J.O. 117 du 20 mai 2006       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Décision n° 2006-0406 du 4 avril 2006 se prononçant sur un différend opposant la société Afone et la Société française du radiotéléphone (SFR)


NOR : ARTJ0600043S



L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes,

Vu la directive 97/33 /CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP) ;

Vu la directive 2002/19 /CE du Parlement et du Conseil du 7 mars 2002 relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées ainsi qu'à leur interconnexion ;

Vu la communication de la Commission du 22 août 1998 relative à l'application des règles de concurrence aux accords d'accès dans le secteur des télécommunications ;

Vu le code des postes et des communications électroniques, notamment ses articles L. 34-8, L. 36-8 et R. 11-1 ;

Vu la déclaration de la société Afone en date du 17 novembre 2004 d'établir et exploiter un réseau ouvert au public et de fournir au public des services de communications électroniques ;

Vu la décision no 2000-835 de l'Autorité, en date du 28 juillet 2000, proposant au ministre chargé des télécommunications les modalités et les conditions d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine des systèmes mobiles de troisième génération (3G) ;

Vu la décision no 2001-417 de l'Autorité, en date du 30 mai 2001, relative au résultat et au compte rendu de la procédure d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine des systèmes mobiles de troisième génération ;

Vu l'arrêté du 18 juillet 2001 autorisant la Société française du radiotéléphone (SFR) à établir et exploiter un réseau radioélectrique de troisième génération ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;

Vu la recommandation de la commission du 11 février 2003 concernant les marchés pertinents de produits et de services dans le secteur des communications électroniques susceptibles d'être soumis à une réglementation ex ante conformément à la directive 2002/21 /CE du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques ;

Vu la décision no 2003-907 de l'Autorité, en date du 24 juillet 2003, établissant pour l'année 2004 les listes des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché des télécommunications ;

Vu la décision no 2005-0929 de l'Autorité, en date du 8 novembre 2005, se prononçant sur un différend opposant la société Bouygues Telecom à la société Orange France ;

Vu la décision no 2005-0930 de l'Autorité, en date du 8 novembre 2005, se prononçant sur un différend opposant la société Bouygues Telecom à la Société française du radiotéléphone (SFR) ;

Vu la décision no 2006-0044 de l'Autorité, en date du 10 janvier 2006, portant modification du règlement intérieur ;

Vu la demande de règlement d'un différend enregistrée à l'Autorité le 16 décembre 2005, présentée par la société Afone, RCS d'Angers no B 411 068 737, dont le siège social est situé 25, rue Lenepveu, 49100 Angers, représentée par Mes Jean-Paul Tran Thiet et Sylvain Justier, avocats au barreau des Hauts-de-Seine, CMS bureau Francis Lefebvre, 1-3, villa Emile-Bergerat, 92522 Neuilly-sur-Seine Cedex ;

Le différend porte sur le refus opposé par la société SFR à Afone de conclure un accord de « Mobile Virtual Network Operator », c'est-à-dire d'opérateur mobile virtuel (ci-après MVNO). Dans sa saisine, Afone demande à l'Autorité de constater que :

- le refus de la société SFR de conclure avec la société Afone un accord MVNO relevant de la catégorie des conventions d'accès, au sens de l'article 2 de la directive no 2002/19/CE du 7 mars 2002 et de l'article L. 32 du CPCE, constitue un échec de négociations commerciales au sens de l'article L. 36-8 du CPCE ;

- la société SFR est tenue de faire droit à la demande de la société Afone relative à la conclusion d'un accord MVNO, compte tenu des obligations qui pèsent sur elle et, en toute hypothèse, du caractère raisonnable et justifié de sa demande ;

- les conditions contractuelles, techniques et tarifaires énumérées par la société Afone dans la présente saisine sont celles proposées par la société SFR lors des négociations et revêtent, de ce fait, un caractère équitable.

Afone demande à l'Autorité de décider que la société SFR devra conclure avec elle, dans un délai maximal de quinze jours à compter de l'adoption de la décision de l'Autorité, un accord MVNO conforme aux conditions techniques et financières présentées dans la saisine, en vue de permettre à Afone de commercialiser ses services de téléphonie mobile dans un délai maximal de trois mois à compter de la décision de l'Autorité.



I. - EXPOSÉ DES FAITS

1.1. Sur les négociations engagées sur la conclusion d'un accord MVNO


Afone indique avoir, en septembre 2004, pris contact avec la société SFR afin d'engager des négociations commerciales visant à la conclusion d'un contrat MVNO. Afone précise avoir, lors d'une réunion du 8 novembre 2004, exposé la teneur de son projet de MVNO à la société SFR portant sur la présentation de l'activité d'Afone, ses motivations pour devenir MVNO, le bénéfice pour chacun de parvenir à un accord, la définition des prochaines étapes des négociations, comprenant la signature d'un accord de confidentialité et l'élaboration d'un plan d'affaires (« business plan »).



Afone souligne qu'une nouvelle réunion s'est tenue le 7 février 2005, au cours de laquelle SFR a rappelé les éléments qu'elle évaluait dans le cadre d'un projet de MVNO et a sollicité auprès d'Afone l'obtention de certains renseignements relatifs à son projet, dont sa cible et son niveau de pénétration sur celle-ci ainsi que les facultés de conquête d'Afone.

Afone indique que SFR a précisé, d'une part, que le modèle de MVNO qu'elle propose est de type « ESP » ou « Light MVNO » ne comprenant pas d'interconnexion du réseau de SFR avec le commutateur d'Afone et, d'autre part, que la mise à disposition d'Afone d'une messagerie mobile en marque blanche serait envisageable ainsi que le développement de certaines applications convergentes grâce à un système de routage utilisant des numéros propres à Afone.

Afone précise qu'il avait été convenu avec SFR de la signature d'un accord de confidentialité avant le 18 février 2005, ainsi que de la préparation par Afone d'un document précisant certains des éléments de son projet. Afone indique que le 10 février 2005, SFR lui a fait parvenir un modèle d'accord de confidentialité. Un accord définitif a été conclu le 25 février 2005.

Afone précise avoir, en vue d'une réunion du 7 mars 2005, transmis à SFR un document visant à répondre aux demandes de cette dernière portant sur son étude de marché et son offre de services. Afone souligne que lors de cette réunion, d'une part, elle a rappelé à SFR ses principales attentes dans le cadre du contrat MVNO et que, d'autre part, SFR lui a communiqué les principaux éléments techniques et tarifaires du contrat MVNO.

Afone indique avoir au 30 mars 2005 adressé à SFR le compte rendu de la réunion du 7 mars 2005 et un fichier recensant les fonctionnalités qu'elle recherchait dans le cadre de cet accord. Afone souligne que, le 4 avril 2005, SFR a sollicité une validation de la part d'Afone du fait que les modèles technique et économique de SFR répondent aux attentes d'Afone, et une confirmation du potentiel de marché de son projet.

Afone précise avoir validé, en préparation de la réunion prévue le 12 avril 2005, le modèle économique proposé par SFR, dans la mesure où il est identique à celui proposé à ses partenaires MVNO. En revanche, s'agissant du modèle technique, Afone a souhaité obtenir davantage d'informations avant de se prononcer sur sa compatibilité avec ses attentes. Afone souligne avoir confirmé le potentiel économique de son projet grâce au plan d'affaires élaboré à partir des informations transmises par SFR en précisant qu'elle souhaitait lancer son offre MVNO à la fin de l'été 2005. Afone souligne que, lors de cette réunion, SFR n'a pas remis en cause le plan d'affaires transmis par Afone mais l'a interrogé sur la « sincérité » de son positionnement dans le cadre des négociations en cours, au regard des éléments développés dans sa contribution à la consultation publique de l'Autorité sur le marché de l'accès et du départ d'appel sur les réseaux mobiles ouverts au public, lancée le 17 décembre 2004.

S'agissant des tarifs appliqués dans le cadre d'un contrat MVNO, Afone indique avoir accepté la proposition de SFR dans la mesure où les tarifs seraient non discriminatoires par rapport à ceux consentis aux autres MVNO hébergés sur le réseau de SFR. Afone indique que, lors de cette réunion, SFR a précisé ne pouvoir initier le partenariat de MVNO avant le mois d'avril 2006, et aurait communiqué certaines précisions tarifaires sur son offre ESP, ainsi que certaines restrictions d'usage.

Afone précise avoir confirmé, par courrier électronique du 13 avril 2005, à SFR, d'une part, qu'elle acceptait les conditions techniques et économiques proposées dans la mesure où elles étaient non discriminatoires et, d'autre part, qu'elle acceptait la date de lancement envisagée.

Au regard de cet accord de principe, Afone a souhaité obtenir par écrit le projet de contrat MVNO afin de rédiger le cahier des charges de sa future offre. SFR ayant gardé le silence pendant près d'un mois et ce malgré diverses relances, Afone constate l'échec des négociations sur la conclusion d'un accord MVNO.


1.2. L'échec des négociations commerciales concernant la conclusion d'un accord MVNO


Afone souligne que, face à ce silence, elle a adressé le 24 mai 2005 à SFR un courrier dans lequel elle rappelait son accord sur l'ensemble des exigences formulées par SFR et sa volonté d'obtenir la version écrite du contrat MVNO. Le 31 mai 2005, SFR a indiqué ne pas être en mesure de s'engager sur un délai de réponse ou sur un engagement. Afone indique avoir été contrainte de mettre en demeure SFR le 18 juillet 2005 de lui communiquer par écrit le contrat MVNO en lui précisant que, faute de transmission dans les quinze jours, elle ne pourrait que constater le refus de SFR de faire droit à sa demande d'accès à son réseau.

Afone souligne que le 29 juillet 2005, SFR a répondu à sa mise en demeure en contestant l'accord de principe avec Afone et en indiquant que le dossier d'Afone demeurait à l'étude. Dans ces conditions, Afone précise qu'elle a proposé, par courrier du 1er septembre 2005, une nouvelle réunion en soulignant que le 20 septembre 2005 constituait la date ultime à laquelle le projet de contrat devait lui être communiqué.

Afone indique avoir, lors d'une réunion le 14 septembre 2005, exposé à SFR son projet de MVNO qui demeurait inchangé, et rappelé ses motivations. A l'issue de cette réunion, SFR lui a indiqué par courrier qu'elle ne donnait pas suite à sa demande de conclusion d'un accord MVNO. Afone constate donc qu'il y a eu échec des négociations sur les conditions commerciales, techniques et financières d'un accord MVNO.


II. - LA DEMANDE D'AFONE

2.1. Sur la compétence de l'Autorité


Afone rappelle qu'aux termes de l'article L. 36-8 du CPCE, l'Autorité est compétente pour trancher les litiges relevant de négociations commerciales ou d'un désaccord portant sur la conclusion de conventions d'accès à un réseau ouvert au public de communications électroniques fixes ou mobiles.

Les prestations mises en oeuvre dans le cadre d'un contrat MVNO relèvent des prestations d'accès :

Afone estime que les prestations qu'elle sollicite relèvent de la catégorie des prestations d'accès transposées dans le CPCE à l'article L. 32 (8°) et dont l'Autorité peut être saisie.

Sur l'échec des négociations commerciales entre Afone et SFR :

Afone souligne qu'il ressort des échanges avec SFR qu'il y a eu échec des négociations, matérialisé par le refus de SFR de formaliser l'accord MVNO alors qu'Afone avait accepté les conditions et exigences de SFR. Afone considère que le refus de SFR de conclure un contrat MVNO relève de l'article L. 36-8 du CPCE et de la compétence de l'Autorité.



2.2. L'obligation de SFR de faire droit à la demande d'Afone


Afone précise que SFR doit faire droit à sa demande de conclure un accord MVNO, et ce même si l'Autorité a retiré son projet de décision visant à réguler le marché de gros de l'accès et du départ d'appel sur les réseaux mobiles ouverts au public.

Le maintien des obligations prévues par l'ancien cadre réglementaire :

Afone indique que quand bien même l'Autorité aurait choisi le 31 mai 2005 de retirer son projet de décision et de placer le marché no 15 sous surveillance, le processus d'analyse de ce marché identifié dans la recommandation de la Commission européenne n'a pas été mené à son terme.

Ainsi, tant que l'Autorité n'a pas adopté de décision visant soit à imposer de nouvelles obligations aux opérateurs puissants soit à supprimer toute régulation ex ante sur ce marché, les obligations ex ante en vigueur sous l'empire de l'ancien cadre réglementaire demeurent applicables :

A cet égard, les dispositions transitoires des directives cadre et accès en matière d'accès et d'interconnexion conduisent à maintenir les obligations de l'ancien cadre réglementaire. Afone indique que tant que l'Autorité n'a pas adopté une décision précisant les nouvelles obligations incombant aux opérateurs sur le marché de gros de l'accès et du départ d'appel sur les réseaux mobiles ouverts au public, les anciennes obligations incombant à SFR en tant qu'opérateur puissant continuent de s'appliquer.

Afone précise que dans sa décision no 2003-907 du 24 juillet 2003, l'Autorité a désigné SFR comme opérateur puissant pour l'année 2004, et que sa qualité d'opérateur puissant est effective jusqu'à l'adoption par l'Autorité d'une décision relative à l'analyse du marché no 15. A cet égard, SFR exerce une influence significative sur le marché de détail de la téléphonie mobile et sur le marché de l'interconnexion au sens de la directive interconnexion 97/33. Afone considère que cette qualité d'opérateur puissant sur ces marchés impose à SFR de répondre à sa demande d'accès.

Afone rappelle que, conformément à la directive « interconnexion », les opérateurs puissants sur le marché de la téléphonie mobile sont tenus de répondre aux demandes raisonnables d'accès à leur réseau mobile. Ainsi, en tant qu'opérateur puissant, SFR a l'obligation de faire droit à la demande d'accès d'Afone.

SFR a l'obligation de faire droit à la demande d'Afone indépendamment de ses obligations ex ante d'accès :


L'obligation réglementaire souscrite par SFR dans sa licence 3G


Afone rappelle que dans le cadre de l'appel à candidatures organisé par l'Autorité en 2001 pour la délivrance des licences UMTS (cf. décision no 2000-835 susvisée), SFR s'est engagée à ouvrir son réseau aux MVNO. Cet engagement a été formalisé dans le cahier des charges annexé à l'arrêté du 18 juillet 2001 susvisé qui possède un caractère réglementaire. Afone estime que, dans ce contexte, SFR est tenue de faire droit à la demande raisonnable et justifiée d'Afone.


L'obligation pour SFR de faire droit à la demande d'Afone

sur le fondement des critères de l'article L. 36-8 CPCE


Afone estime que l'Autorité doit faire droit à toute demande lorsque celle-ci est justifiée et raisonnable, tant au regard des besoins de l'opérateur que de la capacité de l'opérateur auquel il s'adresse à la satisfaire. Afone considère que sa demande est raisonnable dans la mesure où elle n'emporte pas d'obstacle technique pour SFR, qui aurait déjà conclu plusieurs accords de ce type.


2.3. Sur le caractère raisonnable et justifié de la demande d'Afone


Le caractère raisonnable de la demande d'Afone au regard de ses besoins :

Afone indique souhaiter devenir un opérateur pouvant fournir à ses clients l'ensemble des services de communications électroniques et notamment des services mobiles. Afone rappelle qu'il existe de très importantes barrières à l'entrée sur le marché français de la téléphonie mobile tant au niveau de l'établissement d'un nouveau réseau qu'à celui de la fourniture de services.

Afone considère que la création d'un quatrième réseau national de téléphonie mobile 2G est impossible compte tenu des décisions publiques de ne pas lancer d'appel à candidatures pour une 4e licence GSM nationale et d'attribuer les dernières bandes de fréquences 2G disponibles aux trois opérateurs en place. Afone souligne que l'existence de ces barrières à l'entrée légales, réglementaires et économiques démontre que la seule solution pour pénétrer sur le marché de détail de la téléphonie mobile en France passe par la conclusion d'un contrat MVNO avec un opérateur de réseau existant.

Le caractère raisonnable de la demande d'Afone au regard de la capacité de SFR à la satisfaire :

Afone rappelle qu'elle avait accepté le modèle technique proposé par SFR de type ESP et qu'à aucun moment SFR n'a avancé une impossibilité technique à satisfaire cette demande tant en termes d'infrastructures disponibles qu'en termes de disponibilité de ressources en fréquences. Afone souligne que SFR a déjà conclu des contrats MVNO basés sur le même modèle technique que celui dont Afone souhaite bénéficier. De ce fait, Afone estime que SFR a la capacité pour satisfaire la demande d'Afone.


2.4. Les conditions sollicitées par Afone dans le cadre de l'accord


Afone indique que SFR n'a pas donné suite à sa demande de souscrire un contrat similaire à celui conclu avec d'autres opérateurs, et demande à l'Autorité de statuer sur la totalité de ses demandes. Afone souligne que les différents comptes-rendus de réunion relatant les accords des deux sociétés sur les conditions de partenariat de MVNO peuvent servir de base à l'élaboration d'un contrat. Afone demande à l'Autorité d'imposer à SFR les conditions qu'elle avait proposées et qui avaient été acceptées.

Les responsabilités respectives d'Afone et de SFR dans le cadre de l'accord :

Afone précise que les principes ayant servi de base aux négociations avec SFR devront être respectés.



Afone doit disposer d'une liberté commerciale totale dans le cadre de l'accord :

Afone indique qu'elle souscrit aux principes que l'Autorité a exposés dans son projet de décision d'analyse du marché no 15, principes qui sont garants de la pérennité ainsi que du dynamisme commercial et concurrentiel du MVNO. Dans ce contexte, Afone demande à l'Autorité de prohiber toute disposition du contrat type de SFR venant limiter de manière excessive sa liberté commerciale.

L'architecture technique mise en place dans le cadre de l'accord :

Afone demande la mise en oeuvre d'une architecture technique de type ESP, identique à celle mise en oeuvre par SFR dans le cadre des contrats de MVNO déjà conclus.

Les conditions tarifaires :

Afone demande que l'accord soit conclu aux conditions tarifaires proposées par SFR et qu'elle avait acceptées.

Afone estime que ces tarifs ne sont acceptables que s'ils sont non discriminatoires par rapport à ceux consentis par SFR à d'autres MVNO. Ainsi, Afone souhaite bénéficier de tarifs plus avantageux qui pourraient être proposés à d'autres MVNO.


2.5. Début de l'exécution du contrat MVNO


Afone souligne que l'exécution du contrat MVNO devra débuter dans un délai maximal de trois mois à compter de la décision à intervenir de l'Autorité. Ceci lui permettrait de commercialiser ses services mobiles à destination de ses clients à compter de cette échéance.

Vu le courrier du chef du service juridique en date du 23 décembre 2005 adressé aux parties leur transmettant le calendrier de dépôt des mémoires et portant désignation des rapporteurs ;

Vu la lettre de l'adjoint au chef du service juridique convoquant la société SFR à une réunion le 25 janvier 2006 ;

Vu la lettre de l'adjoint au chef du service juridique convoquant la société Afone à une réunion le 26 janvier 2006 ;

Vu les observations en défense enregistrées le 18 janvier 2006 présentées par la société SFR, immatriculée au RCS de Paris no 403 106 537, dont le siège social est situé 42, avenue de Friedland, 75008 Paris, représentée par M. Pierre Bardon, directeur général délégué, et assistée de Me Frédérique Dupuis-Toubol, avocat au barreau de Paris, cabinet Bird & Bird, 3, square Edouard-VII, centre d'affaires Edouard-VII, 75009 Paris.


I. - EXPOSÉ DES FAITS


SFR souligne que, contrairement aux observations d'Afone, les parties ne se sont jamais entendues sur les « éléments essentiels » d'un contrat MVNO et que leurs relations n'ont jamais atteint la phase de négociation contractuelle dans la mesure où elles se sont limitées à une analyse de la candidature d'Afone et à une présentation de la stratégie de SFR en matière d'accueil de MVNO sur son réseau. SFR souligne avoir examiné attentivement le projet présenté par Afone, avoir précisé à cette dernière que le processus engagé concernait exclusivement l'analyse de sa candidature mais qu'elle manquait d'information sur le projet et que, de ce fait, la poursuite des contacts ne signifiait en aucun cas un engagement de SFR ni de négocier ni de conclure un contrat MVNO avec Afone.


1.1. L'analyse de la candidature d'Afone et la présentation

par les parties de leurs attentes et de leur projet respectif


SFR rappelle que, dans le cadre de sa politique d'accueil de MVNO, elle a accepté dès 2004 d'étudier les nombreuses candidatures de sociétés souhaitant conclure des partenariats de MVNO et qu'à ce jour elle aurait reçu des demandes de plus de 50 opérateurs prospectifs. SFR souligne que c'est en vue d'obtenir des précisions sur les motivations de partenaires prospectifs qu'elle a contacté Afone en septembre 2004 afin d'étudier les possibilités de collaboration. SFR indique que, lors d'une réunion le 8 novembre 2004, Afone a présenté succinctement son activité et les grandes lignes de son projet MVNO. SFR précise que, lors de cette réunion, elle a informé Afone du fait que sa décision de retenir son projet et d'entrer en négociation n'interviendrait qu'à l'issue d'une phase préalable de recueil d'informations sur l'activité d'Afone et son projet MVNO.

SFR indique avoir, lors d'une réunion en date du 7 février 2005, réitéré sa demande d'obtenir des informations plus détaillées du projet d'Afone, tout en accédant à la demande de celle-ci de conclure un accord de confidentialité compte tenu du caractère sensible des informations échangées. SFR souligne que, lors de la réunion du 7 mars 2005, Afone a précisé son projet qui restait incomplet, et SFR lui a présenté oralement le cadre de l'accord MVNO. SFR note que les parties ont exprimé la nécessité d'approfondir et de clarifier des éléments importants de leurs projets respectifs. SFR indique avoir le 4 avril 2005 contesté le compte rendu de la réunion du 7 mars 2005 préparé par Afone, qui selon elle ne reflétait pas les échanges ayant eu lieu. SFR précise avoir informé Afone qu'elle ne disposait toujours pas de données précises sur son projet de marché et que les modèles technique et économique de SFR ne correspondaient pas aux projets d'Afone. SFR indique avoir rappelé à Afone que les négociations ne pourraient s'engager que lorsque les parties se seraient accordées sur le cadre de cette négociation.

SFR indique que, lors de la réunion le 12 avril 2005 au cours de laquelle Afone a présenté son plan d'affaires, SFR lui aurait fait part de son inquiétude liée au fait qu'Afone contestait le modèle ESP proposé par SFR dans sa contribution à la consultation publique de l'Autorité sur l'analyse du marché no 15.


1.2. Sur la décision de SFR de ne pas entrer en négociation


SFR précise que, le 13 avril et le 24 mai 2005, Afone a réitéré sa volonté de négocier et semblait accepter par courrier électronique du 13 avril les modèles économique et technique de SFR comme solution de départ. SFR souligne que, par courrier du 24 mai 2005, Afone estimait que SFR devait faire droit à sa demande d'accès sur son réseau invoquant une « prétendue offre de référence ». SFR note avoir rappelé à Afone le 31 mai 2005 qu'aucune offre ferme n'avait été émise et ne serait émise sans que le processus d'analyse de la candidature d'Afone ne soit mené à son terme.



SFR indique que, par courrier du 18 juillet 2005, Afone l'a mise en demeure de lui communiquer son projet de contrat écrit MVNO, fondant sa demande sur l'obligation d'accès de SFR et évoquant un accord de principe que les parties auraient conclu. SFR souligne avoir au 29 juillet 2005 contesté l'existence d'un tel accord de principe et confirmé sa position de poursuivre l'analyse du projet d'Afone en proposant une réunion début septembre pour faire le point sur les échanges entre les parties. SFR note qu'Afone a accepté la réunion tout en réaffirmant qu'au 20 septembre 2005, SFR devait lui communiquer un projet de contrat MVNO faute de quoi Afone s'engagerait dans une phase contentieuse. SFR indique qu'à la suite de la réunion du 14 septembre 2005, par courrier du 5 octobre 2005, elle a indiqué à Afone qu'elle ne donnait pas une suite favorable à la candidature d'Afone.


II. - DISCUSSION

2.1. Afone ne démontre pas l'existence d'une obligation qui incomberait à SFR

de faire droit à sa demande en vertu du cadre réglementaire applicable


L'ancien cadre réglementaire est abrogé :

SFR observe qu'Afone fonde l'obligation de SFR de faire droit à sa demande d'accès de MVNO sur l'application conjointe des directives 97/33/CE et 2002/19/CE. SFR estime qu'Afone ne peut invoquer la directive abrogée 97/33/CE pour fonder sa demande, quand bien même l'article 27 de la directive 2002/21 /CE en ferait survivre certains effets au titre du droit transitoire, dans la mesure où SFR estime que ces dispositions ne peuvent s'appliquer au cas d'espèce.

Notamment, SFR rappelle que le premier paragraphe de l'article 27 renvoyant à l'article 7 de la directive 2002/19 /CE permet le maintien des obligations relatives à l'accès et à l'interconnexion qui étaient imposées aux opérateurs avant l'entrée en vigueur des nouvelles directives pour une période transitoire s'achevant avant l'analyse ex ante menée sur la base des nouvelles directives. SFR estime que ces deux conditions sont cumulatives et que la demande d'Afone ne répond à aucune de ces conditions, dans la mesure où SFR n'avait dans l'ancien cadre aucune obligation de faire droit aux demandes d'accès des MVNO, et où l'analyse ex ante a bien été réalisée par l'Autorité. En conséquence, SFR considère qu'Afone ne peut se prévaloir de l'ancienne réglementation dans le cadre de laquelle l'Autorité a décidé qu'il n'existait aucune obligation pour les opérateurs de réseau mobile de faire droit aux demandes de MVNO.

Le nouveau cadre réglementaire n'impose aucune obligation à SFR de faire droit à la demande d'Afone :

SFR estime qu'Afone ne peut se prévaloir du cadre réglementaire en vigueur, même si les prestations de MVNO relèvent du régime d'accès au sens de l'article 2 de la directive accès transposée à l'article L. 32 (8°) du CPCE. SFR considère ne pas avoir l'obligation de faire droit aux demandes d'accès de MVNO en l'absence d'obligations prises en application des articles 8 et suivants de la directive 2002/19 /CE, ce que la Commission a indiqué dans le considérant 19 de la directive accès. SFR souligne donc que ce considérant confirme que l'obligation de faire droit à des demandes d'accès n'est pas générique et ne doit être imposée que si elle est indispensable pour la concurrence. SFR rappelle que conformément à la directive accès, l'Autorité a indiqué dans son projet de décision sur le marché no 15 en date d'avril 2005 que si elle entendait imposer une obligation générique de faire droit aux demandes d'accès de MVNO, c'est en raison de l'absence d'une telle obligation dans le cadre juridique en vigueur.

SFR estime donc qu'en l'absence d'obligation légale ou réglementaire, l'Autorité ne peut lui imposer de négocier un contrat avec Afone. SFR demande à l'Autorité de rejeter les demandes d'Afone qui sont dépourvues de fondement juridique au regard du cadre réglementaire applicable.


2.2. Le cahier des charges 3G de SFR n'impose pas de faire droit à la demande d'Afone


SFR souligne qu'Afone ne peut prétendre que SFR serait tenue de faire droit à sa demande d'accès en application de l'article 1.2 de son cahier des charges. SFR constate que les projets présentés par Afone lors des échanges entre les parties et de sa saisine portent à la fois sur les réseaux 2G et 3G de SFR. SFR estime qu'Afone ne peut fonder une demande d'accès visant ces deux réseaux sur un texte ne concernant que le réseau 3G. Par ailleurs, SFR indique qu'elle n'est pas tenue au titre de sa licence 3G de faire droit à toute demande d'accès présentée par des candidats MVNO, mais simplement de proposer une offre permettant l'accueil d'opérateurs virtuels sur son réseau, en contractant avec les partenaires de son choix. De ce fait SFR considère que cet engagement ne lui impose ni de disposer d'une offre de référence, ni de conclure un contrat avec des partenaires qu'elle n'aurait pas librement choisis. En outre, SFR rappelle qu'elle a respecté cet engagement pris au titre de sa réponse à l'appel à candidatures 3G dans la mesure où elle est parvenue à un accord avec cinq opérateurs MVNO et qu'elle est même allée au-delà de son engagement, dans la mesure où elle a accepté d'accueillir les candidats retenus tant sur le réseau 3G que sur son réseau 2G. En conséquence, SFR demande à l'Autorité de rejeter le moyen présenté par Afone fondé sur l'article 1.2 du cahier des charges de SFR.

Vu l'audition de la société SFR en date du 25 janvier 2006 ;

Vu l'audition de la société Afone en date du 26 janvier 2006 ;

Vu le courrier de la société Afone enregistré le 27 janvier 2006 souhaitant un délai supplémentaire pour transmettre ses observations en réplique ;

Vu les observations en réplique enregistrées le 3 février 2006 présentées par la société Afone ;


I. - SUR L'ABSENCE DE TOUTE CONTRAINTE TECHNIQUE ET ÉCONOMIQUE DE SFR

POUR FAIRE DROIT À SA DEMANDE


Afone constate que SFR n'invoque aucune impossibilité pour répondre à sa demande dans le cadre de la présente procédure. Notamment, Afone note que SFR n'invoque pas de difficulté technique eu égard au modèle d'accord de type ESP devant être mis en place entre les parties et ne se prévaut pas du caractère déraisonnable des conditions économiques sollicitées par Afone dans le cadre de l'accord MVNO.

Afone rappelle que lors des négociations elle a accepté l'ensemble des exigences techniques et tarifaires de SFR. Afone souligne que SFR a l'obligation de faire droit à sa demande et rappelle le caractère équitable des conditions qu'elle revendique.



II. - SUR L'HISTORIQUE DES RELATIONS ENTRE AFONE ET SFR


Afone relève que SFR soutient qu'elle ne serait jamais entrée en négociation avec Afone.


2.1. Sur la notion de négociations adoptée par SFR


Afone souligne que, contrairement à ce qu'indique SFR, le fait que des négociations s'engagent ne signifie pas une certitude d'engagement d'une part comme de l'autre. Afone indique qu'au regard des comptes rendus dressés par elle des négociations ont eu lieu, notamment sur le service de messagerie en « marque blanche » (réunion du 7 février 2005). Afone indique que, par la suite, SFR lui a exposé la disponibilité ou non de certains services dans le cadre de son offre MVNO, notamment des services de messagerie, et renvoie aussi à ses précédentes observations.

Enfin, si Afone a exprimé à SFR le souhait « d'entrer en négociation en vue de la conclusion d'un accord MVNO », elle entendait à travers ces termes qu'elle souhaitait entrer dans une phase de négociation rédactionnelle, basée sur une trame contractuelle qui aurait été transmise préalablement par SFR à Afone.


2.2. Sur l'existence d'un accord de principe entre les parties

sur les conditions techniques et tarifaires d'un accord MVNO


Afone souligne qu'au regard des impératifs d'ordre public économique il appartient à l'Autorité de constater que la demande d'Afone est raisonnable et de prendre en compte l'accord de principe qui existait entre les parties. Afone souligne que cet accord de principe existe puisque SFR lui a proposé son offre constituée des éléments essentiels de son accord MVNO, qu'Afone a accepté ces éléments constitutifs de l'offre et que ce sont ces conditions qu'Afone sollicite dans le cadre du présent litige.


III. - L'OBLIGATION POUR SFR DE FAIRE DROIT À LA DEMANDE D'AFONE


Afone constate que SFR ne conteste pas la compétence de l'Autorité pour trancher le présent différend mais que SFR estime que l'Autorité ne peut accueillir sa demande car aucune obligation ne lui impose d'y faire droit.


3.1. Sur le maintien de l'obligation ex ante d'accès tant que la décision de l'Autorité de réguler ou non le marché de gros


de l'accès et du départ d'appel sur les réseaux mobiles ouverts au public n'aura pas été adoptée

Afone renvoie à ses précédentes observations et estime qu'aucun des éléments soulevés par SFR ne peut être retenu.

Sur le fait que SFR n'aurait pas été déclaré comme opérateur puissant sur le marché no 15 :

Afone note que SFR indique qu'elle ne peut se voir imposer des obligations ex ante résultant de l'ancien cadre réglementaire dans la mesure où, notamment, elle ne serait pas « puissante » sur le marché no 15. Afone rappelle, d'une part, que le marché no 15 constitue l'un des marchés pertinents que l'Autorité doit analyser en vertu du nouveau cadre réglementaire et, d'autre part, que tout opérateur puissant doit se voir imposer par l'Autorité au moins une obligation ex ante.

Afone indique que si SFR devait être considérée puissante sur le marché no 15 elle se verrait imposer par l'Autorité au moins une obligation ex ante issue du nouveau cadre réglementaire, ce qui entraînerait la fin de la période transitoire d'application des obligations ex ante issues de l'ancien cadre réglementaire. Afone rappelle que, en attendant la mise en oeuvre des analyses de marché prévues à l'article 16 de la directive cadre, SFR constitue un opérateur puissant sur le marché de détail de la téléphonie mobile et sur le marché de l'interconnexion.

Sur le fait que le processus d'analyse du marché no 15 aurait été mené à son terme :

Afone estime que l'argument retenu par SFR n'est pas pertinent puisque l'analyse de marché menée par l'Autorité est toujours en cours à ce jour. Afone rappelle qu'en mai 2005 l'Autorité a retiré son projet de décision et placé ce marché « sous surveillance » afin de mesurer l'impact sur le marché de la conclusion récente à cette date de plusieurs accords MVNO, d'analyser sa situation concurrentielle et d'apprécier s'il y a lieu de lui appliquer une régulation ex ante.

Sur le fait que l'obligation ex ante d'accès maintenue ne saurait permettre de faire droit à la demande d'Afone :

Afone considère que l'analyse développée par SFR omet l'entrée en vigueur depuis le 25 juillet 2003 de la nouvelle directive accès qui précise le contenu de cette notion. Afone souligne que le principe communautaire d'interprétation conforme impose à l'Autorité de tenir compte de la définition posée par cette directive de 2002 pour apprécier la portée et l'application de l'obligation d'accès issue de la directive 97/33 et de l'ex-article L. 34-8 du CPT. Afone rappelle que ce principe est reconnu au niveau communautaire (arrêt Marleasing de la Cour de justice des Communautés européennes en date du 13 novembre 1990) et consacré en droit interne (arrêt de la Cour de cassation en date du 9 juillet 1996 et série d'arrêts du Conseil d'Etat en date du 8 décembre 2000).

A l'appui de l'application de ce principe, Afone souligne également que dans sa décision no 2004-376 l'Autorité a considéré que la prestation d'IRU relevait de la catégorie de l'accès en vérifiant notamment que cette analyse était compatible avec la nouvelle définition de l'accès (faisant ainsi application du principe d'interprétation conforme). Afone souligne qu'il ne s'agit pas d'imposer à SFR une obligation non transposée et non prévue par le cadre juridique antérieur, puisque la demande d'Afone se fonde sur l'obligation d'accès prévue par le cadre juridique antérieur.

Afone estime que l'Autorité doit tenir compte de la définition posée par l'article 2 de la directive accès pour apprécier la portée de l'obligation d'accès pesant sur SFR.


3.2. Sur le fait que le cahier des charges 3G de SFR

ne lui imposerait pas

de faire droit à la demande d'Afone


Afone souhaite rappeler en premier lieu le contexte dans lequel l'obligation incombant à SFR aux termes de son cahier des charges 3G lui a été imposée, à savoir le cadre de la procédure d'attribution des licences 3G. Dans ce cadre, et afin de renforcer les chances de voir sa candidature retenue, SFR a entendu souscrire un engagement spécifique vis-à-vis des MVNO. Afone rappelle en deuxième lieu que cet engagement a été pris en compte de manière favorable dans l'évaluation de la candidature de SFR par rapport à celles des autres candidats. Afone rappelle en troisième lieu que le cahier des charges 3G de SFR n'a fait que formaliser sous forme d'une obligation l'engagement pris de manière volontaire par cet opérateur.



Afone estime que, compte tenu de ces éléments, SFR se devait de lui proposer son contrat type MVNO portant indistinctement sur son réseau 2G et 3G. Afone relève d'ailleurs que certains MVNO que SFR héberge n'ont accès qu'à son réseau 2G.

Afone précise que cet engagement de proposer un contrat type ne saurait contraindre SFR à accepter toutes les demandes formulées auprès d'elle. Ainsi, dans la mesure où SFR n'a souscrit aucun engagement sur un niveau tarifaire, elle peut refuser, à tout le moins sur le plan contractuel, une demande dont elle jugerait les tarifs inacceptables et ne saurait répondre qu'aux seules demandes qu'elle peut satisfaire (notamment en termes de ressources disponibles). Or Afone constate qu'il en va différemment lorsque, comme en l'espèce, toutes les conditions posées par SFR dans son contrat type ont été acceptées et qu'il n'y a aucune contrainte empêchant SFR de faire droit à la demande d'Afone.


3.3. Sur le fait qu'aucune obligation d'accès ne pèserait sur SFR dans le nouveau cadre réglementaire


Afone convient qu'aucune obligation ex ante issue du nouveau cadre réglementaire ne pèse sur SFR, mais souligne que la liberté contractuelle dont dispose SFR n'est pas absolue et trouve ses limites dans le cadre de la présente procédure. Afone considère que l'Autorité est compétente pour lui imposer la conclusion d'un tel contrat dès lors que la demande d'Afone lui paraîtrait équitable, et quand bien même elle estimerait qu'aucune obligation ex ante ne pèse sur SFR.

La liberté contractuelle de SFR trouve ses limites dans le cadre de la présente procédure :

Afone estime que, conformément à l'article L. 36-8 du CPCE, l'Autorité peut imposer aux parties de conclure un contrat d'interconnexion ou d'accès et de leur enjoindre éventuellement d'en modifier les conditions contractuelles.

L'Autorité doit faire droit à la demande d'Afone si elle estime qu'elle est équitable indépendamment de toute obligation d'accès :

Afone souligne que la procédure de règlement de différend n'a pas pour objet de permettre la création d'une obligation générale d'accès (laquelle peut uniquement être mise en oeuvre à l'issue d'une analyse de marché) mais permet uniquement de trancher, au cas par cas et dans un contexte particulier, le différend opposant les parties. Afone indique que si elle conduisait à imposer la conclusion d'un contrat MVNO cette décision n'aurait pas pour conséquence d'imposer à l'opérateur concerné de faire droit à toute nouvelle demande émanant d'un autre candidat, et l'obligation imposée par cette décision ne s'imposerait pas aux deux autres opérateurs de réseaux mobiles ouverts au public.

Afone précise que, à supposer que l'Autorité considère que SFR n'est pas assujettie à une obligation d'accès, il n'en demeurerait pas moins qu'elle devrait faire droit, en équité, à la demande d'Afone (notamment au regard des objectifs de la régulation posés par l'article L. 32-1 du CPCE).

Le caractère équitable de la demande formulée par Afone :

Afone renvoie à ses précédentes observations et précise qu'elle entend développer une gamme de services innovants, notamment de convergence fixe-mobile (comme un service de messagerie unifiée), à destination d'une clientèle particulière telle que les petites et moyennes entreprises. Ces entreprises ont des besoins spécifiques en matière de communications électroniques, notamment en matière de téléphonie mobile, mais ni leurs compétences techniques ni leur pouvoir de négociation ne leur permettent d'accéder à une prise en compte globale de leurs besoins. Afone considère ainsi que cette clientèle, en raison de l'absence d'optimisation de ses choix techniques et commerciaux, présente un fort potentiel de développement et des attentes non encore satisfaites auxquelles Afone est prête à répondre. Dans ce contexte, Afone considère que sa demande est équitable au regard des objectifs de régulation posés tant par les textes communautaires et nationaux afférents au secteur des communications électroniques.

Afone demande à l'Autorité de rejeter l'ensemble des arguments et demandes invoqués par SFR et de faire droit à l'ensemble de ses demandes concernant la conclusion d'un accord MVNO avec SFR.

Vu les courriers de l'adjoint au chef du service juridique en date du 8 février 2006 adressés aux parties leur transmettant les procès-verbaux des auditions de la société SFR et de la société Afone respectivement en date du 25 et du 26 janvier 2006 ;

Vu le courrier de l'adjoint au chef du service juridique de l'Autorité, en date du 13 février 2006, adressé à la société SFR lui transmettant un questionnaire des rapporteurs ;

Vu la réponse de SFR enregistrée le 15 février 2006 au questionnaire des rapporteurs ;

Vu les observations de la société Afone enregistrées le 16 février 2006 relatives au procès-verbal de l'audition de SFR en date du 25 janvier 2006 ;


1. Sur les modalités d'accueil des MVNO par SFR


Afone rappelle que la nécessité de paramétrer les systèmes d'information de l'opérateur hôte et du MVNO a été exprimée par SFR lors des négociations mais qu'elle n'a jamais constitué un obstacle à la mise en oeuvre de l'accord MVNO. Afone indique que SFR avait précisé qu'un délai de plusieurs mois était nécessaire pour réaliser la phase de paramétrage, ce qu'Afone avait accepté. Afone souligne qu'elle ne conteste pas la nécessité de procéder à cette phase, qui toutefois ne peut empêcher la conclusion d'un accord MVNO. De plus, Afone estime que SFR ne peut évoquer un manque de ressources pour procéder à ces développements, alors qu'elle a demandé à Afone le paiement [...] pour couvrir les coûts liés à cette phase, ce qu'Afone a accepté.

S'agissant des capacités de réseau, Afone prend acte qu'il n'existe aucune contrainte, dans la mesure où, comme SFR l'indique, ses contrats MVNO contraignent les opérateurs virtuels qu'elle accueille à lui communiquer leurs prévisions de trafic afin de lui permettre de dimensionner correctement son réseau et ses systèmes.



Afone estime donc que SFR n'a aucune contrainte technique pour répondre favorablement à la demande d'Afone.


2. Sur l'analyse de la candidature d'Afone par SFR


Afone constate que SFR reconnaît avoir été en négociation avec Afone, même si ces négociations semblent être qualifiées par SFR de passives. Par ailleurs, Afone comprend, d'après les observations de SFR, que cette dernière n'a pas souhaité donner suite aux négociations au motif qu'elle avait des doutes sur la stratégie et la démarche d'Afone.


2.1. S'agissant du projet industriel


Afone conclut aux mêmes fins que ses précédentes observations et notamment que SFR n'a jamais émis de doute sur la stratégie d'Afone. Afone rappelle que tout au long des négociations avec SFR, elle a pu affiner son business plan, grâce aux échanges avec SFR, et que ce business plan met en évidence la qualité d'un tel partenariat. Contrairement à ce qu'affirme SFR, Afone souligne que son projet prévoit de conquérir 66 000 clients en trois ans après le lancement de son offre mobile et plus de 100 000 clients mobiles d'ici cinq ans. Ces prévisions sont donc pour Afone bien supérieures aux objectifs minimaux contractuellement imposés par SFR.

S'agissant du taux d'équipement de la cible TPE et PME, Afone indique que cette cible est relativement faible compte tenu du fait que leurs salariés utilisent leurs abonnements personnels à des fins professionnelles et que, sur ce marché, il y a donc un fort potentiel de croissance pour les offres professionnelles passant par l'optimisation des offres souscrites par les utilisateurs. La stratégie d'Afone sur ce segment est d'autant plus pertinente qu'elle vise à proposer à ses clients existants des services mobiles, en plus des services de téléphonie et de monétique qu'elle leur offre déjà. L'objectif poursuivi par Afone est donc d'adresser l'ensemble des besoins de ses clients en matière de communications électroniques, et de leur proposer notamment des offres de convergence.


2.2. Sur les observations apportées par SFR relatives à la personne même d'Afone


Afone conclut aux mêmes fins que ses précédentes observations. En particulier, elle considère que sa contribution à la consultation publique de l'Autorité sur le marché 15, dans laquelle elle se prononçait en faveur d'un modèle de MVNO étendu, n'est pas contradictoire avec son acceptation du modèle ESP proposé par SFR, dans la mesure où ce dernier lui permet de commercialiser à court terme une offre répondant à ses attentes. Enfin, Afone rappelle la logique industrielle et non capitalistique qui anime son projet MVNO, dont elle n'a jamais fait part publiquement.


3. Sur l'obligation pour SFR découlant de son autorisation 3G


Afone conclut aux mêmes fins que ses précédentes observations et considère que l'engagement de SFR porte bien sur l'accès au réseau 2G et au réseau 3G, ce fait étant attesté par les accords MVNO déjà signés par SFR. Afone confirme que si elle n'avait pas dans le cadre de ses négociations avec SFR fait de l'accès au réseau 3G un pré-requis, elle demeure intéressée par un tel accès dans la mesure où celui-ci lui permettrait de développer de nouvelles offres convergentes. Ainsi, Afone souligne que si SFR n'est disposée à lui proposer un accord MVNO qu'à la condition que cet accord couvre le réseau 2G et le réseau 3G, Afone est disposée à accepter cette condition.

Enfin Afone relève que l'analyse par SFR de l'obligation à laquelle elle est soumise n'est pas sérieuse car elle semble n'être à aucun égard contraignant pour SFR.

Vu les nouvelles observations en défense présentées par la société SFR enregistrées le 17 février 2006 ;

SFR renvoie à ses précédentes observations en défense en demandant à l'Autorité de rejeter les demandes présentées par Afone tant dans sa saisine que dans ses observations en réplique.

Néanmoins, SFR souligne qu'Afone est dans l'incapacité de produire le moindre élément écrit de l'accord de principe qu'elle estime avoir trouvé avec SFR.

SFR considère que l'analyse du marché 15 a été menée, et que lorsque l'Autorité a retiré son projet de décision en mai 2005, elle a ainsi adopté une décision de renoncer à réguler pour le moment le marché 15, se réservant le droit de procéder à une nouvelle analyse d'ici la fin de l'année 2006.

Par ailleurs, SFR estime que les conditions requises en vue d'une application du principe d'« interprétation conforme » soulevé par Afone, ne sont pas réunies. En effet, ce principe est lié à l'interprétation des textes nationaux à la lumière des normes communautaires. Or Afone n'invoque pas la non-conformité d'un texte national en vigueur au regard d'une directive communautaire que la France n'aurait pas ou aurait mal transposée.

De plus, SFR souligne qu'Afone ne saurait se prévaloir de la décision no 2004-376 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 4 mai 2004, à l'appui de ses demandes, dans la mesure où l'Autorité a dans cette décision vérifié que la prestation en cause entrait dans la définition de l'accès prévue par l'ancien cadre, et seulement dans un second temps et à titre accessoire, a vérifié qu'elle entrait également dans celle prévue par le nouveau cadre. SFR considère donc que l'Autorité ne peut juridiquement accéder à la demande d'Afone et élargir la définition de l'accès donnée par l'ancien cadre en fonction de celle donnée par le nouveau cadre en vue d'apprécier la portée de l'obligation résultant de l'ancien cadre.

Enfin, SFR estime que l'Autorité ne peut sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE ni lui imposer une obligation nouvelle d'accès, ni lui enjoindre la conclusion d'un contrat.

Sur le premier point, SFR considère que la procédure de règlement de différend ne peut servir de cadre à l'imposition d'une obligation qui n'est pas prévue par le cadre juridique en vigueur, et que de surcroît, cette procédure est inconciliable avec l'ensemble des conditions de fond et de forme qui doivent être respectées lors de l'imposition d'une obligation nouvelle de faire droit aux demandes raisonnables d'accès des MVNO. Enfin, une décision favorable à la demande d'Afone créerait selon SFR une situation inextricable sur le plan juridique. SFR rappelle que même si l'Autorité a déjà eu l'occasion de se prononcer sur le niveau tarifaire de prestations d'interconnexion et d'accès, dans le cas présent, SFR estime que le cadre juridique n'impose aucune obligation de faire droit aux demandes d'accès des MVNO. En outre, SFR souligne qu'à ce jour aucune autorité de régulation nationale n'a imposé d'obligation d'accès au profit de MVNO dans le cadre d'un règlement de différend.



En conséquence, SFR considère donc que l'Autorité ne peut imposer une obligation nouvelle de faire droit aux demandes d'accès des MVNO dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 36-8 du CPCE.

Sur le deuxième point, SFR invoque la jurisprudence de la cour d'appel de Paris relative à l'exercice par la Commission de régulation de l'énergie de son pouvoir de règlement de différend dans deux arrêts en date du 24 février 2004 et du 25 janvier 2005. La cour a selon SFR donné une valeur de principe à l'interdiction faite aux autorités de régulation d'imposer la conclusion d'un contrat d'accès dans le cadre de leurs missions de règlement de différends.

Sur l'obligation résultant pour SFR de son cahier des charges 3G, SFR note qu'Afone n'apporte aucun élément nouveau permettant d'étayer sa prétention selon laquelle SFR serait tenue de faire droit à sa demande d'accès en application de son cahier des charges relatif au réseau 3G.

SFR rappelle que seuls les engagements inclus dans le cahier des charges lui sont opposables et l'engagement de proposer une offre permettant l'accueil d'opérateurs virtuels sur son réseau est sans équivoque limitée au réseau 3G. SFR souligne que le compte rendu des réponses au premier appel à candidatures 3G de l'Autorité n'est pas opposable à SFR et se limite à évoquer la faculté pour SFR de faire bénéficier également les MVNO partenaires pour le réseau 3G d'un accès au réseau 2G.

SFR note qu'Afone reconnaît que SFR peut se réserver le droit de contracter avec les partenaires de son choix et qu'ainsi elle préserve son entière autonomie commerciale.

SFR renvoie à ses précédentes observations et indique que, s'agissant des raisons ayant motivé d'un point de vue opérationnel et économique le rejet de la candidature d'Afone, elle n'a pas, en l'absence de négociation avec Afone, à répondre sur le caractère raisonnable et justifié de la demande de cette dernière et sur les conditions sollicitées dans le cadre d'un accord MVNO. SFR estime utile toutefois de revenir, d'une part, sur les contraintes auxquelles SFR est confrontée dans le contexte actuel et, d'autre part, sur le manque de crédibilité du projet d'Afone.

SFR indique que les contraintes rencontrées par elle sont liées principalement aux développements techniques et informatiques de SFR, lesquels nécessitent la mobilisation de moyens techniques et humains qui restent pour l'essentiel indépendants de la taille et du potentiel de marché du MVNO. Or SFR indique qu'elle dispose d'une capacité d'absorption SI limitée. Elle a déjà accueilli 6 MVNO en 2005 et reste sollicitée par de nombreux acteurs d'envergure nationale, de telle sorte que SFR est confrontée à certains choix. SFR souligne que ces contraintes sont également liées à la capacité du réseau radio. Compte tenu de ces contraintes, SFR réitère son souhait de contracter avec des sociétés dont le potentiel sur le marché de détail est important, et ce d'autant que le partenariat qu'elle propose est de longue durée [...].

SFR déclare procéder, en raison de ces contraintes, à une analyse attentive de chaque candidature en s'appuyant sur une méthode comparative qui lui permet d'écarter les candidatures lui paraissant le moins crédibles.

SFR renvoie à ses précédentes observations relatives à la crédibilité du projet d'Afone et rappelle que le potentiel de 60 000 lignes visé par Afone est économiquement réduit, ce qui a conduit SFR à émettre des doutes sur la pertinence de la stratégie d'Afone. De plus, SFR déclare avoir analysé un risque élevé quant au potentiel de la stratégie d'Afone dans la mesure où l'évolutivité du modèle ESP proposé par SFR qui était souhaitée par Afone n'était pas garantie (cf. fonctionnalités relatives au système de messagerie vocale). Enfin, SFR indique qu'Afone n'avait pas de projet technique précis au-delà de la VMS unifiée, d'où ses doutes sur les perspectives de valorisation d'actifs.

Au-delà de l'analyse objective de la candidature d'Afone, SFR considère qu'elle a été confrontée au cours des échanges avec Afone à un climat relationnel tendu, dégradé, ainsi qu'à une attitude ambiguë voire déloyale d'Afone.

Vu les observations présentées par la société SFR enregistrées le 23 février 2006 relatives au procès-verbal de l'audition d'Afone en date du 26 janvier 2006 ;


1. Sur la minimisation par Afone des contraintes techniques


SFR renvoie à ses précédentes observations en rappelant la complexité technique liée à l'intégration de tout nouveau MVNO et à toute évolution majeure d'un MVNO déjà lancé, lesquelles nécessitent des développements complémentaires, notamment au niveau du système d'information et des paramétrages. Par ailleurs, SFR indique que les nouvelles plates-formes SI de gestion des MVNO constituent un nouvel environnement technique en cours d'évolution et que la qualité de service due par SFR à ses MVNO hébergés n'est pas stabilisée à ce jour, générant des travaux complémentaires de réglages.

SFR considère qu'Afone minimise l'ensemble de ces contraintes techniques supportées par SFR pour l'accueil des MVNO.


2. Sur le refus par Afone de l'idée que sa candidature soit comparée à d'autres


SFR renvoie à ses précédentes observations, rappelle qu'elle doit tenir compte de nombreuses contraintes et souligne qu'elle ne dispose en 2006 que de huit « créneaux d'instanciation » pour tester et mettre en oeuvre les évolutions des MVNO existants ou intégrer de nouveaux MVNO. SFR indique qu'elle dispose à ce jour d'une douzaine de candidats MVNO et ne peut qu'analyser chaque candidature de façon comparative au regard des autres candidatures. SFR rappelle avoir mentionné à Afone qu'elle devait procéder à une sélection comparative des candidatures, dont Afone nie la nécessité.


3. Sur le choix par Afone du réseau 2G ou 3G


SFR s'oppose aux observations d'Afone et précise qu'elle ne pourrait se voir imposer l'obligation de faire droit à la demande d'accès d'Afone sur le fondement de son cahier des charges 3G.

Vu le courrier du chef du service juridique de l'Autorité, en date du 27 février 2006, convoquant les parties à une audience devant le collège le 28 mars 2006 ;

Vu les observations présentées par la société Afone enregistrées le 2 mars 2006 ;

Afone renvoie à ses précédentes observations en réplique demandant à l'Autorité de faire droit à sa demande d'accès sur le réseau mobile de SFR.



Néanmoins, Afone rappelle que l'analyse du marché 15 n'a pas été menée à son terme, dans la mesure où l'Autorité n'a pas pris de décision qui soit visait à imposer des obligations ex ante, soit concluait au caractère concurrentiel du marché (ainsi que l'Ofcom l'a fait sur ce marché en 2003).

Afone estime que le postulat selon lequel SFR ne serait soumise à aucune obligation d'accès aujourd'hui est erroné, dans la mesure où une obligation pèse sur SFR au titre de son autorisation 3G.

Afone considère que même en l'absence d'une obligation ex ante, l'Autorité demeure non seulement compétente mais, plus encore, tenue de se prononcer sur une demande de règlement de différend, dès lors que les conditions posées par l'article L. 36-8 du CPCE sont remplies. Afone conteste aussi la situation que SFR qualifie « d'inextricable d'un point de vue de la sécurité juridique ».

Afone indique que, contrairement aux observations de SFR, laquelle se fonde sur la jurisprudence de la cour d'appel de Paris pour affirmer que l'Autorité ne peut enjoindre la conclusion d'une convention, l'Autorité a déjà fait usage d'un tel pouvoir d'injonction dans le cadre de la procédure de règlement de différend, et que l'exercice de cette prérogative a été dûment validé par cette dernière (arrêts de la cour d'appel de Paris en date du 20 janvier 2004 et du 28 avril 1998).

Afone rappelle que si SFR n'est pas disposée à conclure un accord MVNO avec elle qu'à la condition que cet accord couvre non seulement l'accès au réseau 2G mais aussi celui au réseau 3G, Afone est disposée à accepter cette condition.

Enfin, Afone renvoie à ses précédentes observations en notant que SFR mentionne des éléments nouveaux dans ses dernières écritures, alors qu'elle n'avait jusque lors soulevé aucune difficulté l'empêchant de faire droit à la demande d'Afone.

Afone souligne que les contraintes techniques liées à l'accueil d'un MVNO, de développements informatiques et de capacité du réseau radio, ne constituent pas, en l'espèce, un obstacle à la conclusion d'un accord MVNO, notamment dans la mesure où Afone a accepté l'allongement du délai standard de la phase de paramétrage par SFR ainsi que le paiement d'une somme [...]. De surcroît, Afone rappelle que SFR a, d'une part, prévu dans son contrat MVNO de dimensionner correctement ses équipements à partir de prévisions transmises par les MVNO, et que, d'autre part, SFR n'a jamais avancé une pénurie en ressources en fréquences.

Sur son projet industriel, Afone rappelle que SFR n'a jamais émis le moindre commentaire sur sa crédibilité, tant vis-à-vis du potentiel économique visé par Afone, de sa capacité à atteindre les objectifs assignés ou de l'absence de spécifications techniques précises. Afone rappelle que le potentiel visé ne peut être considéré comme faible au regard des objectifs contractuels fixés par SFR ; qu'elle bénéficie d'une situation privilégiée sur le marché des très petites entreprises et des petites et moyennes entreprises ; et enfin que l'absence de spécifications techniques précises résulte de la volonté de SFR de ne pas donner un tour davantage opérationnel aux échanges qu'elle a avec Afone.

Enfin, Afone rappelle que les négociations avec SFR ont été menées de bonne foi et que ce n'est qu'en dernier recours qu'Afone a saisi l'Autorité d'un règlement de différend. Sur les prétendues « pratiques » mises en oeuvre par Afone pouvant être préjudiciables à SFR, Afone souligne que cette technique est hors du champ de la présente procédure puisque sa validité est soumise à l'appréciation du juge du fond dans le cadre d'une procédure à laquelle SFR n'est pas partie.

Vu le courrier de la société Afone enregistré le 3 mars 2006 relatif aux réponses de SFR au questionnaire des rapporteurs ;

Vu le courrier de la société SFR enregistré le 6 mars 2006 souhaitant un délai pour produire des observations ;

Vu les observations présentées par la société SFR enregistrées le 21 mars 2006 ;


1. L'accord de confidentialité produit par Afone contribue à écarter l'existence

d'un prétendu accord de principe


SFR souligne que la demande d'Afone visant à obtenir la trame du contrat MVNO de SFR ne démontre pas que SFR aurait pris un quelconque engagement ferme de contracter avec Afone. SFR estime que, contrairement aux observations d'Afone, l'accord de confidentialité conclu entre les parties le 11 février 2005 n'évoque pas les éléments essentiels du partenariat de MVNO et au contraire précise explicitement que tant SFR qu'Afone ont exclu que leurs échanges dans le cadre de l'examen de la candidature d'Afone puissent être interprétés comme un engagement de contracter de leur part.


2. Sur le droit de disposer d'un accès par Afone


SFR renvoie à ses précédentes observations en rappelant qu'Afone ne peut se prévaloir du maintien du cadre antérieur en vigueur au motif que l'analyse ex ante du marché 15 n'a pas été menée à son terme, et que l'argumentation d'Afone fondée sur le principe d'interprétation conforme et les conséquences qu'elle pourrait en tirer concernant ses demandes d'accès MVNO sont dénuées de pertinence.

SFR renvoie à ses précédentes observations en rappelant que la valeur de la jurisprudence de la cour d'appel de Paris est difficilement contestable, et que cette dernière relative aux pouvoirs de la CRE est directement transposable aux pouvoirs de l'Autorité.

Enfin, SFR renvoie à ses précédentes observations en soulignant que la référence aux décisions citées par Afone n'est pas pertinente car, dans le cadre de ces décisions, l'Autorité s'appuyait soit sur une base légale au droit d'accès concerné en vigueur à l'époque des faits, soit sur une obligation résultant directement d'une disposition législative (en l'espèce, obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'interconnexion).



3. Sur l'obligation résultant de son cahier des charges 3G


SFR estime que les observations et demandes d'Afone sont infondées juridiquement. SFR renvoie à ses précédentes observations en rappelant que l'obligation de suivre le cadre d'analyse ex ante pour imposer une nouvelle obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès relève des dispositions des articles L. 38 (I, 3°) et D. 310 du CPCE. Ainsi, selon SFR, l'imposition d'une telle obligation sur la base du cahier des charges 3G de SFR contreviendrait au principe du respect de la hiérarchie des normes, puisqu'une telle interprétation d'un texte à valeur réglementaire heurterait les dispositions à valeur législative précitées. De surcroît, l'interprétation de l'arrêté 3G de SFR doit selon SFR être faite à la lumière des textes communautaires, qui prescrivent notamment le respect d'une procédure d'analyse ex ante en vue d'imposer cette obligation d'accès. SFR souligne que, par contre, l'interprétation selon laquelle son cahier des charges 3G ne crée à sa charge qu'une obligation de proposer une offre lorsqu'une candidature lui paraît recevable tout en conservant sa liberté contractuelle respecte à la fois le principe de la hiérarchie des normes et l'interprétation conforme.

SFR demande à l'Autorité de rejeter les demandes d'Afone concernant le réseau 3G qui reposent sur une base juridique erronée.


4. Les raisons qui ont motivé le rejet de la candidature d'Afone


SFR renvoie à ses précédentes observations en rappelant qu'elle a toujours été transparente à l'égard des MVNO sur les contraintes qui l'amènent à mettre en place un processus de sélection des candidats. SFR note qu'Afone rencontre de grandes difficultés pour réfuter les réserves émises par SFR. Enfin, SFR constate qu'Afone confirme les craintes de SFR sur ses pratiques préjudiciables aux opérateurs en admettant être impliquée dans une procédure judiciaire. SFR rappelle qu'elle doit tenir de la loyauté des MVNO potentiels afin de mettre en place un partenariat d'une durée de neuf ans et que, dans ces conditions, il serait inéquitable de lui imposer un tel partenariat.

Vu le courrier de la société SFR enregistré le 22 mars 2006 souhaitant que l'audience devant le collège ne soit pas publique ;

Vu le courrier de la société Afone enregistré le 23 mars 2006 ne s'opposant pas à ce que l'audience devant le collège soit publique ;

Après avoir entendu le 28 mars 2006, lors de l'audience devant le collège (composé de M. Michel Feneyrol, membre du collège présidant la séance, de Mmes Gabrielle Gauthey, Joëlle Toledano et de MM. Edouard Bridoux, Nicolas Curien, Jacques Douffiagues) :

- le rapport de Mme Lucile Badaire-Loiseau, rapporteur présentant les conclusions et les moyens des parties ;

- les observations de Me Jean-Paul Tran Thiet et de M. Philip Fournier, pour la société Afone ;

- les observations de M. Franck Cadoret et de Me Frédérique Dupuis-Toubol, pour la société SFR.

En présence de :

- MM. Philip Fournier, Nathaniel Amsellem, pour la société Afone, Mes Jean-Paul Tran Thiet et Sylvain Justier, Bureau Francis Lefebvre ;

- MM. Franck Cadoret, Arnaud Lucaussy, Jérôme Percheron, Philippe Wang, Mme Marie-Georges Boulay, pour la société SFR, Me Frédérique Dupuis-Toubol et Me Orion Berg, Cabinet Bird & Bird ;

- M. Philippe Distler, directeur général, M. François Lions, directeur général adjoint, Mmes Lucile Badaire-Loiseau, Joëlle Adda, Laure Souvré, MM. Vincent Gougeon, Fabien Fontaine, Rémi Stéfanini, Benoît Loutrel, Fabrice Alves, agents de l'Autorité ;



Sur la publicité de l'audience :

L'article 15 du règlement intérieur susvisé dispose que « l'audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n'est pas conjointe le collège de l'Autorité en délibère ». SFR a indiqué par courrier enregistré le 22 mars 2006 qu'elle souhaitait que l'audience ne soit pas publique. Afone a indiqué par courrier enregistré le 23 mars 2006 qu'elle ne s'opposait pas à ce que l'audience soit publique. Interrogée sur ce point par le membre du collège présidant la séance avant l'ouverture des débats de l'audience, Afone a indiqué qu'elle ne s'opposait pas à ce que l'audience ne soit pas publique si SFR le désirait. Ainsi, l'audience n'a pas été publique.

Le collège (MM. Edouard Bridoux, Nicolas Curien, Jacques Douffiagues, Michel Feneyrol et Mmes Gabrielle Gauthey, Joëlle Toledano) en ayant délibéré le 4 avril 2006, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité,

Adopte la présente décision fondée sur les faits et les moyens exposés ci-après.


I. - SUR LA RECEVABILITÉ DE LA SAISINE FORMÉE PAR LA SOCIÉTÉ AFONE

1.1. Le litige est relatif à un refus d'accorder l'accès, ce qui suffit à fonder la compétence de l'Autorité


En application des dispositions de l'article L. 36-8-I du CPCE, l'Autorité peut être saisie par l'une ou l'autre des parties « en cas de refus d'accès ou d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de communications électroniques ».

Il résulte de ces dispositions que les conditions susmentionnées qui fondent la compétence de l'Autorité pour connaître d'un différend sont alternatives. Dans ces conditions, et alternativement à tout échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'accès ou d'interconnexion, le refus d'accorder l'accès suffit à fonder la compétence de l'Autorité pour connaître d'un différend entre deux opérateurs de communications électroniques.

Aux termes des dispositions de l'article L. 32 (8°) du CPCE « on entend par accès toute mise à disposition de moyens, matériels ou logiciels, ou de services, en vue de permettre au bénéficiaire de fournir des services de communications électroniques (...) ».

Par ailleurs, au regard des dispositions de l'article L. 32 (6°) du CPCE « on entend par services de communications électroniques les prestations consistant entièrement ou principalement en la fourniture de communications électroniques ».

Enfin, « on entend par communications électroniques les émissions, transmissions ou réceptions de signes, de signaux, d'écrits, d'images ou de sons, par voie électromagnétique » (art. L. 32 [1°] du CPCE).

La société Afone a saisi l'Autorité d'une demande de règlement de différend sur le fondement des dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE en vue de régler un différend relatif à la conclusion d'un accord MVNO. Les conventions de MVNO ont pour objet de permettre à un acteur qualifié d'« opérateur mobile virtuel » qui ne dispose pas d'un réseau radioélectrique et de ressources en fréquences radioélectriques, de fournir à l'utilisateur un service de téléphonie mobile à partir du réseau de l'opérateur « hôte ».

Dans le cadre d'un accord MVNO, l'opérateur « hôte » va fournir à l'opérateur « virtuel » une prestation d'accès et de départ d'appel sur son réseau radioélectrique. Dans ces conditions, l'opérateur « virtuel » est en mesure de fournir à l'utilisateur final un service de communications électroniques au sens des dispositions de l'article L. 32 (1° et 6°) du CPCE.

Il résulte de ces éléments que la convention de MVNO relève du régime juridique de l'accès. Au demeurant, ce point n'est pas contesté par la partie défenderesse.

Dans ces conditions, le présent litige étant relatif à un refus d'accès, la compétence de l'Autorité au titre de l'article L. 36-8-I du CPCE se trouve établie.


1.2. Au surplus, les échanges entre les parties peuvent être qualifiés d'échec des négociations commerciales

A. - Sur le déroulement des échanges entre les sociétés Afone et SFR


Il ressort des pièces versées au dossier de procédure que la société Afone a pris contact, en septembre 2004, avec SFR en vue d'engager des négociations commerciales visant à la conclusion d'un accord MVNO. SFR a indiqué néanmoins, dans ses observations en défense enregistrées le 18 janvier 2006, qu'elle procède dans le cadre de la conclusion d'accord MVNO à une présélection des candidatures des acteurs intéressés par la conclusion d'un partenariat MVNO.

Afone et SFR ont établi une correspondance électronique en vue de convenir de réunions. Une première réunion s'est tenue le 8 novembre 2004, au cours de laquelle Afone a présenté à SFR la teneur de son projet MVNO.

Par courrier électronique en date du 20 décembre 2004, Afone a communiqué à SFR les documents présentés au cours de la première réunion. Une seconde réunion s'est déroulée le 7 février 2005, au cours de laquelle SFR a exposé les éléments analysés dans le cadre d'un projet MVNO et a réitéré sa demande d'obtenir des informations plus détaillées sur le projet MVNO d'Afone. Afone a adressé à SFR un compte rendu de la réunion qui, selon cette dernière, reflétait dans les grandes lignes la teneur de la réunion quand bien même SFR a précisé ne pas avoir validé ce compte rendu.

Par courrier électronique en date du 10 février 2005, SFR a communiqué à Afone un modèle d'accord de confidentialité dont la conclusion est intervenue, comme l'indique la requête introductive d'Afone, le 25 février 2005, et a demandé à Afone les éléments nécessaires à la finalisation de cet accord. SFR et Afone ont convenu d'une troisième réunion en date du 7 mars 2005. Dans ces conditions et en vue de répondre aux attentes de SFR, Afone a communiqué à SFR préalablement à la tenue de la réunion, au regard du courriel adressé à Afone le 10 février 2005, son projet MVNO dans lequel Afone a exposé ses attentes et ses objectifs dans le cadre de la conclusion d'un accord MVNO. Néanmoins, SFR a considéré que les éléments qui lui avaient été communiqués par Afone demeuraient insuffisants.



Dans le cadre du compte rendu établi par Afone, cette dernière a indiqué que SFR lui aurait présenté oralement les principaux éléments du contrat MVNO que SFR entend proposer. Par courrier électronique en date du 30 mars 2005, Afone a adressé à SFR le compte rendu de la réunion du 7 mars 2005 joint d'un fichier listant les fonctionnalités dont elle souhaitait bénéficier dans le cadre d'un accord MVNO. Néanmoins, SFR a contesté, par courrier électronique en date du 4 avril 2005, le compte rendu de la réunion du 7 mars 2005 établi par Afone qui ne reflétait pas, selon les observations en défense déposées par SFR, la teneur des échanges qui ont eu lieu au cours de la réunion. SFR a informé Afone, par courrier électronique en date du 4 avril 2005, qu'elle désirait avoir une validation des modèles économique et technique exposés oralement par elle, la confirmation que ces modèles répondent au projet MVNO voulu par Afone et la confirmation du potentiel de marché d'Afone.

Par courrier électronique en date du 11 avril 2005, Afone a informé SFR qu'elle validait le modèle économique proposé par SFR tout en précisant, relativement au modèle technique proposé par SFR, qu'elle souhaitait obtenir davantage d'informations avant de se prononcer sur sa compatibilité avec son projet MVNO.

Dans le cadre de ces correspondances, une quatrième réunion s'est tenue en date du 12 avril 2005. Au cours de cette réunion, SFR a examiné le « business plan » transmis par Afone et interrogé cette dernière sur le bien-fondé de son positionnement dans le cadre de ses échanges avec SFR, au regard des éléments qu'Afone avait développés dans sa contribution à la consultation publique de l'Autorité sur le marché de l'accès et du départ d'appel sur les réseaux mobiles ouverts au public lancée le 17 décembre 2004. Afone a indiqué à SFR qu'elle était prête à accepter les tarifs appliqués par SFR dans le cadre d'un contrat MVNO dans la mesure où elle considère ces tarifs comme non discriminatoires au regard de ceux consentis aux autres MVNO hébergés sur le réseau de SFR. Par ailleurs, dans le cadre de cette même réunion, SFR a indiqué à Afone qu'elle ne pouvait envisager un partenariat de MVNO avant le mois d'avril 2006. En outre, SFR a fait part à Afone de son inquiétude sur l'aptitude des parties à parvenir à un accord sur la base du modèle d'accord MVNO en raison de l'attitude d'Afone qui, selon les observations en défense déposées par SFR, a contesté publiquement le modèle ESP proposé par SFR et notamment le prix de la prestation.

Par courrier électronique en date du 13 avril 2005, Afone a confirmé à SFR, d'une part, qu'elle acceptait les conditions techniques et économiques proposées par SFR dans la mesure où elles étaient non discriminatoires et, d'autre part, qu'elle acceptait la date de lancement envisagée. Afone a estimé disposer dans ces conditions d'un « accord de principe » et a demandé à SFR que lui soit communiqué par écrit le projet de contrat MVNO.

Afone a indiqué que SFR avait gardé le silence pendant près d'un mois et qu'après diverses relances elle ne lui avait pas communiqué un projet d'accord MVNO, ce qui, selon Afone, constitue un échec des négociations. Dans ces conditions, Afone a adressé à SFR un courrier en date du 24 mai 2005 dans lequel Afone rappelle à SFR son accord sur l'ensemble des exigences formulées par SFR et réitère sa demande d'obtenir la communication d'une version écrite de l'accord MVNO.

SFR a adressé, en réponse aux demandes formulées par Afone, un courrier électronique en date du 31 mai 2005 dans lequel SFR a informé Afone qu'elle n'était pas en mesure de s'engager, au 31 mai 2005, ni sur un délai ferme de réponse ni sur une certitude d'engagement, dans la mesure où sa démarche s'inscrivait dans le cadre d'une analyse globale des dossiers de candidature qui lui ont été adressés en vue de conclure des accords MVNO.

Afone a, par courrier en date du 18 juillet 2005, mis en demeure SFR de lui communiquer un projet de contrat écrit MVNO en lui précisant que, faute d'une transmission du contrat dans les quinze jours, elle ne pourra que constater le refus par SFR de faire droit à sa demande d'accès à son réseau dans le cadre de leur accord de principe.

En réponse, SFR a adressé à Afone un courrier en date du 29 juillet 2005, dans lequel elle a contesté l'existence d'un « accord de principe » entre les parties et a confirmé sa position de poursuivre l'analyse du projet d'Afone, en lui proposant une réunion début septembre 2005 pour permettre à Afone de compléter la présentation de son projet MVNO.

Afone a informé SFR par courrier en date du 1er septembre 2005 qu'elle acceptait dans son principe l'organisation d'une nouvelle réunion. Néanmoins, Afone a expressément indiqué, dans ce courrier, que le 20 septembre 2005 constituait la date ultime à laquelle le projet de contrat devait lui avoir été communiqué, faute de quoi Afone s'engagerait dans une phase contentieuse. Dans le cadre de la réunion qui s'est déroulée le 14 septembre 2005, Afone a exposé à SFR que son projet MVNO restait inchangé.

Par courrier en date du 5 octobre 2005, SFR a informé Afone qu'après analyse de son dossier de candidature elle ne pouvait donner suite à sa demande de conclusion d'un accord MVNO sur son réseau.


B. - Sur la qualification de ces échanges d'échec des négociations commerciales


Au regard des échanges qui se sont déroulés entre les sociétés Afone et SFR, il apparaît que la société Afone a entrepris des démarches dès le mois de septembre 2004 en vue de négocier l'accès au réseau mobile de la société SFR aux fins de conclure un accord MVNO. SFR soutient néanmoins, dans ses observations en défense enregistrées le 18 janvier 2006, que les parties ne sont jamais entrées en négociation et que leurs relations se sont limitées à la présentation de leurs projets respectifs. SFR soutient également, dans ses observations en duplique enregistrées le 17 février 2006, ne pas avoir émis d'offre ferme et précise à l'attention d'Afone. Dans ces conditions, SFR estime qu'Afone n'apporte pas d'élément permettant d'établir l'ouverture de négociations contractuelles et la conclusion d'un accord de principe entre Afone et SFR.

Il ressort des pièces transmises par les parties à la procédure de règlement de différend qu'il ne peut être contesté que des correspondances, des entretiens et des réunions se sont effectivement tenus entre les sociétés SFR et Afone relativement à la possibilité de conclure un accord MVNO.

L'Autorité constate, au regard des pièces du dossier et plus particulièrement du courrier recommandé adressé par SFR à Afone en date du 5 avril 2005, que la société Afone n'a pas obtenu l'accès au réseau mobile de SFR en vue de la conclusion d'un contrat MVNO.



L'Autorité relève, dans le cadre de la présente procédure, que des négociations se sont effectivement tenues entre les sociétés Afone et SFR. En effet, dans le cadre de la réunion du 7 mars 2005 faisant suite à la communication d'un accord de confidentialité et au cours de laquelle Afone a présenté son projet, SFR a sollicité d'Afone que cette dernière valide les modèles économique et technique du projet MVNO tels que proposés par SFR à l'ensemble de ses interlocuteurs. En outre, il apparaît, au regard des pièces du dossier, que la société SFR a présenté et proposé à Afone ses modèles économique et technique d'accueil de MVNO ; que la société Afone a, par courrier électronique en date du 13 avril 2005, validé ces modèles technique et économique et a confirmé à SFR son accord relativement à la date de lancement d'un partenariat MVNO en avril 2006.

Nonobstant l'accord de la société Afone sur les modèles technique et économique du projet MVNO, SFR n'a pas proposé d'offre à la société Afone. Dans ces conditions les échanges intervenus entre les sociétés Afone et SFR doivent être qualifiés de négociations commerciales et l'échec auquel ils ont abouti d'échec des négociations commerciales au sens de l'article L. 36-8 du CPCE.

Pour toutes ces raisons, l'Autorité considère que la demande de la société Afone est recevable et se déclare compétente pour connaître du différend qui l'oppose à SFR en ce qui concerne le refus de SFR d'accorder une prestation d'accès à la société Afone dans le cadre de la conclusion d'un accord MVNO.


II. - SUR LE FOND


Sur l'engagement de SFR au titre de son autorisation UMTS :

Le paragraphe 1.2 du chapitre 1er du cahier des charges annexé à l'arrêté du 18 juillet 2001 autorisant la Société française du radiotéléphone à établir et exploiter un réseau radioélectrique de troisième génération ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public dispose que « conformément aux engagements souscrits dans son dossier de candidature, l'opérateur : (...) propose une offre permettant l'accueil d'opérateurs virtuels sur son réseau ».

Cette disposition résulte de la procédure d'attribution des autorisations UMTS. En effet, par décision no 2000-835 en date du 28 juillet 2000, l'Autorité a proposé au ministre chargé des télécommunications les modalités et les conditions d'attribution des autorisations UMTS.

Le 18 août 2000, le Gouvernement a publié la proposition de l'Autorité, lançant officiellement l'appel à candidatures pour l'octroi, en métropole, de quatre licences UMTS d'une durée de quinze ans. Conformément à la proposition de l'Autorité, le Gouvernement a annoncé que les candidats seraient sélectionnés dans le cadre d'une procédure dite de soumission comparative fondée sur quatorze critères de sélection. Chaque candidature devait faire l'objet d'une notation sur chacun de ces critères, déterminant une note globale sur 500 points. Le 31 mai 2001, l'Autorité a publié la décision no 2001-417 relative au résultat et au compte rendu de la procédure d'attribution des autorisations UMTS dont il ressort que deux candidats - France Télécom Mobiles SA (FTM) et Société française du radiotéléphone (SFR) - avaient déposé un dossier de candidature. L'Autorité a annoncé dans la décision no 2001-417 que les deux candidats avaient été retenus, en précisant que les notes respectivement obtenues par FTM et SFR étaient de 379 et 410 sur un barème de points de 500.

Il ressort de la décision no 2001-417, et plus particulièrement de l'analyse du troisième critère de sélection des candidatures relatif aux « relations avec les fournisseurs de services », que les notes respectivement obtenues par FTM et SFR, sur ce point, ont été de 20 et 24 sur un barème de points de 30. L'Autorité a été amenée à constater, toujours dans la décision no 2001-417, que, s'agissant de l'évaluation des candidats sur ce critère, « SFR prévoit une politique d'ouverture de son réseau concernant non seulement des fournisseurs de services mais aussi des opérateurs mobiles virtuels, qui est ainsi nettement plus poussée que celle mentionnée par FTM ». En particulier, le dossier de candidature de FTM n'avait pas abordé la problématique des opérateurs mobiles virtuels tandis que « l'ouverture aux opérateurs mobiles virtuels [était] un élément à part entière du plan d'affaires de SFR ». En effet, SFR a proposé et détaillé dans son dossier de candidature les engagements qu'elle entendait souscrire dans le cadre de ses relations avec les fournisseurs de services. Au regard de ces engagements, SFR s'engageait à proposer une offre permettant l'accueil d'opérateurs virtuels sur son réseau.

Dans la décision no 2001-417 l'Autorité relève expressément, s'agissant de cette offre, qu'« un projet d'accord type est proposé par SFR » et que « les opérateurs mobiles virtuels pourront profiter de la couverture 2G et 3G de SFR ».

Il résulte de ce qui précède que SFR a pris de manière volontaire l'engagement de proposer un projet d'accord type relatif à l'ouverture de son réseau aux opérateurs mobiles virtuels. Cet engagement a bien été formulé dans le cadre d'un appel à candidatures rentrant dans le champ d'application de l'article L. 42-2. La reprise, dans l'arrêté d'autorisation du 18 juillet 2001 qui lui a été délivré, de cet engagement de proposer une offre permettant l'accueil d'opérateurs virtuels sur son réseau résulte de l'application directe des dispositions de l'article L. 42-1-II (6°) du CPCE, au terme desquelles l'autorisation d'utilisation des fréquences radioélectriques attribuée par l'Autorité « précise les conditions d'utilisation de la fréquence ou de la bande de fréquences qui portent [...] sur les engagements pris par le titulaire dans le cadre de l'appel à candidatures prévu à l'article L. 42-2 ».

Sur le respect de l'engagement de SFR vis-à-vis d'Afone :

Au regard des observations présentées par SFR, notamment pendant son audition, cette dernière interprète cette clause de son cahier des charges comme valant simple obligation « de proposer une offre, c'est-à-dire d'entamer effectivement des négociations autour d'une offre quand une candidature lui apparaît recevable » tout en « disposant pleinement de sa liberté contractuelle ». Par ailleurs, SFR considère que son engagement serait satisfait par le seul fait d'avoir signé des accords MVNO avec plusieurs opérateurs virtuels.

Toutefois, l'Autorité relève que l'interprétation faite par SFR des dispositions relatives à ses engagements issus de l'autorisation UMTS reviendrait à reconnaître à SFR la possibilité de soumettre la proposition d'une offre à son appréciation de la recevabilité d'une candidature et viderait, par voie de conséquence, l'engagement pris dans le cadre de l'appel à candidatures de toute valeur. En effet, considérer que la liberté contractuelle de SFR n'est pas altérée par l'existence de la disposition de son cahier des charges résultant de son engagement revient à considérer que l'engagement pris ne revêt plus aucun caractère contraignant pour SFR et n'a donc plus valeur d'obligation.



L'Autorité relève également que cet engagement a été un élément différenciant de la candidature de SFR et qu'il a été pris en compte lors de l'attribution des notations respectives des candidats.

Il résulte de ce qui précède que la liberté contractuelle de SFR est encadrée, en ce qui concerne l'accès à son réseau, et que cet encadrement réside dans le respect par SFR de son engagement de proposer une offre permettant l'accueil d'opérateurs mobiles virtuels sur son réseau.

S'agissant des modalités selon lesquelles une telle offre doit être formulée, l'Autorité rappelle en premier lieu les termes de la décision no 2001-417 précitée : « l'analyse stratégique conduite par SFR [dans la conduite de son ouverture aux opérateurs mobiles virtuels] l'encourage à concentrer ses efforts sur les acteurs qui disposent soit d'un avantage concurrentiel sur les clients à conquérir, soit d'un avantage sur les services et les contenus proposés ».

Au cas d'espèce, il résulte de l'instruction qu'Afone a formulé, dès le mois de septembre 2004, une demande d'accès au réseau de SFR, afin de commercialiser une offre de convergence visant à fournir aux clients un ensemble de services : de téléphonie fixe, de téléphonie mobile, d'accès internet ainsi qu'éventuellement de monétique et télésurveillance. A travers cette offre, Afone viserait le segment du marché des très petites entreprises (TPE) et des petites et moyennes entreprises, qu'il adresse déjà aujourd'hui et sur lequel il soutient détenir une certaine expertise. La société Afone fait valoir qu'elle bénéficie d'une base commerciale existante (plus de 300 000 clients) ainsi que d'un savoir-faire logistique et commercial, qu'elle s'estime capable de conquérir près de 60 000 clients sur ses trois premiers exercices en tant qu'opérateur virtuel ciblant les TPE. Par ailleurs, Afone déclarerait présenter une surface financière avérée ; à cet égard il aurait confirmé à SFR pouvoir contribuer au versement requis par SFR pour couvrir les coûts liés à la phase de paramétrage et de développements informatiques.

De manière plus générale, Afone indique avoir accepté l'ensemble des conditions tarifaires et techniques posées par SFR pour l'accueil d'opérateurs virtuels sur son réseau, et s'être donc conformée aux principales exigences formulées oralement par SFR.

Au regard des éléments développés ci-dessus, en l'état du dossier, la candidature d'Afone apparaît cohérente avec l'engagement pris par SFR dans le cadre de son dossier de réponse à l'appel à candidatures, selon les termes de la décision no 2001-417. Aussi SFR doit-elle formuler une offre à l'attention d'Afone.

En second lieu, l'Autorité considère que l'offre proposée par SFR doit permettre effectivement l'accueil d'opérateurs mobiles virtuels sur son réseau. Dans le cadre de l'appel à candidatures, SFR a transmis un projet d'accord type à l'Autorité à l'appui de son engagement de proposer une offre permettant l'accueil d'opérateurs mobiles virtuels sur son réseau. Toutefois, l'Autorité souhaite préciser que l'obligation incombant à SFR de respecter son engagement ne préjuge en rien de l'autonomie commerciale de SFR dans la formulation d'une offre individualisée au cas par cas prenant en compte les spécificités du demandeur et les contraintes opérationnelles de SFR.

S'agissant des autres demandes d'Afone, il résulte de l'absence de formulation d'une offre ferme et précise par SFR à Afone qu'aucune négociation relative aux modalités de l'accès n'a pu avoir lieu entre les parties sur la base d'une telle offre proposée par SFR pour en préciser ou adapter les clauses contractuelles. Or, au regard de l'engagement pris par SFR, la négociation entre les parties doit avoir lieu sur la seule base de l'offre proposée par SFR. En conséquence, l'Autorité considère prématuré de se prononcer sur les autres demandes d'Afone et renvoie les parties à la négociation sur la base de l'offre proposée par SFR à Afone.

Pour toutes ces raisons, l'Autorité enjoint SFR de proposer à Afone, dans le respect de ses engagements pris au titre de son autorisation UMTS, une offre permettant l'accueil d'Afone en tant qu'opérateur mobile virtuel sur son réseau.

Dès lors, l'Autorité considère qu'il n'est pas nécessaire de se prononcer sur les autres moyens invoqués par Afone.

Sur le moyen soulevé par SFR relatif à l'articulation du règlement de différend et de l'analyse de marché :

L'Autorité entend préciser que l'injonction qui est faite à SFR de respecter son engagement vis-à-vis de la société Afone ne lui impose pas une obligation de faire droit aux demandes raisonnables d'accès à son réseau. L'Autorité considère donc que l'obligation de SFR de respecter son engagement vis-à-vis d'Afone est distincte et indépendante de toute obligation de faire droit à toute demande raisonnable d'accès à son réseau qui pourrait résulter de la procédure d'analyse de marché relative au marché de gros de l'accès et du départ sur les réseaux mobiles ouverts au public (marché no 15 de la recommandation C[2003]/497 du 11 février 2003).

En outre, l'Autorité constate que les engagements pris de manière volontaire dans le cadre d'un appel à candidatures s'imposent aux opérateurs au titre de l'article L. 42-1-II (6°) du CPCE, indépendamment de tout processus d'analyse des marchés issu de l'article L. 37-1 du CPCE. A ce jour, l'Autorité estime qu'aucune obligation n'a été imposée à SFR en application des articles L. 37-1 et suivants, au titre de l'analyse du marché no 15.

Enfin, l'Autorité renvoie à ses décisions no 2005-0929 et no 2005-0930 :

« L'Autorité rappelle qu'elle est tenue de trancher un différend, dans la mesure où la demande est recevable au regard des dispositions de l'article L. 36-8 du CPCE, et ce, quand bien même une analyse de marché serait en cours concernant le marché en cause (au cas d'espèce le marché no 15).

En effet, sur le fondement de l'article L. 36-8-I précité du CPCE, l'Autorité tranche les litiges en précisant "les conditions équitables d'ordre technique et financier, dans lesquelles l'interconnexion et l'accès doivent être assurés. Suivant les prescriptions de l'article R. 11-1 du CPCE, elle rend sa décision dans le délai de quatre mois sauf circonstance exceptionnelle.

La mise en oeuvre de ce mécanisme ne saurait donc être confondue avec la procédure distincte d'analyse des marchés qui, en application des dispositions des articles L. 37-1 et suivants du CPCE, vise à imposer des obligations réglementaires ex ante au vu des obstacles au développement de la concurrence identifiés sur le marché concerné. En outre, cette procédure suppose de procéder à une consultation publique, de recueillir l'avis du Conseil de la concurrence et de notifier les projets de décisions à la Commission européenne.



Dans le premier cas, il est question de mettre en oeuvre une compétence quasi juridictionnelle, sous le contrôle du juge judiciaire, dans les conditions prévues par le législateur et de prononcer à ce titre, ainsi que le rappelle le Conseil constitutionnel, "des décisions exécutoires prises dans l'exercice de prérogatives de puissance publique (1).

Dans le second cas, il s'agit de mener sur la base de critères précis une analyse de l'évolution de la situation concurrentielle sur un marché donné pour, selon les situations, déterminer les meilleurs dispositifs de correction ex ante susceptibles d'être appliqués pour remédier aux imperfections qui auront pu être identifiées.

Les deux mécanismes sont autonomes et ne s'excluent nullement.

Un règlement de différend peut ainsi intervenir dans le contexte d'un litige formé à l'occasion de l'exercice des activités de communications électroniques sur un marché régulé au titre de la régulation asymétrique ex ante sectorielle relative à l'analyse de marché. De même, un litige peut tout aussi bien être tranché, notamment sur le fondement de l'équité, entre des opérateurs pour des prestations non régulées, mais relevant du régime de l'accès ou de l'interconnexion.

Les fondements juridiques des deux procédures sont distincts, l'objet du règlement de litige est différent de celui de l'analyse des marchés et leurs effets ne sont pas identiques. Aucune priorité ni aucune subordination ne saurait être accordée à l'une plutôt qu'à l'autre. Dès lors, l'ARCEP ne peut écarter la compétence qu'elle tire des dispositions de l'article L. 36-8 susvisé. »

En conséquence de ce qui précède, l'Autorité décide :


Article 1


SFR doit proposer à Afone, dans un délai de six semaines à compter de la notification de la présente décision, dans le respect de ses engagements pris au titre de son autorisation UMTS, une offre permettant l'accueil d'Afone en tant qu'opérateur mobile virtuel sur son réseau. L'Autorité renvoie les parties à la négociation sur la base de cette proposition faite par SFR à Afone.

Article 2


Le surplus des demandes et conclusions présentées par Afone et SFR est rejeté.

Article 3


Le chef du service juridique ou son adjoint est chargé de notifier aux sociétés Afone et SFR la présente décision et de veiller à son exécution. Elle sera rendue publique, sous réserve des secrets protégés par la loi, et publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 4 avril 2006.


Le membre du collège présidant la séance,

M. Feneyrol


(1) Conseil constitutionnel, décision no 96-378 DC du 23 juillet 1996, RJC-I 675. [...] passages relevant des secrets protégés par la loi.