J.O. 132 du 9 juin 2006       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 2006-673 du 8 juin 2006 portant refonte du code de l'organisation judiciaire et modifiant le code de commerce, le code rural et le code de procédure pénale (partie Législative)


NOR : JUSX0600063P



Monsieur le Président,

Le code de l'organisation judiciaire a été institué par deux décrets du 16 mars 1978. A cette occasion, de très nombreuses dispositions législatives et réglementaires contenues dans des textes épars ont été codifiées.

Dans son rapport pour l'année 1984-1985, le Conseil d'Etat a émis principalement trois critiques à l'encontre de ce code. D'une part, le code de l'organisation judiciaire avait été adopté par décret en Conseil d'Etat alors même qu'il contenait une partie Législative et que des lois postérieures avaient modifié celle-ci. D'autre part, la répartition de ses dispositions entre les parties Législative et Réglementaire ne respectait pas la Constitution. Enfin, d'autres codes regroupaient de nombreuses dispositions d'organisation concernant des juridictions de l'ordre judiciaire.

L'année suivante, le Conseil d'Etat a renouvelé les mêmes observations.

A l'occasion d'une première réunion interministérielle en date du 18 novembre 1986, il a été donné acte au ministère de la justice de sa proposition de constituer un groupe de codification pour mettre en oeuvre les recommandations émises par le Conseil d'Etat.

La loi no 91-1258 du 17 décembre 1991 a répondu à la première remarque du Conseil d'Etat en donnant force de loi à la partie Législative du code de l'organisation judiciaire.

Cependant, les difficultés relatives à la définition du périmètre du code ont retardé les travaux de refonte. Deux conceptions se sont opposées : l'une, globale, qui regroupait l'ensemble des dispositions d'organisation judiciaire dans un seul code ; l'autre, restrictive, qui excluait l'organisation des juridictions spécialisées.

A la réunion interministérielle du 17 avril 1996, le cabinet du Premier ministre a décidé que ce code serait « suiveur » pour les dispositions concernant les juridictions spécialisées.

Lors de la réunion interministérielle du 12 juin 2003, le cabinet du Premier ministre confirmait cet arbitrage en précisant que les dispositions d'organisation judiciaire relatives aux conseils des prud'hommes, aux juridictions de sécurité sociale, aux tribunaux de commerce et aux tribunaux paritaires des baux ruraux devaient rester dans les codes regroupant les dispositions procédurales ou de fond ou les rejoindre.

Par ailleurs, compte tenu de l'enchevêtrement propre à la matière pénale des dispositions d'organisation judiciaire et de procédure, le ministère de la justice a choisi de les maintenir toutes dans le code de procédure pénale.

La loi no 2003-591 du 2 juillet 2003 a habilité le Gouvernement à simplifier le droit et, notamment, à procéder à la refonte du code de l'organisation judiciaire.

Les délais fixés n'ayant pu être respectés, une seconde loi d'habilitation no 2004-1343 du 9 décembre 2004 a alors été adoptée.

L'article 86-I de cette loi prévoit que, dans les conditions prévues par l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à procéder par ordonnance à la refonte du code de l'organisation judiciaire.

Les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication de l'ordonnance sous la seule réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet.

Dans les mêmes conditions, le Gouvernement est habilité, afin de tirer les conséquences de la rédaction retenue pour la partie législative du code de l'organisation judiciaire, à procéder par ordonnance aux modifications nécessaires des parties Législatives du code de procédure pénale, du code pénal, du code de commerce et du code rural.

En outre, le Gouvernement peut, le cas échéant, étendre l'application des dispositions codifiées à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française, aux Terres australes et antarctiques françaises et à Wallis-et-Futuna, avec les adaptations nécessaires.

La présente ordonnance procède donc, sous les réserves susvisées, à une nouvelle codification à droit constant.

L'article 1er et l'annexe I de l'ordonnance modifient en premier lieu le code de l'organisation judiciaire lui-même en substituant cinq livres aux neuf livres qui composent l'actuelle partie Législative.

Le premier livre aborde les « dispositions communes » non seulement aux juridictions figurant dans les livres suivants, mais encore à toutes les juridictions de l'ordre judiciaire comprises dans d'autres codes. Puis sont traitées, dans l'ordre de la procédure, les juridictions du premier degré (livre II), celles du second degré (livre III) et la Cour de cassation (livre IV). Les dispositions particulières à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, à Wallis-et-Futuna, aux Terres australes et antarctiques françaises, à la Polynésie française et à la Nouvelle-Calédonie font l'objet du cinquième et dernier livre.

En application de la loi d'habilitation, ces cinq nouveaux livres rétablissent la hiérarchie des normes.

Conformément à l'avis du Conseil d'Etat, ont été déclassées en partie Réglementaire les dispositions relatives au siège et au ressort des juridictions, notamment en ce qu'elles nécessitent un décret en Conseil d'Etat pour leur création et leur suppression, au nombre des assesseurs, aux chambres détachées des tribunaux de grande instance, à la chambre détachée de la cour d'appel de Fort-de-France, aux sections détachées des tribunaux de première instance de Papeete et de Nouméa, notamment en ce qu'elles prévoient que leur présidence est assurée par un magistrat désigné dans les formes prévues pour la nomination des magistrats du siège, et à la délégation des magistrats du parquet.

La nouvelle partie Législative assure en outre la cohérence rédactionnelle des textes rassemblés.

C'est ainsi que, par exemple, a été adoptée une nouvelle présentation du partage des compétences entre le tribunal d'instance et la juridiction de proximité : une réserve de compétence est mentionnée à l'occasion de l'énumération des compétences du tribunal d'instance à chaque fois que la juridiction de proximité peut s'avérer compétente.

Une autre illustration en est donnée par les dispositions relatives à l'outre-mer et aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle : les dispositions particulières relatives aux départements ont été intégrées dans les livres généraux (livres Ier, II et III) ; les dispositions relatives aux territoires et collectivités ont été conservées dans un livre distinct, un titre étant consacré à chacun, supprimant le système de renvois multiples sur la base duquel l'actuel livre IX était construit et renforçant ainsi la lisibilité d'un droit particulièrement complexe.

Ces cinq nouveaux livres harmonisent également l'état du droit.

Par ailleurs, la présente refonte permet de remédier à certaines erreurs. Notamment, en raison de son caractère « suiveur », le code de l'organisation judiciaire a accumulé des références inexactes de renvois à des textes particuliers. Par exemple, l'actuel article L. 731-2 cite l'article 8-2 de l'ordonnance no 58-1273 du 22 décembre 1958 relative à l'organisation judiciaire, texte abrogé par l'article 3 de la loi no 91-1258 du 17 décembre 1991 conférant aux chefs de cour le pouvoir de déléguer des magistrats du siège de la cour d'appel pour exercer des fonctions judiciaires dans les tribunaux du ressort de la cour d'appel, modifiant le code de l'organisation judiciaire (partie Législative) et donnant force de loi audit code. L'actuel article L. 731-4 renvoie à l'article 321 du code de justice militaire, lequel avait été abrogé par l'article 51 de la loi no 99-929 du 10 novembre 1999 portant réforme du code de justice militaire et du code de procédure pénale. L'actuel article R. 321-16 se réfère à l'ordonnance no 59-63 du 6 janvier 1959 relative aux réquisitions de biens et services, abrogée par l'ordonnance no 2004-1374 du 20 décembre 2004 relative à la partie Législative du code de la défense.

Enfin, ces nouveaux livres ont supprimé des dispositions devenues sans objet. Par exemple, l'actuel article L. 921-3 relatif aux suppléants des juges d'instance est purement et simplement abrogé. Les cours d'appel de Saint-Denis-de-la- Réunion, Fort-de-France et Basse-Terre, consultées, ont répondu qu'aucun suppléant n'était actuellement en fonction auprès des tribunaux d'instance de leur ressort. Elles précisent que cet article « paraît être tombé en désuétude », qu'il « n'a plus aucune utilité » et qu'il serait « opportun de purement et simplement supprimer cette disposition ».

En second lieu, la présente refonte transfère les dispositions relatives au tribunal de commerce et aux greffiers des tribunaux de commerce dans le code de commerce. Tel est l'objet de l'article 2 de l'ordonnance et de l'annexe II.

La publication de la présente ordonnance permettra de compléter la partie Réglementaire du code de commerce, en état d'achèvement, des dispositions d'application relatives aux tribunaux de commerce et aux greffiers des tribunaux de commerce.

Les dispositions relatives aux tribunaux de commerce et aux greffiers des tribunaux de commerce sont intégrées dans le livre VII du code de commerce, relatif à l'organisation du commerce, et actuellement consacré aux réseaux des chambres de commerce et d'industrie (titre Ier), à l'équipement commercial (titre II), aux marchés d'intérêt national (titre III) et aux manifestations commerciales (titre IV). Ce livre, qui s'intitulera « Des juridictions commerciales et de l'organisation du commerce », est enrichi de trois titres : Du tribunal de commerce, Des juridictions commerciales particulières, Du greffe du tribunal de commerce.

Les dispositions relatives aux tribunaux de commerce sont insérées dans un titre II, prenant place après celui relatif aux chambres de commerce et d'industrie. Celles-ci formant leur corps électoral, il a semblé cohérent de les laisser en tête du livre VII. Viennent ensuite les juridictions commerciales particulières (titre III), le greffe du tribunal de commerce (titre IV), l'équipement commercial (titre V) et un titre VI résultant de la fusion des actuels titres sur les marchés d'intérêt national et les manifestations commerciales.

Le livre VII du code de commerce respecte donc les articulations du code de l'organisation judiciaire et ne remet pas en cause sa cohérence initiale. Seul le nouveau titre III sur le greffe du tribunal de commerce voit son plan modifié par rapport à celui du code de l'organisation judiciaire. Des chapitres sur les missions du greffier, sur les conditions d'accès à la profession et sur ses conditions d'exercice ont été créés afin de faciliter la codification des dispositions réglementaires correspondantes qui sont non seulement issues de la partie Réglementaire du code de l'organisation judiciaire mais également d'un certain nombre de décrets autonomes.

L'élaboration de ce livre a été menée conformément aux règles habituelles de codification définies par la Commission supérieure de codification et selon les prévisions de l'article 86 de la loi de simplification du droit du 9 décembre 2004. C'est ainsi que, selon la méthode du « droit constant », sont codifiées les dispositions en vigueur sans leur apporter d'autre modification que celles imposées par le respect de la hiérarchie des normes, la cohérence rédactionnelle des textes et l'harmonisation du droit.


La règle du respect de la hiérarchie des normes a imposé la déclassification de quelques articles issus de la partie Législative du code de l'organisation judiciaire et d'une disposition de la partie Législative du code de commerce.

La cohérence rédactionnelle des textes a également justifié des modifications de pure forme et la mise à jour des nombreux renvois aux articles du code de l'organisation judiciaire, désormais compris dans le code de commerce, ou aux articles du livre VII du code de commerce recodifiés en raison de l'intégration des dispositions du code de l'organisation judiciaire dans ce même livre. Un certain nombre d'articles comportant des dispositions n'ayant pas le même objet ont également été scindés et les règles de rédaction des textes, notamment celle de la rédaction au présent de l'indicatif, ont été respectées. Ce travail de remise en ordre formel a été particulièrement nécessaire pour le titre V relatif à l'équipement commercial.

Enfin, l'harmonisation de l'état du droit a imposé d'actualiser certaines dispositions.

C'est ainsi que la référence au « commissaire de la République » est remplacée par celle de « préfet », qu'il a été tenu compte dans les dispositions renvoyant aux procédures collectives de la loi no 2005-845 du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises et, dans celles faisant références aux mesures d'incapacité d'exercice d'une activité commerciale, de l'ordonnance no 2005-428 du 6 mai 2005 relative à l'incapacité en matière commerciale et à la publicité du régime matrimonial des commerçants. Il a également été décidé de maintenir en vigueur les références aux dispositions applicables aux procédures de règlement judiciaire et de liquidation de biens de la loi no 67-563 du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la faillite personnelle et les banqueroutes car il reste un certain nombre de procédures en cours soumises à cette loi, bien qu'elle ait été abrogée dans sa quasi-totalité par la loi no 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises.

Afin de ne pas créer de vide juridique, les articles 3 et 4 diffèrent l'abrogation des dispositions déclassées à l'entrée en vigueur du décret en Conseil d'Etat qui refondra la partie Réglementaire.

Conformément à l'article 5, seules demeureront en vigueur, à titre provisoire, dans un « ancien » code de l'organisation judiciaire, les dispositions relatives aux procédures issues de la loi no 67-563 du 13 juillet 1967 sur le règlement judiciaire, la liquidation des biens, la faillite personnelle et les banqueroutes, ainsi que celles relatives aux tribunaux du travail. Les premières disparaîtront avec les procédures concernées. Les secondes seront transférées dans le code du travail, lequel fait l'objet actuellement d'une recodification par le ministère du travail.

Par ailleurs, l'article 6 remplace les références aux dispositions abrogées par les références des dispositions correspondantes issues des nouvelles codifications.

Enfin, la refonte du code de l'organisation judiciaire affecte d'autres textes (articles 7 à 11).

A l'article 7, le code rural accueille les dispositions relatives à l'organisation des tribunaux paritaires des baux ruraux, sous un plan rénové.

Le code de procédure pénale reçoit les très rares dispositions d'organisation judiciaire en matière pénale édictées par le code de l'organisation judiciaire (article 8).

L'article 9 modifie la présentation des dispositions concernant les juridictions commerciales des collectivités d'outre-mer conformément à la présentation adoptée lors de la codification de la partie Législative du code de commerce.

Les dispositions relatives à l'outre-mer figurant dans le code de l'organisation judiciaire n'étaient en effet pas présentées comme des adaptations à l'ordre juridique métropolitain mais comme un droit particulier à chaque collectivité. La présentation des dispositions intégrées dans le code de commerce est donc modifiée en respectant le régime législatif de chacune des collectivités. Pour Saint-Pierre-et-Miquelon, les dispositions du code qui ne sont pas applicables à cette collectivité sont précisées. Pour Mayotte, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna, ce sont en revanche les dispositions applicables qui sont indiquées. Ainsi, en dépit de la disparité de régime applicable aux collectivités, la référence juridique pour chacune reste commune. Les articles applicables sont ensuite modifiés dans leur rédaction par des mesures d'adaptation. Cette présentation est celle recommandée par la Commission supérieure de codification depuis l'adoption du projet de code de la défense.

L'article 10 abroge des dispositions énoncées par des normes extérieures, poursuivant l'érosion de textes anciens et la modernisation de notre droit.

L'article 11 diffère l'abrogation de certaines dispositions extérieures qui seront codifiées à l'occasion de la refonte de la partie Réglementaire du code de l'organisation judiciaire. Il s'agit de règles applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et relatifs à la navigation sur le Rhin ainsi que des articles de l'ordonnance no 82-877 du 15 octobre 1982 instituant des assesseurs coutumiers dans le territoire de la Nouvelle-Calédonie et dépendances au tribunal civil de première instance et à la cour d'appel.

Enfin, l'article 12 rend la présente ordonnance (à l'exception des articles 2, 7 et 8-III) applicable à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les Terres australes et antarctiques françaises et dans les îles Wallis et Futuna. Elle est également applicable de plein droit à Saint-Pierre-et-Miquelon, conformément à l'article 22 de la loi no 85-595 du 14 juin 1985 relative au statut de l'archipel.

Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.