d'ensemble de la procédure législative ; que, dès lors, le grief invoqué doit être écarté ;

Sur la mission « Enseignement scolaire » :

6. Considérant qu'en vertu de l'article 67 de la loi déférée, il est ouvert aux ministres, pour 2006, au titre du budget général, des autorisations d'engagement et des crédits de paiement conformément à une répartition par mission donnée à l'état B annexé ; que cet état B fixe les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de la mission intitulée : « Enseignement scolaire » ; que, par ailleurs, l'article 71 de la même loi fixe, pour 2006, le plafond des autorisations d'emplois du ministère de l'éducation nationale et de la recherche ;

7. Considérant que les requérants font valoir que la loi de finances pour 2006 supprime des « postes d'enseignants mis à disposition dans les associations participant au système éducatif » et prévoit le versement à ces dernières d'une subvention équivalente ; qu'ils estiment que ce choix va à l'encontre d'une identification claire de la participation des emplois à la réalisation des politiques publiques et méconnaît, dès lors, « l'esprit de la loi organique » ; que, ce faisant, ils mettent en cause la sincérité de la répartition des dépenses de personnel de la mission « enseignement scolaire » et du plafond des autorisations d'emplois du ministère ;

8. Considérant que l'article 5 de la loi organique du 1er août 2001 prévoit que les charges budgétaires de l'Etat sont regroupées par titres, dont l'un est consacré aux dépenses de personnel ; qu'il précise que ces dépenses comprennent les rémunérations d'activité, les cotisations et contributions sociales, les prestations sociales et allocations diverses ; que, si l'article 7 de la même loi dispose que la présentation des crédits par titre est indicative, il précise que « les crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel de chaque programme constituent le plafond des dépenses de cette nature » et qu'ils sont « assortis de plafonds d'autorisation des emplois rémunérés par l'Etat », lesquels sont spécialisés par ministère ; qu'enfin, son article 44 ajoute que : « Dès la promulgation de la loi de finances de l'année..., le Gouvernement prend des décrets portant... fixation, par programme, du montant des crédits ouverts sur le titre des dépenses de personnel » ;

9. Considérant que la transformation en détachements des mises à disposition de personnels de l'Etat n'est contraire à aucune règle constitutionnelle ou organique ; qu'une transformation de cet ordre est effectivement mise en oeuvre par la loi de finances pour 2006 en ce qui concerne des personnels de l'éducation nationale intervenant auprès d'organismes extérieurs à l'Etat, notamment dans le secteur associatif ; qu'il est prévu d'accorder aux organismes concernés une subvention correspondant aux montants des rémunérations des personnels détachés qu'ils prendront en charge ; que cette mesure, destinée à mieux identifier les employeurs véritables et la réalité de l'aide que leur apporte l'Etat, ne méconnaît pas le principe de sincérité budgétaire ; qu'en l'espèce, les dispositions organiques précitées ont été respectées ;

10. Considérant, dans ces conditions, que les griefs dirigés à l'encontre de la mission « Enseignement scolaire » doivent être rejetés ;

Sur la mission « Ecologie et développement durable » :

11. Considérant que l'état B annexé à la loi déférée, auquel renvoie son article 67, fixe les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de la mission ministérielle intitulée : « Ecologie et développement durable » ;

12. Considérant que, selon les requérants, « de nombreux crédits permettant la mise en oeuvre des objectifs de la mission qui regroupe les politiques en faveur de la protection de l'environnement et de la prévention des risques naturels se trouvent dispersés dans d'autres missions » ; qu'ils se réfèrent, en particulier, aux missions intitulées : « Agriculture, pêche, forêt et affaires rurales », « Politique des territoires » et « Transports » ; qu'ils en déduisent que le contenu de la mission « Ecologie et développement durable » serait en contradiction avec « les règles de spécialisation des crédits prévues par l'article 7 de la loi organique » et avec « l'esprit » de cette législation ; que seraient ainsi méconnus le « principe de responsabilisation des gestionnaires publics » et les « objectifs de lisibilité des enjeux et des choix budgétaires » ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la loi organique du 1er août 2001 : « Les crédits ouverts par les lois de finances pour couvrir chacune des charges budgétaires de l'Etat sont regroupés par mission relevant d'un ou plusieurs services d'un ou plusieurs ministères. Une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie. Seule une disposition de loi de finances d'initiative gouvernementale peut créer une mission » ;

14. Considérant qu'il appartient au Gouvernement de définir le périmètre des différentes missions en fonction des politiques publiques mises en oeuvre ; qu'il est également de sa compétence de choisir de constituer ces missions à partir des crédits d'un seul ou de plusieurs ministères ; que, contrairement aux affirmations des requérants, les critères sur lesquels repose la délimitation des missions mises en cause ne sont entachés d'aucune erreur manifeste d'appréciation ; que, dès lors, les griefs dirigés à l'encontre de la mission « Ecologie et développement durable » doivent être rejetés ;

Sur les procédures d'affectation de certaines recettes à certaines dépenses :

15. Considérant que l'article 16 de la loi organique du 1er août 2001 dispose : « Certaines recettes peuvent être directement affectées à certaines dépenses. Ces affectations prennent la forme de budgets annexes, de comptes spéciaux ou de procédures comptables particulières au sein du budget général, d'un budget annexe ou d'un compte spécial » ; que les articles 17 à 24 de la même loi organique définissent le nouveau régime juridique de ces procédures d'affectation ; que son article 19 fait des comptes d'affectation spéciale une catégorie particulière de comptes spéciaux ;

16. Considérant que les articles 45 à 54 de la loi déférée ont pour objet de procéder, en ce qui concerne les comptes spéciaux, aux adaptations rendues nécessaires par l'entrée en vigueur des dispositions organiques précitées ; qu'il en est ainsi de l'article 48, qui a trait au compte d'affectation spéciale intitulé : « Participations financières de l'Etat », et de l'article 49 qui ouvre, dans les écritures du Trésor, un compte d'affectation spéciale intitulé : « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » ;

17. Considérant, par ailleurs, que les états A et B annexés à la loi déférée, auxquels renvoient ses articles 66, 68 et 69, fixent, d'une part, le montant des recettes des comptes d'affectation spéciale et des budgets annexes, d'autre part, celui de leurs autorisations d'engagement et de leurs crédits de paiement ;

18. Considérant que les requérants contestent plus particulièrement la conformité à la loi organique du 1er août 2001 du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » ;

En ce qui concerne le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » :

19. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du I de l'article 21 de la loi organique du 1er août 2001 : « Les opérations de nature patrimoniale liées à la gestion des participations financières de l'Etat, à l'exclusion de toute opération de gestion courante, sont, de droit, retracées sur un unique compte d'affectation spéciale... » ;

20. Considérant que l'article 48 de la loi déférée procède à l'ouverture du compte d'affectation spéciale intitulé : « Participations financières de l'Etat » ; que son I prévoit que ce compte retrace : « 1° En recettes : - a) Tout produit des cessions par l'Etat de titres, parts ou droits de sociétés qu'il détient directement ; - b) Les produits des cessions de titres, parts ou droits de sociétés détenus indirectement par l'Etat qui lui sont reversés ; - c) Les reversements de dotations en capital, produits de réduction de capital ou de liquidation ; - d) Les remboursements des avances d'actionnaires et créances assimilées ; - e) Les remboursements de créances résultant d'autres interventions financières de nature patrimoniale de l'Etat ; - f) Des versements du budget général » ; que le I de l'article 48 prévoit également que le compte retrace : « 2° En dépenses : - a) Les dotations à la Caisse de la dette publique et celles contribuant au désendettement d'établissements publics de l'Etat ; - b) Les dotations au Fonds de réserve pour les retraites ; - c) Les augmentations de capital, les avances d'actionnaire et prêts assimilés, ainsi que les autres investissements financiers de nature patrimoniale de l'Etat ; - d) Les achats et souscriptions de titres, parts ou droits de société ; - e) Les commissions bancaires, frais juridiques et autres frais qui sont directement liés aux opérations mentionnées au a du 1°, ainsi qu'aux c et d du présent 2° » ; que le II de l'article 48 lui affecte le solde du « Compte d'affectation des produits de cessions de titres, parts et droits de sociétés » no 902-24, dont la clôture est prononcée par le cinquième alinéa du I de l'article 45 et auquel il se substitue ;

21. Considérant que les requérants formulent, à l'encontre de ce compte, deux critiques tenant, d'une part, à sa structure, et, d'autre part, à la nature des dépenses qu'il retrace ;

Quant au caractère « mono-programme » du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » :

22. Considérant que le compte d'affectation spéciale créé par l'article 48 de la loi déférée comporte un programme unique ;

23. Considérant que, selon les requérants, le fait que ce compte ne comporte qu'un seul programme serait « contraire à la lettre » de la loi organique relative aux lois de finances et « opposé à son esprit, notamment en matière de renforcement du droit d'amendement pour les parlementaires » ;

24. Considérant qu'en vertu de la première phrase du deuxième alinéa du I de l'article 7 de la même loi organique : « Une mission comprend un ensemble de programmes concourant à une politique publique définie » ; que son article 47, combiné avec les dispositions figurant à cet article 7, offre aux membres du Parlement la faculté nouvelle de présenter des amendements majorant les crédits d'un ou plusieurs programmes ou dotations inclus dans une mission, à la condition de ne pas augmenter les crédits de celle-ci ; qu'il résulte de ces dispositions que, comme le font valoir les requérants, une mission ne saurait comporter un programme unique ;

25. Considérant qu'aux termes du premier alinéa du II de l'article 20 de la loi organique du 1er août 2001 : « Chacun des comptes spéciaux dotés de crédits constitue une mission au sens des articles 7 et 47. Leurs crédits sont spécialisés par programme » ; que, dès lors, en l'état de la législation, les comptes spéciaux ne devraient pas comporter un programme unique ;

26. Considérant, toutefois, que la présentation du compte d'affectation spéciale critiqué et des autres missions « mono-programme » s'inscrit dans le cadre de la mise en place d'une nouvelle nomenclature budgétaire ; qu'afin de laisser aux autorités compétentes le temps de procéder aux adaptations nécessaires et de surmonter les difficultés inhérentes à l'application d'une telle réforme, la mise en conformité des missions « mono-programme » et des nouvelles règles organiques pourra n'être effective qu'à compter de l'année 2007 ;

27. Considérant, ainsi, que le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » et les nouvelles règles organiques devront être mis en conformité ; qu'il devra en être de même pour les autres comptes spéciaux, figurant dans la loi de finances pour 2006, qui ne comportent qu'un programme ;

28. Considérant que, sous la réserve énoncée au considérant précédent, il n'y a pas lieu, en l'état, de déclarer ces missions contraires à la Constitution ;

Quant aux dépenses retracées par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » :

29. Considérant, comme il a été dit ci-dessus, que l'article 48 de la loi déférée fait figurer, parmi les dépenses retracées par le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'Etat », les commissions bancaires, frais juridiques et autres frais qui sont directement liés aux cessions par l'Etat de titres, parts ou droits de sociétés qu'il détient directement, aux augmentations de capital, avances d'actionnaire et prêts assimilés ainsi qu'aux autres investissements financiers de nature patrimoniale de l'Etat, aux achats et souscriptions de titres, parts ou droits de société ;

30. Considérant que, selon les requérants, l'inclusion, au sein des dépenses du compte, de « frais de gestion courante » liés à certaines opérations constituerait « une nouvelle violation de la loi organique relative aux lois de finances » ;

31. Considérant, en premier lieu, que la première phrase du second alinéa du I de l'article 21 précité de la loi organique du 1er août 2001, en application de laquelle a été pris l'article 48 de la loi déférée, précise que les opérations « de gestion courante » sont exclues des dépenses retracées par le compte d'affectation spéciale relatif aux participations financières de l'Etat ;

32. Considérant, en second lieu, comme il ressort des termes mêmes de l'article 21 de la loi organique du 1er août 2001 et des travaux parlementaires à l'issue desquels il a été adopté, qu'en exigeant que les recettes d'un compte d'affectation spéciale soient, « par nature, en relation directe » avec ses dépenses, le législateur organique a entendu limiter les possibilités de dérogation au principe de non-affectation des recettes aux dépenses ; qu'en effet, sans vouloir pour autant faire obstacle aux exigences de bonne gestion des ressources publiques, il a défini la possibilité d'affecter une recette à une dépense dans le cadre d'un compte d'affectation spéciale de façon plus restrictive que sous l'empire de l'ordonnance no 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, dont l'article 25 se bornait à indiquer que « les comptes d'affectation spéciale retracent des opérations financées au moyen de ressources particulières » ;

33. Considérant, toutefois, que les opérations dont l'inscription parmi les dépenses du compte est contestée, qui n'ont pas un caractère récurrent, ne peuvent être qualifiées d'opérations de gestion courante ; qu'elles sont en relation directe avec les recettes résultant des opérations de cession d'actifs, seules étant prises en charge par le compte les dépenses inhérentes à ces opérations et intrinsèquement liées à leur produit ; que leur insertion parmi les dépenses du compte est justifiée par une exigence de bonne gestion des ressources publiques ; que, dans ces conditions, le grief invoqué doit être rejeté ;

En ce qui concerne le compte d'affectation spéciale « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » :

34. Considérant que le I de l'article 49 de la loi déférée dispose : « Il est ouvert dans les écritures du Trésor un compte d'affectation spéciale, intitulé : "Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route... » ; qu'il prévoit que ce compte retrace, en recettes, une fraction égale à 60 % du produit des amendes perçues par la voie de « systèmes automatiques de contrôle et sanction », dans la limite de 140 millions d'euros, et en dépenses, les coûts relatifs à ces systèmes ainsi qu'à la modernisation du fichier national du permis de conduire ; que le sixième alinéa du I fait également figurer parmi ses dépenses : « Le coût de la compensation financière versée aux établissements de crédit au titre des prêts souscrits par les personnes âgées de seize à vingt-cinq ans en vue du financement de leur formation à la conduite et à la sécurité routière » ;

35. Considérant que les recettes de ce compte ne sont pas, par nature, en relation directe avec la dépense induite par la décision des pouvoirs publics de verser aux établissements de crédit une compensation au titre des prêts souscrits en vue de faciliter le financement de la préparation au permis de conduire ; que, dès lors, a été méconnue l'exigence fixée par le I de l'article 21 de la loi organique du 1er août 2001 en ce qui concerne la relation qui doit exister entre les recettes et les dépenses d'un compte d'affectation spéciale ; que, par suite, il y a lieu de déclarer contraire à la Constitution le sixième alinéa du I de l'article 49 de la loi déférée ;

En ce qui concerne les budgets annexes :

36. Considérant qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article 18 de la loi organique du 1er août 2001 : « Des budgets annexes peuvent retracer, dans les conditions prévues par une loi de finances, les seules opérations des services de l'Etat non dotés de la personnalité morale résultant de leur activité de production de biens ou de prestation de services donnant lieu au paiement de redevances, lorsqu'elles sont effectuées à titre principal par lesdits services » ; qu'aux termes de la première phrase du premier alinéa de son II : « Un budget annexe constitue une mission, au sens des articles 7 et 47 » ;

37. Considérant que le budget annexe « Journaux officiels » ne comporte qu'un programme ; que, comme il a été dit ci-dessus, une mission ne saurait comporter un programme unique ; que ce budget annexe et les nouvelles règles organiques devront être mis en conformité à compter de l'année 2007 ; que, sous cette réserve, il n'y a pas lieu, en l'état, de le déclarer contraire à la Constitution ;

Sur l'utilisation des surplus de recettes :

38. Considérant qu'aux termes du premier alinéa du IV de l'article 66 de la loi déférée : « Pour 2006, les éventuels surplus mentionnés au 10° du I de l'article 34 de la loi organique no 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances sont utilisés dans leur totalité pour réduire le déficit budgétaire » ; qu'aux termes de son dernier alinéa : « Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, les éventuels surplus de recettes des impositions de toute nature portant sur les produits pétroliers peuvent être utilisés pour financer des dépenses » ;

39. Considérant que les règles relatives à l'utilisation des surplus mentionnés au considérant précédent ont été fixées par la loi organique no 2005-779 du 12 juillet 2005, qui a complété à cet effet les articles 34 et 35 de la loi organique du 1er août 2001 ; qu'ainsi, le 10° du I de cet article 34 dispose désormais que la loi de finances de l'année arrête, dans sa première partie, « les modalités selon lesquelles sont utilisés les éventuels surplus, par rapport aux évaluations de la loi de finances de l'année, du produit des impositions de toute nature établies au profit de l'Etat » ; que, par ailleurs, l'article 35 réserve aux lois de finances rectificatives la faculté de modifier en cours d'année ces modalités ;

40. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que les surplus dont la loi de finances de l'année et, le cas échéant, la loi de finances rectificative, doivent déterminer les modalités d'utilisation, sont ceux qui sont susceptibles d'être constatés en fin d'exercice en retranchant au produit de l'ensemble des impositions de toutes natures établies au profit de l'Etat le total prévu par la loi de finances initiale ; que le législateur organique n'a pas entendu permettre que des règles spécifiques soient prévues pour l'utilisation des surplus constatés à partir d'une catégorie particulière de recettes ;

41. Considérant qu'il s'ensuit qu'en édictant une règle particulière pour l'utilisation du surplus de recettes résultant de la fiscalité pétrolière, quelles que soient les caractéristiques de cette dernière, le législateur a méconnu la loi organique ; que, dès lors, il y a lieu d'office de déclarer contraire à la Constitution le dernier alinéa du IV de l'article 66 de la loi déférée ;

Sur l'imposition des intérêts de plans d'épargne-logement :

42. Considérant que l'article 7 de la loi de finances met fin à l'exonération fiscale des intérêts des plans d'épargne-logement de plus de douze ans ou, s'ils ont été ouverts avant le 1er avril 1992, de ceux dont le terme est échu ; qu'aux termes du II de l'article R. 315-28 du code de la construction et de l'habitation, applicable depuis cette date : « La durée d'un plan d'épargne-logement ne peut être supérieure à dix ans. Toutefois cette disposition ne s'applique pas aux plans d'épargne-logement qui, en vertu du contrat initial ou d'avenants à ce contrat, conclus avant le 1er avril 1992, ont une durée supérieure à dix ans. Ces plans demeurent valables jusqu'à l'expiration du contrat initial ou du dernier avenant et ne peuvent faire l'objet d'aucune prorogation... » ;

43. Considérant que, selon les requérants, la suppression de l'exonération fiscale n'est justifiée par aucun intérêt général suffisant ; qu'elle porte à l'économie des contrats légalement conclus une atteinte excessive ;

44. Considérant, en premier lieu, que l'exonération fiscale prévue par le législateur pour les intérêts d'un plan d'épargne-logement ne constitue pas une clause contractuelle de ce plan ; que, par suite, le grief tiré d'une atteinte à l'économie de contrats légalement conclus manque en fait ;

45. Considérant, en second lieu, qu'il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; qu'en particulier, il méconnaîtrait la garantie des droits proclamés par l'article 16 de la Déclaration de 1789 s'il portait aux situations légalement acquises une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d'intérêt général suffisant ;

46. Considérant, en l'espèce, que l'article 7 ne concerne que des plans d'épargne arrivés à échéance ; qu'il n'a pas d'effet rétroactif ; qu'il n'affecte donc pas une situation légalement acquise dans des conditions contraires à la garantie des droits proclamée par l'article 16 de la Déclaration de 1789 ;

Sur l'impôt de solidarité sur la fortune :

47. Considérant que le I de l'article 26 de la loi déférée insère dans le code général des impôts un article 885 I quater qui instaure une exonération de l'impôt de solidarité sur la fortune à concurrence des trois quarts de la valeur des parts ou actions que détiennent, dans une société, les personnes qui y exercent leur activité principale, à condition, lorsqu'il ne s'agit pas d'une société de personnes, que cette activité soit exercée « comme salarié ou mandataire social » ; que, pour ouvrir droit à cette exonération, les parts ou actions doivent rester la propriété du redevable pendant une durée minimale de six ans ; que cette exonération bénéficie également, sous la même condition de conservation de six ans, aux anciens salariés et mandataires sociaux de l'entreprise qui, lors de leur cessation de fonctions, détenaient depuis au moins trois ans les parts et actions de cette entreprise ; que le II de l'article 26 modifie l'article 885 I bis du code général des impôts afin de porter de la moitié aux trois quarts de la valeur des parts ou actions de certaines sociétés l'exonération dont bénéficient les propriétaires de ces titres lorsqu'ils s'engagent collectivement à les conserver durant au moins six ans ;

48. Considérant que, selon les requérants, cet article méconnaît le principe d'égalité devant les charges publiques, d'une part, en procurant un « avantage fiscal exorbitant » à une nouvelle catégorie de personnes dont la situation ne diffère pas de celle des autres redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune, d'autre part, en rapprochant indûment la situation des personnes engagées dans un pacte d'actionnaires de celle des personnes totalement exonérées de cet impôt à raison de leurs « biens professionnels » ; qu'ils soutiennent qu'aucune considération d'intérêt général ne peut justifier l'une ou l'autre de ces mesures ;

49. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des travaux parlementaires que, pour assurer le développement des entreprises et sauvegarder l'emploi, le législateur a entendu favoriser la stabilité du capital des sociétés ; qu'à cette fin, les dispositions contestées encouragent l'actionnariat des salariés et des mandataires sociaux, dont les titres n'entrent pas dans la catégorie des biens professionnels exonérée de l'impôt de solidarité sur la fortune en vertu de l'article 885 O bis du code général des impôts ; que, dans ce but, le nouvel avantage fiscal accordé par l'article 885 I quater vise à inciter tant les mandataires sociaux de l'entreprise et les salariés qui y exercent leurs fonctions, que ceux qui ont quitté l'entreprise pour faire valoir leurs droits à la retraite, à conserver les parts ou actions qu'ils détiennent ; qu'eu égard aux conditions posées en ce qui concerne la durée de conservation des titres et le caractère effectif du lien qui doit unir les personnes concernées aux sociétés en cause, l'exonération partielle que prévoit la disposition critiquée repose sur des critères objectifs et rationnels en relation directe avec les fins poursuivies par le législateur ; que doit être, dès lors, rejeté le grief tiré de la violation du principe d'égalité ;

50. Considérant, en second lieu, que le régime dérogatoire mis en place demeure distinct de celui applicable aux biens professionnels ; qu'au regard des objectifs d'intérêt général qu'il s'est assignés, le législateur, faisant usage de son pouvoir d'appréciation, pouvait fixer aux trois quarts de la valeur des parts ou actions le seuil de la nouvelle exonération ;

51. Considérant que, par mesure de coordination, le législateur pouvait porter à un niveau équivalent le seuil de l'exonération applicable aux personnes collectivement engagées à conserver les titres dont elles sont propriétaires ;

52. Considérant, dès lors, que les griefs dirigés contre l'article 26 doivent être rejetés ;

Sur l'affectation d'impositions à la sécurité sociale :

53. Considérant que l'article 56 de la loi de finances affecte le produit de diverses impositions aux caisses nationales de sécurité sociale et à certains régimes particuliers en vue de compenser les allégements de cotisations sociales ;

54. Considérant que, selon les requérants, cette affectation procéderait à une débudgétisation contraire à la Constitution ; qu'elle porterait atteinte à l'information et au pouvoir de décision du Parlement ; qu'elle ne correspondrait pas à une compensation intégrale ; qu'elle méconnaîtrait les articles LO 111-3 et LO 111-4 du code de la sécurité sociale qui ont pour objet « de renforcer la transparence des relations financières entre l'Etat et la sécurité sociale » ;

En ce qui concerne la cohérence entre la loi de finances et la loi de financement de la sécurité sociale :

55. Considérant qu'en vertu du c du 2° du C de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, la loi de financement de la sécurité sociale approuve, dans sa partie comprenant les dispositions relatives aux recettes et à l'équilibre général pour l'année à venir, le montant de la compensation mentionnée à l'annexe prévue au 5° du III de l'article LO 111-4 ;

56. Considérant que l'article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 a fixé à 21,817 milliards d'euros le montant de la compensation mentionnée à l'annexe prévue au 5° du III de l'article LO 111-4 du code de la sécurité sociale ; que le législateur a évalué à 18,9 milliards d'euros le montant du produit des impositions affectées à la sécurité sociale par l'article 56 de la loi de finances ; que, compte tenu des autres mesures de compensation prévues par la loi de finances pour 2006, l'article 56 de cette dernière est en cohérence avec l'article 24 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 ; qu'en tout état de cause, comme le prévoit le IV du même article 56, « en cas d'écart constaté entre le produit en 2006 des impôts et taxes affectés et le montant définitif de la perte de recettes liée aux allégements de cotisations sociales mentionnés au I pour cette même année, cet écart fait l'objet d'une régularisation, au titre de l'année 2006, par la plus prochaine loi de finances suivant la connaissance du montant définitif de la perte » ;

En ce qui concerne le respect de la loi organique du 1er août 2001 :

57. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 2 de la loi organique du 1er août 2001 : « Les impositions de toute nature ne peuvent être directement affectées à un tiers qu'à raison des missions de service public confiées à lui et sous les réserves prévues par les articles 34, 36 et 51 » ; que, dans sa décision du 25 juillet 2001 susvisée, le Conseil constitutionnel a interprété ces dispositions en jugeant que « la loi ne peut affecter directement à un tiers des impositions de toutes natures qu'à raison des missions de service public confiées à lui, sous la triple condition que la perception de ces impositions soit autorisée par la loi de finances de l'année, que, lorsque l'imposition concernée a été établie au profit de l'Etat, ce soit une loi de finances qui procède à cette affectation et qu'enfin le projet de loi de finances de l'année soit accompagné d'une annexe explicative concernant la liste et l'évaluation de ces impositions » ;

58. Considérant, en premier lieu, que le produit des impositions concernées sera versé par l'intermédiaire de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, établissement public national à caractère administratif, aux caisses nationales de sécurité sociale, établissements publics nationaux à caractère administratif, ainsi qu'à des régimes particuliers de sécurité sociale, lesquels assurent essentiellement la gestion d'un service public ; que la perception et l'affectation de ces impositions, qui avaient été établies au profit de l'Etat, sont respectivement autorisées par les articles 1er et 56 de la loi de finances pour 2006 ; que leur liste et leur évaluation figuraient tant à l'annexe 5 au projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2006 qu'au tome I du fascicule « Evaluation des voies et moyens » annexé au projet de loi de finances pour 2006 ; que ces documents ont permis au Parlement de se prononcer en connaissance de cause sur les compensations concernées ;

59. Considérant, en second lieu, que les compensations d'exonérations ou de réductions de cotisations sociales ne sauraient être regardées comme des dépenses qui devraient, par nature, figurer au budget de l'Etat ;

60. Considérant, par suite, que les griefs dirigés contre l'article 56 de la loi de finances doivent être écartés ;

Sur le plafonnement des impôts directs :

61. Considérant que l'article 74 de la loi déférée tend à plafonner la part des revenus d'un foyer fiscal affectée au paiement d'impôts directs ; que son II insère dans le code général des impôts un nouvel article 1er aux termes duquel : « Les impôts directs payés par un contribuable ne peuvent être supérieurs à 60 % de ses revenus » ; que son III crée dans le même code un nouvel article 1649-0 A qui précise les modalités d'application de ce plafonnement ;

62. Considérant que ce nouvel article 1649-0 A institue un droit à restitution de la fraction des impositions excédant le seuil de 60 % mentionné à l'article 1er ; que, selon son 2, sous réserve qu'elles ne soient pas déductibles d'un revenu catégoriel de l'impôt sur le revenu et qu'elles aient été payées en France, les impositions prises en compte sont les impositions directes suivantes : - l'impôt sur le revenu ; - l'impôt de solidarité sur la fortune ; - la taxe foncière sur les propriétés bâties, la taxe foncière sur les propriétés non bâties afférentes à l'habitation principale du contribuable, ainsi que certaines taxes additionnelles à ces taxes ; - la taxe d'habitation afférente à l'habitation principale du contribuable, ainsi que certaines taxes additionnelles à cette taxe ;

63. Considérant que les 4 à 7 du nouvel article 1649-0 A définissent les catégories de revenus qui entrent dans le calcul du droit à restitution ; qu'il s'agit du revenu réalisé par le contribuable au titre de l'année qui précède celle du paiement des impositions et comprenant, sous réserve de certains aménagements et exceptions, les revenus soumis à l'impôt sur le revenu nets de frais professionnels, les produits soumis à un prélèvement libératoire et les revenus exonérés d'impôt sur le revenu réalisés au cours de la même année en France ou hors de France ;

64. Considérant que les requérants soutiennent que ces dispositions, en limitant la participation de certains contribuables et en définissant les capacités contributives par rapport aux seuls revenus, méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques ;

65. Considérant que l'article 13 de la Déclaration de 1789 dispose : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; que cette exigence ne serait pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ;

66. Considérant, dès lors, que, dans son principe, l'article contesté, loin de méconnaître l'égalité devant l'impôt, tend à éviter une rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ;

67. Considérant, s'agissant des modalités adoptées pour la mise en oeuvre de ce principe, que ni la fixation de la part des revenus au-delà de laquelle le paiement d'impôts directs ouvre droit à restitution, ni la définition des revenus entrant dans le calcul, ni la détermination des impôts directs pris en compte, ni les mesures retenues pour opérer la restitution ne sont inappropriées à la réalisation de l'objectif que s'est fixé le législateur ; que la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement ; qu'il ne lui revient donc pas de rechercher si l'objectif que s'est assigné le législateur aurait pu être atteint par d'autres voies ;

68. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 74 n'est pas contraire à la Constitution ;

Sur le plafonnement de certain avantages fiscaux :

69. Considérant que le I de l'article 78 de la loi de finances pour 2006 insère, dans la section V du chapitre Ier du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts, un II bis intitulé : « Plafonnement de certains avantages fiscaux au titre de l'impôt sur le revenu », comportant un article 200-0 A ;

70. Considérant que le 1 de l'article 200-0 A détermine en fonction de la composition du foyer fiscal le montant du plafonnement des avantages fiscaux concernés ;

71. Considérant que le 2 du même article soumet à ce plafonnement : « - a) L'avantage en impôt procuré par la déduction au titre de l'amortissement prévue au h du 1° du I de l'article 31, pratiquée au titre de l'année d'imposition ; - b) L'avantage en impôt procuré par la déduction au titre de l'amortissement prévue à l'article 31 bis, pratiquée au titre de l'année d'imposition ; - c) L'avantage en impôt procuré par le montant du déficit net foncier défini à l'article 28, obtenu en application du deuxième alinéa du 3° du I de l'article 156, diminué de 10 700 EUR et d'une fraction des dépenses effectuées pour la restauration des logements, égale aux trois quarts pour les immeubles situés dans une zone urbaine sensible définie au 3 de l'article 42 de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, aux deux tiers pour les immeubles situés dans un secteur sauvegardé et qui font l'objet des protections prévues au a du III de l'article L. 313-1 du code de l'urbanisme ou dont la modification est soumise au b du même III, et à la moitié pour les autres immeubles ; - « d) Les réductions et crédits d'impôt sur le revenu, à l'exception de ceux mentionnés aux articles 199 ter, 199 quater B, 199 quater C, 199 quater F, 199 septies, 199 undecies A, 199 undecies B, 199 terdecies-0 B, 199 quindecies, 199 octodecies, 200, 200 quater A, 200 sexies, 200 octies, 200 decies, 238 bis, 238 bis-0 AB, aux 2 à 4 du I de l'article 197, des crédits d'impôt mentionnés à la section II du chapitre IV du présent titre, du crédit correspondant à l'impôt retenu à la source à l'étranger ou à la décote en tenant lieu, tel qu'il est prévu par les conventions internationales » ;

72. Considérant que le 3 de l'article 200-0 A précise : « L'avantage en impôt procuré par les dispositifs mentionnés aux a à c du 2 est égal au produit du montant total des déductions et déficits concernés par le taux moyen défini au 4 » ;

73. Considérant que le 4 du même article définit le taux moyen mentionné au 3 comme étant « égal au rapport existant entre : - a) Au numérateur, le montant de l'impôt dû majoré des réductions et crédits d'impôt imputés avant application des dispositions du 1 et du prélèvement prévu à l'article 125 A ; - b) Au dénominateur, la somme algébrique des revenus catégoriels nets de frais professionnels soumis à l'impôt sur le revenu selon le barème défini à l'article 197 : - diminuée du montant des déficits reportables sur le revenu global dans les conditions prévues au premier alinéa du I de l'article 156, de la fraction de contribution sociale généralisée mentionnée au II de l'article 154 quinquies, des sommes visées aux 2° et 2° ter du II de l'article 156 et de celles admises en déduction en application du I de l'article 163 quatervicies ; majorée des revenus taxés à un taux proportionnel et de ceux passibles du prélèvement mentionné à l'article 125 A » ; qu'il précise, en outre que : « Lorsque le taux déterminé selon les règles prévues aux alinéas précédents est négatif, l'avantage mentionné au 3 est égal à zéro » ;

74. Considérant que le 5 de l'article 200-0 A ajoute : « L'excédent éventuel résultant de la différence entre le montant d'avantage obtenu en application des 2 et 3 et le montant maximum d'avantage défini au 1 est ajouté au montant de l'impôt dû ou vient en diminution de la restitution d'impôt. - En cas de remise en cause ultérieure de l'un des avantages concernés par le plafonnement défini au 1, le montant de la reprise est égal au produit du montant de l'avantage remis en cause par le rapport existant entre le montant du plafond mentionné au 1 et celui des avantages obtenus en application des 2 et 3 » ;

75. Considérant que le II de l'article 78 de la loi de finances détermine les conditions dans lesquelles les investissements outre-mer visés aux articles 199 undecies A et 199 undecies B du code général des impôts, non retenus par la loi déférée, pourront ultérieurement être pris en compte dans le plafonnement prévu à l'article 200-0 A précité ; que son III modifie, après les avoir renumérotés en articles 199 unvicies et 199 duovicies, les articles 163 septdecies et 163 octodecies A du même code, relatifs respectivement aux souscriptions d'actions de sociétés qui ont pour activité exclusive le financement en capital d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles et aux pertes en capital subies par les créateurs d'entreprise ; qu'en particulier, il transforme ces déductions du revenu global en réductions d'impôt ; que son I procède, par voie de conséquence, à des modifications de divers articles du code général des impôts ; que son V règle l'application dans le temps du plafonnement des divers avantages fiscaux en cause ;

76. Considérant que les requérants soutiennent que ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques ; qu'ils font valoir, d'une part, que le choix des avantages fiscaux soumis au plafonnement ne traduit pas une différence objective de situation entre contribuables ; qu'ils se réfèrent notamment aux avantages fiscaux accordés aux investissements outre-mer ; qu'ils exposent que les critères retenus sont flous, ce qui est d'autant plus inacceptable que ce dispositif est appelé à s'appliquer à tout nouveau mécanisme fiscal dérogatoire ; qu'ils ajoutent, d'autre part, que le principe d'une majoration du plafond en fonction du nombre d'enfants à charge ou de personnes membres du foyer âgés de plus de 65 ans ne repose pas sur un motif d'intérêt général en rapport avec l'objet de la loi ;

77. Considérant que l'égalité devant la loi énoncée par l'article 6 de la Déclaration de 1789 et « la garantie des droits » requise par son article 16 ne seraient pas effectives si les citoyens ne disposaient pas d'une connaissance suffisante des règles qui leur sont applicables et si ces règles présentaient une complexité excessive au regard de l'aptitude de leurs destinataires à en mesurer utilement la portée ; qu'en particulier, le droit au recours pourrait en être affecté ; que cette complexité restreindrait l'exercice des droits et libertés garantis tant par l'article 4 de la Déclaration, en vertu duquel cet exercice n'a de bornes que celles qui sont déterminées par la loi, que par son article 5, aux termes duquel « tout ce qui n'est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas » ;

78. Considérant qu'en matière fiscale, la loi, lorsqu'elle atteint un niveau de complexité tel qu'elle devient inintelligible pour le citoyen, méconnaît en outre l'article 14 de la Déclaration de 1789, aux termes duquel : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée » ;

79. Considérant qu'il en est particulièrement ainsi lorsque la loi fiscale invite le contribuable, comme en l'espèce, à opérer des arbitrages et qu'elle conditionne la charge finale de l'impôt aux choix éclairés de l'intéressé ; qu'au regard du principe d'égalité devant l'impôt, la justification des dispositions fiscales incitatives est liée à la possibilité effective, pour le contribuable, d'évaluer avec un degré de prévisibilité raisonnable le montant de son impôt selon les diverses options qui lui sont ouvertes ;

80. Considérant, toutefois, que des motifs d'intérêt général suffisants peuvent justifier la complexité de la loi ;

81. Considérant que c'est au regard des principes ci-dessus énoncés que doit être appréciée la conformité à la Constitution de l'article 78 de la loi de finances pour 2006 ;

82. Considérant, en premier lieu, que les destinataires des dispositions en cause ne sont pas seulement l'administration fiscale, mais aussi les contribuables, appelés à calculer par avance le montant de leur impôt afin d'évaluer l'incidence sur leurs choix des nouvelles règles de plafonnement ;

83. Considérant qu'un tel calcul impliquerait notamment la conversion en réduction d'impôt des avantages se traduisant par une déduction de l'assiette du revenu imposable ; que cette conversion impliquerait le recours à un taux moyen d'imposition défini par un ratio dont le contribuable devrait évaluer par avance le numérateur et le dénominateur par référence aux nombreuses dispositions auxquelles renvoie l'article 78 ; que le calcul devrait en outre prendre en compte l'incidence des reprises, lorsque des engagements pluriannuels n'ont pu être respectés ; qu'il devrait également tenir compte des particularités que conserveraient certains régimes d'incitation fiscale spécifiques en matière d'investissement dans les entreprises ou dans l'immobilier, qu'il s'agisse des possibilités de report, de l'aménagement de leurs régimes propres incidemment réalisé par l'article 78, de l'existence future de plusieurs plafonds ou de ce qu'une partie de l'avantage échapperait au plafonnement ;

84. Considérant que la complexité de ces règles se traduit notamment par la longueur de l'article 78, par le caractère imbriqué, incompréhensible pour le contribuable, et parfois ambigu pour le professionnel, de ses dispositions, ainsi que par les très nombreux renvois qu'il comporte à d'autres dispositions elles-mêmes imbriquées ; que les incertitudes qui en résulteraient seraient source d'insécurité juridique, notamment de malentendus, de réclamations et de contentieux ;

85. Considérant que la complexité du dispositif organisé par l'article 78 pourrait mettre une partie des contribuables concernés hors d'état d'opérer les arbitrages auxquels les invite le législateur ; que, faute pour la loi de garantir la rationalité de ces arbitrages, serait altérée la justification de chacun des avantages fiscaux correspondants du point de vue de l'égalité devant l'impôt ;

86. Considérant, dans ces conditions, que la complexité de l'article 78 est, au regard des exigences constitutionnelles ci-dessus rappelées, excessive ;

87. Considérant, en second lieu, que le gain attendu, pour le budget de l'Etat, du dispositif de plafonnement des avantages fiscaux organisé par l'article 78 de la loi déférée est sans commune mesure avec la perte de recettes résultant des dispositions de ses articles 74, 75 et 76 ;

88. Considérant, dès lors, que la complexité nouvelle imposée aux contribuables ne trouve sa contrepartie dans aucun motif d'intérêt général véritable ;

89. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la complexité de l'article 78 de la loi de finances pour 2006 est à la fois excessive et non justifiée par un motif d'intérêt général suffisant ; qu'il y a lieu en conséquence, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs de la saisine, de déclarer cet article contraire à la Constitution ;

Sur la réforme de la taxe professionnelle :

90. Considérant que l'article 85 de la loi déférée réforme le régime de plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ; que le II de cet article modifie le deuxième alinéa du I de l'article 1647 B sexies du code général des impôts afin de fixer à 3,5 % le taux de plafonnement pour l'ensemble des entreprises ; que son III détermine les modalités de prise en charge par l'Etat du dégrèvement ainsi accordé ; que le A de ce III prévoit que l'Etat rembourse à chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale la différence entre, d'une part, la base servant au calcul de la cotisation de taxe professionnelle établie au titre de l'année d'imposition multipliée par le taux de référence de chaque collectivité ou établissement public, d'autre part, le montant du plafonnement déterminé selon le pourcentage de la valeur ajoutée de 3,5 % ; que, selon son B, le taux de référence est le taux le plus faible entre celui de l'année 2005, celui de l'année d'imposition et celui de l'année 2004 majoré de 5,5 % pour les communes, de 7,3 % pour les départements et de 5,1 % pour les régions ;

91. Considérant que les requérants soutiennent que cet article fait obstacle, de manière rétroactive, à la prise en compte des augmentations de taux décidées par les collectivités territoriales ; qu'ils font encore valoir qu'en répartissant les effets du plafonnement entre les différentes collectivités territoriales, les dispositions contestées organisent une forme de tutelle entre collectivités ; qu'à ce double titre, le législateur aurait méconnu le principe de libre administration des collectivités territoriales ; qu'ils reprochent également à l'article 85 de figer la compensation versée par l'Etat aux collectivités et de priver de tout effet utile sur le produit fiscal les hausses de taux que les collectivités territoriales pourraient décider à l'avenir, en violation du principe de leur autonomie financière ;

92. Considérant, en premier lieu, que le III de l'article 85 prévoit que le mécanisme de compensation par l'Etat du dégrèvement ne s'appliquera qu'à compter des impositions établies au titre de l'année 2007 ; qu'il n'a pas pour objet et ne peut avoir pour effet d'affecter les budgets des années 2005 et 2006 ; que, par ailleurs, l'interférence entre les taxes professionnelles perçues par différentes collectivités sur le territoire desquelles est établie une entreprise dont la taxe professionnelle sera plafonnée ne saurait avoir pour effet d'instaurer une tutelle entre ces collectivités ; que, par suite, ces deux griefs manquent en fait ;

93. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 72-2 de la Constitution : « Les recettes fiscales et les autres ressources propres des collectivités territoriales représentent, pour chaque catégorie de collectivités, une part déterminante de l'ensemble de leurs ressources. La loi organique fixe les conditions dans lesquelles cette règle est mise en oeuvre » ;

94. Considérant que, pour assurer la mise en oeuvre de cette disposition, la loi organique no 2004-758 du 29 juillet 2004 a inséré dans le code général des collectivités territoriales les articles LO 1114-1 à LO 1114-4 ;

95. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article LO 1114-3 du code général des collectivités territoriales, pour chacune des catégories de collectivités territoriales définies à l'article LO 1114-1 du même code, « la part des ressources propres ne peut être inférieure au niveau constaté au titre de l'année 2003 » ;

96. Considérant qu'en vertu de ces dispositions organiques, le Conseil constitutionnel ne pourrait que censurer des actes législatifs ayant pour conséquence nécessaire de porter atteinte au caractère déterminant de la part des ressources propres d'une catégorie de collectivités territoriales, tel qu'il est défini par lesdites dispositions ; que, cependant, l'article contesté n'emportera pas, de son seul fait, des conséquences d'une ampleur telle que le degré d'autonomie financière d'une catégorie de collectivités territoriales se dégradera dans une proportion incompatible avec la règle fixée par l'article LO 1114-3 ;

97. Considérant, en tout état de cause, que l'article LO 1114-4 du code général des collectivités territoriales tend à garantir la pérennité de l'autonomie financière des collectivités territoriales ; qu'il prévoit à cet effet que le Gouvernement transmettra au Parlement, pour une année donnée, au plus tard le 1er juin de la deuxième année qui suit, « un rapport faisant apparaître, pour chaque catégorie de collectivités territoriales, la part des ressources propres dans l'ensemble des ressources ainsi que ses modalités de calcul et son évolution » ; qu'il indique que « si, pour une catégorie de collectivités territoriales, la part des ressources propres ne répond pas aux règles fixées à l'article LO 1114-3, les dispositions nécessaires sont arrêtées, au plus tard, par une loi de finances pour la deuxième année suivant celle où ce constat a été fait » ;

98. Considérant, dès lors, que, si, au vu de ce rapport, il apparaissait que, en raison de l'évolution des circonstances, et notamment par l'effet de l'article contesté, éventuellement conjugué à d'autres causes, la part des ressources propres dans l'ensemble des ressources d'une catégorie de collectivités territoriales devenait inférieure au seuil minimal déterminé par l'article LO 1114-3 du code général des collectivités territoriales, il appartiendrait à la loi de finances pour la deuxième année suivant celle de ce constat d'arrêter les mesures appropriées pour rétablir le degré d'autonomie financière de cette catégorie au niveau imposé par le législateur organique ;

99. Considérant, en outre, que, si ce rapport révélait que la mesure contestée entravait la gestion d'une collectivité territoriale au point de porter à sa libre administration une atteinte d'une gravité telle que serait méconnu l'article 72 de la Constitution, il appartiendrait aux pouvoirs publics de prendre les mesures correctrices appropriées ;

100. Considérant que, sous les réserves énoncées aux deux considérants précédents, les dispositions de l'article 85 ne sont pas contraires à la Constitution ;

Sur la place de certaines dispositions dans la loi de finances :

101. Considérant que l'article 105 de la loi déférée, qui modifie le premier alinéa de l'article L. 1511-2 du code général des collectivités territoriales, tend à permettre aux conseils régionaux de déléguer à des établissements publics autres que « locaux » la gestion des avances qu'ils octroient à certaines entreprises ;

102. Considérant que l'article 148, qui modifie l'article L. 822-1 du code de l'éducation, prévoit que les biens affectés au logement des étudiants et appartenant à un établissement public pourront être transférés aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale qui s'engagent à les rénover ou à les réhabiliter, à l'instar de ceux qui appartiennent à l'Etat ;

103. Considérant que ces dispositions ne concernent ni les ressources, ni les charges, ni la trésorerie, ni les emprunts, ni la dette, ni les garanties ou la comptabilité de l'Etat ; qu'elles n'ont pas trait à des impositions de toutes natures affectées à des personnes morales autres que l'Etat ; qu'elles n'ont pas pour objet de répartir des dotations aux collectivités territoriales ou d'approuver des conventions financières ; qu'elles ne sont pas relatives au régime de la responsabilité pécuniaire des agents des services publics ou à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ; qu'ainsi, elles sont étrangères au domaine des lois de finances tel qu'il résulte de la loi organique du 1er août 2001 ; qu'il suit de là que les articles 105 et 148 de la loi déférée ont été adoptés selon une procédure contraire à la Constitution ;

104. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution, Décide :


Article 1


Sont déclarées contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de finances pour 2006 :

- le sixième alinéa du I de l'article 49 ;

- le dernier alinéa du IV de l'article 66 ;

- l'article 78 ;

- l'article 105 ;

- l'article 148.

Article 2


Ne sont pas contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de finances pour 2006 :

- sous les réserves énoncées aux considérants 27 et 37, les dispositions relatives aux missions « mono-programme » ;

- sous les réserves énoncées aux considérants 98 et 99, l'article 85 ;

- les articles 7, 26, 56 et 74.

Article 3


La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 29 décembre 2005, où siégeaient : M. Pierre Mazeaud, président, MM. Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe et Valéry Giscard d'Estaing, Mme Jacqueline de Guillenchmidt, MM. Pierre Joxe et Jean-Louis Pezant, Mme Dominique Schnapper, M. Pierre Steinmetz et Mme Simone Veil.


Le président,

Pierre Mazeaud