J.O. Numéro 60 du 12 Mars 2002       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 04540

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Décision no 2002-34 du 9 janvier 2002 prononçant, en application de l'article L. 36-11 du code des postes et télécommunications, une sanction à l'encontre de France Télécom relative aux manquements de France Télécom dans l'exécution de la décision de l'Autorité no 2000-1194 en date du 15 novembre 2000 se prononçant sur un règlement de différend entre les sociétés Sonera France et France Télécom en application de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications


NOR : ARTT0200008S



L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, et notamment ses articles L. 36-8 et L. 36-11 ;
Vu le règlement intérieur de l'Autorité de régulation des télécommunications, approuvé par la décision no 99-528 de l'Autorité en date du 18 juin 1999, et notamment ses articles 18, 20 et 21 ;
Vu la décision no 2000-1194 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 15 novembre 2000 se prononçant sur un différend entre Sonera France et France Télécom relatif à l'accès au réseau de France Télécom pour la fourniture d'un service de renseignements téléphoniques ;
Vu les courriers du chef du service juridique en date du 15 novembre 2000 notifiant la décision no 2000-1194 à France Télécom et à Sonera France ;
Vu le courrier du directeur général de l'Autorité adressé à M. Marc Fossier, directeur des relations extérieures de France Télécom, en date du 8 janvier 2001, s'informant de l'exécution de la décision no 2000-1194 susvisée ;
Vu le courrier de France Télécom enregistré le 12 janvier 2001 fournissant copie de l'offre adressée le 15 décembre 2000 à Sonera France ;
Vu le courrier du directeur général de l'Autorité adressé à M. Marc Fossier, directeur des relations extérieures de France Télécom, en date du 24 avril 2001, s'informant à nouveau de l'exécution de la décision no 2000-1194 susvisée ;
Vu le courrier du directeur général de l'Autorité adressé à M. Alpo Akujårvi, président de Sonera France, en date du 24 avril 2001, s'informant de l'exécution de la décision no 2000-1194 susvisée ;
Vu le courrier de France Télécom enregistré le 30 avril 2001 fournissant la chronologie des négociations avec Sonera France ;
Vu le courrier de Sonera France enregistré le 2 mai 2001 relatif à l'exécution de la décision no 2000-1194 susvisée ;
Vu le courrier du chef du service juridique de l'Autorité adressé à M. Marc Fossier, directeur des relations extérieures de France Télécom, en date du 23 mai 2001, l'informant de l'ouverture d'une procédure de sanction pour non-exécution de la décision no 2001-1194 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 15 novembre 2000 et l'invitant à présenter ses observations ;
Vu le courrier du rapporteur à M. Marc Fossier, directeur des relations extérieures de France Télécom, en date du 28 mai 2001, l'invitant à transmettre, d'ici le 1er juin 2001, les pièces relatives aux échanges avec Sonera portant sur l'exécution de la décision susvisée ;
Vu le courrier du rapporteur à M. Alpo Akujårvi, président de Sonera France, en date du 28 mai 2001, l'invitant à transmettre, d'ici le 1er juin 2001, les pièces relatives aux échanges avec France Télécom portant sur l'exécution de la décision susvisée ;
Vu le courrier de France Télécom, enregistré le 1er juin 2001, fournissant copie des échanges intervenus entre France Télécom et Sonera France depuis avril 2001 ;
Vu le courrier de maître Dupuis-Toubol, représentant Sonera France, enregistré le 1er juin 2001, fournissant la copie des échanges intervenus entre France Télécom et Sonera France depuis le 15 novembre 2000 ;
Vu la lettre de Sonera France, en date du 6 juin 2001, indiquant ses représentants à la réunion du 8 juin 2001 ;
Vu la lettre de Sonera France, enregistrée le 19 juin 2001, transmettant les comptes rendus des réunions des 31 mai et du 8 juin 2001 entre France Télécom et Sonera France ;
Vu le projet de procès-verbal de l'audition du 7 juin 2001 de la société France Télécom ;
Vu l'avenant no 1 au contrat d'intégration du 3211 de Sonera dans le réseau Audiotel, transmis par France Télécom lors de la réunion du 7 juin 2001 ;
Vu la lettre du rapporteur, en date du 25 juin 2001, transmettant le procès-verbal susvisé et fixant au 29 juin 2001 la date de retour du procès-verbal signé par un représentant de France Télécom ;
Vu le projet de procès-verbal de l'audition du 8 juin 2001 de la société Sonera France ;
Vu la lettre du rapporteur de l'Autorité, en date du 25 juin 2001, transmettant le procès-verbal susvisé et fixant au 29 juin 2001 la date de retour du procès-verbal signé par un représentant de Sonera France ;
Vu la lettre de France Télécom, enregistrée le 29 juin 2001, indiquant ses modifications sur le projet de procès-verbal de l'audition du 7 juin 2001 et transmettant les pièces échangées avec Sonera France entre le 15 novembre et le 7 avril 2001, ainsi qu'après le 7 juin 2001, et comprenant notamment l'avenant no 1 au contrat d'intégration du 3211 de Sonera France dans le réseau de France Télécom, signé le 15 juin 2001 ;
Vu la lettre de Sonera France, enregistrée le 2 juillet 2001, indiquant ses remarques sur le projet de procès-verbal de l'audition du 8 juin 2001 ;
Vu la lettre du rapporteur, en date du 2 juillet 2001, adressée à France Télécom intégrant ses remarques et fixant au 9 juillet 2001 la date de retour du procès-verbal signé par un représentant de France Télécom ;
Vu la lettre du rapporteur, en date du 4 juillet 2001, adressée à Sonera France transmettant le procès-verbal de l'audition du 8 juin 2001 cosigné par le rapporteur et le représentant de Sonera France ;
Vu le procès-verbal de consultation d'un représentant de la société France Télécom en date du 7 juillet 2001 ;
Vu la lettre du rapporteur, en date du 12 juillet 2001, adressée à France Télécom, transmettant le procès-verbal de l'audition du 7 juin 2001 cosigné par le rapporteur et le représentant de France Télécom ;
Vu le rapport d'instruction du rapporteur contenant l'exposé des faits et des griefs ;
Vu la lettre du chef du service juridique de l'Autorité, en date du 19 novembre 2001, notifiant à France Télécom le rapport d'instruction du rapporteur et fixant au 30 novembre 2001 la date de remise des observations écrites ;
Vu la lettre du chef du service juridique de l'Autorité, en date du 19 novembre 2001, transmettant à Sonera France, pour information, le rapport d'instruction du rapporteur ;
Vu la lettre de France Télécom enregistrée le 30 novembre 2001, transmettant ses observations sur le rapport d'instruction ;
Vu la lettre du chef du service juridique, en date du 4 décembre 2001, adressée à Sonera France, lui transmettant pour information les observations de France Télécom enregistrées le 30 novembre 2001 ;
Vu les lettres du chef du service juridique de l'Autorité, en date du 10 décembre 2001, convoquant France Télécom et Sonera France à une audience devant le collège de l'Autorité le 21 décembre 2001 ;
Vu la lettre de Sonera France enregistrée le 12 décembre 2001, transmettant des observations sur le courrier de France Télécom enregistré le 30 novembre 2001 ;
Vu la lettre de Sonera France enregistrée le 12 décembre 2001, indiquant ses représentants à l'audience du 21 décembre 2001 ;
Vu la lettre du chef de service juridique de l'Autorité, en date du 14 décembre 2001, transmettant à France Télécom la lettre de Sonera France enregistrée le 12 décembre 2001 ;
Vu la lettre de France Télécom enregistrée le 19 décembre 2001, indiquant ses représentants à l'audience du 21 décembre 2001 ;
Après avoir entendu, le 21 décembre 2001, lors de l'audience devant le collège :
- le rapport de M. Philippe Distler, rapporteur présentant les faits et les griefs ;
- les observations de Me Frédérique Dupuis-Toubol, avocat, représentant la société Sonera France ;
- les observations de M. Jean-Daniel Lallemand, pour la société France Télécom ;
En présence de :
MM. Jean Marimbert, directeur général, Philippe Distler, François Lions, Eric Vève, Mmes Françoise Laforge, Elisabeth Rolin, agents de l'Autorité ;
MM. Jean-Daniel Lallemand, Michel Seiler, Gabriel Lluch, Mme Laurence Coste, pour la société France Télécom.
MM. Joël Jaakkola et Laurent Balonchard, pour la société Sonera France, assisté de Me Frédérique Dupuis-Toubol, cabinet Bird & Bird ;
Le collège en ayant délibéré le 9 janvier 2002, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité.


1. Exposé des faits

La décision no 2000-1194 de l'Autorité, en date du 15 novembre 2000, se prononçant sur un différend entre Sonera France et France Télécom, relatif à l'accès au réseau de France Télécom pour la fourniture d'un service de renseignements téléphoniques, dispose dans ses articles 1er et 2 que :
« Art. 1er. - France Télécom doit faire droit à la demande d'accès de Sonera France pour la collecte du trafic à destination du numéro de la forme 3 BPQ attribué à Sonera France et pour la terminaison du trafic de Sonera France, en concluant une convention d'accès dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, portant sur les offres de collecte et de terminaison de trafic, établies sur la base des offres dites L. 34-2 mentionnées par France Télécom et adaptées à la demande de Sonera France.
« Art. 2. - France Télécom doit faire droit à la demande de Sonera France de prestation de facturation et de recouvrement pour compte de tiers pour la collecte du trafic à destination du numéro de la forme 3 BPQ de Sonera France, pour son service de renseignements et d'aboutement d'appel, quel que soit l'opérateur qui assure les prestations de collecte et de terminaison du trafic, en concluant une convention dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision dont les conditions financières prévoient une rémunération exclusive fixée à 7 % du montant perçu du client final diminué de la rémunération d'accès versée à France Télécom pour le transport de la communication sur son réseau. »
La décision a été notifiée à France Télécom et à Sonera France par courrier du chef du service juridique en date du 15 novembre 2000.
Par courrier en date du 8 janvier 2001, le directeur général de l'Autorité s'est informé auprès de France Télécom de l'exécution de la décision no 2000-1194.
Par courrier enregistré le 12 janvier 2001, France Télécom fournit la copie de l'offre adressée le 15 décembre 2000 à Sonera France.
Par courriers en date du 24 avril 2001, le directeur général de l'Autorité s'est enquis auprès de Sonera France et, à nouveau auprès de France Télécom, de l'exécution de la décision no 2000-1194.
France Télécom, par courrier enregistré le 30 avril 2001, et Sonera France, par courrier enregistré le 2 mai 2001, ont transmis au directeur général de l'Autorité les éléments relatifs à l'exécution de la décision no 2000-1194.
Par courrier du chef du service juridique, en date du 23 mai 2001, France Télécom a été informée de l'ouverture d'une procédure de sanction à son encontre pour non-exécution de la décision no 2000-1194 du 15 novembre 2000.

1.1. Le déroulement des négociations entre France Télécom
et Sonera France

A titre liminaire, il convient de rappeler que la décision précitée de l'Autorité laissait à Sonera France un choix quant à la nature des prestations fournies par France Télécom dans le cadre de la convention d'accès :
- soit une prestation de collecte de trafic, de terminaison de trafic et de facturation/recouvrement pour compte de tiers pour son service de renseignements et d'aboutement d'appel ;
- soit une prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers pour son service de renseignements et d'aboutement d'appel, dans le cas où la collecte et la terminaison du trafic étaient fournies par un opérateur tiers.
Dans tous les cas, Sonera France devait bénéficier d'une autonomie dans la fixation de ses tarifs au client final, conformément à sa demande, comme le précise la décision de l'Autorité, notamment dans ses motifs, page 10, relatifs à l'inadaptation de la proposition de France Télécom d'offre « Audiotel » aménagée.
Il est à noter que la prestation technique d'aboutement, c'est-à-dire la réalisation de la connexion entre l'appel entrant vers le service de renseignements de Sonera France et l'appel sortant vers le numéro du correspondant, fourni par le service de renseignements, n'était pas incluse dans le champ du différend, la demande n'en ayant pas été faite par Sonera France. Il était donc implicite que Sonera France réaliserait elle-même cette prestation. Il était également clair que la réalisation par Sonera France de cette prestation d'aboutement, permettant la mise en communication par l'opérateur du service de renseignements de Sonera France avec l'appelé, nécessitait la prise en compte par France Télécom, dans sa prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers, de la facturation de l'aboutement réalisé (montant fixe) et du changement de tarif en cours de communication (montant variable) inhérent à cette mise en relation, comme le précise la décision de l'Autorité, notamment dans ses motifs en page 10, relatifs à l'inadaptation de la proposition de France Télécom d'offre « Audiotel » aménagée.
Il ressort des pièces du dossier que les négociations entre France Télécom et Sonera France se sont déroulées comme suit :

1.1.1. Préliminaires à la proposition initiale de France Télécom

Par courrier en date du 21 novembre 2000, Sonera France précise à France Télécom sa demande qui reprend les termes de la décision de l'Autorité, à savoir la fourniture par France Télécom d'une prestation de collecte du trafic à destination de son service de renseignements et d'aboutement d'appel, de terminaison des appels et de facturation/recouvrement de son service. Une réunion a lieu entre les représentants des deux sociétés le 29 novembre 2000 où Sonera France précise les tarifs qu'elle entend appliquer à son service.
Au cours de cette réunion et des échanges écrits qui suivent, France Télécom annonce trois impossibilités majeures faisant obstacle, selon elle, à ce qu'elle réponde à la demande de Sonera France :
- elle ne peut réaliser la prestation d'aboutement, ce qui la contraindrait à ouvrir son réseau intelligent, qu'elle considère comme propriétaire, et ce que la décision de l'Autorité n'a pas prévu ;
- elle ne peut accepter de facturer un service à un tarif supérieur à 2,21 F toutes taxes comprises par minute en heures pleines, car cela est contraire à sa politique tarifaire ;
- elle ne peut accepter comme prix payé par les clients et facturé par elle que des multiples entiers de ses propres unités ou paliers tarifaires.

1.1.2. La proposition initiale de contrat

La proposition de France Télécom datée du 15 décembre 2000, présentée par France Télécom comme conforme à la décision de l'Autorité, comportait :
- une prestation de collecte du trafic à destination du service de Sonera France ;
- la tarification des appels vers la plate-forme de Sonera France sur la base de laquelle France Télécom exécutera la prestation de facturation/recouvrement pour le compte de Sonera France : minimum de perception de ... (1), une tarification dite « de cadencement périodique » de ... (1) ;
- une prestation de terminaison d'appel vers toutes les destinations, mais sur la base du tarif de détail pour certaines d'entre elles (local et international notamment) ;
- des frais d'accès au service.
En revanche, la facturation de la prestation d'aboutement n'est pas proposée, dans la mesure où elle n'est pas réalisée par France Télécom.
Cette proposition ne convient pas à Sonera France, notamment à cause de l'absence de prestation de facturation de l'aboutement : cet état de fait est signifié à France Télécom par un courrier en date du 9 janvier 2001.
Des négociations sont alors engagées par Sonera France avec France Télécom afin de trouver une solution réalisable par France Télécom et acceptable par Sonera France.

1.1.3. Les négociations entre France Télécom et Sonera France

S'ouvre alors une longue période de négociations qui s'étendent de janvier à juin 2001. De nombreuses réunions sont organisées, complétées par de nombreux échanges de courriers.
D'après les pièces communiquées par France Télécom et Sonera France dans le cadre de la présente procédure, ces réunions, au nombre de neuf, se sont tenues les 23 janvier, 20 février, 7 mars, 20 mars, 11 avril, 18 avril, 11 mai, 31 mai et 8 juin 2001. Les principaux courriers échangés sont datés des 2 février (Sonera France), 23 février (France Télécom), 2 avril (Sonera France), 10 avril (France Télécom).
Parmi les principaux points soulevés au cours de ces échanges, sont résumés ci-après ceux qui sont en relation directe avec le respect par France Télécom de la décision de l'Autorité.

i) Réunion du 23 janvier 2001

Cette réunion avait pour objet d'élucider les scénarios techniques possibles pour que Sonera France puisse fournir le service prévu :
- scénario 1 : France Télécom assure la collecte, la facturation/recouvrement, la terminaison d'appel, Sonera France réalisant la prestation d'aboutement ;
- scénario 2 : France Télécom assure les prestations de collecte, d'aboutement, de facturation/recouvrement et de terminaison d'appel ;
- scénario 3 : la collecte, l'aboutement et la terminaison des appels sont assurés par un opérateur tiers, France Télécom assurant la facturation/recouvrement pour compte de tiers.
Une discussion est apparue entre les parties à propos du scénario 1 : la prestation d'aboutement est considérée par Sonera France comme faisant partie de la décision de l'Autorité, alors que France Télécom considère qu'elle n'en fait pas partie.
Compte tenu de cette difficulté d'interprétation, Sonera France demande à France Télécom de faire des propositions relatives aux scénarios 2 et 3.
Dans les faits, seuls le scénario 2 a donné lieu à discussion entre les parties, France Télécom n'ayant jamais fait de proposition ni pour le scénario 1, ni pour le scénario 3. Il est également fait mention d'un « scénario 2 bis », dont les variantes (collecte et aboutement par un opérateur tiers) par rapport au scénario 2 ne sont pas explicitement développées dans les documents transmis par les parties à l'Autorité.

ii) Réunion du 20 février 2001

Au cours de la réunion du 20 février 2001, France Télécom annonce que le scénario 2 est « entièrement faisable ».
Certains points pouvant présenter des difficultés sont abordés : les postes à partir desquels l'aboutement est impossible (notamment les publiphones), les destinations vers lesquelles cet aboutement est également impossible, l'obligation de respecter les plages horaires de France Télécom.
Par ailleurs, France Télécom confirme sa volonté de ne pas facturer pour compte de tiers des services à un tarif supérieur à 2,21 F toutes taxes comprises par minute en heures pleines, décision qui résulte, selon les déclarations de son représentant, d'une volonté politique et non d'une impossibilité technique.
Enfin, France Télécom indique, mais sans apporter de conclusion, que seul le recours à son réseau intelligent permettrait de fournir le service complet demandé par Sonera France.
A la suite de cette réunion, les travaux sont engagés sur la base du scénario 2, notamment par l'envoi à Sonera France des spécifications techniques d'un service de facturation pour compte de tiers.

iii) Le courrier du 23 février 2001 : envoi des spécifications
techniques de France Télécom à Sonera France

Le courrier accompagnant l'envoi des spécifications techniques (spécifications SUP) de son réseau dresse la liste des propositions de France Télécom, certaines assorties de réserves de faisabilité et sans délais d'examen :
- sur la facturation du client final : France Télécom facture pour le compte de Sonera France le service de renseignement et d'aboutement, elle facturera pour son propre compte la communication après l'aboutement de l'appel ;
- l'aboutement n'est pas possible à partir des publiphones ;
- le service ne sera pas accessible à partir des postes d'abonné en service restreint ;
- l'aboutement est possible pour les numéros Z = 1 à 6 (donc y compris les appels vers les mobiles) pour les numéros internationaux, et les numéros non géographiques des séries 0800, 0801, 0802, 0803, 0810, 0820, 085 ;
- tarification de l'appelant : un minimum de perception égal ... (1), un cadencement périodique de ... (1) sur la base d'un tarif inférieur à 2,21 F par minute ;
- possibilité de regrouper les plages horaires (heures pleines - heures creuses - heures bleu nuit) ;
- la facturation pour compte de tiers figurera sur la facture courante de France Télécom, la facturation des appels aboutés figurant à part.
Les réunions et courriers suivants portent sur des aspects liés aux spécifications techniques. En particulier, lors de la réunion du 7 mars, France Télécom annonce un problème technique dans la prestation de comptage et de facturation et annonce qu'un délai supplémentaire est nécessaire pour faire étudier cette question par une nouvelle équipe de France Télécom. D'autres réunions sont également reportées par France Télécom sans précision de délais (courrier du 14 mars de France Télécom à Sonera France par exemple).

iv) La réunion du 20 mars 2001

Au cours de cette réunion, les informations suivantes sont échangées.
Sonera France rappelle le modèle tarifaire accepté par France Télécom, bien qu'elle continue à contester la contrainte imposée par France Télécom sur la tarification du cadencement périodique :
- minimum de perception : ... (1) ;
- prix variable en fonction du temps : ... (1) ;
- mise en relation : ... (1).
En outre, Sonera France fait part de son inquiétude quant aux dérapages en terme de délais pour pouvoir ouvrir commercialement son service en juin 2001. Elle demande à France Télécom de lui communiquer une proposition commerciale et un projet de contrat, ainsi que la liste des tâches à accomplir par Sonera France pour la mise en oeuvre des prestations.
France Télécom fait alors état d'une difficulté technique apparue pour réaliser un changement de tarif en cours de communication (passage d'une tarification forfaitaire minimum de perception à une tarification à la durée cadencement périodique). France Télécom promet une étude de faisabilité pour le 11 avril, date prévue pour la prochaine réunion.
Sonera France s'étonne de l'apparition tardive de cette difficulté et relève que le service 12 de France Télécom permet cette tarification. Ce à quoi France Télécom répond que le service du 12 est fourni sur un réseau spécifique, qu'il s'agit d'un système propriétaire, qu'il n'a pas recours au protocole SUP et qu'il ne permet pas l'aboutement vers l'international.
Sonera France demande alors la mise en oeuvre d'une solution provisoire et dégradée, sans changement de tarif en cours de communication, afin d'ouvrir le plus rapidement possible son service.
D'autres problèmes sont évoqués et notamment : accessibilité du service depuis les postes en service restreint, aboutement depuis les cabines publiques.
France Télécom annonce également un délai supplémentaire d'étude de 3 semaines sur les aspects techniques et un délai de 6 semaines entre la signature du contrat et le câblage du 32 11 (numéro attribué par l'Autorité à Sonera France pour la fourniture de ce service) dans les commutateurs. Enfin, France Télécom annonce que la maîtrise d'ouvrage du dossier a été transférée de la BE (Branche Entreprise) à la DIVOP (Division Opérateurs).

v) Les courriers des 2 et 10 avril 2001

Par un courrier daté du 2 avril 2001, Sonera France fait part à France Télécom de son mécontentement du déroulement des négociations depuis leur origine :
- France Télécom n'a pas fait appel de la décision de l'Autorité mais ne l'a toujours pas appliquée ;
- la proposition initiale du 15 décembre 2000 n'était pas conforme à la décision de l'Autorité ;
- France Télécom n'a pas fait de proposition de facturation avec collecte et terminaison d'appel assurées par un opérateur tiers ;
- France Télécom n'a pas réalisé les études de faisabilité des scénarios cibles de Sonera France.
Sonera France demande alors, pour le 11 avril une proposition :
- d'une part, pour une prestation de collecte, terminaison et facturation pour compte de tiers avec changement de tarif en cours de communication ;
- d'autre part, pour une prestation de facturation pour compte de tiers seule.
Par un courrier en date du 10 avril, France Télécom répond que :
- la solution contenue dans la proposition du 15 décembre 2000 était la seule possible dans les délais impartis par l'Autorité ;
- la facturation pour compte de tiers seule figure bien dans la décision de l'Autorité, mais elle est impossible techniquement et, de plus, un règlement de différend est en cours devant l'Autorité sur cette question avec un opérateur.
France Télécom annonce qu'elle continue les travaux pour la collecte et la terminaison du trafic, l'aboutement des appels et la facturation avec changement de tarif.

vi) La réunion du 11 avril 2001

Au cours de la réunion du 11 avril, France Télécom présente :
- les fonctionnalités disponibles à court terme dans le cadre du scénario 2 (3 à 4 mois après signature du contrat, auxquels s'ajoutent les délais de tests et corrections éventuelles) :
- collecte de trafic ;
- aboutement d'appels ;
- mise en relation vers les numéros géographiques nationaux de France Télécom, des autres opérateurs de boucle locale et des opérateurs mobiles (avec changement de tarif au moment de la mise en relation) ;
- mise en relation vers les numéros Audiotel d'un tarif inférieur ou égal à celui de Sonera France ;
- facturation pour compte de tiers ;
- accès à partir des abonnés de France Télécom, des publiphones, points-phone, terminaux à cartes, avec carte France Télécom ;
- intégration des appels vers les 3211 dans le suivi des communications (service Allofact de France Télécom) ;
- tarifs de renseignements : ... (1) ;
- minimum de perception ... (1) ;
- tarif de mise en relation à ... (1) ;
- plages horaires fournies par Sonera France le 28 février 2001 ; reversements à Sonera France ;
- statistique des appels vers le 3211 (sous forme d'agrégat) ;
- les fonctionnalités disponibles à long terme (10 à 12 mois après signature du contrat auxquels s'ajoutent les délais de test et corrections éventuelles) :
- mise en relations vers les numéros internationaux ;
- les fonctionnalités non disponibles ou à l'étude (sans délais) :
- accès depuis un opérateur de boucle locale tiers (OBL) fixe ou mobile (ces OBL ne gèrent pas les changements de tarifs en cours de communication) ;
- mise en relation vers les numéros libre appels et à coûts partagés ;
- mise en relation vers les numéros à coûts partagés des opérateurs tiers ;
- différentiation au niveau des services restreints ;
- appel depuis les DOM-TOM ;
- autres tarifs (à la seconde).
France Télécom précise que le scénario 3 (facturation seule) n'est pas à l'étude, malgré l'insistance de Sonera France, car il présente des difficultés techniques et qu'un règlement de différend est en cours sur cette question entre France Télécom et un opérateur tiers.
Sonera France accepte d'examiner ce scénario, mais seulement à titre transitoire, car s'il est encore éloigné du scénario cible, il permettra néanmoins l'ouverture du service dès juin 2001 et présente une facturation conforme à décision de l'Autorité.

vii) La phase contractuelle des négociations

Les discussions précédentes vont aboutir à la signature de deux contrats en date du 11 mai et du 12 juin 2001.
Le contrat signé le 11 mai 2001 entre France Télécom et Sonera France est un contrat de type Audiotel, dont les seules caractéristiques significatives sont, d'une part, d'inclure un numéro de la forme 3 BPQ dans les numéros accessibles à travers le système Audiotel et, d'autre, part, de prévoir une rémunération, pour la facturation pour compte de tiers de 7 % conforme à la décision de l'Autorité.
Par ce contrat, Sonera France pourrait rendre un service de renseignements, mais dans des conditions éloignées de celles qu'elle avait initialement envisagées. C'est pourquoi, ce contrat a dû être complété par un avenant spécifique permettant des fonctionnalités plus proches de celles initialement demandées par Sonera France à France Télécom.
Cet avenant, notamment négocié au cours des réunions des 31 mai et 8 juin 2001, a donné lieu à une proposition commerciale le 12 juin et a été signé entre les parties le 15 juin 2001.
Les principales dispositions sont les suivantes :
- accessibilité du 3211 à partir des postes d'abonnés ordinaires de France Télécom, hors ceux en accès sélectif modulables, des publiphones, points phones et terminaux à carte, clients du service Atout RPV de France Télécom et clients de la carte France Télécom ; les clients des OBL tiers, fixes ou mobiles n'ont pas accès au 3211 ;
- mise en relation vers les numéros géographiques nationaux de France Télécom et des OBL tiers (Z = 1 à 5), les numéros mobiles (Z = 6), les numéros « Audiotel » d'un tarif inférieur ou égal à 2,21 F toutes taxes comprises par minute ; la mise en relation est possible à partir des postes d'abonnés ordinaires de France Télécom, des publiphones, points phones et terminaux à carte ; les autres fonctionnalités seront étudiées ultérieurement ; la mise en relation est gratuite à partir des publiphones, points phones et terminaux à carte et à destination des numéros « Audiotel ».
La tarification du service est celle prévue lors de la réunion du 11 avril :
- pour la phase de renseignement :
- en heures pleines (du lundi au vendredi, de 8 heures à 22 heures) : ... (1),
- en heures creuses : ... (1) ;
- pour l'aboutement de l'appel : ... (1).
La communication ultérieure est facturée au prix public de France Télécom.
Le « système de reversement » de France Télécom à Sonera France correspond aux dispositions relatives à la facturation pour compte de tiers prévues par la décision de l'Autorité. Il prévoit en outre un système de reversement supplémentaire, fonction du volume de trafic généré non prévu par la décision. France Télécom ne facture pas la mise en relation lorsque cette dernière est gratuite pour le client final.

2. Les observations de France Télécom et de Sonera France
recueillies au cours des auditions des 7 et 8 juin 2001
2.1. Les observations de France Télécom recueillies
lors de son audition le 7 juin 2001

Lors de son audition du 7 juin 2001, France Télécom rappelle son interprétation du dispositif de la décision no 2000-1194. La décision no 2000-1194 s'appuie sur des offres de France Télécom alors en vigueur et non sur des propositions spécifiques. A propos de l'offre de facturation et de recouvrement pour compte de tiers, y compris dans l'hypothèse où Sonera France ne serait pas raccordée directement au réseau de France Télécom, la décision no 2000-1194 s'appuie sur l'offre relative aux services spéciaux alors que cette dernière associe un seul tarif par numéro et ne permet pas de changement de tarif au cours d'une communication téléphonique.
France Télécom précise l'historique de ses relations avec Sonera France depuis la décision no 2000-1194. Trois phases peuvent être distinguées : une première phase, jusqu'à mi-janvier, avec la proposition de France Télécom du 15 décembre 2001, sans aboutement d'appel ni changement de tarif pendant la communication ; une deuxième phase, de mi-janvier à avril 2001, pendant laquelle les études techniques complémentaires ont été réalisées ; enfin, depuis avril, la troisième phase de négociations habituelles en vue de la signature d'une convention avec une nouvelle proposition de France Télécom transmise le 6 juin 2001.
France Télécom précise qu'un délai de quatre semaines s'est écoulé entre la notification de la décision no 2000-1194 et sa proposition du 15 décembre 2001 du fait des difficultés rencontrées à contacter Sonera France afin de connaître ses prévisions d'affaire. France Télécom a communiqué à Sonera France, le 15 décembre 2000, une proposition qu'elle estime conforme à la décision no 2000-1194. Elle précise que Sonera France n'a pas souhaité signer cette proposition pour des raisons étrangères au litige porté devant l'Autorité. En effet, Sonera France a exprimé des besoins complémentaires comme le changement de prix en cours de communication lors de l'aboutement d'appel qui dépassent le cadre de la décision no 2000-1194.
France Télécom a alors mené, à partir du 23 janvier 2001, des études techniques internes complémentaires pour apprécier la faisabilité des demandes de Sonera France. Elle précise que ces études ont montré qu'il est impossible, d'un point de vue technique, de fournir une prestation répondant au besoin de changement de tarif pendant la communication si Sonera France n'est pas directement connectée au réseau de France Télécom.
France Télécom a communiqué le 11 mai 2001 une nouvelle proposition répondant aux besoins complémentaires de Sonera France, dans l'hypothèse où celle-ci serait directement interconnectée à France Télécom.
France Télécom et Sonera France ont signé un contrat 1e 11 mai 2001 qui prévoit une rémunération, pour la prestation de facturation et de recouvrement pour compte de tiers de 7 % (P - PA) et l'absence de changement de tarif pendant la communication. Des négociations ont alors débuté sur un avenant à ce contrat portant sur le changement de tarif pendant la communication. France Télécom a transmis à Sonera France une nouvelle proposition le 6 juin 2001.

2.2. Les observations de Sonera recueillies
lors de son audition le 8 juin 2001

Lors de son audition du 8 juin 2001, Sonera France rappelle les deux phases dans ses relations avec France Télécom. Un premier contrat a été signé le 11 mai 2001. Il correspond à l'offre Audiotel aménagée proposée dans le cadre de la procédure de règlement de différend. France Télécom s'est alors engagée à proposer un avenant à ce contrat prévoyant des prestations complémentaires permettant la mise en relation entre l'appelant et l'appelé. D'autre part, un calendrier de suppression des stipulations contraignantes est prévu afin de permettre une ouverture commerciale du service progressive.
A la date de l'audition, le contrat signé le 11 mai 2001 et l'avenant que Sonera France va signer ne permettent pas de fixer librement les tarifs, ni d'effectuer une mise en relation vers les numéros gratuits ou à coûts partagés et ne permettent pas l'accès au service de Sonera France si l'abonné de France Télécom a choisi une option d'accès restreint dans le cadre du service Accès Sélectif de France Télécom, alors que le service de renseignements téléphoniques, « le 12 » de France Télécom, reste accessible. Il est prévu un délai de six mois pour la mise en oeuvre opérationnelle de l'avenant. Des motifs d'ordre technique ont été avancés par France Télécom pour justifier ce délai. France Télécom refuse de permettre à Sonera France de confier à un opérateur alternatif la collecte du trafic à destination de sa plate-forme.
Sonera France précise que dans l'hypothèse où France Télécom n'assure pas la collecte du trafic, l'aboutement d'appel peut être effectué par elle-même.
Sonera France précise que jusqu'à la réunion du 8 juin 2001, France Télécom a toujours refusé d'assurer la prestation de facturation et de recouvrement pour compte de tiers sans assurer en parallèle la collecte du trafic. Lors de cette réunion, France Télécom a justifié sa position par des motifs d'ordre technique liés au changement de tarification lors de l'aboutement d'appel. Sonera France estime cependant que, si elle fournit off line des tickets de taxation valorisés, ceux-ci sont suffisants pour que France Télécom facture le client.
France Télécom a précisé que la facture serait séparée de la sienne, ce que Sonera France a accepté. France Télécom n'a informé Sonera France que courant mars qu'elle ne pouvait mettre en oeuvre le changement de tarif lors de l'aboutement ainsi que la facturation pour compte de tiers, dès lors que la collecte du trafic ne lui était pas confiée.
France Télécom souhaite facturer des coûts de développement pour cette offre et inclure une clause dans le contrat en cas de rupture du contrat dans l'année suivant sa conclusion.
Sonera France précise que les tarifs de collecte du trafic restent très supérieurs à ceux que peuvent offrir les opérateurs tiers. C'est pourquoi Sonera France souhaite la fourniture par France Télécom d'une prestation de facturation et de recouvrement pour compte de tiers sans prestation de collecte du trafic.
Sonera France précise également que France Télécom ne lui octroie qu'un changement de tarif par an sans frais, les suivants étant facturés ... (1). France Télécom facture ... (1) par minute, toutes taxes comprises, pour la collecte, alors que l'offre d'opérateurs tiers est moitié moindre.

3. Rappel de l'exposé des faits et des griefs contenus
dans le rapport du rapporteur
3.1. Sur le délai initial de proposition de contrat
de France Télécom à Sonera France

France Télécom fait valoir que le retard dans la transmission d'une proposition à Sonera France est imputable au fait que l'adresse de cette dernière était inconnue de France Télécom. Or, il apparaît, dans les pièces transmises par les parties, qu'une réunion s'est tenue entre elles dès le 29 novembre 2000, suite à un courrier de Sonera France du 21 novembre, adressé avec avis de réception, sur lequel figurait l'adresse de Sonera France. Il semble donc que cet argument ne puisse valablement être invoqué par France Télécom pour justifier du retard à la transmission d'une proposition de contrat à Sonera France.

3.2. Sur l'évolution de la proposition de France Télécom
à Sonera France
i) Sur la prestation de facturation de l'aboutement d'appel

La première proposition de France Télécom à Sonera France exclut explicitement la facturation des appels aboutés (qui figure dans la décision de l'Autorité), dans la mesure où cette prestation n'est pas fournie par France Télécom, car hors champ du règlement de différend. France Télécom considère qu'elle ne peut facturer une prestation qu'elle ne fournit pas elle-même, alors que tel est bien l'objet d'une facturation pour compte de tiers. On peut également noter que France Télécom semble avoir entretenu la confusion entre la facturation pour le compte de Sonera France de l'aboutement d'appel et des appels aboutés, une fois la mise en relation avec le destinataire final effectuée, et la réalisation technique de la prestation d'aboutement elle-même, c'est-à-dire la connexion physique entre l'appel entrant vers le service de renseignement de Sonera France et l'appel sortant vers le numéro du correspondant. Ces deux prestations sont bien évidemment indépendantes par nature. Il était également clair que la réalisation par Sonera France de cette prestation d'aboutement nécessitait la prise en compte par France Télécom dans sa prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers, de la facturation de l'aboutement (montant fixe) et du changement de tarif en cours de communication (montant variable), inhérent à cette mise en relation, comme le précise la décision de l'Autorité, notamment dans ses motifs.
France Télécom, si elle a refusé de détacher la prestation d'aboutement de la facturation de cette prestation réalisée par Sonera France, a accepté le principe de fournir et de facturer cette prestation lors de la réunion du 20 février, soit 2 mois après le délai imparti par l'Autorité pour la signature d'un contrat conforme à la décision.
On constate donc que le temps nécessaire à France Télécom pour accepter ce principe a été préjudiciable à l'exécution de la décision dans les délais fixés par l'Autorité.

ii) Sur la prestation de facturation/recouvrement seule

Alors que :
- cette solution figurait explicitement à l'article 2 de la décision de l'Autorité ;
- cette solution était identifiée comme « scénario 3 » lors de la réunion du 23 janvier 2001 ;
- son étude a été explicitement demandée par Sonera France à France Télécom, d'une part, dès la réunion du 23 janvier, puis dans son courrier du 2 avril 2001,
France Télécom a refusé d'en examiner les conditions, notamment dans son courrier du 10 avril, avançant deux arguments distincts :
- d'une part, l'impossibilité technique de réaliser une telle prestation ;
- d'autre part, le fait qu'un règlement de différend sur la facturation pour compte de tiers des services à revenus partagés était en cours devant l'Autorité entre France Télécom et un opérateur tiers et que France Télécom ne pouvait présager de son issue.
Or, France Télécom n'a pas fait de recours en réformation de la décision no 2000-1194 devant la Cour d'appel, alors même qu'elle en estimait la disposition stipulée à l'article 2 techniquement irréalisable, argument dont elle ne peut donc utilement se prévaloir postérieurement.
En outre, les règlements de différends dont l'Autorité a à connaître sont par nature des cas individuels et indépendants les uns des autres et que France Télécom ne peut, de sa propre volonté, conditionner l'exécution d'une décision à une autre décision à venir. En l'espèce, les deux affaires étaient, en outre, distinctes quant au fond et quant à la qualification juridique des parties, la présente affaire ayant trait à un service de renseignement téléphonique fourni par un fournisseur de services, alors que l'affaire à laquelle France Télécom fait référence concernait une prestation de facturation pour compte de tiers pour les services à revenus partagés fournis par un opérateur tiers.
Enfin, en refusant de procéder à la prestation de facturation/recouvrement indépendamment de la réalisation de la prestation de collecte et de terminaison d'appel, France Télécom a pu imposer des prix de collecte et de terminaison supérieurs à ceux qui auraient pu être proposés à Sonera France par d'autres opérateurs (près du double d'après les dires de Sonera France).
Ainsi, cette obligation imposée par France Télécom, en contradiction avec la décision de l'Autorité, n'est pas économiquement neutre pour Sonera France.

iii) Sur l'autonomie tarifaire de Sonera France

La décision de l'Autorité confirmait pour Sonera France la liberté de sa politique tarifaire. En l'occurrence, Sonera France a finalement accepté de fixer les tarifs de ses clients en multiples entiers des propres paliers de France Télécom. Mais France Télécom a refusé que le tarif du « cadencement périodique » (tarif à la durée postérieur au minimum de perception) soit supérieur à 2,21 F toutes taxes comprises par minute. Ce refus est fondé, non sur des contraintes techniques, mais sur sa « volonté politique », comme France Télécom l'affirme dès sa proposition initiale du 15 décembre 2000. Ce refus est confirmé lors de la réunion du 20 février 2001 et maintenu jusqu'à l'issue des négociations.
Le rapporteur considère, d'une part, que cette contrainte tarifaire est contraire à la décision de l'Autorité ainsi qu'au principe de liberté du commerce énoncé à l'article 410-2 du code du commerce et, d'autre part, que les discussions sur ce point ont contribué à alourdir et prolonger de façon infondée l'ensemble des négociations.

iv) Sur les problèmes techniques de changement de tarif
en cours de communication

Dès l'origine des négociations infructueuses qui ont conduit Sonera France à saisir l'Autorité en règlement de différend, France Télécom connaissait la nature du service que Sonera France entend fournir et le mode de tarification envisagé : minimum de perception, tarification du service de renseignement à la durée, tarification forfaitaire de l'aboutement d'appel et tarification à la durée de l'appel abouté.
Il est donc surprenant que France Télécom fasse officiellement état de difficultés techniques pour procéder à un changement de tarification en cours de communication seulement lors de la réunion du 20 mars 2001, alors même que France Télécom a recours à ce mode de tarification pour ses propres services et notamment pour son service de renseignement accessible par le 12.
Ce constat est renforcé par le fait que France Télécom a indiqué, au cours de la réunion du 20 février 2001, que le recours à son réseau intelligent permettrait de fournir toutes les prestations demandées par Sonera France, y compris donc le changement de tarification en cours de communication.
Or, il est constant que les décisions de l'Autorité en matière de règlement de différend font à France Télécom ou à tout autre opérateur une obligation de résultat, sous le contrôle de la Cour d'appel, et non une obligation de moyens. C'est donc à tort que France Télécom justifie son refus d'« ouvrir son réseau intelligent à des tiers » au fait que la décision de l'Autorité ne prévoit pas une telle disposition (compte rendu de la réunion du 29 novembre 2000).
De plus, les contrats finalement conclus les 11 mai et 15 juin permettent cette fonctionnalité.
Ainsi, France Télécom a délibérément élevé des obstacles techniques injustifiés en cours de négociation afin de différer la conclusion du contrat prévu par la décision de l'Autorité.

v) Sur les prestations fournies par France Télécom à Sonera
France dans le cadre des contrats des 11 mai et 15 juin 2001

Jusqu'à la signature définitive du contrat, et même après que France Télécom ait accepté de fournir et de facturer la prestation d'aboutement d'appel ainsi que de réaliser la mise en relation, Sonera France n'était pas en situation de connaître avec précision les fonctionnalités qui pourraient être rendues par son service, notamment en ce qui concerne :
- les caractéristiques des postes à partir desquels le numéro 3211 est accessible : à titre d'exemple, dans un premier temps (courrier de France Télécom à Sonera France du 23 février 2001), les cabines téléphoniques et postes à cartes sont exclus du périmètre du service ;
- le type de communication disponible après l'aboutement : à titre d'exemple, si dans un premier temps les communications internationales étaient incluses dans les communications possibles après aboutement (courrier précité de France Télécom), le contrat définitif les exclut ;
- certaines demandes de Sonera France ne sont pas satisfaites, telles que la possibilité d'être appelé à partir des postes en service restreint, comme c'est le cas pour le service de renseignement fourni par France Télécom, de même que la mise en relation vers les numéros gratuits ou à coûts partagés.
Enfin, les délais imposés par France Télécom, notamment en ce qui concerne les tests, conduisent à ce que Sonera France ne puisse fournir techniquement son service qu'au mieux vingt-huit semaines après la signature du contrat, soit en janvier 2002.

3.3. Griefs retenus

Au vu de ces éléments, il apparaît que France Télécom n'a pas exécuté dans sa totalité la décision de l'Autorité :
- en ce qu'elle a refusé de proposer un contrat comprenant seulement une prestation de facturation/recouvrement telle que prévue à l'article 2 ;
- en ce que Sonera France ne bénéficie pas d'une pleine autonomie tarifaire du fait de la volonté de France Télécom et non d'impossibilités techniques ;
- en ce que les prestations fournies ne remplissent pas toutes les fonctionnalités demandées par Sonera France, notamment en terme d'accessibilité de son numéro et de possibilités de mise en relation vers certains numéros.
En outre, même si les contrats finalement proposés par France Télécom pouvaient être considérés comme acceptables par Sonera France, les délais de négociation largement imputables aux atermoiements et manoeuvres dilatoires de France Télécom conduisent Sonera France à repousser l'ouverture commerciale de son service au mieux au début de l'année 2002, soit un an plus tard qu'elle ne l'avait prévu lors de sa saisine de l'Autorité et avec six mois de retard par rapport aux objectifs affichés en cours de négociation (notamment le courrier du 2 avril).
Il est donc fait grief à France Télécom :
- d'un retard, imputable au comportement dilatoire de France Télécom, de 180 jours, entre le 15 décembre 2000 et le 15 juin 2001, date de signature d'une convention acceptable par Sonera France, bien que n'exécutant que partiellement la décision no 2000-1194 ;
- d'un refus d'exécuter l'article 2 de la décision, ce qui entraîne un surcoût pour Sonera France des prestations de collecte et de terminaison d'appel, par rapport aux prix de marché.
Le rapport d'instruction a été notifié à France Télécom le 19 novembre 2001.

4. Observations de France Télécom
sur le rapport d'instruction

Par courrier enregistré le 30 novembre 2001, France Télécom fait part de ses observations sur le rapport d'instruction.
A titre liminaire, France Télécom considère qu'elle a bien exécuté la décision de l'Autorité, exécution qui s'est traduite par la convention signée le 14 juin 2001 entre les parties. L'Autorité ne peut opposer à France Télécom de n'avoir pas conclu dans le délai requis au regard des incertitudes d'interprétation de sa décision ainsi que des impossibilités techniques dont cette dernière ne tenait pas compte. C'est bien l'absence de formulation explicite des obligations contractuelles des deux parties qui a conduit France Télécom à mener les consultations et les études nécessaires, en particulier sur la question de la facturation, pour laquelle il n'existait pas de solution a priori transposable. A ce titre, France Télécom renvoie au rapport d'instruction qui n'hésite pas à préciser in extenso l'interprétation que le régulateur doit donner à une décision dont il est pourtant l'auteur.
France Télécom souligne également que, contrairement aux conclusions du rapporteur, au titre de l'article 8 du contrat signé le 14 juin 2001, Sonera France est autorisée à modifier les prix publics de son service pour les appels en provenance des utilisateurs du réseau de France Télécom.
En outre, le rapporteur ne saurait soutenir que la décision n'a pas été exécutée dans sa totalité dès lors qu'elle ouvrait elle-même plusieurs voies à la conclusion d'un accord.
Si l'article 2 de la décision no 2000-1194 établit qu'il est nécessairement fait droit à la demande de Sonera France de prestation de facturation et de recouvrement pour compte de tiers « quel que soit l'opérateur qui assure les prestations de collecte et de terminaison du trafic », il ne peut conduire à exclure France Télécom des opérateurs susceptibles d'assurer l'ensemble des prestations dès lors que les parties ont conjointement retenu cette solution.

i) Sur le délai de 180 jours pour parvenir
à la conclusion d'un accord

France Télécom rappelle qu'une première convention a été proposée à Sonera France le 15 décembre 2000. Des difficultés d'interprétation de la décision de l'Autorité sont apparues et ont conduit à la remise en question par Sonera France du scénario technique originel. En effet, contrairement à l'interprétation de la décision par le rapporteur, il n'était pas explicité que « dans tous les cas, Sonera France devait bénéficier d'une autonomie dans la fixation de ses tarifs au client ».
De plus, Sonera France a demandé, en janvier 2001, à France Télécom de lui fournir la prestation d'aboutement d'appel, prestation n'entrant pas dans le champ de la décision.
En conséquence, diverses mises au point, incluant des études de faisabilité technique, se sont révélées nécessaires pour assurer une suite favorable à ces demandes de Sonera France. A l'évidence, il ne saurait donc s'agir d'atermoiements ou de manoeuvres dilatoires de France Télécom.

ii) Sur le refus d'exécuter l'article 2 de la décision

France Télécom souligne qu'elle n'a en aucun cas refusé d'exécuter l'article 2 de la décision, puisqu'elle a présenté à Sonera France le 15 février 2000 une offre de facturation/recouvrement pour compte de tiers, dans des conditions techniques similaires à celles qui sont appliquées à l'interconnexion pour les services à coûts et à revenus partagés en matière de facturation, conformément au constat de la décision no 2000-1194 selon lequel « les catalogues d'interconnexion pour les années 2000 et 2001 de France Télécom prévoient que les opérateurs ... peuvent collecter du trafic pour compte de tiers à destination des numéros spéciaux de la forme 08ABPQMCDU ... ».
Postérieurement à cette proposition et alors que la décision de l'Autorité ne tenait pas compte de cette possibilité, Sonera France a demandé à France Télécom de réaliser la prestation d'aboutement. Dans ce nouveau contexte et afin de prendre en compte la demande initiale de Sonera France de changement de tarif en cours de communication, France Télécom a fait une nouvelle proposition à Sonera France reposant sur le raccordement obligatoire de la plate-forme de Sonera France à son réseau. En l'absence de raccordement direct au réseau de France Télécom, il n'existe aucun mécanisme technique permettant de prendre en compte les changements de tarifs en cours de communication réclamés par Sonera France.
Ainsi, l'Autorité ne peut à la fois réclamer un parallélisme entre les prestations fournies à Sonera France et celles offertes à l'interconnexion pour les services spéciaux et contraindre France Télécom à prendre en compte un changement de tarif en cours de communication lorsque Sonera France est raccordée à un opérateur interconnecté.
France Télécom motive à double titre son refus de fournir toute prestation de facturation/recouvrement intégrant un changement de tarif en cours de communication lorsque Sonera France est raccordée à un opérateur interconnecté :
- soit les informations de changement de tarifs en cours de communication sont transmises en temps réel à l'interconnexion et il n'existe actuellement aucun mécanisme technique susceptible de permettre cela ;
- soit les informations concernant la tarification sont transmises en temps différé par l'intermédiaire de tickets de taxation dont Sonera France assure seule la valorisation, et il n'est pas concevable que France Télécom puisse établir une facturation à partir d'instruments de comptage extérieurs.
En tout état de cause, France Télécom souligne qu'elle a entrepris toutes les démarches pour trouver dans les meilleurs délais une solution satisfaisante pour Sonera et qu'elle y est parvenue en concluant une convention le 14 juin 2001.
Depuis la signature de cette convention, la qualité des relations commerciales entre les deux parties conduisent France Télécom à s'interroger sur le sens d'une sanction en cette affaire.
France Télécom considère qu'elle a exécuté la décision no 2000-1194, que les griefs retenus dans le rapport ne sont pas justifiés et qu'il n'y a donc pas lieu de la sanctionner.

5. Observations de Sonera France

Par courrier enregitré le 12 décembre 2001, Sonera France fait part de ses observations.
En préambule, Sonera France indique que même si les relations entre France Télécom et Sonera France se sont améliorées, les conclusions du rapport d'instruction sont exactes.
En premier lieu, Sonera France note que France Télécom ne conteste pas véritablement avoir refusé l'exécution de l'article 2 de la décision no 2000-1194, mais invoque de prétendus obstacles techniques, alors que, comme l'indique France Télécom, il s'agit d'un refus de principe d'établir « une facturation à partir d'instruments de comptage extérieurs ».
Ce refus d'exécuter l'article 2 de la décision cause un préjudice considérable à Sonera France en lui imposant notamment un tarif de collecte de ...(1) largement supérieur au prix de marché.
En second lieu, France Télécom invoque le contrat du 14 juin 2001 pour justifier de l'exécution de la décision. Or, il s'agit d'une convention de type « Audiotel » dont l'Autorité avait souligné le caractère inadapté à la demande de Sonera dans sa décision et que Sonera France a signée comme un moyen transitoire d'ouvrir un service en attendant une convention conforme à la décision de l'Autorité.
Enfin, France Télécom invoque des difficultés d'interprétation de la décision, sur lesquelles elle avait tout loisir d'interroger l'Autorité, et des difficultés techniques dont elle n'a jamais apporté la preuve. Bien au contraire, France Télécom n'a pas exécuté l'article 2 de la décision sur la base de considérations politiques et non techniques.
Il en résulte que Sonera France n'a toujours pas obtenu, plus d'un an après, la décision de l'Autorité et plus de trente mois après avoir engagé des négociations commerciales, la prestation demandée à France Télécom pour être en mesure d'offrir un service de renseignements concurrent de celui de France Télécom.

6. Analyse de l'Autorité
6.1. Sur la procédure

Aux termes de l'article 20 de la décision no 99-528 du 18 juin 1999 portant règlement intérieur de l'Autorité : « ... Dans le cas d'une inexécution d'une décision de règlement des différends prise en application de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, le rapport est également adressé à l'autre ou aux autres parties concernées. A l'expiration du délai fixé pour la consultation du dossier et la présentation d'observations écrites par la personne concernée, le rapporteur ou son adjoint transmet le dossier au collège, accompagné, le cas échéant, des observations écrites de la partie mise en cause. »
Considérant que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que, pour les besoins de l'instruction et pour l'application de l'article L. 36-11 (2o) du code susmentionné, lorsqu'un exploitant de réseau fait l'objet d'une procédure de sanction pour ne s'être pas conformé dans les délais fixés à une décision prise en vertu de l'article L. 36-8 du même code, le chef du service juridique ou son adjoint communique aussi à la partie concernée les observations écrites de la partie mise en cause en réponse au rapport d'instruction, et donne ensuite à l'exploitant mis en cause communication des observations éventuellement émises par la partie concernée par l'exécution de la décision de règlement de litige.
Il ressort des pièces du dossier que, conformément à l'article 20 du règlement intérieur, le rapport d'instruction a été adressé à France Télécom le 19 novembre afin qu'elle puisse, le cas échéant, présenter ses observations écrites pour le vendredi 30 novembre 2001. Le rapport a aussi été adressé le 19 novembre pour information à la société Sonera France. France Télécom a produit des observations en réponse le 30 novembre 2001 d'où il ressortait en conclusion que « Depuis la mise en demeure du contrat signé le 14 juin 2001, la qualité des relations commerciales entre les deux parties et les échos extrêmement favorables de Sonera conduisent France Télécom à s'interroger sur le sens d'une sanction que pourrait prononcer l'Autorité au titre de l'article L. 36-11 en cette affaire. Pour toutes ces raisons, France Télécom considère qu'elle a exécuté la décision no 2000-1194. Dès lors, France Télécom estime que les griefs retenus dans le rapport ne sont pas justifiés et que, par voie de conséquence, il n'y a pas lieu à la sanctionner. »
Compte tenu des termes mêmes du paragraphe de conclusion qui pouvait légitimement conduire à s'interroger à l'approche de l'audience sur la réalité et l'étendue de l'inexécution dont il était fait grief à France Télécom, il était justifié et nécessaire pour éclairer l'appréciation de l'Autorité de communiquer à la société Sonera France la réponse de France Télécom. France Télécom, à qui les observations en réponse de la société Sonera France ont été communiquées dès le 14 décembre, soit une semaine avant l'audience, a ainsi été mise en mesure de produire en tant que de besoin de nouvelles observations, ce qu'elle n'a pas fait.
Il résulte de ce qui précède que les arguments de procédure, présentés pour la première fois à l'audience par France Télécom et confirmés par un courrier en date du 3 janvier 2002, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être écartés.

6.2. Sur le fond

Dans ses observations écrites enregistrées le 30 novembre 2001, France Télécom considère qu'elle a exécuté pleinement la décision no 2000-1194 et que les griefs qui lui ont été notifiés ne sont pas justifiés. Elle fait valoir que le retard de 180 jours dont il lui est fait grief résulte, d'une part, de l'imprécision de la décision qui a nécessité des négociations complémentaires et des études techniques et, d'autre part, des nouvelles demandes de Sonera France en cours de négociation, portant en particulier sur la réalisation de l'aboutement d'appel par France Télécom. Elle considère également que le refus d'exécuter l'article 2 de la décision n'est pas fondé, à la fois parce que la décision laissait un choix ouvert à la négociation des parties, que France Télécom et Sonera France ont conclu un accord et qu'il n'est pas possible à France Télécom de fournir une prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers avec changement de tarification lorsque Sonera France est raccordée à un opérateur interconnecté.

i) Sur le délai de 180 jours dans l'exécution de l'article 1er
de la décision no 2000-1194 de l'Autorité

Sur ce délai imputable, selon France Télécom, à l'imprécision de la décision et aux impossibilités techniques, l'Autorité estime que la demande de Sonera France de mettre en oeuvre un service de renseignements et d'aboutement d'appel concurrent du service du 12 de France Télécom, objet du différend tranché par l'Autorité dans sa décision no 2000-1194, ainsi que les motifs de la décision définissent de façon suffisamment précise la nature des prestations demandées à France Télécom.
En effet, s'agissant de la prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers, celle-ci doit de facto couvrir la facturation par France Télécom de l'ensemble du service de Sonera France, à savoir la facturation du service de renseignements de l'aboutement d'appel et de la communication établie après aboutement, sauf à priver de son effet utile la décision de l'Autorité au regard « tant de la modicité des montants à facturer, compte tenu du prix d'un service de renseignements téléphoniques et du caractère occasionnel de l'utilisation d'un tel service par les abonnés, qui ne justifie économiquement pas une relation commerciale directe entre le fournisseur de services et son client, notamment au regard du coût de l'émission d'une facture spécifique » (page 12 de la décision no 2000-1194).
France Télécom ne saurait non plus raisonnablement soutenir qu'elle n'avait pu s'apercevoir avant la réunion du 20 mars 2001 que la nature même du service demandé par Sonera France conduit, comme pour son propre service du 12, à un changement de tarification, après réalisation de l'aboutement d'appel, pour tarifer à la durée l'appel ainsi établi, cette question ayant été évoquée dès la réunion du 29 novembre 2000. France Télécom ne saurait également justifier cette absence de compréhension par le fait que le dispositif de la décision de l'Autorité ne prévoit pas explicitement cette prestation, alors que son article 2 dispose que « France Télécom doit faire droit à la demande de Sonera France de prestation de facturation et de recouvrement pour compte de tiers pour la collecte du trafic à destination du numéro de la forme 3 BPQ de Sonera France, pour son service de renseignements et d'aboutement d'appel » et que dans les motifs de la décision (page 10) l'Autorité souligne le caractère inadapté de l'offre « Audiotel » aménagée proposée par France Télécom en ce qu'elle ne permet pas de facturer à la durée la communication établie après aboutement : « De surcroît, la structure des paliers "Audiotel" à la durée, impose aux appels une durée maximale et ne permet donc pas de facturer et de recouvrer le prix de la communication établie par aboutement d'appel depuis le centre d'appel de Sonera France jusqu'au poste appelé. Il est également constant que la structure tarifaire retenue par France Télécom pour son service du "12" ne s'inscrit pas dans les grilles tarifaires "Audiotel" proposées.
Il résulte de ce qui précède, et en particulier de l'absence de facturation et de recouvrement pour l'aboutement d'appel, que l'offre "Audiotel" aménagée proposée par France Télécom, qui ne permet pas de fournir le service dans son ensemble prévu par Sonera France, ne saurait répondre aux besoins exprimés par la demande de Sonera France. »
France Télécom ne saurait justifier le retard à exécuter la décision no 2000-1194 au motif que Sonera France lui aurait tardivement demandé, en janvier 2001, de réaliser l'aboutement d'appel, prestation technique qui ne fait pas l'objet de la décision no 2000-1194 de l'Autorité. En effet, France Télécom a refusé de réaliser la prestation d'aboutement lors de la réunion avec Sonera France du 29 novembre 2000. En revanche, la prestation de facturation pour compte de tiers était effectivement incluse dans le règlement de différend. Une confusion est apparue dès l'origine des négociations entre ces deux éléments : d'une part, la prestation technique d'aboutement des appels et, d'autre part, la facturation pour compte de tiers de cette prestation. En outre, Sonera France a indiqué, lors de la réunion du 23 janvier 2001, que la mise en oeuvre du scénario 2 n'était acceptable que comme une mesure transitoire vers le scénario 3, où France Télécom réalise uniquement une prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers.
Enfin, l'Autorité note que la proposition initiale de contrat en date du 15 décembre 2000 n'était que la reprise de la proposition d'offre « Audiotel » aménagée proposée par France Télécom avant la demande de règlement du différend.
Par ailleurs, France Télécom souligne que Sonera France dispose de la liberté tarifaire pour son service, contrairement aux affirmations du rapporteur. En effet dans le contrat conclu le 14 juin 2001, l'article 8 précise « Sonera est autorisée à modifier les prix publics de son service pour les appels en provenance des utilisateurs du réseau téléphonique commuté de France Télécom ... ».
L'Autorité relève néanmoins que cette liberté tarifaire est encadrée par une contrainte technique imposant à Sonera France de fixer son tarif à la durée sur la base d'unités Télécom (UT) que France Télécom utilise pour elle-même. Si cette contrainte technique peut paraître acceptable, en ce qu'elle n'entrave pas fondamentalement la liberté tarifaire de Sonera France, l'Autorité considère que la décision de France Télécom de limiter à 2,21 F (TTC) par minute au maximum le prix à la durée du service de Sonera France, et ce depuis le début des négociations, est contraire au principe de liberté tarifaire et ne repose, comme France Télécom l'a d'ailleurs indiqué au cours des négociations, que sur une volonté politique (justifiée en référence à un règlement de différend sur les services à revenus partagés en cours à l'époque devant l'Autorité) et non sur une impossibilité technique. France Télécom justifie le délai des négociations sur ce point par le caractère non explicite de ce principe dans la décision de l'Autorité et, en particulier, dans son dispositif. L'Autorité considère que la saisine de Sonera France et les motifs de sa décision (en particulier page 10) sont explicites sur ce point et relève, au demeurant, que s'il subsistait une quelconque incertitude dans l'esprit de France Télécom quant à l'étendue de ses obligations au titre de l'exécution de la décision, il lui était loisible de saisir l'Autorité pour se faire confirmer la portée de la décision, ce qu'elle n'a pas fait.
Il apparaît donc que la conduite des négociations par France Télécom, en conduisant Sonera France à accepter des solutions complexes, résultant des impossibilités techniques affirmées par France Télécom ou de ses refus de principe, a produit un retard important dans l'exécution de la décision no 2000-1194. L'Autorité note également que le contrat conclu le 14 juin 2001 ne satisfait pas Sonera France, qui l'estime non conforme à la décision de l'Autorité, en ce qu'il s'agit d'une convention Audiotel adaptée et que sa demande d'une prestation de facturation/recouvrement seule est toujours refusée par France Télécom. L'Autorité souligne que les imprécisions de la décision alléguées par France Télécom ne sauraient justifier les interprétations restrictives que France Télécom en a faites dans ses négociations avec Sonera France, au regard du contexte antérieurement créé par les échanges entre les parties et la décision de l'Autorité dans le cadre du différend, ainsi que de la faculté de France Télécom de soulever à tout moment ces difficultés de compréhension de la décision auprès de l'Autorité. L'Autorité note à cet égard que dans les réponses de France Télécom aux deux courriers du directeur général de l'Autorité en date du 8 janvier 2001 et du 24 avril 2001, France Télécom ne fait pas état de difficultés d'interprétation de la décision.
L'Autorité estime donc justifié qu'un retard de 180 jours dans l'exécution de la décision no 2000-1194 soit imputé à France Télécom.

ii) Sur le refus d'exécuter l'article 2 de la décision

France Télécom souligne qu'elle n'a pas refusé d'exécuter l'article 2 de la décision puisqu'elle a présenté une offre de facturation/recouvrement à Sonera France conformément à la décision. En l'espèce, dans sa proposition en date du 15 décembre 2000, elle a entendu faire bénéficier Sonera France de conditions techniques similaires à celles qui sont appliquées à l'interconnexion pour les services à coûts et à revenus partagés en matière de facturation, conformément au constat de la décision no 2000-1194 selon lequel « les catalogues d'interconnexion pour l'année 2000 et 2001 de France Télécom prévoient que des opérateurs autorisés au titre de l'article L. 33-1 peuvent collecter du trafic pour compte de tiers, à destination des numéros spéciaux de la forme 08ABPQMCDU attribués à des fournisseurs de services au sens de l'article L. 34-2 qui sont leur client. »
France Télécom souligne qu'en l'absence de raccordement de Sonera France à son réseau, elle ne peut prendre en compte les changements de tarifs en cours de communication demandés par Sonera France, ce qui d'ailleurs est en contradiction, selon elle, avec la demande de l'Autorité de fourniture d'un service équivalent à celui offert en interconnexion pour les numéros spéciaux. En effet :
- il n'existe aucun mécanisme technique de transmission en temps réel à l'interface d'interconnexion des informations de changement de tarif ;
- France Télécom ne saurait établir une facture à partir d'instruments de comptage qu'elle ne maîtrise pas, si Sonera France lui fournissait en temps différé des tickets de taxation.
L'Autorité constate que Sonera France a, depuis le début des négociations, maintenu sa demande d'une solution, dite scénario 3, où France Télécom fournit la prestation de facturation/recouvrement pour son service, la collecte et la terminaison du trafic de Sonera France étant assurées par un opérateur tiers interconnecté.
Elle note également que France Télécom s'appuie sur un extrait des motifs de la décision qu'elle interprète comme une demande de l'Autorité de fournir un service identique à celui offert en interconnexion pour les services à coûts et revenus partagés, qui, selon la grille tarifaire de France Télécom, suivie par les opérateurs interconnectés, ne nécessite pas de changement de tarification en cours de communication. L'Autorité estime que cette lecture n'est conforme ni au texte ni à l'esprit de la décision, qui, dans ses motifs (p. 11 et 12), fait le simple constat factuel que France Télécom fournit déjà une prestation de facturation pour compte de tiers pour divers services à des fournisseurs de service, raccordés soit directement à son réseau, soit à des opérateurs tiers interconnectés.
Elle rappelle que l'article 2 de la décision laisse le choix à Sonera France de recourir à une prestation de facturation/recouvrement pour compte de tiers, que la collecte et la terminaison du trafic soit assurée par France Télécom selon les modalités techniques et tarifaires négociées en application de l'article 1er ou qu'elle recourt aux prestations d'un opérateur tiers pour la collecte et la terminaison à un prix de marché.
Il ressort des négociations que, nonobstant la signature par Sonera France du contrat du 14 juin 2001, en tant que moyen transitoire pour pouvoir ouvrir son service, celle-ci a constamment demandé une offre de facturation recouvrement seule, à laquelle France Télécom a refusé de faire droit, sans même entreprendre des études de faisabilité.
L'Autorité considère que les motifs invoqués par France Télécom pour justifier ce refus ne sont pas fondés, en particulier en ce qui concerne la solution reposant sur la transmission de tickets de taxation en temps différé. Elle note également que ce refus entraîne un surcoût économique pour Sonera France.
L'Autorité estime donc que France Télécom a refusé d'exécuter l'article 2 de la décision no 2000-1194, en ce qu'elle n'a pas fait droit à la demande de Sonera France d'une offre de facturation/recouvrement seule, les prestations de collecte et de terminaison d'appel étant assurées par un opérateur tiers interconnecté à France Télécom.

7. Conclusion
7.1. Il y a lieu de sanctionner France Télécom au vu
des faits et motifs exposés ci-dessus

L'Autorité estime, au vu des faits et motifs exposés ci-avant, qu'il y a lieu de sanctionner France Télécom pour ses manquements dans l'exécution de la décision de l'Autorité no 2000-1194, en date du 15 novembre 2000, se prononçant sur un règlement de différend entre les sociétés Sonera France et France Télécom en application de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications, manquements portant, d'une part, sur un retard de 180 jours dans l'exécution de ladite décision et, d'autre part, sur le refus persistant d'exécuter l'article 2 de ladite décision, en ce que France Télécom n'a pas fait droit à la demande de Sonera France d'une offre de facturation/recouvrement seule.

7.2 Sur le montant de la sanction

Aux termes de l'article L. 36-11 (2o) du code des postes et télécommunications, « lorsqu'un exploitant de réseau ou un fournisseur de services ne se conforme pas dans les délais fixés à une décision prise en application de l'article L. 36-8 ..., l'Autorité de régulation des télécommunications peut prononcer à son encontre une des sanctions suivantes : ... b) Soit, si le manquement n'est pas constitutif d'une infraction pénale, une sanction pécuniaire, dont le montant est proportionné à la gravité du manquement et aux avantages qui en sont tirés, sans pouvoir excéder 3 % du chiffre d'affaires hors taxe du dernier exercice clos, taux porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation ».
En l'espèce, l'Autorité constate la gravité du manquement reproché à France Télécom, découlant de la conjonction, d'une part, du retard de 180 jours dans l'exécution de la décision no 2000-1194 en date du 15 novembre 2000 et, d'autre part, de son refus d'exécuter l'article 2 de ladite décision, en ce que France Télécom n'a pas fait droit à la demande de Sonera France d'une offre de facturation/recouvrement seule. L'Autorité estime que France Télécom a tiré avantage de ce manquement en maintenant sa part de marché sur les services de renseignements et d'aboutements d'appels au cours de l'année 2001, marché sur lequel France Télécom a réalisé en 2000 un chiffre d'affaires de l'ordre de ... (1), les contrats conclus le 11 mai et 15 juin 2001 entre les parties n'étant pas entrés en vigueur à la date du 31 décembre 2001. En fonction de ces éléments, l'Autorité estime qu'il y a lieu d'infliger une sanction pécuniaire de 5 millions d'euros à France Télécom en application de l'article L. 36-11 (2o, b) du code des postes et télécommunications,
Décide :


Art. 1er. - France Télécom a manqué à ses obligations en ne se conformant pas à la décision de l'Autorité no 2000-1194 en date du 15 novembre 2000 se prononçant sur un règlement de différend entre les sociétés Sonera France et France Télécom, au titre d'un retard de 180 jours dans l'exécution de cette décision, qui lui est imputable, et du refus d'exécution de l'article 2 de ladite décision, en ce que France Télécom n'a pas fait droit à la demande de Sonera France d'une offre de facturation/recouvrement seule.


Art. 2. - Une sanction pécuniaire de 5 millions d'euros est prononcée à l'encontre de France Télécom.


Art. 3. - La présente décision sera notifiée à France Télécom, transmise à Sonera France et publiée au Journal officiel de la République française, sous réserve des secrets protégés par la loi.


Fait à Paris, le 9 janvier 2002.

Le président,
J.-M. Hubert


(1) ... Passages relevant des secrets des affaires.