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Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance no 96-345 du 24 avril 1996 relative à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins


NOR : TASX9600042R


Rapport au Président de la République Monsieur le Président, Le présent projet d'ordonnance, relatif à la maîtrise médicalisée des dépenses de soins, constitue l'un des principaux volets de la réforme de la sécurité sociale présentée au Parlement par le Premier ministre à la mi-novembre 1995. Il contribuera à sauvegarder les principes de la sécurité sociale et l'accès de tous à des soins de qualité. Maîtriser les dépenses de soins par des procédures médicalisées qui veillent à la qualité des soins est le seul chemin qui permettra de sortir de l'alternative entre l'accroissement des prélèvements obligatoires et la diminution du niveau de la couverture sociale. Ainsi doivent se concilier le perfectionnement de notre système de soins et le rétablissement des comptes sociaux. A cette fin, et dans le cadre de la loi constitutionnelle votée par le Congrès le 19 février 1996, la présente ordonnance ouvre la voie d'une politique de santé, engage l'effort d'adaptation de l'offre de soins libérale, poursuit la mise en place des instruments de la maîtrise médicalisée et clarifie les responsabilités des acteurs de notre système de soins et de sécurité sociale. L'élaboration d'une véritable politique de santé doit éclairer les choix financiers essentiels qui relèvent désormais du Parlement. L'institution des conférences de santé réunies dans chaque région et au niveau national permettra de mieux évaluer les besoins sanitaires de la population et de hiérarchiser les priorités d'action. Sur la base de travaux scientifiques, elle ouvrira un large débat public et préparera l'intervention du législateur. Aux besoins de santé doit répondre une offre toujours mieux adaptée, dans le respect des principes de la médecine libérale - liberté d'installation, liberté de choix du médecin, liberté de prescription, paiement à l'acte, secret professionnel. L'indépendance que garantissent ces principes sera préservée dans l'intérêt même du malade. Quant à la nécessaire adaptation de l'offre, elle sera facilitée par des dispositifs qui doivent assurer une meilleure régulation des flux de formation des médecins, permettre la réorientation des praticiens vers d'autres modes d'exercice et dessiner de nouvelles formes d'organisation des soins. Afin de redonner une place centrale au médecin généraliste, il convient d'assurer un suivi plus cohérent du malade soigné aussi bien en ville qu'à l'hôpital ou dans des structures intermédiaires. Le choix est fait d'emprunter d'abord la voie de l'expérimentation et du volontariat dans des conditions que précise le projet. L'amélioration de la qualité des soins et la maîtrise des dépenses sont l'affaire des professionnels de santé. La formation médicale continue qui permet de prendre en compte l'évolution très rapide des connaissances et des techniques est le moyen essentiel de cette politique de qualité. Quant à la maîtrise des dépenses, elle passe par l'usage d'instruments tendant vers le << juste soin >>. Ces instruments de maîtrise médicalisée (comme le codage des actes, des prescriptions et des pathologies, le carnet médical, les références médicales opposables) et une meilleure organisation des soins permettront en effet de concilier la qualité des soins et le respect des contraintes financières. Ce rôle essentiel des praticiens, qui rejoint les responsabilités propres de l'assurance maladie et des pouvoirs publics, implique une clarification des responsabilités. Après la réforme de la Constitution, l'ordonnance précise les pouvoirs de chaque acteur du système de soins et de la sécurité sociale. A la suite des conférences de la santé et du vote de la loi de financement de la sécurité sociale par le Parlement, l'Etat et les caisses nationales d'assurance maladie détermineront par convention les engagements réciproques qui concourent à la mise en oeuvre des orientations fixées par le Parlement. A partir de ce cadre clair, les caisses nationales et les organisations représentatives des médecins libéraux exerceront leurs pleines responsabilités conventionnelles afin d'assurer le respect de l'objectif des dépenses voté par le Parlement, en s'appuyant sur des mécanismes de régulation très largement individualisés et médicalisés. Le projet comporte sept titres. Le titre Ier institue les conférences nationale et régionales de santé. Leur objet est de marquer la place des priorités de santé dans le débat parlementaire préalable au vote du Parlement. La conférence nationale élaborera un rapport à partir des travaux réalisés dans les régions et des contributions des organismes de recherche ainsi que de l'administration de la santé qu'elle sollicitera. Le rapport de la conférence ainsi qu'un rapport du Haut Comité de la santé publique, qui lui aura été communiqué au préalable, seront transmis au Parlement. La conférence nationale réunira les professionnels libéraux et salariés de santé et les représentants des conférences régionales. Celles-ci rassembleront les représentants des pouvoirs publics, de la sécurité sociale, des établissements, des professionnels et des usagers. Le titre II est relatif à la formation des médecins et à l'adaptation de l'offre de soins de ville. La formation initiale des médecins généralistes est allongée de six mois par l'instauration d'un stage en cabinet médical (art. 2). Afin que les médecins bénéficient, dans l'intérêt de leurs malades, de l'élévation constante du niveau des connaissances et des techniques, une obligation de formation continue est instituée pour les médecins libéraux et hospitaliers qui devront solliciter tous les cinq ans l'attestation du respect de cette obligation. Les formations sont validées par un Conseil national de la formation médicale continue qui réunit l'ordre, l'Université, les associations de formation ainsi que des représentants, choisis en leur sein ou en dehors, des unions régionales de médecins libéraux. Les conseils régionaux de la formation médicale continue ou les commissions médicales d'établissement délivrent l'attestation exigée des médecins. Le manquement à cette obligation est passible de sanction par l'ordre et fait l'objet pour les médecins libéraux d'un signalement aux caisses d'assurance maladie. Le fonds d'assurance formation regroupe les financements obligatoires et conventionnels. Sa composition est élargie de façon à associer tous les acteurs du monde médical (art. 3). L'article 4 crée un fonds de réorientation et de modernisation de la médecine libérale. Son objet est de financer les aides à la réorientation des médecins et à l'informatisation de leurs cabinets ainsi que les allocations de préretraite. Il sera alimenté par les contributions exceptionnelles versées par les médecins en 1996, par les contributions au mécanisme de cessation anticipée d'activité et par toute ressource qui lui sera affectée. L'article 5 étend le champ d'application du mécanisme de préretraite des médecins en abaissant l'âge minimal d'accès de soixante ans à cinquante-sept ans et accroît son attractivité en assouplissant les règles de non-cumul de l'allocation de préretraite et de la rémunération d'une activité salariée. Jusqu'au 31 décembre 1997 les médecins auront la faculté de bénéficier de ce dispositif dès cinquante-six ans. Ainsi devrait-il être possible de parvenir d'ici à l'an 2000 à une stabilisation du nombre des médecins libéraux. Le titre III a pour objet d'instituer des outils susceptibles d'améliorer la coordination des soins. Deux voies sont empruntées à cette fin. D'abord (art. 6) des expérimentations seront menées sur une période de cinq ans en vue de promouvoir des formes nouvelles d'organisation de soins : filières articulant les interventions auprès d'un patient à partir d'un médecin généraliste et destinées à améliorer la qualité du suivi médical, réseaux de soins pour coordonner les interventions en ville et à l'hôpital notamment. L'Etat agréera les projets après examen par un conseil scientifique et avis d'un conseil d'orientation regroupant l'ensemble des parties intéressées à la conduite de ces expériences et tout particulièrement les professionnels libéraux. Pour la pleine efficacité de ces expériences, il pourra être dérogé aux règles qui régissent les rapports entre professionnels de santé, assurés sociaux et caisses d'assurance maladie. En second lieu (art. 7) un carnet de santé est institué pour l'ensemble de la population. Il appartient aux caisses d'assurance maladie de le distribuer à leurs bénéficiaires qui seront tenus de le présenter à chaque consultation. Ce carnet est l'instrument essentiel de la réussite d'une réforme qui vise à faciliter le suivi des malades et leur orientation dans le système de soins. L'information mutuelle du médecin traitant, qui tient le dossier médical du patient, et des autres professionnels de santé en sera améliorée. La confidentialité du carnet est garantie par des sanctions pénales qui frappent tout usage illégal. Ce carnet a vocation à être porté à terme sur la carte électronique du bénéficiaire de l'assurance maladie avec les garanties offertes par la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique et aux libertés. Le titre IV a trait aux systèmes d'information de l'assurance maladie et aux cartes de santé. L'article 8 comporte les dispositions nécessaires à la mise en place d'échanges informatisés dont les finalités principales sont de disposer d'une information plus riche susceptible de permettre aux professionnels de santé de mieux évaluer leur pratique et de moderniser la gestion de l'assurance maladie au bénéfice de l'ensemble des interlocuteurs des organismes. Au 31 décembre 1998, caisses d'assurance maladie et professionnels de santé devront être en mesure de procéder à de tels échanges de données. A la même date, chaque assuré social aura reçu une carte à puce comportant la photographie du titulaire. Les professionnels de santé qui s'engageraient avant le 31 décembre 1997 à télétransmettre les feuilles de soins pourront bénéficier d'actions d'accompagnement. Au-delà du 1er janvier 2000 les professionnels qui ne procéderaient pas à la télétransmission des feuilles de soins acquitteront une contribution aux frais de gestion des feuilles papier. Ce calendrier ambitieux révèle la détermination du Gouvernement pour aller plus vite dans la voie de l'informatisation. Les obligations des professionnels de santé en matière de codage des actes et des pathologies sont précisées. L'utilisation commerciale des informations médicales nominatives est interdite (art. 9). Le titre V qui porte sur le contrôle médical, les instances et les procédures contentieuses comporte des dispositions qui concourront à améliorer l'efficacité de l'intervention de la médecine conseil des caisses d'assurance maladie. L'article 10 précise les pouvoirs du contrôle médical. L'article 11 dispose que, dans les cas où un manquement a été constaté en cas de prescription de médicaments, de transports sanitaires ou d'indemnités journalières non conforme aux textes en vigueur, la procédure de sanction est médicalisée par l'intervention d'un comité médical régional composé de médecins désignés par les unions régionales de médecins libéraux et de membres du contrôle médical régional des caisses placés sous la présidence du médecin inspecteur régional de la santé. Ce comité donne sur les faits et la sanction un avis qui s'impose aux caisses. L'article 13 redéfinit les cas dans lesquels les caisses peuvent récupérer les sommes indûment versées auprès des professionnels qui n'ont pas respecté les règles en vigueur. L'article 14 simplifie la procédure d'expertise dans le contentieux de la nomenclature. Afin de permettre à la section des assurances sociales de l'ordre des médecins de mieux remplir ses missions l'article 15 donne la possibilité à l'ordre d'assortir les peines prononcées d'un sursis et augmente le nombre de juges suppléants. Le titre VI comporte des dispositions relatives aux procédures de prise en charge et aux conventions avec les professions médicales et les auxiliaires médicaux. L'article 16 confie à l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé créée par l'ordonnance relative à la réforme de l'hospitalisation publique et privée le rôle d'émettre un avis sur la liste des actes, prestations et fournitures admis au remboursement. Cette disposition législative permet de mieux identifier la phase scientifique initiale dans la procédure de nomenclature et ouvre la voie à la réforme de nature réglementaire de cette procédure. L'article 17 réaffirme le principe de la plus stricte économie compatible avec les besoins du malade qui s'applique à l'ensemble de l'activité du médecin. En outre, le médecin est tenu de signaler sur l'ordonnance le cas où il prescrit un médicament en dehors de l'indication thérapeutique pour laquelle le produit a été admis au remboursement. Le même article 17 procède à l'adaptation du champ de la convention médicale compte tenu des dispositions de la présente ordonnance et fixe les règles de détermination de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses opposable aux médecins ainsi que les règles relatives à la revalorisation des honoraires et aux modalités de la régulation. L'Etat et les caisses nationales d'assurance maladie disposeront de quinze jours à compter de la publication de la loi de financement de la sécurité sociale pour conclure l'avenant annuel à la convention d'objectifs et de gestion instituée par le titre Ier de l'ordonnance portant mesures relatives à l'organisation de la sécurité sociale. A défaut d'accord, l'Etat notifie aux caisses nationales l'objectif d'évolution des dépenses de soins de ville. Compte tenu de l'objectif prévisionnel d'évolution des dépenses de soins de ville, l'annexe annuelle à la convention médicale fixe les objectifs qui portent sur les dépenses remboursables par les régimes d'assurance maladie. La même annexe fixe également les tarifs des honoraires et peut comprendre une provision pour leur revalorisation. Si l'objectif est respecté, cette provision est versée aux médecins en proportion de leur activité et dans la limite le cas échéant d'un plafond. La revalorisation est acquise pour l'année suivante. En cas de dépassement des objectifs et selon son importance, soit la revalorisation est diminuée à due concurrence de ce dépassement, soit un reversement exigible des médecins est arrêté dans les conditions prévues par la convention d'objectifs et de gestion. Il appartiendra aux partenaires conventionnels de préciser les modalités de l'individualisation du reversement selon les caractéristiques de l'activité du médecin, afin de ne pas pénaliser les praticiens dont l'activité aura été rigoureuse. Le même article établit en outre un calendrier précis des différentes opérations qui concourent à l'établissement de l'objectif prévisionnel des dépenses. Dans les cinquante jours suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, les caisses nationales d'assurance maladie et les organisations représentatives de médecins doivent avoir signé l'annexe annuelle à la convention médicale, annexe relative à l'objectif de dépenses médicales et aux tarifs d'honoraires. L'Etat doit approuver cette annexe ou s'y opposer dans un délai de quinze jours. A défaut de conclusion d'une annexe, l'Etat exerce un pouvoir de substitution. Afin de remédier au vide juridique qui résulte actuellement de l'absence de convention médicale, en cas de défaut d'accord ou d'annulation, un arrêté, pris après consultation des caisses nationales d'assurance maladie et des syndicats de médecins, déterminera sous forme de règlement conventionnel les dispositions minimales qui doivent régir les relations entre les médecins et les caisses. L'article 18 confère aux caisses nationales et aux professions de santé autres que les médecins la possibilité d'inclure dans les conventions qui les lient des références professionnelles opposables. L'article 19 confie à l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé ou à l'Agence du médicament le rôle d'établir les références médicales et les recommandations de bonne pratique. Il appartient donc comme aujourd'hui aux partenaires conventionnels de définir les conditions dans lesquelles ces références deviennent opposables. L'Etat peut approuver de façon sélective, pour des raisons de santé publique, les références médicales opposables et demander aux parties à la convention médicale de lever l'opposabilité d'une référence qui serait scientifiquement dépassée. Tout manquement aux références médicales opposables est soumis à l'examen du comité médical régional mentionné à l'article 11 lorsque les instances conventionnelles locales n'ont pas pris de décision dans un délai déterminé ou lorsque le partage des voix est constaté. Le contentieux se déroule devant le tribunal des affaires de sécurité sociale. L'article 20 fixe les dates d'effet spécifiques à certaines dispositions de l'ordonnance. L'article 22 fixe la règle de sélection des indications pour lesquelles un médicament est admis au remboursement. Il précise, en outre, les conditions de dénomination des médicaments génériques pour lesquels l'inscription sur la liste des spécialités remboursables est sollicitée. La procédure d'inscription sur la liste des médicaments utilisables par les hôpitaux et les cliniques, notamment en cas d'inscription simultanée, est simplifiée sans que la liberté des prix négociés dont bénéficie cette catégorie de spécialités soit remise en cause. L'article 23 établit une définition des médicaments génériques et dispose que la publicité qui leur est relative mentionne leur nature de spécialités génériques. L'article 24 attribue aux ministres de la santé et de la sécurité sociale la compétence d'inscrire les médicaments sur la liste des spécialités utilisées dans les hôpitaux. L'article 25 précise les conditions d'assujettissement des groupes d'entreprises pharmaceutiques aux contributions exceptionnelles mises à leur charge en 1996. Le titre VII comporte des dispositions diverses, notamment d'abrogation et de renumérotation d'articles . Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation. Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.