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LES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION

DISCUSSION AU SÉNAT DU PROJET DE LOI RELATIF
AUX EXPÉRIMENTATIONS
DANS LE DOMAINE
DES TECHNOLOGIES ET SERVICES DE L'INFORMATION

SEANCE DU 20 FEVRIER 1996
EXTRAITS


EXTRAITS DE LA RÉPONSE GÉNÉRALE DU MINISTRE AUX ORATEURS

François FILLON, Ministre délégué à la Poste, aux Télécommunications et à l'Espace

"(...) Ce débat, dont tout le monde a souligné la grande qualité, permet de nourrir une réflexion que le Gouvernement souhaite voir se généraliser dans l'ensemble de notre pays afin que nous soyons capables, en nous fondant, en particulier, sur les expérimentations que nous allons lancer, de relever le défi de la société de l'information.

Je tiens tout particulièrement à remercier MM. Rausch et Laffitte qui, par leurs rapports, ont éclairé chacun la préparation de ce débat et y ont apporté une expérience très concrète. (...)

Je tiens à répondre à plusieurs questions précises qui m'ont été posées par les orateurs de la majorité, en particulier par MM. Cluzel et Joyandet. (...)

M. Cluzel a parlé de projet "colbertiste" tout en précisant que ce terme n'avait pas, dans sa bouche, un caractère péjoratif. J'ai envie de vous dire, monsieur le sénateur, que c'est tout le contraire que nous essayons de faire pour le moment. Nous avons renoncé au grand plan câble-fibre optique, qui lui aurait été un projet "colbertiste", que certains nous proposaient pour nous engager dans une démarche expérimentale dont France Télécom assume d'ailleurs une grande part de responsabilité puisqu'elle conduira - aucun orateur ne l'a souligné au cours du débat - un tiers des expérimentations.

Lorsque ces expérimentations auront été menées, France Télécom pourra alors déterminer quelle politique d'investissement sera suivie. C'est dans la perspective de ces investissements qui seront considérables qu'elle a conclu deux alliances stratégiques avec Deutsche Telekom et l'américain Sprint.

Plusieurs sénateurs ont évoqué la question centrale de l'école. (...)

J'examine actuellement comment France Télécom pourrait favoriser l'accès des écoles et pas seulement des collèges et des lycées au réseau Numéris. Je réponds en particulier ici à la question posée par M. Rausch.

Puis, évoquant le numérique terrestre, vous aves traduit les inquiétudes des uns et des autres quant aux risques de dévelopement d'un support supplémentaire venant concurrencer ceux qui existent, en particulier le câble.

M. Philippe Douste-Blazy et moi-même avons confié une mission à M. Philippe Lévrier sur l'opportunité et les conditions du développement du numérique terrestre. Par ailleurs, nous lançons un certain nombre d'expérimentations en ce domaine. (...)

Enfin, vous avez raison de souligner que le développement des satellites de communication pose problème, comme Internet d'ailleurs, du fait du caractère extraterritorial de ce mode de diffusion. M. Philippe Douste-Blazy a très récemment proposé que la France s'inspire, pour leur régulation, du Broadcasting Act britannique. Une réflexion est en cours, mais il est trop tôt pour légiférer.

Je puis, en revanche, vous préciser que le Gouvernement est d'accord pour que le problème des satellites de communication soit traité, à l'occasion de la loi sur les télécommunications, c'est-à-dire avant l'été 1996. (...)

Concernant l'évolution du cadre législatif de l'audiovisuel, que de nombreux intervenants ont évoquée, j'ai bien noté la proposition de M. Cluzel, tendant à créer un groupe de travail associant les parlementaires. J'en ferai part à M. Douste-Blazy. Comme il le souhaite, le CSA sera consulté sur un éventuel projet, comme il l'a d'ailleurs été sur le projet de loi qui vous est soumis.

Quant aux orateurs du groupe socialiste, j'avoue ne pas les comprendre ou, plutôt, je les comprends trop bien. Tout d'abord, ils refusent le principe même de l'expérimentation. Or, ils ont tort, car c'est le meilleur moyen d'éviter de commettre les mêmes erreurs qu'avec le plan câble. (...)

Ensuite, ils font semblant de croire que l'ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications n'est pas inéluctable. Ce faisant, ils commettent une erreur et trahissent leurs propres engagements.

Ils commettent une erreur, car ce sont les technologies qui imposent, en réalité, cette ouverture. Elles l'imposent déjà dans toute une série de domaines. Vous savez qu'il est possible de réaliser aujourd'hui de la téléphonie vocale en France sans passer par le réseau de France Télécom.

Mais, surtout, ils trahissent leurs propres engagements. M. Saunier est remonté à 1993 pour évoquer le début de la dérégulation dans le secteur des télécommunications. Vous avez, monsieur le sénateur, une mémoire très sélective car, en réalité, le commencement de la dérégulation date du livre vert sur les télécommunications de 1987. Je vous invite, à cet égard, à relire les débats qui se sont tenus au sein du Conseil des ministres, en 1989, lorsque a été décidé la première phase de libéralisation. Vous y trouverez des interventions très brillantes et fondées de M. Quilès défendant, au nom de la France, l'objectif de l'ouverture à la concurrence. (...)

M. Ralite nous a heureusement permis de nous échapper quelques instants dans un autre monde, qui, par bien des aspects, est sympathique mais qui semble être contraire à celui qui a été choisi à plusieurs reprises par nos concitoyens. Je me rappelais encore à l'instant les engagements pris par le peuple français s'agissant de l'ouverture des relations commerciales au sein de l'Union européenne.

Vous vous êtes exprimé avec beaucoup de talent mais non sans quelque approximation. Je tiens à en relever deux.

La première concerne le téléphone sur le câble. Je note avec intérêt que vous n'avez cité que deux des trois expériences. En effet, la troisième, celle de Metz, a été réalisée par France Télécom, ce qui vous aurait gêné, dans votre démonstration.

Mais surtout s'agissant du câble, la question qui se pose est de savoir si l'on veut ou non donner un jour au câble, qui est le véritable média interactif, une chance de décoller économiquement. Si on le veut réellement, le câble doit pouvoir offrir tous les services de télécommunications, y compris le téléphone. Vous conviendrez avec moi que ce ne sont pas trois expérimentations qui remettront en cause la rentabilité de France Télécom et encore moins la notion de service public.

Je tiens d'ailleurs à vous indiquer que les câblo-opérateurs que vous citiez tout à l'heure, qui installent le téléphone sur le câble, s'acquitteront des obligations de service public et financeront les déficits d'accès de France Télécom, comme le font actuellelment les opérateurs de téléphone mobile, suivant les mêmes règles.

Enfin, et ce sera ma conclusion, je puis vous assurer, monsieur Ralite, que les textes relatifs aux télécommunications qui sont en cours d'élaboration préservent le service public et la péréquation tarifaire géographique".

QUESTION PRÉALABLE Jacques VALADE, président de séance

"Je suis saisi, par Mme Pourtaud, MM. Delfau, Saunier et Sérusclat, et les membres du groupe socialiste et apparentés, d'une motion n· 1, tendant à opposer la question préalable.

Cette notion est ainsi rédigée :

"En application de l'article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu'il n'y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l'Assemblée Nationale, relatif aux expérimentations dans le domaine des technologies et services de l'information (n· 193, 1995-1996)."


EXTRAITS DE LA RÉPONSE DU MINISTRE À LA QUESTION PRÉALABLE DÉPOSÉE PAR LE GROUPE SOCIALISTE

François FILLON

"(...) Cette motion tendant à opposer la question préalable se fonde sur trois arguments dont je veux croire qu'ils relèvent plus, de votre part, d'une certaine mauvaise foi que d'un aveuglement sur l'importance des enjeux.

Vous niez l'urgence qu'il y a à entreprendre dès aujourd'hui une adaptation modeste de notre législation. Mais l'un des signataires de cette motion tendant à opposer la question préalable, M. Franck Sérusclat, ne soulignait-il pas, au sein de son excellent rapport parlementaire sur "les nouvelles techniques d'information et de communication", que tous les grands pays industrialisés sont engagés dans une course de vitesse vers la société de l'information ? "Les Américains en font un programme politique aussi essentiel comme au temps du New Deal", écrivait-il. Ils poursuivait : "Les Japonais s'activent pour être les premiers sur le marché mondial".

Tel était le constat très juste établi par M. Sérusclat, dès mars 1995. Ce constat est encore plus vrai aujourd'hui. (...)

Il s'agit, (...) non pas de "légiférer dans l'urgence", comme les auteurs de cette motion tendant à opposer la question préalable semblent le croire, mais de répondre à l'urgence de manière lucide et raisonnée. (...)

Puis-je me permettre, en outre, de préciser que nombre d'élus socialistes ont bien compris cette urgence et sont conscients que le futur n'a pas, tout comme les technologies de l'information, de couleur politique ? Votre réaction à ce projet de loi ne me fera donc pas oublier que, en pratique, bien des projets d'expérimentations de qualité émanent de collectivités locales qui ne se réclament pas de la majorité. (...)

Vous accusez par ailleurs le Gouvernement de vouloir réduire le Parlement à une "simple chambre d'enregistrement, chargée d'avaliser les expérimentations pasées et à venir". C'est faire bien peu de cas du nombre de projets d'expérimentations dans lesquels les parlementaires se sont investis sur le terrain, de l'étroite association de ceux-ci à une démarche que le Gouvernement a toujours voulue concertée. (...)

C'est d'ailleurs pour que le Gouvernement puisse rester à votre écoute, mesdames, messieurs les sénateurs, que j'ai souhaité que les parlementaires participent pleinement à l'observatoire d'évaluation des expérimentations qui sera bientôt mis en place et qui associera, outre les administrations concernées, des représeentants des collectivités locales et des entreprises. (...)

En réalité, et pour résumer mon sentiment, cette question préalable masque mal deux attitudes qui ne sont certainement pas les plus adéquates pour aborder cette révolution technologique.

La première, c'est celle qui consiste à vouloir maintenir à tout prix un statu quo dans le secteur des télécommunications, afin, notamment, pensez-vous, de conserver en l'état le monopole actuel. Cette tentation conservatrice est vaine, car les technologies qui émergent bouleverseront, que vous le vouliez ou non, le paysage des télécommunications. Il convient donc de se préparer à ces mutations pour ne pas les subir. C'est ce à quoi vous vous refusez.

En fait - et, là, nous touchons à votre deuxième attitude - vous n'avez pas confiance dans la capacité française à relever les défis de la société de l'information. Cette révolution nous contraint à une mutation intellectuelle, structurelle et technologique. Cette mutation vous fait peur. Vous adoptez une position timide et conservatrice, alors que nous avons tout lieu d'être entreprenants, offensifs et créatifs. (...)"


DISCUSSION DES ARTICLES

64 amendements ont été examinés, 10 amendements ont été adoptés avec l'accord du Gouvernement. Seul l'amendement du sénateur Daniel Millaud (Polynésie française) étendant le projet de loi aux territoires d'Outre-mer a été adopté contre l'avis du Gouvernement qui estimait nécessaire une consultation préalable des institutions politiques locales.

L'Assemblée Nationale devrait examiner ce projet de loi en seconde lecture dans le courant du mois de mars.



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