[ industrie | darpmi | Guide des eaux minérales ]

ORDONNANCE ROYALE DU 18 JUIN 1823
relative au règlement sur la police des eaux minérales

Modifiée par décret du 21 mai 1880.

(Bulletin des lois, VII S. B. 613, n° 15049.)



Louis, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes verront, salut;

Informés que l'exécution des lois et règlements sur l'administration et la police des eaux minérales est négligée ; que leurs dispositions ne sont point assez connues, faute d'avoir été rappelées et mises ensemble ; qu'il n'en a point été fait une suffisante application aux eaux minérales artificielles ;

Vu la déclaration du 25 avril 1772, les arrêts du conseil des 1er avril 1774 et 5 mai 1781, ainsi que l'article 11 de la loi du 24 août 1790 et l'article 484 du code pénal, qui ont maintenu en vigueur ces anciens règlements ;

Vu les arrêtés du Gouvernement des 18 mai 1799 (29 floréal, ân. VII), 23 avril 1800 (3 floréal, an VIII), 27 décembre 1802 (6 nivôse, an XI) et la loi du Il avril 1803 ~21 germinal, an XI) ;

Vu enfin, en ce qui concerne le traitement des inspecteurs, les lois de finances des 17 août 1822 et 20 mai 1823 ;

Considérant que les précautions générales à prendre et les ,,aranties à exiger, dans l'intérêt de la santé publique, à l'égard des entreprises ayant pour but la fabrication au le débit des médicaments quelconques, forment une des branches les plus importantes de la police administrative ;

Que l'expérience n'a cessé de démontrer la nécessité des règles particulières qui concernent les eaux minérales et les inconvénients inséparables de toutes négligences dans leur exécution ;

Que cette nécessité est surtout démontrée pour les eaux minérales artificielles, afin de prévenir non seulement les dangers de leur altération et de leur faux emploi, mais les dangers plus grands qui peuvent résulter de leur préparation ;

A ces causes,

Sur le rapport de notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur, Notre conseil d'Etat entendu,

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :

TITRE I

Dispositions générales.

Article 1er.

Toute entreprise ayant pour effet de livrer ou d'administrer au publie des eaux minérales naturelles ou artificielles, demeure soumise à une autorisation préalable et à l'inspection d'hommes de l'art, ainsi qu'il sera réglé ci-après.
Sont seuls exceptés de ces conditions les débits desdites eaux qui ont lieu dans des pharmacies.

Article 2.

Les autorisations exigées par l'article précédent continueront à être délivrées par notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur, sur l'avis des autorités locales, accompagné, pour les eaux minérales naturelles, de leur analyse, et, pour les eaux minérales artificielles, des formules de leur préparation.
Elles ne pourront être révoquées qu'en cas de résistance aux règles prescrites par la présente ordonnance, ou d'abus qui seraient de nature à compromettre la santé publique.

Article 3.

L'inspection ordonnée par le même article premier continuera à être confiée à des docteurs en médecine ou en chirurgie ; la nomination en sera faite par notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur, de manière qu'il n'y ait qu'un même inspecteur par établissement, et qu'un même Inspecteur en inspecte plusieurs, lorsque le service le permettra.
Il pourra néanmoins, là où ce sera jugé nécessaire, être nommé des inspecteurs adjoints, à l'effet de remplacer les inspecteurs titulaires en cas d'absence, de maladie ou de tout autre empêchement.

Article 4.

L'inspection a pour objet tout ce qui, dans chaque établissement, importe à la santé publique.

Les inspecteurs font, dans ce but, aux propriétaires, régisseurs ou fermiers, les propositions et observations qu'ils jugent nécessaires ; ils portent, au besoin, leurs plaintes à l'autorité, et sont tenus de lui signaler les abus venus à leur connaissance.

Article 5.

Ils veillent particulièrement à la conservation des sources, à leur amélioration; à ce que les eaux minérales artificielles soient toujours conformes aux formules approuvées, et à ce que les unes et les autres eaux ne soient ni falsifiées ni altérées. Lorsqu'ils s'aperçoivent qu'elles le sont, ils prennent ou requièrent les précautions nécessaires pour empêcher qu'elles ne puissent être livrées au publie, et provoquent, s'il y a lieu, telles poursuites que de droit.

Article 6.

Ils surveillent, dans l'intérieur des établissements, la distribution des eaux, l'usage qui en est fait par les malades, sans néanmoins pouvoir mettre obstacle à la liberté qu'ont ces derniers de suivre les prescriptions de leurs propres médecins ou chirurgiens, et même d'être accompagnés par eux s'ils le demandent.

Article 7.

Les traitements des inspecteurs étant une charge des établissements inspectés, les propriétaires, régisseurs ou fermiers seront nécessairement entendus pour leur fixation, laquelle continuera à être faite par les préfets et confirmée par notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur.
Il n'est point dû de traitement aux inspecteurs adjoints.

Article 8.

Partout où l'affluence du publie l'exigera, les préfets, après avoir entendu les propriétaires et les inspecteurs, feront des règlements particuliers qui auront en vue l'ordre intérieur, la salubrité des eaux, leur libre usage, l'exclusion de toute préférence dans les heures à assigner aux malades pour les bains ou douches, et la protection particulière due à ces derniers dans tout établissement placé sous la surveillance speciale de l'autorité.
Lorsque l'établissement appartiendra à l'Etat, à un département, à une commune, ou à une institution charitable, le règlement aura aussi en vue les autres branches de son administration.

Article 9.

Les règlements prescrits par l'article précédent seront transmis à notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur, qui pourra y faire telles modifications qu'il jugera nécessaires.
Ils resteront affichés dans les établissements, et seront obligatoires pour les personnes qui les fréquenteront, comme pour les individus attachés à leur service. Les inspecteurs pourront requérir le renvoi de ceux de ces derniers qui refuseront de s'y conformer.

Article 10.

Resteront pareillement affichés dans ces établissements et dans tous les bureaux destinés à la vente d'eaux minérales, les tarifs ordonnés par l'article 10 de l'arrêté du Gouvernement du 27 décembre 1802.
Lorsque ces tarifs concerneront des entreprises particulières, l'approbation des préfets ne pourra porter aucune modification dans les prix et servira seulement à les constater.

Article 11.

Il ne sera, sous aucun prétexte, exigé ni perçu des prix supérieurs à ces tarifs.
Les inspecteurs ne pourront également rien exiger des malades dont ils ne dirigeront pas le traitement, ou auxquels ils ne donneront pas des soins particuliers.
Ils continueront à soigner gratuitement les indigents admis dans les hospices dépendant des établissements thermaux et seront tenus de les visiter au moins une fois par jour.

Article 12.

Les divers inspecteurs rempliront et adresseront, chaque année, à notre ministre de l'intérieur, des tableaux dont il leur sera fourni des modèles ; ils y joindront les observations qu'ils auront recueillies, et les mémoires qu'ils auront rédigés sur la nature, la composition et l'efficacité des eaux, ainsi que sur le mode de leur application.

TITRE II

Dispositions particulières à la fabrication des eaux minérales artificielles, aux dépôts et à la vente de ces eaux et des eaux minérales naturelles.

Article 13.

Tous individus fabriquant des eaux minérales artificielles ne pourront obtenir ou conserver l'autorisation exigée par l'article premier qu'à la condition de se soumettre aux dispositions qui les concernent dans la présente ordonnance, de subvenir aux frais d'inspection, de justifier des connaissances nécessaires pour de telles entreprises ou de présenter pour garant un pharmacien légalement reçu.

Article 14.

Ils ne pourront s'écarter, dans leurs préparations, des formules approuvées par notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur, et dont copie restera dans les mains des inspecteurs chargés de veiller à ce qu'elles soient exactement suivies.
Ils auront néanmoins, pour des cas particuliers, la faculté d'exécuter des formules magistrales sur la prescription écrite et signée d'un docteur en médecine ou en chirurgie.
Ces prescriptions seront conservées pour être représentées à l'inspecteur s'il le requiert.

Article 15.

Les autorisations nécessaires pour tous dépôts d'eaux minérales ou artificielles, ailleurs que dans des pharmacies ou dans les lieux où elles sont puisées ou fabriquées, ne seront parefilement accordées qu'à la condition expresse de se soumettre aux présentes règles et de subvenir aux frais d'inspection.
Il est néanmoins rien innové à la faculté que les précédents règlements donnent à tout particulier de faire venir des eaux minérales pour son usage et pour celui de sa famille.

Article 16.

Il ne peut être fait d'expédition d'eaux minérales naturelles hors de la commune où elles sont puisées, que sous la surveillance de l'inspecteur ; les envois doivent être accompagnés d'un certificat d'origine, par lui délivré, constatant les quantités expédiées, la date de l'expédition, et la manière dont les vases ou bouteilles ont été scellés au moment où l'eau a été puisée à la source.
Les expéditions d'eaux minérales artificielles seront pareillement surveillées par l'inspecteur et accompagnées d'un certificat d'origine délivré par lui.

Article 17.

Lors de l'arrivée desdites eaux aux lieux de leur destination, ailleurs que dans des pharmacies ou chez des particuliers, les vérifications nécessaires pour s'assurer que les précautions prescrites ont été observées et qu'elles peuvent être livrées au publie, seront faites par les inspecteurs. Les caisses ne seront ouvertes qu'en leur présence, et les débitants devront tenir registre des quantités reçues ainsi que des ventes successives.

Article 18.

Là ou il n'aura point été nommé inspecteur, tous établissements d'eaux minérales ou artificielles seront soumis aux visites ordonnées par les articles 29, 30 et 31 de la loi du 11 avril 1803 (21 germinal an XI).

TITRE III

De l'administration des sources minérales appartenant à l'Etat, aux communes ou aux établissements charitables.

Article 19.

Les établissements d'eaux minérales qui appartiennent à des départements, à des communes ou à des institutions charitables seront gérés pour leur compte. Toutefois, les produits ne seront point confondus avec les autres revenus et continueront à être spécialement employés aux dépenses ordinaires et extraordinaires desdits établissements, sauf les excédent,; disponibles après qu'il aura été satisfait à ces dépenses.
Les budgets et les comptes seront aussi présentés et arrêtés séparément, conformément aux règles prescrites pour ces trois ordres de services publics.

Article 20.

Ceux qui appartiennent à l'Etat continueront à être administrés par les préfets, sous l'autorité de notre ministre secrétaire d'Etat de l'intérieur, qui en arrêtera les budgets et les comptes, et fera imprimer, tous les ans, pour être distribué aux chambres, un tableau général et sommaire de leurs recettes et de leurs dépenses. Sera aussi imprimé, à la suite dudit tableau, le compte sommaire des subventions portées au budget de l'Etat pour les établissements thermaux.

Article 21.

Les établissements objets du présent titre seront mis en ferme, à moins que, sur la demande des autorités locales et des idministrations propriétaires, notre ministre de l'intérieur n'ait autorisé leur mise en régie.

Article 22.

Les cahiers des charges, dont feront nécessairement partie les tarifs exigés par l'article 10, devront être approuvés par les préfets, après avoir entendu les inspecteurs. Les adjudications seront faites publiquement et aux enchères.
Les clauses des baux stipuleront toujours que la résiliation pourra être erononcée immédiatement par le conseil de préfecture, en cas de violation du cahier des charges.

Article 23.

Les membres des administrations propriétaires on surveillantes, ni les inspecteurs, ne pourront se rendre adjudicataires desdites fermes, ni y être intéressés.

(Décret du 21 mai 1880). - "En cas de mise en régie, le régisseur sera nommé par le préfet. Si l'établissement appartient à une commune ou à une administration charitable, la nomination ne sera faite que sur présentation du maire ou de cette administration.
" Seront nommés de la même manière les employés et servants attachés au service des eaux minérales, dans les établissements objets du présent titre.
" Toutefois ces dernières nominations ne pourront avoir lieu que de l'avis de l'inspecteur.
" Si l'établissement appartient à plusieurs communes, les présentations seront faites par le maire de la commune où il sera situé.
" Les mêmes formes seront observées pour la fixation du traitentent des uns et des autres employés, ainsi que pour leur révocation. "

Article 25.

Il sera procédé, pour les réparations, constructions, reconstructions et autres travaux, conformément aux règles prescrites pour la branche de service publie à laquelle l'établissement appartiendra, et à nos ordonnances des 8 août, 31 octobre 1821 et 22 mai 1822.
Toutefois ceux de ces travaux qui ne seront point demandés par l'inspecteur ne pourront être ordonnés qu'après avoir pris son avis.

Article 26.

Notre ministre secrétaire d'Etat au département de l'intérieur est chargé de l'exécution de la présente ordonnance.
Donné en notre château des Tuileries, le 18 juin de l'an de gràce 1823 et de notre règne le vingt-neuvième.

Par le Roi :

LOUIS

Le ministre
secretaire d'Etat au département de l'intérieur,
CORBIÈRE.

Copyright © 1999 AdmiNet
Send your comments to cs
URL : http://www.ensmp.fr/industrie/darpmi/eaux/ord18juin1823.html
powered by Spirit