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Décret no 95-1115 du 17 octobre 1995 relatif à l'expropriation des biens exposés à certains risques naturels majeurs menaçant gravement des vies humaines


NOR : ENVP9530043D


Le Premier ministre, Sur le rapport du ministre de l'économie, des finances et du Plan, du ministre de l'intérieur et du ministre de l'environnement, Vu le code des communes; Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique; Vu le code des assurances; Vu la loi no 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, et notamment le chapitre Ier de son titre II; Vu l'avis du Conseil national des assurances en date du 28 mars 1995; Le Conseil d'Etat (section des travaux publics) entendu, Décrète: TITRE Ier DISPOSITIONS RELATIVES A LA PROCEDURE D'EXPROPRIATION DES BIENS EXPOSES A CERTAINS RISQUES NATURELS MAJEURS

Art. 1er. - Les dispositions réglementaires du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique sont applicables à l'expropriation des biens exposés à un risque naturel majeur décidée en application de l'article 11 de la loi du 2 février 1995 susvisée, sous les réserves et avec les compléments définis au présent titre.

Art. 2. - Le préfet engage la procédure d'expropriation à la demande des ministres chargés de la prévention des risques majeurs, de la sécurité civile et de l'économie. Le dossier soumis à l'enquête publique en application du II de l'article R. 11-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est complété par une analyse des risques décrivant les phénomènes naturels auxquels les biens sont exposés, et permettant d'apprécier l'importance et la gravité de la menace qu'ils présentent pour les vies humaines au regard notamment des critères suivants: a) Les circonstances de temps et de lieu dans lesquelles le phénomène naturel est susceptible de se produire; b) L'évaluation des délais nécessaires à, d'une part, l'alerte des populations exposées et, d'autre part, à leur complète évacuation. Cette analyse doit également permettre de vérifier que les autres moyens envisageables de sauvegarde et de protection des populations s'avèrent plus coûteux que les indemnités d'expropriation.

Art. 3. - L'enquête est menée dans les formes prévues par les articles R. 11-4 à R. 11-14 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Le dossier mentionné à l'article 2 ci-dessus est adressé également par le préfet, pour avis, à chaque commune dont une partie du territoire est comprise dans le périmètre délimitant les immeubles à exproprier. L'avis du conseil municipal doit être transmis au préfet dans un délai de deux mois. Passé ce délai, l'avis est réputé favorable.

Art. 4. - A l'issue de la procédure décrite à l'article 3 ci-dessus, le préfet transmet le dossier avec son avis ainsi que les avis recueillis et les conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête au ministre chargé de la prévention des risques majeurs. Lorsque les conclusions du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête sont favorables, l'utilité publique peut être déclarée par arrêté conjoint des ministres chargés de la prévention des risques majeurs, de la sécurité civile et de l'économie. Dans le cas contraire, elle ne peut être déclarée que par décret en Conseil d'Etat. Le ministre chargé de la prévention des risques majeurs adresse copie de l'acte déclaratif d'utilité publique au préfet et à l'organisme gestionnaire mentionné à l'article 6 ci-après.

Art. 5. - Le préfet transmet au ministre chargé de la prévention des risques majeurs l'indication des montants des indemnités fixés par accord amiable ou par le juge de l'expropriation. Le ministre informe l'organisme gestionnaire du montant de ces indemnités. Celles-ci sont payées ou consignées selon les modalités définies par le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, lorsque le transfert prévu à l'article 12 ci-après a été effectué. Le préfet adresse également au ministre chargé de la prévention des risques majeurs, en vue de l'application des dispositions du premier alinéa de l'article 13 de la loi du 2 février 1995 susvisée, l'évaluation des crédits nécessaires à l'exécution des travaux de démolition ou de limitation d'accès concernant les biens expropriés. TITRE II DISPOSITIONS RELATIVES AU FONDS DE PREVENTION DES RISQUES NATURELS MAJEURS

Art. 6. - La gestion comptable et financière du fonds de prévention des risques naturels majeurs est assurée par la caisse centrale de réassurance selon les règles qui lui sont applicables sous réserve des dispositions du présent titre. Elle fait l'objet d'une comptabilité distincte de celle des autres opérations pratiquées par la caisse. Le président du conseil d'administration de la caisse centrale de réassurance arrête les comptes du fonds pour l'exercice écoulé, après consultation du conseil de gestion mentionné à l'article 9 selon les modalités prévues à l'article 11.

Art. 7. - Les ressources du fonds de prévention des risques naturels majeurs comprennent: 1o Le produit du prélèvement institué par l'article 13, deuxième alinéa, de la loi du 2 février 1995 susvisée; 2o Les intérêts des fonds placés; 3o Les bénéfices sur réalisations de valeurs; 4o Les sommes reversées en application de l'article 14 ci-dessous; 5o Les avances de l'Etat mentionnées au quatrième alinéa de l'article 13 de la loi du 2 février 1995 susvisée. Ces ressources sont destinées à couvrir: 1o Les indemnités versées aux expropriés et les dépenses liées à la limitation de l'accès et à la démolition éventuelle des biens exposés mentionnées au premier alinéa de l'article 13 de la loi du 2 février 1995 susvisée; 2o Les frais de gestion exposés par la caisse centrale de réassurance pour la gestion du fonds; 3o Les pertes sur réalisations de valeurs; 4o Les indemnités et remboursements de frais éventuellement dus aux membres du conseil de gestion du fonds énumérés au troisième alinéa de l'article 9 ci-dessous; 5o Le remboursement des avances de l'Etat.

Art. 8. - Les avoirs disponibles du fonds sont placés par la caisse centrale de réassurance en actifs mentionnés à l'article R. 332-2 du code des assurances. Ces actifs sont soumis aux limitations prévues aux articles R. 332-3 et R. 332-3-1; pour le calcul de ces limitations, le montant de chacune des catégories d'actifs est rapporté au montant des avoirs disponibles du fonds.

Art. 9. - Il est institué un conseil de gestion du fonds de prévention des risques naturels majeurs. Ce conseil est présidé par un magistrat de la Cour des comptes désigné pour trois ans renouvelables, par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et de la prévention des risques majeurs; il comprend en outre: 1. Un représentant de chacun des ministres chargés respectivement de la prévention des risques majeurs, de l'économie, du budget et de la sécurité civile; 2. Un maire désigné sur proposition du ministre chargé des collectivités locales; 3. Un représentant des entreprises d'assurance désigné sur proposition du ministre chargé de l'économie; 4. Deux personnalités qualifiées désignées par le ministre chargé de la prévention des risques majeurs; 5. Le président du conseil d'administration de la caisse centrale de réassurance ou son représentant. Les membres du conseil visés aux 2, 3 et 4 ci-dessus sont nommés pour trois ans par arrêté du ministre chargé de la prévention des risques majeurs. Leur mandat est renouvelable; toutefois, celui-ci prend fin si son titulaire perd la qualité au titre de laquelle il a été nommé. Il est alors procédé à une nouvelle nomination pour la durée du mandat restant à courir ainsi qu'en cas de décès ou de démission. Les membres du conseil mentionnés à l'alinéa ci-dessus ont droit au remboursement des frais qu'ils ont exposés dans l'exercice de leur mandat dans les conditions fixées par un arrêté du ministre chargé de la prévention des risques majeurs.

Art. 10. - Le conseil de gestion du fonds de prévention des risques naturels majeurs est réuni au moins une fois par an, sur convocation de son président, à l'initiative de celui-ci ou à la demande soit de l'un des ministres chargés de l'économie et de la prévention des risques majeurs, soit du président de la caisse centrale de réassurance. En cas de partage égal des voix, celle du président est prépondérante. Le secrétariat du conseil est assuré par la caisse centrale de réassurance.

Art. 11. - Le conseil est consulté sur les projets de comptes annuels du fonds auxquels doivent être joints les justificatifs des frais de gestion de ce dernier exposés par la caisse. Il est consulté sur le projet de rapport annuel sur la gestion du fonds prévu au premier alinéa de l'article 15 de la loi du 2 février 1995 susvisée. Il est également consulté sur les demandes de remboursement mentionnées à l'article 14 du présent décret. Il peut être consulté par les ministres chargés de la prévention des risques majeurs, de la sécurité civile et de l'économie sur toute question se rapportant à l'objet du fonds. Il est informé des opérations menées par le fonds.

Art. 12. - Les ministres chargés de la prévention des risques majeurs et de l'économie fixent par arrêté conjoint, compte tenu des disponibilités du fonds, le montant des sommes à affecter au paiement ou à la consignation d'indemnités d'expropriation et au paiement de travaux. La caisse centrale de réassurance transfère les sommes ainsi fixées au trésorier payeur général de chaque département concerné.

Art. 13. - Lorsque le préfet estime que la délivrance d'un permis de construire ou d'une autorisation administrative susceptible d'augmenter la valeur des biens à exproprier doit donner lieu à un remboursement du coût de l'expropriation dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 14 de la loi du 2 février 1995 susvisée, il en informe l'autorité qui a délivré le permis ou l'autorisation en lui laissant un délai de trois mois pour faire connaître ses observations. A l'expiration de ce délai, le préfet indique, après avis du conseil de gestion du fonds, le montant des sommes dues par la personne morale de droit public au nom de laquelle a été délivré le permis de construire ou l'autorisation administrative. Il notifie ce montant à la personne morale de droit public concernée et à la caisse centrale de réassurance. Lorsqu'il s'agit d'une collectivité territoriale, il lui rappelle que la dépense revêt le caractère d'une dépense obligatoire. Le président du conseil de gestion du fonds peut saisir le ministre chargé de la prévention des risques majeurs de tout cas où les dispositions du deuxième alinéa de l'article 14 de la loi du 2 février 1995 susvisée lui paraîtraient applicables. TITRE III DISPOSITIONS DIVERSES

Art. 14. - L'article R. 24-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique est complété ainsi qu'il suit: << - au titre Ier du décret no 95-1115 du 17 octobre 1995 relatif à l'expropriation des biens exposés à certains risques naturels majeurs menaçant gravement des vies humaines. >>

Art. 15. - Le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de l'économie, des finances et du Plan, le ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports, le ministre de l'intérieur, le ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la citoyenneté, le ministre du logement, le ministre de l'environnement et le secrétaire d'Etat au budget sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 17 octobre 1995.


ALAIN JUPPE Par le Premier ministre: Le ministre de l'environnement, CORINNE LEPAGE Le garde des sceaux, ministre de la justice, JACQUES TOUBON Le ministre de l'économie, des finances et du Plan, JEAN ARTHUIS Le ministre de l'aménagement du territoire, de l'équipement et des transports, BERNARD PONS Le ministre de l'intérieur, JEAN-LOUIS DEBRE Le ministre de la réforme de l'Etat, de la décentralisation et de la citoyenneté, CLAUDE GOASGUEN Le ministre du logement, PIERRE-ANDRE PERISSOL Le secrétaire d'Etat au budget, FRANCOIS D'AUBERT