J.O. Numéro 186 du 12 Août 2001       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 13099

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Décision no 2001-595 du 19 juin 2001 relative à l'avis de l'Autorité sur le projet de rapport du Gouvernement au Parlement sur la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile


NOR : ARTL0100361S



L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, et notamment son article L. 35-7 ;
Vu la demande d'avis du secrétariat d'Etat à l'industrie en date du 5 juin 2001 ;
Après en avoir délibéré le 19 juin 2001,
Décide :



Art. 1er. - L'avis de l'Autorité de régulation des télécommunications annexé à la présente décision sur le projet de rapport du Gouvernement au Parlement sur la couverture du territoire par les réseaux de téléphonie mobile est approuvé.


Art. 2. - Le président de l'Autorité de régulation des télécommunications est chargé de transmettre au ministre chargé des télécommunications la présente décision, qui sera publiée, y compris ses annexes, au Journal officiel.


Fait à Paris, le 19 juin 2001.

Le président,
J.-M. Hubert


A N N E X E I

Aux termes de l'article L. 35-7 du code des postes et télécommunications, le Gouvernement doit remettre au Parlement « au moins une fois tous les quatre ans » à compter de la date de publication de la loi du 26 juillet 1996 un rapport sur le service public des télécommunications. Le premier de ces rapports doit notamment comporter « un bilan de la couverture du territoire par les réseaux de radiotéléphonie mobile ».
Le Gouvernement a choisi d'élaborer un rapport spécifique sur cette problématique de la couverture des réseaux mobiles.
Ce rapport doit proposer « les modifications nécessaires à apporter » au chapitre III du code des postes et télécommunications relatif au service public des télécommunications « pour assurer, à un terme rapproché, la couverture des zones faiblement peuplées du territoire, ainsi que des routes nationales et des autres axes routiers principaux, par au moins un service de radiotéléphonie mobile terrestre ou satellitaire » et doit également préciser « les moyens nécessaires pour atteindre cet objectif dans le respect du principe d'égalité de concurrence entre opérateurs, notamment les modalités d'un investissement commun aux opérateurs ou d'une combinaison des différentes technologies disponibles dans les zones à faible densité de population non couvertes à la date de remise du rapport ».
Conformément à l'article L. 35-7 du code des postes et télécommunications, le secrétariat d'Etat à l'industrie a sollicité l'avis de l'Autorité de régulation des télécommunications sur le projet de rapport qu'il a préparé.
L'Autorité note que l'étude ayant servi de base à l'élaboration par le secrétariat d'Etat à l'industrie du présent rapport a donné lieu à une concertation menée autour de la direction générale de l'industrie, des technologies de l'information et des postes, à laquelle ont participé le Conseil général des technologies de l'information, l'Agence nationale des fréquences et les trois opérateurs mobiles concernés. L'Autorité de régulation des télécommunications y a été associée.
I. - Sur l'état de la couverture des réseaux
de téléphonie mobile (chapitre 4)

Le bilan de couverture présenté dans le rapport a été obtenu par superposition de cartes de couverture des trois opérateurs mobiles construites en faisant l'hypothèse qu'il y a couverture en un point si le niveau du champ radioélectrique constaté en ce point est supérieur à une valeur seuil fixée sur la base de considérations théoriques.
L'Autorité considère qu'une démarche complémentaire de mesure directe de la couverture sur le terrain pourrait utilement compléter la démarche théorique utilisée dans le présent rapport. C'est pourquoi elle a engagé une réflexion sur la méthode de mesure de la couverture qui devrait déboucher prochainement sur l'obtention de résultats concrets sur l'état de la couverture dans quarante cantons.
L'Autorité remarque que, du fait de la méthodologie utilisée, les zones non couvertes dont rend compte le présent rapport ont une extension supérieure à 1 kilomètre carré. L'Autorité estime que cela est en accord avec l'esprit de ce rapport qui est de mettre en évidence les zones de couverture bien constituées et non les défauts isolés de couverture ou résultant d'une insuffisante qualité de service. Il n'en demeure pas moins que ces défauts renforcent la perception, par les usagers, de la non-couverture.
Le bilan de couverture présenté se focalise sur la couverture agrégée des trois opérateurs mobiles français, sans distinguer la couverture opérateur par opérateur. En ce sens, il ne rend qu'imparfaitement compte de l'expérience des utilisateurs qui sont, pour l'immense majorité d'entre eux, abonnés à un seul réseau et perçoivent donc la couverture associée à un seul opérateur.
L'Autorité constate l'amélioration de la couverture depuis 1997 que fait apparaître la méthodologie du rapport, sous l'effet conjugué de la forte augmentation de la pénétration des services de téléphonie mobile et de l'importance de la couverture comme argument de vente.
Cependant ce sont encore 8,4 % du territoire qui ne sont couverts par aucun opérateur mobile, soit approximativement l'équivalent de huit départements français. L'état de la couverture est encore insuffisant eu égard au besoin universel qu'est devenu aujourd'hui le GSM.
La couverture supplémentaire apportée par Bouygues Telecom et la Société française du radiotéléphone par rapport à la couverture de France Télécom Mobiles est de 2,6 % du territoire, soit l'équivalent de deux ou trois départements français. Il apparaît donc que, malgré la similitude dans le principe de choix des zones de déploiement des différents opérateurs, le gain de couverture engendré par Bouygues Telecom et la Société française du radiotéléphone est appréciable.
L'Autorité note que le périmètre du présent rapport n'incorpore pas les départements et territoires d'outre-mer. L'évolution récente du nombre d'opérateurs dans ces départements et territoires est susceptible d'induire une évolution de la couverture à échéance rapprochée.
II. - Sur l'analyse économique de la couverture géographique des réseaux de radiotéléphonie en France et les tendances associées au développement de ces réseaux (chapitre 6)
L'Autorité considère que les travaux présentés dans cette partie constituent une très bonne base d'analyse mais tient à souligner cependant la sensibilité potentielle des résultats concernant les gains ou pertes d'exploitation en fonction des hypothèses du modèle.
L'Autorité estime qu'une annexe présentant les grandes lignes du modèle économique et la valeur des paramètres clés (décomposition des coûts d'investissements et des coûts d'exploitation, hypothèses relatives au calcul des recettes) pourrait être utilement jointe au rapport.
III. - Sur l'objectif de couverture du territoire
(chapitre 7)

Le rapport fixe comme objectif de couverture du territoire la couverture des zones de vie permanentes ou occasionnelles que sont les mairies et les bourgs non couverts aujourd'hui.
L'Autorité considère que la téléphonie mobile est par nature associée au concept de mobilité et donc à la continuité de la couverture : la couverture des principaux axes entre les zones de vie permanentes ou occasionnelles visées par le rapport doit donc être également prise en compte dans la définition des objectifs de couverture.
La fixation d'un objectif de couverture doit s'accompagner d'un calendrier précisant les échéances auxquelles les objectifs de couverture doivent être remplis, afin de permettre aux opérateurs et aux collectivités territoriales de disposer d'une visibilité suffisante.
L'Autorité considère également que le rapport aurait dû clarifier la question de savoir si les engagements de couverture affichés ne portent que sur la couverture par le service de voix ou s'ils englobent également la couverture GPRS en mode paquets.
IV. - Sur les solutions susceptibles d'améliorer la couverture

du territoire par les réseaux de radiotéléphonie mobile (chapitre 8)
1. Sur les solutions techniques :
Pour améliorer la couverture des zones aujourd'hui non couvertes, les solutions permettant un partage des investissements semblent constituer la piste à privilégier afin de diminuer les coûts associés. Parmi celles-ci, deux d'entre elles se distinguent : la mutualisation des infrastructures passives consistant à partager les sites et les équipements passifs (pylônes) et la solution de l'itinérance locale pour laquelle un seul opérateur installe des équipements dans la zone non couverte considérée et rend possible l'accès des abonnés des autres opérateurs à la ressource radio gérée par les équipements concernés. Le rapport met en avant le moindre coût relatif de cette dernière solution d'itinérance locale, et il semble effectivement légitime de la privilégier.
L'Autorité souhaite par ailleurs apporter des précisions relatives à la mise en oeuvre de l'itinérance.
a) Sur la tarification :
L'Autorité estime que la tarification d'un client en situation d'itinérance locale doit être la même que celle pratiquée lorsque ce même client utilise le réseau de l'opérateur auquel il est abonné.
b) Sur la qualité de service :
Le rapport précise que l'accès à l'ensemble des services usuellement accessibles par un client d'un opérateur peut en situation d'itinérance devenir problématique. En l'état actuel des réseaux, l'accès à la messagerie vocale, aux services de numéros courts en général ainsi que la faculté d'accueil des clients prépayés sont notamment susceptibles de poser problème. Etant donné l'importance du parc prépayé et des services considérés, l'Autorité estime important que les opérateurs se mobilisent au plus vite pour atténuer autant que faire se peut cette altération éventuelle du bouquet de services.
La mise en oeuvre des fonctionnalités de « réseau intelligent » CAMEL phase 2 dans les réseaux mobiles permet de proposer en itinérance des services voix en mode prépayé et des services de numéros courts (accès à la messagerie vocale, au service clientèle). Du fait de la politique des opérateurs visant à améliorer la portabilité des services de leurs clients en itinérance internationale, la mise en oeuvre de CAMEL phase 2 semble un passage nécessaire pour les opérateurs mobiles, à relativement court terme. L'itinérance locale bénéficierait alors de cette meilleure portabilité des services.
L'Autorité rappelle par ailleurs que la solution d'itinérance locale s'accompagnera d'une coupure de la communication lorsqu'un client d'un opérateur basculera d'une zone couverte par cet opérateur vers une zone en itinérance ou réciproquement.
c) Sur l'attribution de code réseau :
La mise en oeuvre de l'itinérance locale pourrait nécessiter l'attribution à chacun des trois opérateurs mobiles actuels d'un nouveau code réseau. Ceci n'est pas un point de blocage étant donné le nombre de codes réseau disponibles à ce jour.
2. Sur le mode de financement :
Dans son avis no 2001-475 en date du 18 mai 2001 sur le rapport 2000 du Gouvernement au Parlement concernant le service public des télécommunications, l'Autorité a rappelé que l'extension du service universel associée à l'incorporation des services de téléphonie mobile dans le champ de celui-ci « conduirait à imposer de nouvelles obligations aux opérateurs de téléphonie mobile, en particulier en matière d'homologation tarifaire, puisque les tarifs qui se rapportent aux prestations de service universel sont soumis à l'homologation tarifaire ». L'Autorité considère en définitive que l'inclusion des services de téléphonie mobile dans le champ du service universel n'est pas une réponse appropriée au problème spécifique que pose aujourd'hui le financement de l'achèvement de la couverture territoriale GSM.
Elle souligne également que le champ du service universel est à ce jour délimité par une directive européenne et que son éventuelle modification impliquerait l'ouverture de négociations au niveau de l'Union européenne.
L'Autorité considère qu'il est d'abord de la responsabilité des opérateurs de poursuivre leurs efforts d'amélioration de couverture du territoire, quand bien même les mécanismes d'incitation ou de soutien de la part des collectivités publiques pourraient favoriser ce processus nécessaire.
Un dispositif d'exemption des opérateurs mobiles d'une partie de la rémunération additionnelle à la rémunération d'interconnexion a été prévu par le législateur afin de favoriser le développement des réseaux mobiles. L'article L. 35-3 du code des postes et télécommunications dispose en effet qu'afin « de favoriser le développement des radiotélécommunications mobiles (...), les opérateurs de radiotélécommunications mobiles soumis par leurs cahiers des charges à des obligations de couverture à l'échelle nationale sont exemptés de la part de cette rémunération additionnelle correspondant au déséquilibre de la structure courante des tarifs téléphoniques. En contrepartie, les opérateurs concernés s'engagent à contribuer (...) à la couverture, par au moins un service de radiotéléphonie mobile, des routes nationales et des autres axes routiers principaux et des zones faiblement peuplées du territoire non couvertes par un tel service à la date de remise du premier rapport mentionné à l'article L. 35-7. » L'Autorité, par sa décision no 97-339 en date du 17 octobre 1997, avait choisi de proposer au ministre de ne pas exclure les trois opérateurs mobiles actuels du bénéfice de cette exemption. L'estimation définitive du montant des sommes ainsi économisées est en cours d'établissement, mais il apparaît d'ores et déjà que le montant cumulé entre les trois opérateurs devrait être compris entre 70 et 80 millions de francs.
L'Autorité considère qu'une piste de réflexion pour l'achèvement de la couverture pourrait être d'élargir cette disposition en prévoyant d'exonérer les opérateurs mobiles de tout ou partie de leur contribution au fonds de service universel en contrepartie d'un engagement du réinvestissement des sommes ainsi économisées dans la couverture des réseaux mobiles, dans la continuité du dispositif décrit ci-dessus. L'Autorité note en effet que la contribution prévisionnelle des opérateurs mobiles au fonds de service universel pour les années 2000 et 2001 est en forte croissance, et que les sommes correspondantes représentent sur trois ans un montant total du même ordre de grandeur que l'évaluation des investissements nécessaires pour remplir les objectifs de couverture prévus par le Gouvernement.
Une modification législative serait nécessaire pour un tel élargissement de ces dispositions, selon des modalités à l'approfondissement desquelles l'Autorité se tient prête à participer.
Si la solution d'un financement public devait être retenue, l'Autorité considère qu'il faudra veiller à mettre en place un mécanisme de répartition, département par département, ou région par région tenant compte des efforts relatifs de couverture à accomplir dans ces zones, afin de prévenir tout phénomène de préemption de l'enveloppe budgétaire dévolue à l'amélioration de la couverture par les départements ou régions aujourd'hui les plus réactifs sur cette problématique de la couverture mobile.
3. Sur le dispositif de mise en oeuvre de l'itinérance locale :
a) Sur le dispositif juridique :
L'Autorité souligne que le projet de loi sur la société de l'information contient des dispositions spécifiques relatives à l'itinérance entre opérateurs trouvant un champ direct d'application dans le cas de figure de l'itinérance locale entre opérateurs GSM.
Dans son avis no 2001-423 en date du 2 mai 2001 sur le projet de loi sur la société de l'information, l'Autorité a commenté le dispositif juridique permettant d'imposer aux opérateurs mobiles de faire droit à certaines demandes d'itinérance. L'Autorité confirme l'analyse qu'elle a développée à cette occasion.
b) Sur la répartition des zones :
Dans la logique de cette analyse, l'Autorité conduira les négociations avec les opérateurs mobiles afin de proposer au ministre une extension de la couverture s'appuyant sur la mise en oeuvre de l'itinérance.
Dans ce schéma, les zones non couvertes et identifiées comme devant à terme être couvertes doivent être réparties entre les trois opérateurs mobiles, chacun couvrant la zone lui étant dévolue.
L'Autorité considère que c'est aux opérateurs qu'il appartient de faire une proposition commune de répartition entre eux des zones à couvrir, puisqu'ils sont les plus à même d'appréhender l'ensemble des contraintes techniques et économiques sous-jacentes. La disponibilité des données de l'état d'avancement de la réflexion devrait permettre d'assigner aux opérateurs un délai bref, de l'ordre de deux ou trois mois.
Dans l'hypothèse où les opérateurs ne trouveraient pas d'accord au terme d'un délai préalablement fixé, l'Autorité de régulation des télécommunications serait amenée à prononcer un arbitrage sur la question.
Si le mécanisme suggéré par l'Autorité d'exemption des opérateurs mobiles d'une partie de leur contribution au fonds de service universel mobiles était validé par une modification législative, en échange d'un réinvestissement des sommes ainsi économisées dans la couverture des réseaux mobiles, l'Autorité proposerait ensuite au ministre de mettre en oeuvre ce mécanisme en fonction des propositions d'extension de couverture faites par les opérateurs.
L'Autorité souhaite enfin apporter des remarques rédactionnelles sur le rapport, rassemblées dans l'annexe ci-jointe.
A N N E X E I I
REMARQUES DE L'AUTORITE SUR LE RAPPORT
Sur la formulation des objectifs de couverture

Il est précisé dans la partie 8.4 du rapport que « la couverture des 1 450 mairies qui ne le sont pas encore doit constituer notre objectif partagé ». Cette position est reprise dans la conclusion où il est écrit qu'une « traduction concrète de l'objectif du Gouvernement serait la couverture des mairies et des bourgs des 1 450 communes concernées ».
Il est par contre écrit dans le chapitre 7 que « le Gouvernement estime que l'objectif à atteindre devrait être la couverture des lieux de vie permanents et occasionnels. Cet objectif inclut la couverture au moins partielle des 1 450 communes (mairie, bourg) qui aujourd'hui ne sont desservies par aucun réseau de radiotéléphonie mobile ».
Les deux formulations énoncées ci-dessus ne sont pas équivalentes, la seconde englobant certes l'objectif visé dans la première, mais ouvrant la voie à une interprétation plus large. L'Autorité considère que cette ambiguïté doit être levée.
Partie 4.3

Ce paragraphe pourrait mentionner que, du fait de la méthodologie utilisée pour analyser le résultat de la superposition des cartes des trois opérateurs, les zones non couvertes dont l'étude rend compte sont celles ayant une extension supérieure à 1 kilomètre carré.
Partie 8.2

Le titre de la partie 8.2, « la mise en place de l'itinérance nationale ne répondrait pas à l'objectif des pouvoirs publics », est susceptible d'induire le lecteur en erreur du fait d'un risque potentiel de confusion entre le concept d'itinérance nationale et d'itinérance locale.
Partie 8.4

Cette partie discute les deux scénarii de partage d'infrastructures : l'itinérance locale et le partage des infrastructures passives. L'avant-dernier paragraphe de cette partie porte sur le partage infrastructures passives, mais la clarté du texte y gagnerait si ce terme était explicitement utilisé.
Cette remarque vaut également pour le dernier paragraphe qui pourrait être rédigé ainsi : « Cependant, cette solution technique de mutualisation des infrastructures passives ne permet pas (...) de plus de 1 % ».