-------------------------------- «LES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION : UNE CHANCE POUR LE DEVELOPPEMENT DU TERRITOIRE» Mesdames, Messieurs, mes chers Amis, Je suis particulièrement heureux de participer à vos 18èmes universités d’été de la communication. D’autant plus que - comme vous le savez - le sujet pour lequel vous m’avez invité : «les nouvelles technologies de l’information : une chance pour le développement du territoire» me tient particulièrement à coeur en tant que Président des Inforoutes de l’Ardèche. Dans mon esprit, tout se tient : nous pourrons mieux aider les entreprises à exporter, et en particulier les plus petites d’entre elles, lorsque nous aurons maîtrisé la formation des citoyens. Ne nous y trompons pas : dans la révolution de l’intelligence à laquelle nous sommes confrontés, il m’apparaît nécessaire d’être présent sur le terrain pour voir les véritables difficultés engendrées par la société de l’information, et dessiner des solutions viables et crédibles. En effet, le secteur des technologies de l’information et de la communication, en forte croissance, est porteur d’opportunités dignes d’intérêt pour le développement des entreprises. Il suscite cependant des réticences compréhensibles dont il faut prendre localement la mesure. On ne doit pas négliger les écueils perçus par les citoyens et les entreprises. Nous ne sommes plus dans un monde où une décision centralisée - l’équipement de toute la France en réseaux à hauts débits, par exemple - peut être appliquée sans autre forme de procès. Il faut au contraire développer progressivement une conscience citoyenne des enjeux, en laissant ensuite la société sécréter ses solutions et ses équipements. Car le développement de la société de l’information ne peut pas laisser indifférent : cette révolution touche tous les citoyens, et il convient de veiller à ne pas laisser sur le bord du chemin certains d’entre eux pour des raisons financières ou géographiques. Les nouvelles technologies, une histoire de campagne L’attractivité du territoire ne se mesure pas à sa distance à Paris : aujourd’hui ce qui compte c’est la distance à la plus proche fibre optique qui permet d’acheminer images, textes et sons à l’autre bout du monde pour atteindre de nouveaux marchés lointains. Or, avec le développement des infrastructures de télécommunications, un village devient aussi proche de la Silicon Valley qu’une multinationale implantée en banlieue parisienne. C’est cette opportunité que doivent saisir les PME françaises aujourd’hui, soutenues par une politique ambitieuse de soutien à l’exportation et au développement international. Deux piliers pour appuyer le développement des nouvelles technologies en zone rurale : l’éducation et les PME. L’éducation Deux pistes d’action retiennent plus particulièrement mon attention : l’éducation, et l’usage des nouvelles technologies par les PME. Pour l’école, il est indispensable d’agir dès l’enseignement primaire, car c’est dès le plus jeune âge que la sensibilisation à ce que sera demain le monde doit se faire. L’ouverture de leurs maîtres aux nouvelles technologies, source de renouveau pédagogique, est certaine, comme le montrent nos réalisations en Ardèche. Une formation précoce aux technologies de l’information permettra aux enfants de prendre conscience de la diversité du monde, et en particulier de la richesse de l’Europe - ce qui nous distingue fortement des Etats-Unis, ne serait-ce que par la diversité linguistique. Les distinctions nationales traduisent en effet des acceptions différentes du licite et de l’interdit et des cultures variées qui sont une richesse qu’il faut découvrir, et parfois préserver. Cette sensibilisation des élèves leur fera toucher du doigt combien des avis divers sur un sujet méritent d’être pris en compte. Le respect de la diversité des points de vue et des cultures devrait permettre - entre autres bénéfices - un développement harmonieux et profitable de la société de l’information. La mise en oeuvre effective des connexions pour les écoles se heurte trop souvent à l’éternelle question du paiement du trafic, surtout dans les petites communes. Je rappelerai simplement que les Etats-Unis ont, quant à eux, opté pour la solution d’une taxe parafiscale sur les lignes téléphoniques. Les PME Il est désormais indispensable que les PME disposent de leur place sur le Web, et qu’elles soient elles-même convaincues que cela augmentera leur activité - à condition bien sûr d’être bilingues dans cette présence. Il me paraît important que, à l’échelon local, on puisse aider les PME à se connecter, par exemple en créant des centres de communication animés par les autorités locales; c’est, vous le savez, ce que nous avons commencé à faire en Ardèche. Cela ne demande pas d’effort financier exceptionnel, mais bien plutôt un déploiement d’énergie pour animer localement ces centres. A cet égard, les nouveaux emplois-jeunes de Mme Martine Aubry devraient être bien utiles. Pour prendre un exemple dans le domaine du commerce extérieur, je crois que les PME peuvent être aidées dans leur démarche internationale par une utilisation beaucoup plus large d’Internet. Ce dernier offre en effet un accès très facile à une information économique qui est indispensable lorsque l’on s’attaque aux marchés étrangers. Je souhaite d’ailleurs, en liaison avec Mme Marylise Lebranchu, Secrétaire d’Etat aux PME, au commerce et à l’artisanat, tester rapidement cette idée, afin de voir comment ces services peuvent être offerts aux PME exportatrices. Vous ne serez pas surpris si je vous dis que nous avons pour projet de demander aux PME d’Ardèche et du Finistère leur opinion... Il y a naturellement d’autres idées qui sont mises en avant dans le but d’aider les PME à venir à ces nouvelles technologies. Certains évoquent par exemple la mise en place de formules de crédit d’impôt. Toutes ces idées contribueront à la réflexion du Gouvernement. L’économie du multimédia et le commerce électronique. Le rôle de l’Etat ne devrait pas se limiter à la formation, voire à la mise à disposition de contenus ou de matériels. En effet, dans un contexte d’ouverture des marchés et de convergence technologique entre l’informatique et les télécommunications, une politique ambitieuse de développement de ces technologies et de soutien aux entreprises françaises exportatrices est plus que jamais nécessaire pour permettre aux sociétés, et notamment les plus petites, de gérer au mieux les mutations du secteur et d’exporter leur savoir-faire. Dans cet esprit, les nouveaux réseaux sont le vecteur de l’économie de l’immatériel. C’est notamment de cette manière que pourra se développer demain l’industrie du multimédia. J’en prendrai pour exemple le Commerce Electronique, qui est largement connu des Français à travers le Minitel : les possibilités d’échanges électroniques changent de dimension avec l’arrivée d’Internet, qui permet des ventes dans le monde entier et offre une séduction de l’acheteur beaucoup plus forte qu’avec le Minitel. Le développement du Commerce Electronique reste cependant handicapé par l’absence de système de paiement comparable au kiosque et par le manque de confiance, peut-être justifié, qu’il suscite pour des transactions commerciales. Pour résumer rapidement mon propos, les entreprises perdent trop souvent de l’argent en passant d’un serveur Minitel à Internet, et les clients potentiels refusent de perdre la sécurité offerte par le Minitel, à laquelle ils sont habitués. Cette situation est spécifiquement française, et les actions des pouvoirs publics français se sont pour l’instant surtout limitées, afin de ne pas déstabiliser une activité naissante, à un soutien au développement d’outils techniques. Il convient de ne pas s’arrêter là, et il apparaît indispensable d’apporter au moins le même niveau de confiance que celui offert lors de la réalisation d’une transaction par Minitel. Le consommateur se trouvant en France doit se voir appliquer le plus simplement possible et sans ambiguïté les règles connues du droit français ou les accords internationaux pertinents pour tout ce qui touche à l’acte d’achat et ses conséquences. Il ne s’agit pas d’opposer le Minitel à Internet, mais d’utiliser les avantages de chacun (et le Minitel a encore certains avantages) pour mettre en place un Internet «beau» (il l’est déjà) mais également en lequel il est raisonnablement possible d’avoir confiance. Conditions d’attractivité des zones rurales. Les zones rurales seront source de croissance et d’emplois grâce à l’usage des nouvelles technologies, sous la condition essentielle que les conditions économiques y soient réunies pour que les entreprises viennent s’y installer et travailler. Les décisions d’aménagement du territoire sont fondamentales, mais il faut aller plus loin et redonner toutes leurs chances aux zones rurales. D’ailleurs, si ces dernières se développent grâce au désenclavement permis par la tarification d’Internet, pour les entreprises et pour les citoyens, cela permettra également de résoudre une partie des questions qui agitent les banlieues des grandes villes comme la sur-assistance, la sécurité ou ... la pollution. Y pense-t-on assez quand on parle d’aménagement du territoire, de la ville ? Je vois pour ma part quelques éléments fondamentaux qui permettront cette «égalité des chances» pour le monde rural. Tout d’abord l’accès aux réseaux de communication : les liaisons téléphoniques fixes, la télévision sont bien en place. En est-il de même pour la téléphonie mobile, et pour tous ? Ensuite, l’existence d’hôpitaux de proximité pratiquant une médecine d’une qualité égale à celle disponible dans les grandes agglomérations est un élément primordial d’attractivité des zones rurales. Pense-t-on assez à la téléformation des praticiens de terrain, comme nous l’expérimentons dans le petit hôpital de ma commune de Saint-Agrève ? Le télé-enseignement est une condition indispensable du développement de l’activité dans ces zones. Je pense en particulier à l’enseignement supérieur court, qui bénéficierait grandement d’un réel télé-enseignement, permettant à tous de recevoir l’enseignement désiré sans surcoût insupportable pour les familles rurales les plus modestes. Un satellite de télécommunications numérique dont les 150 canaux seraient dédiés à cette tâche permettrait de disposer d’un système viable et fonctionnel. Il n’y a pas de solution miracle. Ce ne sont là que quelques idées. On ne peut tout résoudre, et il n’existe certainement pas de solution «miracle» unique. J’insisterais cependant sur le fait que pour mettre tout ceci en place, se reposer sur les seules forces du marché est insuffisant : l’Etat doit se donner comme rôle essentiel d’être initiateur de ce développement de l’usage de ces technologies. Même aux Etats-Unis, temple du libéralisme, on en a conscience, et des programmes nationaux ont été lancés, et leur financement en partie public a été trouvé. Soyons optimistes : ce n’est pas parce que les Français se tournent tard vers les technologies de l’information, qu’il ne s’y mettront pas : regardez l’aventure du téléphone ! Parti parmi les derniers, nous avons su prendre la tête en Europe. Nous avons aujourd’hui, dans notre retard, une occasion historique de nous montrer les plus novateurs, de profiter des derniers développements technologiques et des baisses de prix que nous laisse espérer l’industrie des terminaux, où il faudrait que la France réapparaisse. Le Premier ministre a dessiné lundi dernier devant vous une approche qui doit être globale, pour cette question qui ne peut être résolue par un seul ministère, mais bien par les contributions des différents départements concernés. Après bien des années de quasi-silence des gouvernements successifs sur l’importance de ces nouvelles technologies pour la société de demain, M. Jospin montre la fermeté du nouvel engagement de l’Etat, et je m’en réjouis vivement. Gageons que cet engagement politique au plus haut niveau saura provoquer, dans la même veine que la décentralisation et le renouveau du service public, une prise de conscience des citoyens et des administrations de l’importance des enjeux. Je m’attacherai ainsi, aux côtés de Dominique Strauss-Kahn, à proposer des mesures concrètes visant à encourager l’usage de ces nouvelles technologies sur tout le territoire, afin que l’utilisation des nouveaux moyens d’exportation se développe dans notre pays, tout particulièrement pour les PME installées en zone rurale, et plus généralement toutes celles qui veulent bien envisager d’aborder le marché mondial.
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