J.O. 105 du 5 mai 2006       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Avis n° 2005-1008 du 17 novembre 2005 sur les projets de décret modifiant la partie réglementaire du code des postes et des communications électroniques et visant, d'une part, la régulation des activités postales (les modalités de délivrance des autorisations et les conditions de fourniture des services postaux, les procédures de règlement de différends et de conciliation et, enfin, les conditions dans lesquelles les fonctionnaires et agents peuvent être habilités et assermentés), d'autre part, la suppression de l'institution du médiateur du service universel postal


NOR : ARTR0500109V



L'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes,

Vu la directive 97/67 /CE du Parlement européen et du Conseil du 15 décembre 1997 concernant les règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité du service ;

Vu la directive 2002/39 /CE du Parlement européen et du Conseil du 10 juin 2002 modifiant la directive 97/67 /CE en ce qui concerne la poursuite de l'ouverture à la concurrence des services postaux de la Communauté ;

Vu le code des postes et des communications électroniques, et notamment les articles L. 3 et L. 5-1, L. 5-4, L. 5-5, L. 5-6, L. 5-7, L. 5-9 et L. 20 ;

Vu la loi no 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales ;

Vu la demande d'avis du ministre délégué à l'industrie en date du 8 novembre 2005 ;

Après en avoir délibéré le 17 novembre 2005,

Les saisines sur les projets de décrets susvisés marquent le lancement des nouvelles compétences de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes sur la régulation du secteur postal et lui permettent de rendre son premier avis sur la mise en oeuvre du nouveau cadre réglementaire.

En effet, par courrier en date du 8 novembre 2005, le ministre délégué à l'industrie a adressé une demande d'avis à l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes portant sur quatre projets de décrets d'application de la loi no 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales et qui modifient la partie règlementaire du code des postes et des communications électroniques :

1. Le projet de décret en Conseil d'Etat qui doit préciser les conditions et les modalités d'application de l'article L. 5-1 relatif aux autorisations, et notamment les normes de qualité de service et les conditions de leur contrôle ;

2. Le projet de décret en Conseil d'Etat qui doit déterminer les conditions d'application de l'article L. 5-6 relatif à la procédure de règlement de différends ;

3. Le projet de décret en Conseil d'Etat qui doit fixer les conditions dans lesquelles les fonctionnaires et agents du ministère chargé des postes et de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes seront habilités et assermentés afin de mener des enquêtes ;

4. Enfin, le projet de décret portant suppression du médiateur du service universel postal et portant modification de la deuxième partie (décrets en Conseil d'Etat) du code des postes et des communications électroniques.



I. - Cadre général d'examen de ces décrets


En application de l'article 18 de la loi no 2005-516 du 20 mai 2005 relative à la régulation des activités postales, l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (ARCEP) dispose, à compter du 1er novembre 2005, de compétences dans plusieurs domaines touchant à la régulation du secteur postal, notamment la délivrance d'autorisations à certains prestataires de services postaux et la procédure de règlement de différends. L'effectivité des compétences de l'Autorité ne sera cependant assurée qu'après publication des décrets d'application des articles L. 5-1 du code des postes et des communications électroniques (CPCE) sur les autorisations et L. 5-6 du CPCE sur la procédure de règlement de différends.

Dans ces conditions, il apparaît indispensable à l'Autorité que ces décrets soient publiés dans les meilleurs délais.

Toutefois, le cadre réglementaire sera encore incomplet dans la mesure où d'autres décrets d'application seront encore nécessaires et en particulier le décret relatif au service universel postal et aux obligations de service public. Afin d'assurer un maximum de sécurité juridique au secteur postal et de permettre le développement de la régulation dans un cadre réglementaire stabilisé, il est également nécessaire que la totalité des décrets d'application puisse être publiée le plus rapidement possible.


II. - Sur le projet de décret relatif aux autorisations


L'analyse des termes de la loi conduit l'Autorité à souligner les points suivants :

- le régime d'autorisation ne doit pas constituer une barrière à l'entrée sur le marché, par des conditions excessives ou des procédures disproportionnées ;

- il doit donner à l'Autorité les moyens d'information suffisants pour assurer sa mission de contrôle et de sanction en cas de manquement ;

- il doit assurer un équilibre entre les obligations qu'il fait peser sur les opérateurs autorisés et les droits que ceux-ci tirent de la situation d'opérateur autorisé.

Conformément à ces objectifs, l'Autorité a examiné successivement les points essentiels du projet de décret relatif aux modalités de délivrance des autorisations et formule les observations suivantes :


1. L'étendue et les modalités de l'information à fournir

par le demandeur en vue de la délivrance de l'autorisation


En amont de la délivrance de l'autorisation, il est essentiel pour l'Autorité de connaître au mieux :

- comment l'opérateur entend répondre aux besoins des usagers et de pouvoir appréhender facilement les caractéristiques techniques du service offert et de l'outil de production utilisé ;

- le modèle économique de l'activité.

Au demeurant, ces informations sont indispensables pour libeller l'autorisation, qui doit être publiée et dont le CPCE fixe le contenu. A cet égard, l'Autorité estime que les dispositions prévues dans le projet de décret concernant la fourniture de pièces précises, et le formalisme qui doit être respecté quant à la demande d'autorisation, sont nécessaires et proportionnées aux besoins de l'Autorité ; elles lui permettront d'évaluer les demandes et de délivrer les autorisations dans de bonnes conditions.


2. Les procédures de délivrance


L'Autorité souhaite que les contraintes attachées à la délivrance des autorisations soient proportionnées aux enjeux de l'autorisation et des activités concernées. Or, il apparaît que ceux-ci sont variables puisque l'autorisation est requise pour des catégories de services très différentes. La loi sur la régulation des activités postales susvisée énumère les situations suivantes :

- les envois transfrontières : cette activité consiste à grouper des envois à destination de l'étranger ou en provenance de l'étranger, qui seront distribués par des opérateurs postaux de service universel ou des opérateurs sous le contrôle des autorités de réglementation de pays tiers ;

- des activités de distribution sur le territoire national, exercées par l'opérateur historique et de nouveaux entrants sur le marché, au nombre desquels les services de portage de presse, qui opèrent déjà sur le marché de la distribution d'envois à domicile ;

- l'offre de services d'envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives et juridictionnelles.

Le projet de décret prévoit deux procédures de délivrance d'autorisations, en fonction des activités concernées. En effet, selon la nature de l'activité envisagée et selon le niveau d'exigence qui leur sont attachés, il pourra être attribué une autorisation implicite sur la base d'une liste de caractéristiques établies préalablement pour l'ensemble des prestataires ou une autorisation expresse.

Pour les services d'envois de correspondance transfrontière, ainsi que pour les services d'envois de correspondance incluant la distribution, offerts par les porteurs et les vendeurs colporteurs de presse, l'ARCEP devra publier les caractéristiques attendues pour l'obtention d'une autorisation et « le silence gardé pendant plus de deux mois à compter de la réception d'un dossier complet par l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes vaut décision d'acceptation sur la base de cette liste de caractéristiques » (art. R. 4-3 [b]). Une telle procédure équivaut pour ce type d'activité à prévoir un régime simplifié d'autorisation sur des marchés d'ores et déjà ouverts à la concurrence.

Par contre, une procédure plus encadrée est organisée pour les services d'envois recommandés utilisés dans le cadre de procédures administratives et juridictionnelles ainsi que les services d'envois de correspondance incluant la distribution, rendus par des entreprises autres que les porteurs et les vendeurs colporteurs de presse. En effet, l'ARCEP, dans ces cas, devra instruire les demandes et délivrer, si la demande est fondée, dans un délai de deux mois, les autorisations de façon expresse (art. R. 4-3 [a]).

L'Autorité considère que ce double système d'autorisations est justifié en raison de la diversité de ces activités sur des marchés plus ou moins ouverts à la concurrence. De plus, ce système garantit que les opérateurs fournissant une activité identique seront soumis aux mêmes contraintes en matière d'autorisation.

Ce régime répond par ailleurs aux préoccupations du Conseil de la concurrence dans son avis no 2003-A-06 du 16 mai 2003 sur la loi postale. Il estimait (1) en effet qu'« une simplification de la procédure d'autorisation serait souhaitable afin de préserver le dynamisme de la concurrence sur le marché et ne pas l'entraver par des démarches lourdes d'instruction à l'ART (aujourd'hui ARCEP) de nature à la surcharger d'activité ». Le Conseil de la concurrence recommandait à cet effet l'adoption d'un régime de déclaration valant reconnaissance de l'engagement des personnes concernées de respecter les obligations leur incombant au titre d'opérateur intervenant dans le champ du service universel dans sa partie concurrentielle. Le système proposé par le projet de décret sur les autorisations s'inscrit bien dans ce cadre.

Selon le Conseil de la concurrence, un dispositif de déclaration aurait été suffisant dès lors que le régulateur dispose du pouvoir de prononcer une interdiction d'exercer à l'encontre des opérateurs qui y manqueraient. L'Autorité note à cet égard que l'article L. 5-3 du CPCE lui donne des compétences importantes en matière de contrôle des activités des opérateurs autorisés, puisque, à l'issue de la procédure mise en place par cet article , l'Autorité peut sanctionner un opérateur.

Pour ces raisons, l'Autorité approuve le dispositif proposé, qui vise à ne pas créer de barrière à l'entrée sur le marché. Peu de conditions de refus lors de la délivrance de l'autorisation sont prévues. En revanche, le régime des sanctions, une fois l'autorisation délivrée, va du simple avertissement au retrait de l'autorisation.


(1) Points 15 et 16 de l'avis no 2003-A-06 du 16 mai 2003 du Conseil de la concurrence et relatif au projet de loi sur la transposition de la directive 97/67 /CE concernant les règles communes de développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l'amélioration de la qualité de service, modifiée par la directive 2002/39 /CE du 10 juin 2002 modifiant le code des postes et télécommunications et portant création d'une Autorité de régulation pour le secteur postal.

3. L'équilibre entre les droits et les obligations

des opérateurs autorisés


Il est important que le dispositif retenu pour la délivrance des autorisations mette en oeuvre un système équilibré entre les droits et les obligations pour le titulaire.

En effet, l'obtention d'une autorisation donne, notamment, le droit d'accès aux boîtes aux lettres et à des « moyens indispensables à l'exercice de l'activité postale ». Ainsi, il importe d'encadrer précisément les obligations imposées aux opérateurs autorisés afin de garantir leur sérieux, leur fiabilité et de s'assurer du respect, par ceux-ci, de la confidentialité et des normes de qualité de service. Par ailleurs, des obligations telles la mise en oeuvre de procédure de traitement des réclamations et la fourniture de statistiques sont des éléments fondant la bonne foi et la volonté de transparence des opérateurs.

Il est prévu par le projet d'article R. 4-6 que l'Autorité proposera des prescriptions techniques relatives à la qualité des services et au traitement des réclamations par les opérateurs. Concrètement, ces prescriptions seront établies en concertation avec les opérateurs, afin de mettre en oeuvre un système répondant au mieux aux attentes du marché.

Enfin, l'obligation pour l'opérateur de mettre en oeuvre un procédé de marquage permettant d'identifier les objets qu'il traite entre parfaitement dans le cadre de la mise en oeuvre de ce système équilibré. En effet, le marquage des objets traités est une condition de base à l'organisation du retour d'objets perdus ou mal adressés. Il permettra également de faciliter les relations entre le prestataire de service universel et les opérateurs autorisés pour l'accès aux moyens indispensables à l'exercice de l'activité postale (art. L. 3-1 du CPCE).

C'est pourquoi l'ensemble des obligations attachées aux autorisations telles qu'elles sont décrites dans le projet de décret est, pour l'Autorité, indispensable au développement de la concurrence dans ce secteur et à la protection des consommateurs.

Par ailleurs, sur la procédure de réclamation, l'Autorité relève le manque de cohérence entre le projet d'article R. 4-6 (qui parle de procédure « peu onéreuse ») et le projet d'article R. 4-5 2 (dans lequel la procédure doit être « gratuite ») et propose, pour y remédier, les modifications jointes en annexe.


III. - Sur le projet de décret

relatif à la procédure de règlement de différends


Les dispositions prévues dans le projet de décret concernent essentiellement le respect des règles du contradictoire et du secret des affaires, et sont conformes aux stipulations de l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, lesquelles sont applicables à l'Autorité quand elle statue en règlement de différend.

Afin de préciser les détails de la procédure de règlement de différend devant l'ARCEP et d'assurer une cohérence avec le traitement des procédures dans le domaine des communications électroniques, il convient d'ajouter un article renvoyant au règlement intérieur de l'Autorité et de modifier en conséquence la numérotation des articles , conformément à l'annexe 2 du présent avis.

Enfin, deux autres modifications pourraient être apportées au texte. D'une part, il convient de supprimer la disposition selon laquelle l'Autorité est tenue d'entendre les parties en audience si elles en font la demande, puisqu'elle outrepasse les dispositions législatives de l'article L. 5-6 du CPCE, alinéa 2, selon lesquelles l'Autorité « peut, avant de prendre sa décision, entendre toute personne dont l'audition lui paraît utile ». D'autre part, la précision formulée au projet d'article R. 6-1 concernant les conséquences d'une absence de mention des voies et délais de recours à l'encontre d'une décision de règlement de différend ne semble pas nécessaire et pourrait également être supprimée. L'alinéa 2 de ce projet d'article reprend globalement le cadre de la procédure administrative et n'a pas nécessairement lieu d'être dans les dispositions réglementaires en l'espèce.

En conclusion, le cadre règlementaire proposé dans les projets de décrets sur les autorisations et les procédures de règlements de différends répond aux objectifs de régulation équilibrée des activités postales, à partir d'un dispositif qui :

- donne les moyens d'assurer une transparence sur les prestations offertes aux usagers ;

- garantit les conditions de fiabilité des services ;

- procure :

- aux usagers, la protection de normes minimales prévues dans les autorisations et l'assurance d'une procédure de réclamation efficace ;

- aux opérateurs autorisés, la possibilité de déposer une demande de règlement de différend devant l'Autorité en ce qui concerne l'accès aux moyens indispensables à l'exercice de l'activité postale permise par l'autorisation ;

- enfin, assure un moyen dissuasif de sanction en cas d'infraction aux dispositions du code des postes et des communications électroniques.

Ce dispositif doit ainsi permettre d'entretenir la confiance sur un marché qui s'ouvre à la concurrence.

IV. - Sur les projets de décret relatifs aux conditions dans lesquelles les fonctionnaires et agents pourront être habilités et assermentés et sur la suppression de l'institution du médiateur du service universel postal

Ces projets de décret ne soulèvent pas de remarques sur le fond et l'Autorité prend acte de la suppression de l'institution du médiateur du service universel postal.

Sous réserve des remarques énoncées ci-dessus et des modifications rédactionnelles formulées en annexe, l'Autorité émet un avis favorable sur les projets de décret.

Le présent avis et les propositions rédactionnelles annexées seront transmis au ministre délégué à l'industrie et publiés au Journal officiel de la République française.



Fait à Paris, le 17 novembre 2005.


Le président,

P. Champsaur





A N N E X E 1

PROJET DE DÉCRET RELATIF AUX MODALITÉS DE DÉLIVRANCE DES AUTORISATIONS


Vous pouvez consulter le tableau dans le JO

n° 105 du 05/05/2006 texte numéro 85





A N N E X E 2

PROJET DE DÉCRET RELATIF À LA PROCÉDURE DE RÈGLEMENTS DE DIFFÉRENDS


Vous pouvez consulter le tableau dans le JO

n° 105 du 05/05/2006 texte numéro 85


A N N E X E 3

PROJET DE DÉCRET RELATIF AUX CONDITIONS DANS LESQUELLES LES FONCTIONNAIRES

ET AGENTS PEUVENT ÊTRE HABILITÉS ET ASSERMENTÉS


Vous pouvez consulter le tableau dans le JO

n° 105 du 05/05/2006 texte numéro 85