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Consultation publique sur l'interconnexion
Les conditions d'interconnexion constituent l'un des paramètres
essentiels dans l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications.
C'est pourquoi la loi du 26 juillet 1996 de réglementation des télécommunications
a prévu, à l'instar des autres pays qui libéralisent leur
marché, et en appliquant les principes définis par l'Union Européenne
dans ce domaine, des dispositions importantes pour clarifier et encadrer les
conditions d'interconnexion entre réseaux, notamment en déterminant
des obligations spécifiques pour les opérateurs exerçant
une influence significative sur le marché, et pour trancher les litiges éventuels
survenant entre opérateurs.
Les dispositions figurant dans la loi (document 1) peuvent être ainsi
résumées :
tous les opérateurs de réseaux ouverts au public
doivent faire droit aux demandes raisonnables d'interconnexion émanant
d'opérateurs de même catégorie ou de fournisseurs de
services téléphoniques au public ;
les opérateurs exerçant une influence significative sur
le marché - au départ, essentiellement France Télécom
- sont tenus de publier une offre technique et tarifaire d'interconnexion,
approuvée par l'Autorité de régulation des télécommunications,
et d'appliquer des tarifs d'interconnexion reflétant les coûts
correspondant à l'usage effectif du réseau ;
l'Autorité de régulation des télécommunications
a compétence pour trancher les litiges de toute nature survenant à
l'occasion de la négociation ou de l'exécution des conventions
d'interconnexion conclues entre deux opérateurs.
Ces dispositions législatives doivent être complétées
par plusieurs mesures d'application.
Il s'agit tout d'abord de deux décrets prévus par la loi de réglementation
des télécommunications.
Le premier, qui sera publié début 1997 après
consultation de l'Autorité de régulation des télécommunications,
doit déterminer les conditions générales et les principes
tarifaires auxquels les accords d'interconnexion doivent satisfaire ; il doit
notamment transposer la future directive sur l'application de l'ONP à
l'interconnexion (document 2), qui a été adoptée par le
Conseil le 18 juin 1996 et est actuellement en discussion avec le Parlement
européen en vue d'une adoption définitive début 1997. Le
projet de décret élaboré par le ministère des télécommunications
est présenté dans le cadre de cette consultation.
Le second doit encadrer dans le temps la procédure de règlement
des litiges menée par l'Autorité de régulation des télécommunications
; conformément au projet de directive, l'intention du ministère
est de prévoir un délai de règlement des litiges fixé
à trois mois, ce délai pouvant être porté à
six mois avec l'accord du demandeur lorsqu'une expertise complémentaire
apparaît nécessaire.
L'autre volet d'application de la nouvelle réglementation concerne l'élaboration
de l'offre catalogue de France Télécom. La DGPT a constitué
un groupe de travail sur l'interconnexion (GTI) qui associe les opérateurs
autorisés et les associations d'opérateurs, afin de débattre
notamment du contenu de cette offre catalogue et de préparer, sans
attendre la création de la nouvelle Autorité de régulation
des télécommunications, les décisions que celle-ci devra
prendre dans ce domaine dès le début de l'année 1997.
France Télécom a présenté dans ce cadre une
proposition d'offre catalogue (document 3). Le projet de décret prévoit
la création d'un Comité de l'Interconnexion présidé
par l'Autorité de régulation des télécommunications
qui poursuivra les travaux ainsi engagés.
La présente consultation, qui se déroulera jusqu'au 30
novembre 1996, a pour objectif de recueillir les commentaires des acteurs intéressés,
sur le projet de décret présenté en annexe, notamment sur
la démarche retenue en matière tarifaire et comptable qui vise à
mettre en oeuvre les conclusions du groupe d'expertise économique présidé
par M. Champsaur, sur le contenu évoqué ci-dessus de l'autre
projet de décret, ainsi que sur l'offre de services d'interconnexion
proposée par France Télécom.
Plus spécifiquement, les commentaires pourraient porter sur les
questions suivantes :
(i) les interfaces d'interconnexion (articles 3 et 8)
Le projet de décret prévoit une démarche souple
permettant de définir des interfaces d'interconnexion en privilégiant
le recours à des normes européennes, lorsqu'elles existent, sans
s'opposer à l'utilisation d'interfaces non normalisées ou à
l'ajout de compléments aux interfaces normalisées. Toutefois, les
brevets correspondants doivent alors être accessibles par les différents
opérateurs concernés. Le projet de décret prévoit
que le Comité sur l'Interconnexion pourra servir de forum d'échange
sur les interfaces d'interconnexion.
Il prévoit par ailleurs des dispositions particulières pour
les opérateurs puissants sur le marché : les interfaces
d'interconnexion figurant à leur catalogue sont approuvées par
l'Autorité de régulation des télécommunications. Les
opérateurs peuvent toutefois utiliser dans le cadre de négociations
commerciales d'autres interfaces, l'Autorité de régulation des télécommunications
ayant la possibilité de les rendre publiques dans certaines situations.
(ii) le champ de l'offre catalogue d'interconnexion (article 10)
L'offre publique devra être suffisamment complète pour répondre
aux besoins des opérateurs existants ou potentiels ; mais elle ne peut prétendre
les couvrir tous intégralement.
C'est pourquoi un opérateur astreint à la publication d'un
catalogue d'interconnexion ne pourra pas refuser de négocier des
conditions d'interconnexion hors catalogue. Le contenu de l'offre catalogue
devra lui-même évoluer en fonction du marché : initialement
incluses, les liaisons louées pourraient en être retirées
lorsque la concurrence jouera effectivement sur le segment de marché
pertinent ; à l'inverse, de nouvelles fonctionnalités pourront y être
rajoutées à la demande de l'Autorité de régulation
des télécommunications.
(iii) le dégroupage de l'offre d'interconnexion (article 9)
Les conditions techniques et tarifaires des offres d'interconnexion doivent être
suffisamment détaillées pour faire apparaître les divers éléments
propres à répondre aux demandes.
L'offre d'interconnexion d'un opérateur puissant doit permettre aux
opérateurs tiers d'avoir accès à l'ensemble des segments de
marché dans des conditions équivalentes à celles dont bénéficie
l'opérateur puissant pour ses propres services. En particulier, l'accès
optimal au marché local suppose dans certains cas l'accès
individuel à chaque commutateur d'abonnés : la possibilité
de cet accès doit donc être prévue dès à présent.
Les opérateurs puissants sur le marché seront notamment tenus
d'offrir l'accès à leurs commutateurs d'abonnés et à
leurs commutateurs de hiérarchie supérieure ou, à défaut
d'accès aux commutateurs de hiérarchie supérieure, à
une offre technique équivalente correspondant aux points de raccordement
(PRT) de la proposition de France Télécom.
Le projet de décret prévoit, dans le cas où l'un de ces
opérateurs ne serait pas en mesure pour des raisons techniques de
permettre l'accès à tous ses commutateurs d'abonnés,
l'existence d'une offre transitoire simulant sur le plan tarifaire cet accès
physique pour les commutateurs d'abonnés qui ne pourraient être
ouverts.
France Télécom serait donc tenue d'offrir, en complément
de son offre PRT, l'accès physique à tous ses CAA techniquement
capables de supporter les interfaces d'interconnexion inscrites à son
catalogue ainsi qu'un tarif simulant cet accès pour les autres CAA.
(iv) aspects comptables : l'assiette des coûts pertinents et la séparation
comptable (articles 6, 11 et 14).
Conformément aux recommandations du rapport Champsaur (document 4),
le projet de décret énonce le principe général selon
lequel "les coûts pris en compte doivent être pertinents,
c'est-à-dire liés par une forme de causalité, directe ou
indirecte, au service rendu".
La détermination des coûts pertinents repose sur une
classification des coûts de l'opérateur en quatre grands types de
coûts : les coûts de réseau général, les coûts
spécifiques aux services d'interconnexion, les coûts spécifiques
aux services de l'opérateur autres que l'interconnexion, et les coûts
communs (document 5).
Une première version d'un document définissant des règles
précises de pertinence des coûts a été établie
par la DGPT dans le cadre d'un processus de concertation avec les opérateurs
du secteur (document 5). Il définit l'assiette sur la base de laquelle
sont évalués les coûts d'interconnexion de référence.
Le processus de concertation devra être poursuivi afin de compléter
ces règles de pertinence(1).
Par ailleurs, la classification des coûts en quatre grands types de coûts
décrite précédemment conduit également à préciser
des règles de séparation comptable, dont l'objectif est d'assurer
que les opérateurs "puissants" offrent aux autres opérateurs
l'accès aux ressources de leur réseau dans des conditions financières
équivalentes à celles retenues, le cas échéant, pour
leurs propres services ou ceux de leurs filiales ou partenaires.
(v) méthode d'établissement des tarifs d'interconnexion
(articles 11 à 13).
Le projet de décret pose le principe selon lequel les tarifs
d'interconnexion doivent tendre à accroître l'efficacité économique
à long terme, conformément aux recommandations du rapport
Champsaur. Il prévoit une mise en oeuvre de ce principe en deux temps :
- il fixe l'objectif pour l'Autorité de régulation des télécommunications
de définir en concertation avec le secteur une méthode de fixation
des tarifs d'interconnexion respectant pleinement le principe d'efficacité
à long terme ;
- dans l'attente de la définition de cette méthode, les tarifs
d'interconnexion seraient fixés selon une "méthode
initiale", qui reposerait sur des coûts moyens comptables prévisionnels
pertinents. Cette méthode s'inspire de deux options suggérées
par le rapport d'étude de KPMG intitulé "Propositions
pour le calcul des coûts des services d'interconnexion de France Télécom"
(document 6).
Dans le cadre de cette méthode initiale, le projet de décret
prévoit la possibilité pour l'Autorité de régulation
des télécommunications de définir des conditions de décroissance
des tarifs d'interconnexion au regard des références
internationales de coûts et de tarifs d'interconnexion. A titre
d'illustration, le document 7 présente les tarifs d'interconnexion proposés
par France Télécom au mois de juillet 1996, non fondés sur
des coûts moyens pertinents, et donne à titre indicatif des tarifs,
à services comparables, pratiqués dans trois pays, le Royaume-Uni,
la Suède et l'Australie, notamment sur la base d'une étude réalisée
en 1996 par Devotech et Deloitte & Touche.
La décision du basculement vers la méthode "objectif"
est laissée à l'Autorité de régulation des télécommunications
après consultation publique.
Le ministère souhaite recueillir l'avis des acteurs du secteur en ce
qui concerne la démarche ainsi décrite et les étapes
possibles.
(1) Par exemple, un périmètre plus extensif des coûts de
réseau général devra être défini, comprenant
l'accès à l'international et les liaisons louées.
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