J.O. 172 du 27 juillet 2006       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Avis sur le projet d'arrêté fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie des nappes aquifères ou des roches souterraines telles que visées au 6° de l'article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000


NOR : INDI0607872V



La CRE a été saisie, le 7 juin 2006, par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et par le ministre délégué à l'industrie, d'un projet d'arrêté fixant les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie des nappes aquifères ou des roches souterraines telles que visées au 6° de l'article 2 du décret no 2000-1196 du 6 décembre 2000.


I. - DESCRIPTION DU TARIF PROPOSÉ


Le projet d'arrêté fixe les conditions d'achat de l'électricité produite par les installations utilisant l'énergie géothermique.

Le tarif proposé, dans le cadre d'un contrat de 15 ans, est constitué de deux éléments :

- un tarif de référence égal à 120 EUR/MWh en métropole et à 100 EUR/MWh dans les départements d'outre-mer, dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte ;

- une prime à l'efficacité énergétique nulle pour un rendement inférieur à 30 % et égale à 30 EUR/MWh pour un rendement supérieur à 50 % (les valeurs intermédiaires sont obtenues par interpolation linéaire).


II. - COMPARAISON DU TARIF PROPOSÉ

AVEC LES COÛTS ÉVITÉS DES FILIÈRES CONVENTIONNELLES


Les projets d'arrêtés fixant les conditions d'achat sont pris en application de l'article 10 de la loi no 2000-108 du 10 février 2000, modifié par la loi du 13 juillet 2005, et du décret no 2001-410 du 10 mai 2001. L'article 10 de la loi prévoit que, pour chacune des filières, le tarif d'achat est égal aux coûts d'investissement et d'exploitation évités aux acheteurs, auxquels peut s'ajouter une prime prenant en compte la contribution de la production livrée ou des filières à la réalisation des objectifs définis au deuxième alinéa de l'article 1er de la même loi, soit :

- l'indépendance et la sécurité d'approvisionnement ;

- la qualité de l'air et la lutte contre l'effet de serre ;

- la gestion optimale et le développement des ressources nationales ;

- la maîtrise de la demande d'énergie ;

- la compétitivité de l'activité économique ;

- la maîtrise des choix technologiques d'avenir ;

- l'utilisation rationnelle de l'énergie.

Comme il n'existe pas d'approche rationnelle permettant d'évaluer la plupart des contributions à ces objectifs, la loi laisse au pouvoir réglementaire une marge d'appréciation très importante, qui rend difficile l'analyse du tarif proposé.

De surcroît, la loi dispose que le niveau de la prime ne peut conduire à ce que la rémunération des capitaux immobilisés dans les installations bénéficiant de ces conditions d'achat excède une rémunération normale des capitaux, compte tenu des risques inhérents à ces activités et de la garantie dont bénéficient ces installations d'écouler l'intégralité de leur production à un tarif déterminé.

La production d'électricité des installations utilisant l'énergie géothermique peut être considérée comme garantie, du fait des caractéristiques techniques de cette technologie. En outre, bien que le tarif ne tienne plus compte du critère de puissance garantie, dans la mesure où la production du gisement varie peu et où le producteur est incité à exploiter son installation au maximum des capacités disponibles, il est possible de considérer que le coût évité de production à retenir est le coût complet de production.

Le tableau suivant donne, pour la métropole continentale, les résultats de la comparaison entre le tarif d'achat proposé, et la somme des coûts évités (coûts fixes + coûts variables) et des externalités, en métropole et hors métropole :


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Vous pouvez consulter le tableau en cliquant,
en bas du document, dans l'encart "version PDF"
JO no 172 du 27/07/2006 texte numéro 119
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Le tarif d'achat proposé est très supérieur aux coûts et externalités évités en métropole. Il est nettement inférieur aux coûts et externalités évités dans les DOM, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte. Dans ces zones, le tarif proposé peut même être inférieur aux coûts de production, ce qui signifie que tout projet réalisé réduirait les charges de service public de la production d'électricité.


III. - COMPARAISON DU TARIF PROPOSÉ

AVEC LES COÛTS DE PRODUCTION DE LA FILIÈRE


Il est impossible d'identifier des coûts de production normatifs de la filière géothermie, du fait du nombre très limité de sites susceptibles d'être équipés. La seule référence aujourd'hui disponible est celle du site de la Bouillante, en Guadeloupe, qui exploite l'énergie de nappes d'eau souterraines. Le tarif proposé est cohérent avec les coûts constatés de ce projet.

La technologie consistant à exploiter l'énergie des roches souterraines, quant à elle, ne semble pas encore mûre. Ses coûts sont, et resteront à moyen terme, supérieurs au tarif proposé.


IV. - AVIS DE LA CRE


Le tarif proposé est supérieur aux coûts et externalités évités en métropole. Dans les DOM, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, il leur est nettement inférieur.

Le nombre de projets susceptibles de bénéficier de ce tarif est limité. Le principal site identifié à ce jour est celui de la Bouillante, en Guadeloupe. Compte tenu des coûts de production locaux, l'application du tarif proposé à ce projet se traduira par des économies sur les charges du service public de l'électricité. Ce projet pourrait, cependant, dépasser le plafond de 12 MW ouvrant droit au bénéfice de l'obligation d'achat lors de la mise en service de la troisième tranche.

Un autre projet à Soultz-sous-Forêt, dans le Bas-Rhin, présente principalement un intérêt expérimental. Compte tenu des coûts de fonctionnement envisagés, il est peu probable que la production d'électricité à partir de ce puits présente un intérêt économique pour la collectivité.

En conséquence, la CRE émet un avis favorable sur le projet de tarif applicable dans les départements d'outre-mer, dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et à Mayotte, et un avis défavorable sur le projet de tarif applicable en métropole.

Fait à Paris, le 29 juin 2006.



Pour la Commission de régulation de l'énergie :

Le président,

P. de Ladoucette