J.O. Numéro 105 du 5 Mai 2002       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 08653

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Décret no 2002-792 du 3 mai 2002 pris pour l'application des articles L. 213-2, L. 213-3, L. 213-4 et L. 213-5 du code du travail


NOR : MEST0210674D



Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l'emploi et de la solidarité, du ministre de l'agriculture et de la pêche et du ministre de l'équipement, des transports et du logement,
Vu la directive 93/104 /CE du 23 novembre 1993 modifiée concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail ;
Vu le code du travail, notamment les articles L. 213-2, L. 213-3, L. 213-4 et L. 213-5 issus de l'article 17 de la loi no 2001-397 du 9 mai 2001 relative à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
Vu le code rural ;
Vu le décret no 82-397 du 11 mai 1982 modifié relatif à l'organisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture ;
Vu l'avis du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels en date du 29 mai 2001 ;
Vu l'avis de la Commission nationale d'hygiène et de sécurité du travail en agriculture en date du 3 juillet 2001 ;
Vu les avis des organisations syndicales les plus représentatives au plan national des employeurs et des salariés ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :


Art. 1er. - Le chapitre III du titre Ier du livre II du code du travail (partie Réglementaire) comprend quatre sections ainsi rédigées :

« Section 1
« Définition du travailleur de nuit

« Art. R. 213-1. - En l'absence de définition par une convention ou un accord collectif étendu du nombre minimal d'heures de travail de nuit et de la période de référence mentionnés au 2o de l'article L. 213-2, ce nombre minimal est de 270 heures de travail accomplies pendant une période de 12 mois consécutifs.
« Section 2
« Dispositions concernant les dérogations
à la durée maximale quotidienne du travail de nuit

« Art. R. 213-2. - Il peut être dérogé par une convention ou un accord collectif de branche étendu à la durée maximale quotidienne de 8 heures fixée au premier alinéa de l'article L. 213-3 pour les activités suivantes :
« 1o Activités caractérisées par l'éloignement entre le domicile et le lieu de travail du salarié ou par l'éloignement entre différents lieux de travail du salarié ;
« 2o Activités de garde, de surveillance et de permanence caractérisées par la nécessité d'assurer la protection des biens et des personnes ;
« 3o Activités caractérisées par la nécessité d'assurer la continuité du service ou de la production.
« Art. R. 213-3. - I. - Il peut être dérogé à la durée maximale quotidienne de 8 heures fixée au premier alinéa de l'article L. 213-3, sur autorisation de l'inspecteur du travail, dans le cas de faits dus à des circonstances qui sont étrangères à l'employeur, anormales et imprévisibles, ou à des événements exceptionnels dont les conséquences n'auraient pu être évitées. Les demandes de dérogation, accompagnées des justifications utiles, de l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, s'ils existent, et du procès-verbal de consultation des délégués syndicaux, s'ils existent, sont adressées par l'employeur à l'inspecteur du travail. En l'absence de délégué syndical, de comité d'entreprise et de délégués du personnel, la demande est accompagnée d'un document attestant une information préalable des salariés.
« Dans un délai maximum de quinze jours suivant la date de réception de la demande, l'inspecteur du travail fait connaître sa décision à l'employeur ainsi que, s'il y a lieu, aux représentants du personnel.
« Les recours hiérarchiques dirigés contre cette décision doivent être portés devant le directeur régional du travail et de l'emploi, le directeur régional du travail des transports ou le chef du service régional de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricoles le cas échéant, et être formés, à peine de forclusion, dans le délai d'un mois suivant la date à laquelle les intéressés en ont reçu notification.
« II. - Lorsque les circonstances mentionnées au I ci-dessus impliquent nécessairement l'exécution de travaux urgents en vue d'organiser des mesures de sauvetage, prévenir des accidents imminents ou réparer des accidents survenus au matériel, aux installations ou aux bâtiments, l'employeur peut déroger sous sa propre responsabilité à la durée de 8 heures fixée au premier alinéa de l'article L. 213-3. S'il n'a pas encore adressé de demande de dérogation, il doit présenter immédiatement à l'inspecteur du travail une demande de régularisation accompagnée des justifications, de l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut des délégués du personnel, s'ils existent, du procès-verbal de consultation des délégués syndicaux, s'ils existent, et de toutes explications nécessaires sur les causes ayant nécessité une prolongation de la durée quotidienne du travail sans autorisation préalable.
« S'il se trouve dans l'attente d'une réponse à une demande de dérogation, il doit informer immédiatement l'inspecteur du travail de l'obligation où il s'est trouvé d'anticiper la décision attendue et en donner les raisons.
« Dans l'un et l'autre cas, l'inspecteur du travail fait connaître sa décision dans un délai maximum de quinze jours suivant la date de réception de la demande.
« Art. R. 213-4. - Il peut être fait application des dérogations prévues aux 2o de l'article L. 213-3 et R. 213-3 à condition que des périodes de repos d'une durée au moins équivalente au nombre d'heures effectuées en application de la dérogation soient accordées aux salariés concernés. Ce repos doit être pris dans les plus brefs délais à l'issue de la période travaillée. Lorsque, dans des cas exceptionnels, l'octroi de ce repos n'est pas possible pour des raisons objectives, une contrepartie équivalente permettant d'assurer une protection appropriée au salarié concerné doit être prévue par accord collectif.
« Section 3
« Dispositions concernant l'affectation
de travailleurs à des postes de nuit

« Art. R. 213-5. - En l'absence de convention ou d'accord collectif et à condition que l'employeur ait engagé sérieusement et loyalement des négociations tendant à la conclusion d'un tel accord, les travailleurs peuvent être affectés à des postes de nuit sur dérogation accordée par l'inspecteur du travail. La demande d'autorisation d'affectation dérogatoire de travailleurs à des postes de nuit, présentée à l'inspecteur du travail par l'employeur sur le fondement du troisième alinéa de l'article L. 213-4, justifie, de façon circonstanciée, les contraintes propres à la nature de l'activité ou au fonctionnement de l'entreprise qui rendent nécessaire le travail de nuit eu égard aux exigences de continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale.
« La demande doit être également accompagnée des éléments permettant de vérifier le caractère loyal et sérieux de l'engagement préalable de négociations dans le délai maximum de 12 mois précédant la demande, l'existence de contreparties et de temps de pause, la prise en compte des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. L'avis des délégués syndicaux et du comité d'entreprise, ou des délégués du personnel, s'il en existe, doit être joint à la demande. En l'absence de délégué syndical, de comité d'entreprise et de délégué du personnel, la demande est accompagnée d'un document attestant une information préalable des salariés.
« Dans le délai de trente jours à compter de la date de réception de la demande, l'inspecteur du travail fait connaître sa décision à l'employeur et, s'il y a lieu, aux représentants du personnel.
« Les recours hiérarchiques dirigés contre cette décision doivent être portés devant le directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, le directeur régional du travail des transports ou le chef du service régional de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricoles le cas échéant, et être formés, à peine de forclusion, dans un délai d'un mois suivant la date à laquelle les intéressés ont reçu notification de la décision contestée.
« Section 4
« Surveillance médicale des travailleurs de nuit

« Art. R. 213-6. - Les travailleurs de nuit bénéficient d'une surveillance médicale renforcée qui a pour objet de permettre au médecin du travail d'apprécier les conséquences éventuelles pour leur santé et leur sécurité du travail de nuit, notamment du fait des modifications des rythmes chronobiologiques, et d'en appréhender les répercussions potentielles sur leur vie sociale.
« Cette surveillance médicale renforcée s'exerce dans les conditions suivantes :
« a) Un travailleur de nuit ne peut être affecté à un poste de nuit que s'il a fait l'objet d'un examen préalable par le médecin du travail et si la fiche d'aptitude établie en application de l'article R. 241-57 du présent code ou du I de l'article 40 du décret no 82-397 du 11 mai 1982 relatif à l'organisation et au fonctionnement des services médicaux du travail en agriculture, s'il s'agit d'un travailleur agricole, atteste que son état de santé est compatible avec une affectation à un poste de nuit ; cette fiche indique la date de l'étude du poste de travail et celle de la dernière mise à jour de la fiche d'entreprise lorsqu'elle est exigible ; la fiche d'aptitude est renouvelée tous les six mois, après examen du travailleur par le médecin du travail ;
« b) Sous réserve des dispositions du décret précité du 11 mai 1982 concernant les salariés agricoles, le médecin du travail est informé par l'employeur de toute absence, pour cause de maladie, des travailleurs de nuit ;
« c) En dehors des visites périodiques, tout travailleur de nuit peut bénéficier d'un examen médical à sa demande ;
« Le médecin du travail prescrit, s'il le juge utile, des examens spécialisés complémentaires ; ces examens sont à la charge de l'employeur ;
« d) Des recommandations précisant les modalités des examens à pratiquer en vue d'assurer la surveillance médicale des travailleurs de nuit font l'objet, en tant que de besoin, d'un arrêté des ministres chargés du travail et de l'agriculture.
« Art. R. 213-7. - Le médecin du travail analyse les éventuelles répercussions sur la santé des travailleurs des conditions du travail nocturne, notamment des horaires et du rythme de celui-ci. Il examine, plus particulièrement, les conséquences de l'alternance des postes et de sa périodicité dans le cas du travail en équipes alternantes comportant un poste de nuit.
« A cet effet, le médecin du travail procède, pendant les périodes au cours desquelles sont occupés les travailleurs de nuit, à l'étude des conditions de travail et du poste de travail. Il analyse ensuite le contenu du poste et ses contraintes, pour chaque salarié.
« Sur la base des éléments ainsi recueillis, il conseille le chef d'entreprise ou son représentant sur les modalités d'organisation du travail de nuit les mieux adaptées aux travailleurs, en fonction du type d'activité.
« Art. R. 213-8. - I. - Le médecin du travail informe les travailleurs de nuit, et plus particulièrement les femmes enceintes et les travailleurs vieillissants, des incidences potentielles du travail de nuit sur la santé. Cette information tient compte de la spécificité des horaires : horaire fixe ou horaire alterné. Il les conseille sur les précautions éventuelles à prendre.
« II. - Pour les entreprises employant des travailleurs de nuit, le rapport annuel d'activité du médecin du travail, prévu à l'article R. 241-33, traite du travail de nuit tel qu'il a été pratiqué dans l'entreprise dans l'année considérée. »


Art. 2. - Après le sixième alinéa de l'article R. 241-42 du code du travail, sont insérés les mots : « De mise en place ou de modification de l'organisation du travail de nuit ».


Art. 3. - La ministre de l'emploi et de la solidarité, le ministre de l'équipement, des transports et du logement et le ministre de l'agriculture et de la pêche sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 3 mai 2002.

Lionel Jospin
Par le Premier ministre :

La ministre de l'emploi et de la solidarité,
Elisabeth Guigou
Le ministre de l'équipement,
des transports et du logement,
Jean-Claude Gayssot

Le ministre de l'agriculture et de la pêche,
François Patriat