JORF n°0024 du 29 janvier 2008    J.O. disponibles

Avis n° 2007-0722 du 4 septembre 2007 sur le projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dont celles relatives à la mise en œuvre du règlement n° 717/2007 du 27 juin 2007

NOR: ARTJ0700106V

Voir ce texte sur Légifrance

L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes,

Vu la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») ;

Vu le règlement CE n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil en date du 27 juin 2007 concernant l'itinérance sur les réseaux publics de téléphonie mobile à l'intérieur de la Communauté et modifiant la directive 2002/21/CE ;

Vu le code des postes et des communications électroniques, notamment ses articles L. 32-4, L. 36-7 et L. 36-11 ;

Vu la saisine pour avis de la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi et du secrétaire d'Etat chargé des entreprises et du commerce extérieur en date du 23 août 2007 ;

Après en avoir délibéré le 4 septembre 2007,

I. ― Contexte juridique

Le règlement n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 concernant l'itinérance sur les réseaux publics de téléphonie mobile à l'intérieur de la Communauté et modifiant la directive 2002/21/CE impose des prix plafonds pour les appels passés par les utilisateurs des réseaux publics de téléphonie mobile à l'intérieur de la Communauté européenne.

Ce règlement a, en application des dispositions de l'article 249 du traité instituant la Communauté européenne, une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre.

Néanmoins certaines de ses dispositions nécessitent l'adoption de mesures nationales.

Il en est ainsi du régime des sanctions applicables aux violations du présent règlement, qui doit être déterminé par les Etats membres selon les dispositions de l'article 9. Les Etats membres doivent notamment prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer leur mise en œuvre.

Par ailleurs, au regard du considérant 35 dudit règlement, les Etats membres peuvent prendre des mesures supplémentaires compatibles avec la législation communautaire afin d'assurer l'application des principes définis par le règlement à l'itinérance intranationale. En effet, selon les dispositions du considérant 35 : « L'itinérance à l'intérieur d'un pays dans les régions ultrapériphériques de la Communauté dans lesquelles les licences de téléphonie mobile sont distinctes de celles délivrées pour le reste du territoire national pourrait bénéficier de réductions tarifaires équivalentes à celles pratiquées sur le marché de l'itinérance communautaire. La mise en œuvre du présent règlement ne devrait pas donner lieu à un traitement tarifaire moins favorable pour les abonnés utilisant des services d'itinérance internes aux pays par rapport à des abonnés utilisant des services d'itinérance communautaire. »

Afin de confier à l'Autorité le pouvoir de sanctionner les manquements aux dispositions du règlement n° 717/2007 susvisé et de contrôler son application mais aussi d'étendre l'application des plafonds tarifaires issus du règlement à l'itinérance intranationale, le Gouvernement a préparé un projet de loi.

En application des dispositions de l'article L. 36-5 du code des postes et des communications électroniques, la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi a saisi pour avis, par une lettre du 23 août 2007, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes sur ce projet de loi.

II. ― Analyse de l'Autorité

2.1. Sur l'article n du projet de loi

Sur le contrôle des obligations résultant du règlement n° 717/2007

Le règlement susvisé, qui est directement applicable dans l'ensemble de la Communauté, prévoit notamment dans son article 7 que « les autorités réglementaires nationales contrôlent et supervisent la conformité au présent règlement sur leur territoire » et que « les autorités réglementaires nationales ont le pouvoir d'exiger des entreprises soumises aux obligations du présent règlement qu'elles fournissent toutes les informations nécessaires à la mise en œuvre et l'application de celui-ci. Ces entreprises fournissent rapidement lesdites informations, sur demande, en respectant les délais et le degré de précision exigés par l'autorité réglementaire nationale ».

L'Autorité, de par les dispositions du 3° de son article L. 36-7 du code des postes et des communications électroniques, « contrôle le respect par les opérateurs des obligations résultant des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables en vertu du présent code et des autorisations dont ils bénéficient et sanctionne les manquements constatés dans les conditions prévues aux articles L. 36-10 et L. 36-11 ».

Afin d'assurer pleinement le contrôle du respect des obligations imposées par le règlement n° 717/2007, le projet de loi vient modifier au travers de l'article n les dispositions de l'article L. 36-7 (3°) et prévoit expressément que l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes contrôle le respect par les opérateurs des obligations résultant des dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables en vertu du présent code, des autorisations dont ils bénéficient et du règlement n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 et sanctionne les manquements constatés dans les conditions prévues aux articles L. 36-10 et L. 36-11.

Sur le pouvoir de sanction

Si le règlement est directement applicable dans l'ensemble de la Communauté, il n'en demeure pas moins qu'aux termes de son article 9 « les Etats membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations du présent règlement et prennent toutes les mesures nécessaires pour assurer leur mise en œuvre. Les sanctions prévues doivent être efficaces, proportionnées et dissuasives. Les Etats membres notifient ces dispositions à la Commission au plus tard le 30 mars 2008 et notifient toute modification ultérieure les concernant dans les meilleurs délais ».

Les dispositions de l'article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques confèrent à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes un pouvoir de sanction qui lui permet de sanctionner « les manquements qu'elle constate, de la part des exploitants de réseaux ou des fournisseurs de services de communications électroniques, aux dispositions législatives et réglementaires afférentes à leur activité ou aux décisions prises pour en assurer la mise en œuvre ».

Aux termes mêmes du 1° de cet article, ce n'est que « en cas d'infraction d'un exploitant de réseau ou d'un fournisseur de services aux dispositions du présent code et des textes et décisions pris pour son application, ainsi qu'aux prescriptions d'une décision d'attribution ou d'assignation de fréquence prise par l'Autorité en application de l'article 26 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication » que « l'exploitant ou le fournisseur est mis en demeure par le directeur des services de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes de s'y conformer dans un délai déterminé ».

Afin d'appliquer les dispositions de l'article 9 du règlement, l'article n du projet de loi vient insérer à la suite de : « liberté de communication » l'expression : « ou du règlement n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 ».

L'Autorité relève qu'en proposant d'amender les dispositions de l'article L. 36-11 (1°) afin d'étendre le champ d'application quant aux infractions susceptibles de donner lieu à une mise en demeure de l'exploitant de réseau ou du fournisseur de services par le directeur des services de l'Autorité, l'articlen du projet de loi confère ainsi à l'Autorité la possibilité de sanctionner les manquements aux dispositions du règlement n° 717/2007 conformément à ce que requiert l'article 9 de ce dernier.

2.2. Sur l'article n + 1 du projet de loi

Sur l'insertion de la définition de la prestation d'itinérance

au sein de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques

Le I de l'article n + 1 du projet de loi propose d'insérer la définition de la prestation d'itinérance au sein de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, en ajoutant après le 17° dudit article un 17° bis ainsi rédigé :

« On entend par prestation d'itinérance celle qui est fournie par un opérateur de radiocommunications mobiles à un autre opérateur de radiocommunications mobiles en vue de permettre l'accueil sur le réseau du premier des clients du second. »

Au regard de la notion d'itinérance locale et de l'interaction entre cette dernière et la prestation d'itinérance, mais aussi de la portée de la définition proposée au regard de la notion d'accès, l'Autorité n'est pas favorable à l'insertion d'une définition aussi large dans le code des postes et des communications électroniques.

L'Autorité relève qu'il serait plus approprié de regrouper au sein du nouvel article L. 38-4 l'ensemble des dispositions relatives à l'itinérance intranationale.

L'Autorité préconise donc la suppression du I de l'article n + 1 du projet de loi.

Sur l'insertion d'une section 3 intitulée « Dispositions particulières aux prestations d'itinérance » au sein du chapitre IV du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code des postes et des communications électroniques

Le II de l'article n + 1 du projet de loi prévoit l'insertion d'une nouvelle section au sein du chapitre IV du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code des postes et des communications électroniques et la création d'un article L. 38-4 relatif aux tarifs de la prestation d'itinérance.

Sur le principe d'imposer une contrainte tarifaire sur les prestations de détails et de gros d'itinérance intranationale équivalente à celle définie par les articles 3 et 4 du règlement n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil, l'Autorité note que ces prestations sont déjà soumises à ces mêmes plafonds lorsqu'elles sont vendues à des opérateurs mobiles européens non français. Ainsi, par exemple, la prestation d'itinérance vendue par un opérateur réunionnais à un opérateur allemand pour accueillir son client sur les réseaux réunionnais entre dans le champ du règlement et doit donc respecter ces plafonds tarifaires. Or cette prestation est rigoureusement la même que celle vendue par le même opérateur réunionnais à un opérateur métropolitain. Cette dernière prestation n'entre pas dans le champ d'application du règlement, mais dans celui de l'article n + 1 du projet de loi. L'analyse d'impact menée par la Commission européenne puis les travaux du Parlement européen et du Conseil ont permis de vérifier que ces plafonds étaient compatibles avec les structures de coût d'un opérateur mobile, y compris celles d'un opérateur opérant sur des territoires insulaires comme Malte, Chypre ou en outre-mer en France.

L'Autorité relève que le titre de la section « Dispositions particulières aux prestations d'itinérance » peut, au regard de son caractère très large, donner lieu à des difficultés d'interprétation et souhaite voir préciser sa portée en ajoutant l'expression « intranationale ».

L'Autorité note par ailleurs que l'insertion de dispositions relatives aux prestations d'itinérance intranationale trouverait mieux sa place dans le chapitre II du titre Ier du livre II de la deuxième partie du code des postes et des communications électroniques soit au sein d'un nouvel article numéroté L. 33-6 situé en fin de section I relative aux réseaux et services, soit au sein d'un nouvel article L. 34-10 inséré dans une nouvelle section 6 intitulée « Dispositions particulières aux prestations d'itinérance intranationale », plutôt qu'au sein d'une nouvelle section 3 du chapitre IV du même titre.

L'Autorité relève que la rédaction de l'article L. 38-4 telle que proposée par le projet de loi est imprécise quant à son champ d'application et quant à la nature de l'obligation qui est faite aux opérateurs. En effet, leur obligation ne devrait pas être de respecter les articles 3 et 4 du règlement n° 717/2007 mais plutôt de respecter les dispositions tarifaires définies par lesdits articles.

L'Autorité propose donc de modifier la rédaction du nouvel article introduit par le II de l'article n + 1 afin de s'assurer que les opérateurs respectent les dispositions tarifaires définies par le règlement et que les dispositions de cet article s'appliquent exclusivement aux prestations vocales.

La rédaction de ce nouvel article pourrait être :

« Un opérateur de radiocommunications mobiles autorisé en métropole, dans un département d'outre-mer, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy accueillant sur son réseau le client d'un opérateur de radiocommunications mobiles autorisé sur un autre de ces territoires respecte les dispositions tarifaires de l'article 3 du règlement n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 au titre des tarifs des prestations vocales ainsi fournies.

Un opérateur de radiocommunications mobiles autorisé en métropole, dans un département d'outre-mer, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Martin ou à Saint-Barthélemy dont le client est accueilli sur le réseau d'un opérateur de radiocommunications mobiles autorisé sur un autre de ces territoires respecte les dispositions tarifaires de l'article 4 du règlement n° 717/2007 du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2007 au titre des tarifs des appels téléphoniques reçus de ou émis vers la métropole, un département d'outre-mer, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin, Saint-Barthélemy ou tout Etat membre européen par son client sur ce réseau. »

Sur la durée d'application des dispositions de l'article n + 1

L'Autorité attire l'attention du Gouvernement sur le fait que les obligations tarifaires imposées par le règlement n° 717/2007 du Parlement européen et le Conseil expirent le 30 juin 2010 et estime, par suite, qu'il conviendrait que le projet de loi prévoie expressément que les obligations imposées par l'article inséré par l'article n + 1 du projet de loi prennent fin à la même date.

Remarques finales

Sous réserve des remarques formulées ci-dessus, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes émet un avis favorable sur ce projet de loi.

Le présent avis sera transmis à la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi et au secrétaire d'Etat chargé des entreprises et du commerce extérieur et publié au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 4 septembre 2007.

Le président,

P. Champsaur