J.O. 304 du 31 décembre 2005       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Décret n° 2005-1739 du 30 décembre 2005 réglementant les relations financières avec l'étranger et portant application de l'article L. 151-3 du code monétaire et financier


NOR : ECOX0508949D



Le Premier ministre,

Sur le rapport du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,

Vu le traité instituant la Communauté européenne, notamment ses articles 45, 57, 58 et 296 ;

Vu le règlement (CE) no 1334/2000 du Conseil du 22 juin 2000 modifié instituant un régime communautaire de contrôle des exportations de biens et technologies à double usage ;

Vu le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises, et notamment son article 21, § 4 ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de l'aviation civile ;

Vu le code de commerce, notamment son article L. 233-3 ;

Vu le code de la défense ;

Vu le code des douanes, notamment son article 459 ;

Vu le code monétaire et financier, notamment son article L. 151-3 ;

Vu le code des ports maritimes ;

Vu la loi du 15 juin 1907 modifiée réglementant les jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques ;

Vu la loi no 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, modifiée par la loi no 86-76 du 17 janvier 1986 ;

Vu la loi no 83-629 du 12 juillet 1983 modifiée réglementant les activités privées de sécurité ;

Vu la loi no 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu la loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, notamment ses articles 30 et 31 ;

Vu le décret no 98-608 du 17 juillet 1998 relatif à la protection des secrets de la défense nationale ;

Vu le décret no 2002-535 du 18 avril 2002 relatif à l'évaluation et à la certification de la sécurité offerte par les produits et les systèmes des technologies de l'information ;

Le Conseil d'Etat (section des finances) entendu,

Décrète :


Article 1


Il est inséré au titre V du livre Ier du code monétaire et financier (partie réglementaire) un chapitre III intitulé « Investissements étrangers soumis à autorisation préalable » et comprenant les articles R. 153-1 à R. 153-12 dont la teneur suit.


Chapitre Ier

Dispositions relatives aux investissements étrangers

en provenance de pays tiers


Article 2


Il est inséré au chapitre III du titre V du livre Ier du même code une section 1 ainsi rédigée :


« Section 1



« Dispositions relatives aux investissements étrangers

en provenance de pays tiers


« Art. R. 153-1. - Constitue un investissement au sens de la présente section le fait pour un investisseur :

« 1° Soit d'acquérir le contrôle, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, d'une entreprise dont le siège social est établi en France ;

« 2° Soit d'acquérir directement ou indirectement tout ou partie d'une branche d'activité d'une entreprise dont le siège social est établi en France ;

« 3° Soit de franchir le seuil de 33,33 % de détention directe ou indirecte du capital ou des droits de vote d'une entreprise dont le siège social est établi en France.

« Art. R. 153-2. - Relèvent d'une procédure d'autorisation au sens du I de l'article L. 151-3 les investissements étrangers mentionnés à l'article R. 153-1 réalisés par une personne physique ressortissante d'un Etat non membre de la Communauté européenne, par une entreprise dont le siège social se situe dans l'un de ces mêmes Etats ou par une personne physique de nationalité française qui y est résidente, dans les activités suivantes :

« 1° Activités dans les secteurs des jeux d'argent ;

« 2° Activités réglementées de sécurité privée ;

« 3° Activités de recherche, de développement ou de production relatives aux moyens destinés à faire face à l'utilisation illicite, dans le cadre d'activités terroristes, d'agents pathogènes ou toxiques et de prévenir les conséquences sanitaires d'une telle utilisation ;

« 4° Activités portant sur les matériels conçus pour l'interception des correspondances et la détection à distance des conversations, autorisés au titre de l'article 226-3 du code pénal ;

« 5° Activités de services dans le cadre de centres d'évaluation agréés dans les conditions prévues au décret no 2002-535 du 18 avril 2002 relatif à l'évaluation et à la certification de la sécurité offerte par les produits et les systèmes des technologies de l'information ;

« 6° Activités de production de biens ou de prestation de services de sécurité dans le secteur de la sécurité des systèmes d'information d'une entreprise liée par contrat passé avec un opérateur public ou privé gérant des installations au sens des articles L. 1332-1 à L. 1332-7 du code de la défense ;

« 7° Activités relatives aux biens et technologies à double usage énumérés à l'annexe IV du règlement (CE) no 1334/2000 du Conseil du 22 juin 2000 modifié instituant un régime communautaire de contrôle des exportations de biens et technologies à double usage ;

« 8° Activités relatives aux moyens de cryptologie et les prestations de cryptologie mentionnés aux paragraphes III, IV de l'article 30 et I de l'article 31 de la loi no 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique ;

« 9° Activités exercées par les entreprises dépositaires de secrets de la défense nationale notamment au titre des marchés classés de défense nationale ou à clauses de sécurité conformément au décret no 98-608 du 17 juillet 1998 relatif à la protection des secrets de la défense nationale ;

« 10° Activités de recherche, de production ou de commerce d'armes, de munitions, de poudres et substances explosives destinées à des fins militaires ou de matériels de guerre et assimilés réglementés par le titre III ou le titre V du livre III de la deuxième partie du code de la défense ;

« 11° Activités exercées par les entreprises ayant conclu un contrat d'étude ou de fourniture d'équipements au profit du ministère de la défense, soit directement, soit par sous-traitance, pour la réalisation d'un bien ou d'un service relevant d'un secteur mentionné aux points 7° à 10° ci-dessus. »


Chapitre II

Dispositions relatives aux investissements en provenance

des Etats membres de la Communauté européenne


Article 3


Il est inséré au chapitre III du titre V du livre Ier du même code une section 2 ainsi rédigée :


« Section 2



« Dispositions relatives aux investissements en provenance

des Etats membres de la Communauté européenne


« Art. R. 153-3. - Constitue un investissement au sens de la présente section le fait pour un investisseur :

« 1° Soit d'acquérir le contrôle, au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce, d'une entreprise dont le siège social est établi en France.

« 2° Soit d'acquérir directement ou indirectement tout ou partie d'une branche d'activité d'une entreprise dont le siège social est établi en France.

« Art. R. 153-4. - Sont soumis à une procédure d'autorisation au sens de l'article L. 151-3, s'ils relèvent de l'article R. 153-3, les investissements réalisés dans les activités énumérées du 8° au 11° de l'article R. 153-2 par une personne physique ressortissante d'un Etat membre de la Communauté européenne, par une entreprise dont le siège social se situe dans l'un de ces mêmes Etats ou par une personne physique de nationalité française qui y est résidente.

« Art. R. 153-5. - Sont soumis à une procédure d'autorisation au sens de l'article L. 151-3, s'ils relèvent du 2° de l'article R. 153-3, les investissements réalisés par une personne physique ressortissante d'un Etat membre de la Communauté européenne, par une entreprise dont le siège social se situe dans l'un de ces mêmes Etats ou par une personne physique de nationalité française qui y est résidente, dans les activités suivantes :

« 1° Activités de casinos, au sens de la loi du 15 juin 1907 modifiée réglementant les jeux dans les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques, dans la mesure où le contrôle de l'investissement est exigé par les nécessités de la lutte contre le blanchiment de capitaux ;

« 2° Activités de sécurité privée, au sens de la loi no 83-629 du 12 juillet 1983 modifiée réglementant les activités privées de sécurité, lorsque les entreprises qui les exercent :

« a) Fournissent une prestation à un opérateur public ou privé d'importance vitale, au sens de l'article L. 1332-1 du code de la défense ;

« b) Ou participent directement et spécifiquement à des missions de sécurité définies aux articles L. 282-8 du code de l'aviation civile et L. 324-5 du code des ports maritimes ;

« c) Ou interviennent dans les zones protégées ou réservées, au sens de l'article 413-7 du code pénal et des textes pris en application du décret no 98-608 du 17 juillet 1998 relatif à la protection des secrets de la défense nationale ;

« 3° Activités de recherche, de développement ou de production, lorsqu'elles intéressent exclusivement :

« a) Les agents pathogènes, les zoonoses, les toxines et leurs éléments génétiques ainsi que leurs produits de traduction mentionnés aux alinéas 1C351 et 1C352a.2 de l'annexe I du règlement (CE) no 1334/2000 du Conseil du 22 juin 2000 modifié instituant un régime communautaire de contrôle des exportations de biens et technologies à double usage ;

« b) Les moyens de lutte contre les agents prohibés au titre de la convention sur l'interdiction de la mise au point, de la fabrication, du stockage et de l'emploi des armes chimiques et de leur destruction, faite à Paris le 13 janvier 1993,

et que le contrôle de l'investissement est exigé par les nécessités de la lutte contre le terrorisme et de la prévention des conséquences sanitaires de celui-ci ;

« 4° Activités de recherche, développement, production ou commercialisation portant sur les matériels conçus pour l'interception des correspondances et la détection à distance des conversations définis à l'article 226-3 du code pénal, dans la mesure où le contrôle de l'investissement est exigé par les nécessités de la lutte contre le terrorisme et la criminalité ;

« 5° Activités de services dans le cadre de centres d'évaluation agréés dans les conditions prévues au décret no 2002-535 du 18 avril 2002 relatif à l'évaluation et à la certification de la sécurité offerte par les produits et les systèmes des technologies de l'information, lorsque les entreprises qui les exercent fournissent ces prestations au profit de services de l'Etat, dans la mesure où le contrôle de l'investissement est exigé par les nécessités de la lutte contre le terrorisme et la criminalité ;

« 6° Activités de production de biens ou de prestations de services dans le secteur de la sécurité des systèmes d'information exercées par une entreprise liée par un contrat passé avec un opérateur public ou privé d'installation d'importance vitale au sens des articles L. 1332-1 à L. 1332-7 du code de la défense pour protéger cette installation ;

«7° Activités relatives aux biens et technologies à double usage énumérés à l'annexe IV du règlement du 22 juin 2000 précité exercées au profit d'entreprises intéressant la défense nationale. »


Chapitre III

Dispositions communes


Article 4


Il est inséré au chapitre III du titre V du livre Ier du même code une section 3 ainsi rédigée :


« Section 3



« Dispositions communes


« Art. R. 153-6. - I. - L'autorisation prévue au présent chapitre est réputée acquise lorsque l'investissement est réalisé entre des entreprises appartenant toutes au même groupe, c'est-à-dire étant détenues à plus de 50 % du capital ou des droits de vote, directement ou indirectement par le même actionnaire.

« L'autorisation n'est toutefois pas réputée acquise lorsque l'investissement a pour objet de transférer à l'étranger tout ou partie d'une branche d'une des activités énumérées respectivement aux articles R. 153-2 et R. 153-4.

« II. - Dans le cas des investissements mentionnés au 3° de l'article R. 153-1 et énumérés à l'article R. 153-2, l'autorisation est également acquise avec dispense de demande préalable lorsque l'investisseur qui franchit le seuil de 33,33 % de détention directe ou indirecte du capital ou des droits de vote d'une entreprise ayant son siège social en France a déjà été autorisé au titre du présent chapitre à acquérir le contrôle de celle-ci au sens de l'article L. 233-3 du code de commerce.

« III. - Si une demande préalable d'autorisation a néanmoins été présentée dans les hypothèses prévues au présent article , l'accusé de réception qui en est délivré mentionne que la demande est sans objet.

« Art. R. 153-7. - Avant la réalisation d'un investissement, l'investisseur peut saisir le ministre chargé de l'économie d'une demande écrite aux fins de savoir si cet investissement est soumis à une procédure d'autorisation. Le ministre répond dans un délai de deux mois. L'absence de réponse ne vaut pas dispense de demande d'autorisation.

« Art. R. 153-8. - Le ministre chargé de l'économie se prononce dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la demande d'autorisation. A défaut, l'autorisation est réputée acquise.

« Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe la composition du dossier de demande d'autorisation.

« Art. R. 153-9. - Le ministre chargé de l'économie examine si la préservation des intérêts nationaux tels que définis par l'article L. 151-3 peut être obtenue en assortissant l'autorisation d'une ou plusieurs conditions.

« Ces conditions portent principalement sur la préservation par l'investisseur de la pérennité des activités, des capacités industrielles, des capacités de recherche et de développement ou des savoir-faire associés, la sécurité d'approvisionnement ou l'exécution des obligations contractuelles de l'entreprise dont le siège social est établi en France, comme titulaire ou sous-traitant dans le cadre de marchés publics ou de contrats intéressant la sécurité publique, les intérêts de la défense nationale ou la recherche, la production ou le commerce en matière d'armes, de munitions, de poudres ou de substances explosives.

« Dans le cas où l'activité au titre de laquelle l'autorisation est requise n'est exercée qu'à titre accessoire, le ministre chargé de l'économie peut subordonner l'octroi de l'autorisation à la cession de cette activité à une entreprise indépendante de l'investisseur étranger.

« Les conditions prévues au présent article sont fixées dans le respect du principe de proportionnalité.

« Art. R. 153-10. - Le ministre chargé de l'économie refuse par décision motivée l'autorisation de l'investissement projeté, s'il estime, après examen de la demande :

« 1° Qu'il existe une présomption sérieuse que l'investisseur est susceptible de commettre l'une des infractions visées par les articles 222-34 à 222-39, 223-15-2, 225-5, 225-6, 225-10, 324-1, 421-1 à 421-2-2, 433-1, 450-1 et 450-2-1 du code pénal ;

« 2° Ou que la mise en oeuvre des conditions mentionnées à l'article R. 153-9 ne suffit pas à elle seule à assurer la préservation des intérêts nationaux définis par l'article L. 151-3 dès lors que :

« a) La pérennité des activités, des capacités industrielles, des capacités de recherche et développement et des savoir-faire associés ne serait pas préservée ;

« b) La sécurité d'approvisionnement ne serait pas garantie ;

« c) Serait compromise l'exécution des obligations contractuelles de l'entreprise dont le siège social est établi en France comme titulaire ou sous-traitant dans le cadre de marchés publics ou de contrats intéressant la sécurité publique, les intérêts de la défense nationale ou la recherche, la production ou le commerce en matière d'armes, de munitions, de poudres et substances explosives.

« Art. R. 153-11. - Le délai imparti à l'investisseur pour rétablir la situation antérieure en application du III de l'article L. 151-3 est notifié par le ministre chargé de l'économie. Il ne peut excéder douze mois.

« Art. R. 153-12. - Les autorités administratives compétentes pour instruire l'autorisation prévue au présent chapitre peuvent recourir à la coopération internationale pour vérifier l'exactitude des informations qui leur sont fournies par les investisseurs étrangers, notamment celles relatives à l'origine des fonds. »

Article 5


Sont insérés au chapitre V du titre VI du livre Ier du même code (partie réglementaire) les articles R. 165-1 et R. 165-2 ainsi rédigés :

« Art. R. 165-1. - Toute infraction aux obligations de déclaration statistique mentionnées aux articles R. 152-1 à R. 152-4 est sanctionnée conformément à l'article L. 165-1.

« Art. R. 165-2. - Quiconque aura contrevenu à l'obligation de déclaration administrative prévue au premier alinéa de l'article R. 152-5 est passible d'une amende égale au montant maximum applicable aux contraventions de 4e classe. »

Article 6


Aux 5°, 6° et 7° de l'article R. 151-1 du même code, les mots : « et des articles 7 à 9 du décret no 2003-196 du 7 mars 2003 réglementant les relations financières avec l'étranger » sont supprimés.

Article 7


Le décret no 2003-196 du 7 mars 2003 réglementant les relations financières avec l'étranger est abrogé.

Article 8


Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire, la ministre de la défense, le ministre des affaires étrangères, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et le ministre de la santé et des solidarités sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 30 décembre 2005.


Dominique de Villepin


Par le Premier ministre :


Le ministre de l'économie,

des finances et de l'industrie,

Thierry Breton

Le ministre d'Etat,

ministre de l'intérieur

et de l'aménagement du territoire,

Nicolas Sarkozy

La ministre de la défense,

Michèle Alliot-Marie

Le ministre des affaires étrangères,

Philippe Douste-Blazy

Le ministre de l'éducation nationale,

de l'enseignement supérieur

et de la recherche,

Gilles de Robien

Le ministre de la santé et des solidarités,

Xavier Bertrand