(Last updated : Sun, 18 May 1997)
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RAPPORT SUR L'ACTIVITÉ
DU CONSEIL GÉNÉRAL DES MINES
EN 1997-98

G. PIKETTY

Maintien des compétences et optimisation économique

des activités de DCN-Cherbourg

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Par lettre en date du 26 novembre 1997, M. le Ministre de la Défense a demandé comment il serait possible de maintenir à l’avenir dans des conditions économiques satisfaisantes les compétences techniques et industrielles de la Direction des Constructions Navales de Cherbourg dans un contexte où les besoins de la Marine Nationale ne permettront plus d’assurer un plan de charge sans discontinuité.

L’étude a été menée conjointement avec le Vice-Amiral d’Escadre Hubert Foillard et avec la collaboration de Fabrice Dambrine, ingénieur en chef des Mines. Elle souligne que la variabilité accusée de la charge d’activité qui apparaîtra à l’horizon d’une dizaine d’années dans les modes de fonctionnement actuels de la DCN, pose un problème radicalement nouveau, générateur de coûts stériles insupportables pour le budget et pour la compétitivité de l’établissement. Or cette compétitivité est indispensable pour augmenter les chances à l’exportation en contrepartie de la réduction des besoins de la Marine et pour se préparer à des rationalisations industrielles très probables à terme au niveau européen.

L’étude préconise à cet effet :

- un mode d’organisation radicalement différent de la DCN, basé sur une logique de répartition par fonctions ou demi-produits de la charge globale d’activité entre les différents établissements, à la différence de logique de répartition par type de navires qui prévaut aujourd’hui ;

- de rompre en conséquence avec le principe d’autonomie des établissements, résultat d’ailleurs de la logique en vigueur et de mettre plus particulièrement en avant un couplage puissant entre DCN-Lorient et DCN-Cherbourg ;

- un recours systématique à la sous-traitance externe pour la réalisation à l’extérieur de sous-ensembles ou de fonctions non stratégiques. La complexité des sous-marins nucléaires conduit à l’intégrer comme un objectif prioritaire dans la conception des nouvelles générations des nouvelles générations de sous-marins, i.e. pratiquement dans la conception prévue d’un sous-marin d’attaque futur (SMAF).

A contrario, il convient que la DCN concentre son intervention directe sur les fonctions ou métiers stratégiques liés à la maîtrise de la construction des sous-marins.

L’impératif de compétitivité et les coûts statutaires élevés de la DCN obligent à pousser à l’extrême cette logique, qui est par ailleurs celle de tous les chantiers civils confrontés par le jeu aléatoire du marché à des variabilités de charges qui peuvent être accusées.

L’étude constate que dans ces conditions, avec une gestion ciblée des effectifs en conséquence, il ne devrait pas y avoir de problèmes de maintien des compétences techniques stricto sensu, même dans le cadre d’une évolution des effectifs sur le moyen-long terme, adaptée à une réduction de l’ordre de 50 % de la charge globale moyenne à cet horizon par rapport à ce qu’elle est aujourd’hui.

Cette conclusion conforte l’analyse faite par la mission selon laquelle il ne serait pas indiqué de développer à Cherbourg une activité d’entretien lourd des sous-marins nucléaires pour soutenir le maintien des compétences techniques et l’activité de l’établissement. Cette activité n’a que des synergies faibles avec l’activité de construction neuve et n’apporte rien au confort des disciplines ou métiers réellement stratégiques pour la construction. A contrario, elle a des synergies très fortes avec l’activité d’entretien courant des sous-marins qui doit se faire obligatoirement aux ports d’attache des sous-marins (Toulon ou Brest), Cherbourg ne pouvant techniquement prétendre à jouer ce rôle.

L’étude constate enfin que l’activité de diversification ne peut que rester marginale compte tenu du coût et des rigidités statutaires et que, s’il convient de ne pas la négliger, elle ne peut être un alibi pour ne pas engager sans tarder les orientations préconisées.

Si l’on dispose en effet d’une petite dizaine d’années avant que n’apparaissent des modifications profondes du contexte lié à la construction de sous-marins nucléaires, obligeant à «faire autrement», les rigidités et pesanteurs existantes concernant notamment l’évolution et la qualification des effectifs, conduisent à mettre en place une dynamique nouvelle sur des fondements nouveaux sans tarder. A défaut, des mesures d’urgence et douloureuses s’imposeraient le moment venu, avec le risque de ne pas pouvoir tirer correctement son épingle du jeu, ni à l’exportation, ni au plan européen.

Ce rapport a été rendu public par le Ministre de la Défense en juillet 1998.