6 La sûreté de la gestion des déchets radioactifs en France

Comme toute activité industrielle, les activités nucléaires génèrent des déchets solides. liquides ou gazeux. Certains d'entre eux sont radioactifs. Une gestion sûre, claire et rigoureuse de ces déchets doit conduire à assurer la protection des personnes, à préserver l'environnement et à limiter les contraintes induites sur les générations futures. Pour la DSIN, cette gestion doit viser à prendre en charge l'ensemble des catégories de déchets de façon adaptée. A cette fin, des filières de gestion spécifiques doivent être développées en tenant compte des risques non seulement radiologiques mais aussi chimiques et parfois biologiques présentés par les déchets. Une approche intégrée doit permettre de prendre en compte l'interdépendance des différentes filières et des différentes étapes de ces filières les unes avec les autres.

Tous les déchets, classés selon leur activité et leur toxicité, ne disposent pas encore de filières d'élimination définitives.

A ce jour, seule la catégorie des déchets de faible et moyenne activité à vie courte fait l'objet d'une gestion sûre complète jusqu'à élimination définitive par stockage au Centre de l'Aube. Cette catégorie représente en volume une part importante du total des déchets produits. On notera cependant que, même dans cette catégorie, on trouve des sous-catégories, notamment les déchets tritiés ou les déchets contenant du graphite, qui ne peuvent être acceptés en l'état au Centre de l'Aube et qui sont actuellement entreposés. On notera également que, du fait de l'absence de capacité de traitement suffisante, des quantités importantes de déchets liquides de faible et moyenne activité à vie courte s'accumulent dans des entreposages établis sur les sites de production.

Les autres catégories de déchets n'ont pas aujourd'hui d'exutoire final. Ces catégories de déchets représenteront à terme pour les déchets de très faible activité des volumes importants pour une activité totale très faible, et pour les déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue des volumes réduits pour une activité et donc une nocivité extrêmement importantes.

La DSIN veille à ce que les déchets produits de nos jours et encore sans exutoire final soient pour l'instant entreposés de façon sûre dans des installations prévues à cet effet. Cependant, certaines installations d'entreposage sont de conception ancienne et ne respectent pas toujours les critères de sûreté actuellement en vigueur pour les nouvelles installations. Leur vieillissement est tel qu'il nécessite la mise en place de dispositions de sûreté compensatoires ainsi que d'une surveillance et d'une maintenance renforcées qui ne sont acceptables que pour une durée limitée. A terme, il sera nécessaire de les remplacer.

En tout état de cause, il faut être conscient que tout entreposage, quel que soit son état actuel, devra être vidé et démantelé à plus ou moins longue échéance du fait de la durée de vie limitée de ce type d'installation. Les exemples de projets de reprise de déchets anciens et de démantèlement d'installations qui se multiplient actuellement sont là pour rappeler que ces opérations sont certes possibles, mais qu'elles sont souvent complexes tant sur le plan de la radioprotection que sur le plan de la sûreté et de la gestion des déchets. Sur ce dernier point, on retiendra que la multiplication des entreposages permet de résoudre le problème de la gestion des déchets à court et moyen terme, mais conduit à long terme à un foisonnement des déchets : les déchets, après leur reprise, doivent la plupart du temps être reconditionnés. ce qui augmente leur volume, et les parties contaminées ou activées des entreposages deviennent des déchets, une fois les installations démantelées.

Compte tenu de ces éléments, il est primordial de préserver l'avenir en poursuivant résolument les recherches de solutions définitives de gestion pour les déchets actuellement sans exutoire, tant pour ceux qui sont déjà produits que pour ceux qui seront produits à l'avenir. Il convient donc de respecter les échéances et les axes fixés par la loi 91-1381 du 30 décembre 1991 pour les recherches concernant les déchets de haute activité et à vie longue. Il convient également de mettre en œuvre à temps les différents concepts de stockage en cours d'étude pour les déchets tritiés, pour les déchets contenant du graphite, pour les déchets radifères et pour les déchets de très faible radioactivité, et de rechercher des sites d'implantation favorables sur le plan hydrogéochimique et sur le plan géologique.

Pour la DSIN, ces divers projets apportent une solution technique crédible et acceptable sur le plan de la sûreté à long terme. Force est de constater que les études actuellement menées sur plusieurs d'entre eux dérivent dans le temps. La décision prise par le Gouvernement, le 9 décembre 1998, de création de deux laboratoires souterrains pour l'étude du stockage en profondeur des déchets fortement radioactifs, dont l'un est d'ores et déjà localisé dans la Meuse, permettra cependant de ne plus accumuler de retard dans l'étude des solutions de gestion possibles pour cette catégorie de déchets.

En parallèle, sur le court et moyen ternie, la DSIN veille à ce que les exploitants nucléaires poursuivent, là où cela est nécessaire sur le plan de la sûreté, leur programme de modernisation ou de remplacement des installations actuelles d'entreposage et de traitement de déchets et d'effluents devenues trop anciennes. Pour éviter des travaux ultérieurs, les installations en cours d'étude ou de réalisation doivent être correctement dimensionnées tant sur le plan de la durée de vie que sur le plan des capacités, pour tenir compte des quantités de déchets et d'effluents à venir, mais aussi, dans une certaine mesure. des quantités déjà produites. A cet égard, il est de la responsabilité des exploitants nucléaires de conduire aussi promptement que possible les opérations de reprise de déchets anciens présents sur leurs sites, afin de les reconditionner et de les entreposer sous une forme plus compatible avec les règles de sûreté actuelles. dans des colis de plus grande durabilité et aux capacités de confinement et de rétention meilleures.

Il convient également que les industriels du nucléaire poursuivent les efforts déjà entrepris pour minimiser à l'origine les quantités de déchets et d'effluents produites ainsi que leur nocivité. En complément, quand cela est possible, le traitement des déchets et le recyclage des matériaux doivent être développés pour concourir au même objectif de minimisation de la quantité et de la nocivité des déchets. Sur ce plan, afin d'être en mesure d'évaluer les progrès réalisés, la DSIN s'attache à ce que les exploitants développent des " études déchets " pour chacun de leurs sites et organisent un suivi régulier des paramètres représentatifs de la gestion de leurs déchets.

De telles approches permettront également de s'assurer que l'interdépendance entre les diverses étapes de la gestion des déchets est bien prise en compte et qu'un juste équilibre est recherché par les exploitants entre concentration de la radioactivité sous forme de déchets solides et dilution de la radioactivité résiduelle lors du rejet des effluents liquides et gazeux traités et, le cas échéant, lors de la libération contrôlée de déchets solides de très faible radioactivité.