J.O. Numéro 36 du 12 Février 1999       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 02239

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Circulaire du 28 décembre 1998 relative à l'évaluation des politiques publiques


NOR : PRMX9903420C


Paris, le 28 décembre 1998.
Le Premier ministre à Mesdames et Messieurs les ministres et secrétaires d'Etat
Le Gouvernement s'est fixé pour priorité d'améliorer l'efficacité des administrations et des services publics. Les orientations qu'il s'est données à cet effet lors du conseil des ministres du 5 novembre 1997, sur proposition du ministre chargé de la réforme de l'Etat, prévoient notamment de développer l'évaluation ministérielle et interministérielle des politiques publiques. Le Gouvernement entend disposer et mettre à la disposition de tous, ministres, administrations, élus, usagers et citoyens, des informations permettant de juger utilement de leurs effets, de leur coût et des conditions de leur mise en oeuvre.
Par circulaire du 3 juin 1998 relative à l'élaboration des programmes pluriannuels de modernisation de chaque ministère, je vous ai demandé de renforcer la capacité de vos administrations à évaluer les politiques dont vous avez la charge ou qui sont déléguées à des établissements publics placés sous votre tutelle. Dans cette perspective, vous désignerez un haut fonctionnaire en charge de l'évaluation au sein de votre département, qui sera le correspondant du Commissariat général du Plan et du Conseil national de l'évaluation.
Le décret no 98-1048 du 18 novembre 1998 a créé un Conseil national de l'évaluation, chargé d'animer une procédure interministérielle d'évaluation des politiques publiques plus simple, plus efficace et plus rapide que le dispositif précédent. Les modalités de cette nouvelle procédure sont commentées en annexe.
La confiance accordée à ce dispositif par les élus, les fonctionnaires et les citoyens est un facteur déterminant de sa réussite. C'est pourquoi je vous demande de faire connaître à vos interlocuteurs et à vos services les dispositions exposées ci-après et de veiller à ce que ces derniers en promeuvent la mise en oeuvre.

1. Une nouvelle ambition
Grâce, notamment, aux travaux du Conseil scientifique de l'évaluation créé en 1990, les principes et méthodes d'une évaluation des actions publiques rigoureuse et utile - tels qu'ils sont largement reconnus et appliqués à l'étranger - ont commencé à se diffuser et être pris en compte par les services et les partenaires de l'Etat. Il s'agit maintenant d'en tirer des bénéfices pratiques sur une plus grande échelle, dans une double perspective de modernisation du fonctionnement des administrations et d'amélioration des mécanismes de la décision publique.
Le décret no 98-1048 du 18 novembre 1998 donne ainsi un contenu concret à l'évaluation interministérielle en lui assignant pour objet d'apprécier l'efficacité des politiques publiques en comparant leurs résultats aux objectifs retenus et aux moyens mis en oeuvre.
En règle générale, on privilégiera les évaluations visant à répondre à des questions claires, permettant d'aboutir dans des délais brefs à des réponses précises susceptibles de conduire à des décisions opérationnelles. Des évaluations de grande ampleur ne sont pas à exclure, à condition que le caractère stratégique des questions abordées pour l'action publique justifie des investigations lourdes et des débats approfondis entre acteurs et spécialistes. Les projets dont les objectifs relèvent davantage de la recherche en sciences économiques et sociales que de la gestion des affaires publiques seront orientés vers d'autres dispositifs.

2. Un champ d'application élargi
Depuis les lois de décentralisation de 1982, les collectivités territoriales concourent avec l'Etat à l'administration du territoire de la République. Il convenait de prendre acte du caractère complémentaire des interventions de l'Etat et des collectivités en élargissant le champ de l'évaluation interministérielle à l'ensemble des politiques conduites par l'Etat, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs.
C'est pour cette même raison que le Gouvernement a également décidé d'associer les collectivités territoriales à l'élaboration du programme d'évaluation que le Premier ministre arrêtera chaque année.
Ce programme peut donc comprendre l'évaluation de politiques publiques menées conjointement par l'Etat et les collectivités territoriales en vue de favoriser la coordination de leurs interventions et le rapprochement de leurs objectifs.
L'évaluation des politiques publiques menées exclusivement par les collectivités territoriales peut être envisagée à la demande de ces dernières.
Dans tous les cas, les conditions de réalisation des évaluations ne peuvent créer, par elles-mêmes, d'obligations nouvelles à la charge des collectivités territoriales, sans leur consentement.
En particulier, s'agissant des politiques conjointes dans lesquelles sont associés l'Etat et une ou plusieurs collectivités territoriales, il appartient aux collectivités territoriales sollicitées de préciser les conditions dans lesquelles elles acceptent de participer au projet proposé dans le cadre du dispositif interministériel. La participation institutionnelle des trois catégories de collectivités territoriales au Conseil national de l'évaluation doit favoriser les ajustements nécessaires.
Les modalités d'évaluation des politiques menées conjointement par l'Etat et les collectivités territoriales dans le cadre des contrats de plan restent fixées par la circulaire des ministres de l'intérieur, de l'aménagement du territoire et des collectivités locales du 9 décembre 1993. Cependant, compte tenu des missions et des compétences du nouveau Conseil national, une circulaire précisera les conditions dans lesquelles celui-ci pourra apporter son concours, dans le cadre de l'article 6 du décret, à l'instance nationale d'évaluation des contrats de plan Etat-région.

3. Une plus grande autonomie
La création d'un Conseil national de l'évaluation chargé d'élaborer un programme annuel d'évaluation donne à la France une position originale en la matière.
La présence de six personnalités qualifiées choisies en raison de leurs compétences en matière d'évaluation et dans les domaines des sciences économiques, sociales et administratives, ainsi que de trois élus et de trois membres du Conseil économique et social, d'un membre du Conseil d'Etat et d'un membre de la Cour des comptes, permet d'assurer à la fois un haut niveau de qualification scientifique et administrative de l'instance et une représentation équilibrée des citoyens et des usagers.
La composition retenue garantit son objectivité, son indépendance et par là même la crédibilité de la procédure tant aux yeux des citoyens que des fonctionnaires et des élus.
Le Commissariat général du Plan, qui assure le secrétariat du Conseil national de l'évaluation, veille, pour sa part, à ce que s'instaure un dialogue ouvert et constructif avec et entre les administrations concernées.

4. Une transparence accrue
La publication du programme arrêté chaque année par le Premier ministre est un élément important de transparence de la procédure. C'est là que s'exprime la volonté du Gouvernement d'améliorer la qualité de la décision publique. La publication systématique des rapports d'évaluation, assortis de l'avis du Conseil national de l'évaluation sur la qualité des travaux réalisés et des réponses des autorités concernées sur les suites à leur donner, constitue la contribution décisive au débat public et à la concertation à laquelle le Gouvernement s'est engagé.
Le rapport annuel du Conseil national de l'évaluation est rendu public. Il permet à cette instance de rendre compte de l'efficacité de la procédure interministérielle et de donner son avis sur le choix des thèmes d'évaluation à privilégier du point de vue de leur faisabilité et de leur utilité et en vue d'un développement cohérent des connaissances et des pratiques.

5. Des procédures plus rapides
L'un des dysfonctionnements manifestes du dispositif antérieur a été la durée excessive des travaux d'évaluation. L'accumulation des retards aux diverses étapes de la procédure a abouti à un délai moyen de trois ans et demi entre le début de la préparation du cahier des charges d'évaluation et la publication des résultats. Dans ces conditions, les conclusions des évaluations n'ont pu être que rarement utilisées dans les processus de décision.
Je demande en conséquence au Conseil national de l'évaluation d'élaborer son projet de programme annuel avant la fin du premier trimestre de chaque année. Les projets d'évaluation ayant été discutés au préalable de manière approfondie avec les administrations, j'arrêterai rapidement le programme définitif. Les instances d'évaluation devront être installées dans les semaines qui suivront.
La durée des évaluations, du lancement des travaux à l'achèvement du rapport, sera limitée à un an, sauf dans des cas exceptionnels où l'ampleur et la complexité du sujet traité l'exigent, cette durée pouvant alors être portée au plus à dix-huit mois.
Les rapports d'évaluation seront rendus publics dans un délai de cinq mois à compter de leur transmission par les instances d'évaluation.
La procédure devra se dérouler dans un délai maximum de dix-huit mois entre l'installation de l'instance d'évaluation et la publication de son rapport.

6. L'utilisation des évaluations dans les processus
de la décision publique
Par cette nouvelle procédure, le Gouvernement s'impose davantage de transparence dans l'affichage de ses priorités d'action et dans la justification de ses décisions.
1. Lors de la publication du programme annuel, l'exposé des questions posées dans les projets d'évaluation et des moyens envisagés pour tenter d'y répondre constitue un acte politique fort. Les autorités publiques concernées manifestent à cette occasion leur volonté de rendre compte de leur action, d'être à l'écoute des besoins et des attentes de la société, de dialoguer de manière ouverte avec les citoyens et les usagers et d'améliorer l'efficacité des processus de décision.
J'attire donc votre attention sur l'importance à accorder à votre niveau à la sélection des thèmes d'évaluation et au choix des questions à traiter en priorité avant de présenter une évaluation au Conseil national de l'évaluation ou de soutenir celles qu'il vous proposera à son initiative.
Je souhaite que la préparation des propositions ministérielles fasse l'objet d'une réflexion collective, suffisamment en amont, animée par le Commissariat général du Plan. Il s'agit d'assurer la plus large mobilisation des moyens disponibles pour identifier les thèmes d'évaluation susceptibles d'éclairer utilement les grands enjeux présents et futurs des politiques publiques, notamment en termes d'évolution des dépenses.
Dans tous les cas, vous devez vous demander si les informations recherchées sont susceptibles de fournir des arguments nouveaux, de nature à compléter et préciser utilement les informations que vous possédez déjà pour moderniser les politiques publiques ou le fonctionnement de vos services.
2. La publication des rapports d'évaluation, assortis des avis des autorités concernées sur les suites à leur donner, constituera un autre moment privilégié pour afficher une volonté de réforme.
S'agissant de l'Etat, j'entends que les conclusions tirées des évaluations décidées dans le cadre du présent dispositif soient intégrées dans les processus de décision qui conduisent à lancer, compléter, infléchir, suspendre ou abandonner une politique publique. Le Commissariat général du Plan joue à cet effet un rôle essentiel. Service placé sous mon autorité, il a la responsabilité d'examiner avec vos services dans un délai de deux mois quelles suites peuvent être données aux conclusions de l'évaluation d'une politique publique entrant dans votre champ de compétence, de veiller à leur examen dans les processus de décision ministériels et interministériels ainsi que de me faire part de toute proposition utile ou de toute difficulté rencontrée à ce sujet.
Le Commissariat général du Plan me rendra également compte de son action d'orientation et de développement de l'évaluation dans l'administration.
Bien entendu, les collectivités territoriales restent, quant à elles, maîtresses de leurs décisions en raison du principe de libre administration des collectivités locales. Elles utilisent donc à leur diligence les résultats des évaluations auxquelles elles ont participé.
*
* *
L'ouverture du Conseil national de l'évaluation à des élus et des membres du Conseil économique et social va modifier notre approche de l'évaluation des politiques publiques.
En ce qui concerne l'Etat, il importe que le nouveau dispositif, qui complète les dispositifs sectoriels préexistants des ministères, serve principalement à évaluer des politiques de dimension interministérielle, d'une certaine ampleur et qui, par leur objet, ont de larges implications. J'entends que les évaluations à venir portent de manière prioritaire sur les politiques susceptibles de faire l'objet de réformes substantielles dans les prochaines années.
Le dispositif interministériel d'évaluation des politiques publiques ne produira les effets attendus que si vous-mêmes, vos collaborateurs directs et vos services veillez à contribuer à la pertinence des travaux d'évaluation et à en utiliser les résultats pour orienter les choix et prendre les décisions de votre compétence. Je vous invite à faire preuve d'ambition dans la sélection des thèmes que vous proposerez et de rigueur dans la participation de vos services aux évaluations comme dans la prise en compte de leurs conclusions.


Lionel Jospin


A N N E X E
I. - Définition
L'évaluation d'une politique publique consiste à comparer ses résultats aux moyens qu'elle met en oeuvre - qu'ils soient juridiques, administratifs ou financiers - et aux objectifs initialement fixés. Elle se distingue du contrôle et du travail d'inspection en ce qu'elle doit aboutir à un jugement partagé sur l'efficacité de cette politique et non à la simple vérification du respect de normes administratives ou techniques.
Une évaluation peut être réalisée à plusieurs stades de la vie d'une politique. On distingue trois types d'évaluation :
- l'évaluation ex ante, entendue comme l'étude prospective de la faisabilité et de l'impact d'une politique envisagée ;
- l'évaluation ex post, qui consiste à tirer les enseignements d'une politique mise en oeuvre ;
- l'évaluation concomitante ou « chemin faisant ».
De la première catégorie relèvent les études d'impact, dont les conditions de réalisation sont précisées par la circulaire du 26 janvier 1998 pour les projets de loi et de décret en Conseil d'Etat.
Le décret relatif à l'évaluation interministérielle des politiques publiques fixe les nouvelles procédures applicables aux deux autres types d'évaluation mentionnés, qui sont le corollaire obligé des études d'impact.
Les évaluations ex post et concomitantes, ayant pour objet de porter un jugement sur des circonstances passées, ne peuvent tenir lieu de rapport de propositions. En règle générale, les propositions ne procèdent pas immédiatement des conclusions de l'évaluation et doivent être élaborées dans un second temps, selon un processus distinct. En ce qui concerne l'Etat, il appartient (cf. III) au Commissariat général du Plan de les établir en liaison avec les ministères compétents au titre des suites à donner aux évaluations.
II. - La procédure applicable
Le nouveau dispositif mis en place vise à confier à une nouvelle instance, le Conseil national de l'évaluation, composée notamment d'élus et de personnalités qualifiées, la mission de proposer au Premier ministre un programme annuel d'évaluation et d'en suivre la réalisation. Assisté dans son fonctionnement par un rapporteur général et par le Commissariat général du Plan, qui en assure le secrétariat, le Conseil national de l'évaluation est le moteur de la nouvelle procédure interministérielle d'évaluation des politiques publiques.
Le président du Conseil national de l'évaluation est nommé par décret, parmi ses membres, sur proposition du conseil. Le président arrête l'ordre du jour des réunions du conseil et signe tous actes relatifs à l'exercice des missions du conseil. Il peut déléguer sa signature en cas d'absence ou d'empêchement.
Le Conseil national de l'évaluation décide de son règlement intérieur, qui sera joint à son rapport d'activité annuel.
2.1 La saisine du Conseil national de l'évaluation
Le souci de développement de l'évaluation au sein de la sphère publique a présidé à la préparation du nouveau décret. C'est pourquoi, outre la faculté d'autosaisine, de larges possibilités de saisine du conseil ont été prévues, que ce soit au bénéfice du Premier ministre et des ministres, de plusieurs institutions (Conseil d'Etat, Cour des comptes, Conseil économique et social, Médiateur de la République), des associations d'élus ou des collectivités territoriales elles-mêmes (cf. art. 4).
Le conseil peut être saisi à tout moment, sous la forme d'un avant-projet sommaire développé dans les conditions prévues au point 2.2 ou d'un dossier déjà solidement élaboré.
Par circulaire du 7 septembre 1998, je vous avais demandé de transmettre au commissaire au Plan des propositions de sujets d'évaluation dans un délai de deux mois. A l'avenir, le Conseil national de l'évaluation vous sollicitera, de sa propre initiative, par l'intermédiaire du commissaire au Plan.
2.2. Le rôle d'accompagnement joué par le Commissariat général
du Plan lors du lancement de la procédure
L'article 8 du décret dispose que le Commissariat général du Plan a pour mission générale d'animer le développement de l'évaluation dans l'administration. A ce titre, il est l'interlocuteur privilégié des services chargés de l'évaluation dans les ministères et les collectivités territoriales. Son rôle consiste notamment à aider les autorités disposant d'un pouvoir de saisine du conseil - au premier rang desquelles il convient de mentionner les ministres - et à sélectionner et formaliser des projets d'évaluation. Il prête également son concours pour la mise au point des projets d'évaluation dont ce dernier se saisit directement.
Après concertation avec les administrations concernées, chaque projet d'évaluation envisagé doit faire l'objet d'un cahier des charges visant à cerner l'ensemble des questions définissant le champ de l'évaluation et à indiquer par quels moyens il convient d'y répondre, sachant qu'une évaluation ne doit en aucun cas être orientée par le choix a priori d'une méthode ou par la nature de l'information immédiatement disponible. En outre, dans la mesure où toute politique publique comporte de multiples dimensions, il est indispensable de sélectionner les aspects qui doivent faire l'objet des investigations prioritaires, compte tenu de l'importance des enjeux économiques et sociaux qui y sont attachés.
Le cahier des charges de chaque projet d'évaluation proposé au conseil doit comporter les éléments suivants :
- une définition des contours du ou des thème(s) d'évaluation retenu(s) ;
- une analyse des raisons pour lesquelles il y a lieu de procéder à l'évaluation ;
- une liste de questions auxquelles l'auteur de la saisine souhaite qu'il soit répondu ;
- une proposition de composition de l'instance d'évaluation (profil du président, administrations concernées, personnalités qualifiées) ;
- une liste des principaux acteurs (ministères, collectivités locales, groupes d'intérêt, etc.) concernés par l'évaluation ;
- une estimation de la durée nécessaire à l'évaluation et du budget d'études éventuel qu'elle requiert, ainsi que la liste des travaux disponibles au sein des administrations susceptibles de nourrir l'évaluation ;
- les possibilités de financement ou de cofinancement des travaux ;
- des premières indications de méthode (questionnaire, enquête, traitements statistiques, comparaisons internationales, etc.), sans préjudice de la méthode qui sera finalement retenue par l'instance chargée de l'évaluation (cf. 2.5).
Si nécessaire, les auteurs de la saisine peuvent proposer que le projet de cahier des charges prévoie l'établissement d'un rapport intermédiaire.
2.3. Examen des projets par le Conseil national de l'évaluation
Le cahier des charges présenté à l'appui de chaque projet fait l'objet d'un examen par le conseil. Si ses appréciations conduisent à préconiser des modifications substantielles du cahier des charges, le dossier est à nouveau instruit par le Commissariat général du Plan et l'auteur de la saisine pour être présenté au conseil lors d'une séance ultérieure.
Le conseil, lorsqu'il approuve le contenu d'un projet d'évaluation, se prononce sur l'ensemble du cahier des charges, et notamment sur le mode de composition de l'instance d'évaluation à mettre en place ainsi que sur le budget prévisionnel du projet.
2.4. Elaboration et adoption du programme annuel d'évaluation
L'ensemble des projets dont les cahiers des charges donnent satisfaction sont rassemblés dans un document de synthèse, appelé « programme d'évaluation » (cf. art. 4), qui est transmis au Premier ministre au plus tard à la fin du mois de mars de chaque année. Les projets non retenus par le conseil sont également transmis au Premier ministre avec mention des raisons pour lesquelles ils ont été rejetés.
Le Premier ministre arrête le programme annuel, qui fait l'objet d'une publication au Journal officiel de la République française.
L'objectif est de lancer les travaux d'évaluation dès le mois de juin de la même année.
2.5. Mise en place et fonctionnement des instances d'évaluation
Dès la publication du programme annuel d'évaluation, le Commissariat général du Plan établit la liste des membres des instances à mettre en place pour réaliser les évaluations retenues. Il est représenté dans chaque instance d'évaluation.
Dans le respect des principes méthodologiques dégagés par le Conseil scientifique de l'évaluation depuis 1990, chaque instance d'évaluation est présidée par une personnalité reconnue en raison de son expérience professionnelle et qui n'est pas directement concernée par le thème de l'évaluation à mener. Elle est par ailleurs composée de représentants des administrations principalement impliquées, d'élus et de personnalités qualifiées, ces dernières ne pouvant être partie prenante au dispositif ou à la politique évalués. Son effectif est limité à douze membres pour des raisons d'efficacité.
Installée par le ministre le plus directement concerné et le commissaire au Plan, l'instance d'évaluation engage ses travaux sur la base du cahier des charges qui lui est communiqué, dans les termes retenus dans le programme annuel arrêté par le Premier ministre.
Les axes de recherche sont ensuite définis par le président et les membres de l'instance d'évaluation, en toute indépendance. La méthode de travail à suivre est également laissée à leur libre appréciation. Quelques principes directeurs peuvent toutefois être valablement pris en compte :
- l'instance peut procéder à toutes les auditions jugées utiles, notamment au début de ses travaux pour orienter ses réflexions. Ces auditions servent notamment à entendre l'ensemble des intérêts en cause, dont il ne saurait être question qu'ils soient représentés au sein d'une instance indépendante ;
- les études commandées à des prestataires extérieurs ne doivent servir qu'à obtenir des données ou des analyses nouvelles. Cette démarche de bon sens participe du souci de bon usage des fonds publics. Il va de soi que les études demandées ne se substituent pas au rapport d'évaluation établi par l'instance ;
- tout en visant à la rigueur de l'analyse, l'instance doit veiller à exécuter ses travaux dans un délai raisonnable. La durée de plusieurs évaluations menées dans le cadre du décret no 90-82 du 22 janvier 1990 a, en effet, été excessivement longue, au point de rendre les conclusions difficilement exploitables. Sans qu'il soit possible de définir un temps standard d'évaluation, il convient de retenir comme référence une durée qui ne saurait être, en règle générale, supérieure à un an.
2.6. Examen et publication des rapports d'évaluation
A l'issue de ses travaux, l'instance d'évaluation remet son rapport au Conseil national de l'évaluation. Le Commissariat général du Plan le transmet simultanément aux administrations, organismes et collectivités concernés. Par souci de clarté et afin de rendre l'évaluation plus accessible pour le grand public, il convient que l'instance d'évaluation prépare un double document, constitué, d'une part, d'un rapport exhaustif, éventuellement accompagné d'annexes, et, d'autre part, d'une synthèse de quelques dizaines de pages.
Comme le prévoit l'article 5 du décret, le conseil dispose au plus de deux mois pour apprécier la qualité des travaux effectués. Il est pour cela assisté du rapporteur général qui, après analyse détaillée de la méthodologie suivie et de la cohérence des observations, remet ses conclusions écrites aux membres du conseil. Elles servent de base à la formulation de l'avis rendu officiellement par le conseil. Cet avis est également adressé sans délai par le Commissariat général du Plan aux administrations, collectivités territoriales ou organismes publics concernés, qui disposent d'un délai de trois mois à compter de cette transmission pour faire part au Conseil national de l'évaluation de leurs observations sur le rapport et des suites qu'ils envisagent d'y donner.
Au terme de ce délai, le rapport d'évaluation, sa synthèse et les observations des administrations concernées sont rendus publics dans les conditions prévues à l'article 5 du décret. Le Commissariat général du Plan est chargé, conformément à l'article 8 du décret, d'assurer la publication de ces documents en relation avec la Documentation française.
2.7. Le rapport d'activité du Conseil national de l'évaluation
L'article 5 du décret dispose que le conseil remet annuellement au Premier ministre un rapport d'activité. Il convient que celui-ci comporte notamment les éléments suivants :
- une analyse des qualités et des faiblesses des évaluations réalisées pendant l'année écoulée ;
- des recommandations pratiques et méthodologiques qui puissent servir de référence générale pour les évaluations à venir ;
- une monographie des évaluations réalisées et la confrontation de leurs conclusions avec les réponses des autorités concernées sur la suite à leur donner ;
- des recommandations au Gouvernement pour assurer un développement cohérent des connaissances sur l'efficacité des politiques publiques.
Le rapport annuel d'activité du conseil fait objet d'une publication.
III. - Les suites à donner aux évaluations
Le décret no 90-82 du 22 janvier 1990 comportait des dispositions relatives aux suites à donner aux évaluations réalisées, sur lesquelles devait se prononcer le comité interministériel de l'évaluation. L'expérience a montré que cette étape du processus d'évaluation a été largement négligée, du fait même de l'absence de réunions du comité interministériel de l'évaluation depuis 1993.
Le développement de l'évaluation n'a de sens que s'il s'intègre dans un processus d'amélioration de la décision publique qui tienne pleinement et rapidement compte des dysfonctionnements mis en évidence dans les rapports des instances d'évaluation. De ce point de vue, l'attention portée à la préparation et à la mise en oeuvre des suites à donner aux évaluations revêt une importance décisive.
3.1. La préparation des suites
Comme le prévoit l'article 8 du décret, la préparation des suites relève de la compétence du Commissariat général du Plan en liaison avec les administrations concernées.
A cet effet, il dispose d'un délai de deux mois pour dégager des rapports et des réponses apportées par les autorités concernées les propositions qui méritent d'être retenues au niveau gouvernemental.
Ce travail de réflexion doit être mené en étroite concertation avec les ministères concernés par les mesures ou orientations à prendre.
3.2. L'adoption des suites
Les propositions du Commissariat général du Plan et le relevé des positions des administrations sont soumis pour examen au Premier ministre, qui arrête ou confirme les décisions à prendre. Le cas échéant, les réunions interministérielles d'arbitrage nécessaires sont organisées.
IV. - Le fonctionnement du Fonds national
de développement de l'évaluation (FNDE)
Mis en place en 1990, le FNDE est maintenu dans le nouveau dispositif comme un outil financier indispensable à la consolidation de l'évaluation dans la sphère publique.
Inscrits au budget des services du Premier ministre, les crédits de ce fonds sont gérés par le Commissariat général du Plan, en sa qualité de secrétaire du conseil.
Comme précisé au point 2.2 de la présente circulaire, le Commissariat général du Plan, lors du travail de préparation du cahier des charges d'une évaluation, propose au Conseil national de l'évaluation un budget prévisionnel consacré au financement des études à commander. Celui-ci est délibéré par le conseil et mentionné dans le descriptif de chaque évaluation figurant dans le programme annuel proposé au Premier ministre, qui en arrête définitivement le montant.
Pour les projets d'évaluation arrêtés par le Premier ministre, les crédits du FNDE contribuent au financement des évaluations à hauteur de 50 %, le reste étant à la charge des administrations ou organismes publics principalement concernés par le thème retenu. La liste exhaustive des contributeurs et le pourcentage de leur participation figurent dans le programme annuel d'évaluation comme indiqué précédemment.
Sur cette base, le Commissariat général du Plan, ordonnateur du fonds, effectue le paiement des études sollicitées par les instances d'évaluation sur les crédits du FNDE, dans le cadre du budget global qui leur est accordé. Les administrations ou organismes publics contributeurs effectuent, au profit du Commissariat général du Plan, un remboursement global à la hauteur du pourcentage de leur participation financière. Le Commissariat général du Plan tient régulièrement informé le conseil national de l'exécution du budget de chaque évaluation, ainsi que de l'engagement des crédits du FNDE.
Avec l'appui méthodologique du rapporteur général du conseil, le Commissariat général du Plan subordonne strictement le paiement des études à leur adéquation avec les commandes passées par les instances d'évaluation.
V. - Le développement de l'évaluation dans l'administration
La place centrale de l'évaluation interministérielle des politiques publiques n'est pas exclusive du développement de l'évaluation au sein de chaque département ministériel, bien au contraire. C'est dans cette perspective que l'article 8 du décret confie au Commissariat général du Plan le soin de mieux ancrer l'évaluation dans l'action administrative par un travail soutenu de diffusion des méthodes et techniques d'évaluation et un effort accru de formation en ce domaine.
Le Commissariat général du Plan organisera à cet effet des réunions de travail périodiques avec les responsables de l'évaluation de tous les ministères, pour apporter son appui aux initiatives prises dans l'administration, favoriser les échanges d'expériences et contribuer à l'adoption d'une démarche cohérente au sein des différents ministères et de leurs établissements publics.
Le Commissariat général du Plan proposera par ailleurs aux administrations des séminaires de formation sur l'évaluation pour poursuivre la diffusion progressive de la culture de l'évaluation dans la sphère publique.
Enfin, pour faire avancer l'état des connaissances sur les méthodes d'évaluation, le rapporteur général et le Commissariat général du Plan noueront des relations plus étroites avec les administrations et instituts de recherche étrangers.
Dans ces différents domaines, le Commissariat général du Plan rend compte de son action au Premier ministre, ainsi qu'au conseil, dans le bilan d'activité prévu à l'article 8 du décret.